Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...B...et Mme A...B...ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les décisions du 23 septembre 2013 par lesquelles le préfet de police a refusé de leur délivrer deux cartes de résident portant la mention " résident de longue durée- CE ".
Par un jugement n° 1316791/3-1 et n° 1317495/3-1 du 23 septembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé les décisions du 23 septembre 2013, d'autre part, enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la demande M. et Mme B...dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, enfin, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 27 novembre 2014, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1316791/3-1 et n° 1317495/3-1 en date du 23 septembre 2014 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter les demandes présentées par M. et Mme B...devant le tribunal administratif.
Il soutient que :
- les premiers juges ont retenu, à tort, que les ressources des époux B...sont stables, régulières et suffisantes ;
- la délivrance d'une carte de résidence doit s'apprécier également au regard de l'intention des intéressés de s'installer durablement sur le territoire français;
- le motif tiré de l'absence de s'installer durablement en France doit être substitué à celui tiré de l'insuffisance de ressources sa décision de refus de carte de résidence.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 octobre 2015 présenté par M. C...B...et Mme A...B..., représentés par MeE..., qui conclut au rejet de la requête et à la confirmation du jugement attaqué, à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de leur délivrer une carte de résident dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, enfin, à la mise à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Julliard,
- les conclusions de M. Roussel, rapporteur public,
- et les observations de Me Dachary, avocat de M. et MmeB... ;
1. Considérant que M. B...et Mme B...néeD..., ressortissants iraniens résidant en France depuis 2004 et disposant depuis le 14 juin 2004 d'une carte de séjour temporaire " visiteur " régulièrement renouvelée jusqu'au 25 septembre 2013, ont sollicité la délivrance d'une carte de résident mention " résident longue durée-CE " sur le fondement des dispositions de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;que par deux décisions en date du 23 septembre 2013, le préfet de police a rejeté cette demande aux motifs que leurs ressources, intégralement composées de revenus fonciers, étaient insuffisantes et qu'ils ne disposaient d'aucune attache familiale en France ; que le préfet de police relève appel du jugement du 23 septembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé ces décisions et lui a enjoint de procéder au réexamen de leur demande dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger qui justifie d'une résidence ininterrompue d'au moins cinq années en France, conforme aux lois et règlements en vigueur, sous couvert de l'une des cartes de séjour mentionnées aux articles L. 313-6, L. 313-8 et L. 313-9, aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 313-10, aux articles L. 313-11, L. 313-11-1, L. 313-14 et L. 314-9, aux 2°, 3°, 4°, 5°, 6°, 7° et 9° de l'article L. 314-11 et aux articles L. 314-12 et L. 315-1 peut obtenir une carte de résident portant la mention " résident de longue durée-CE " s'il dispose d'une assurance maladie. (...) La décision d'accorder ou de refuser cette carte est prise en tenant compte des faits qu'il peut invoquer à l'appui de son intention de s'établir durablement en France, notamment au regard des conditions de son activité professionnelle s'il en a une, et de ses moyens d'existence./ Les moyens d'existence du demandeur sont appréciés au regard de ses ressources qui doivent être stables et suffisantes pour subvenir à ses besoins. Sont prises en compte toutes les ressources propres du demandeur indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues aux articles L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles et L. 351-9, L. 351-10 et L. 351-10-1 du code du travail. Ces ressources doivent atteindre un montant au moins égal au salaire minimum de croissance et sont appréciées au regard des conditions de logement.(...) " ; qu'aux termes de l'article R. 314-1-1 : " L'étranger qui sollicite la délivrance de la carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE " doit justifier qu'il remplit les conditions prévues à l'article L. 314-8 en présentant : (...) 3°) La justification qu'il dispose de ressources propres, stables et régulières, suffisant à son entretien, indépendamment des prestations et des allocations mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 314-8, appréciées sur la période des cinq années précédant sa demande, par référence au montant du salaire minimum de croissance ; lorsque les ressources du demandeur ne sont pas suffisantes ou ne sont pas stables et régulières pour la période des cinq années précédant la demande, une décision favorable peut être prise, soit si le demandeur justifie être propriétaire de son logement ou en jouir à titre gratuit, soit en tenant compte de l'évolution favorable de sa situation quant à la stabilité et à la régularité de ses revenus, y compris après le dépôt de la demande ; (...) " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de police délivre annuellement depuis le 14 juin 2004, une carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur " à M. et Mme B...au regard, notamment, de leurs moyens suffisants d'existence, en application de l'article R. 313-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que M. et MmeB..., tous deux retraités, sont propriétaires de deux appartements situé 4, rue Robert Flers à Paris, dont l'un sert de domicile aux intéressés et dont ils perçoivent des revenus fonciers d'un montant d'environ 800 euros mensuels, qu'ils disposent de plusieurs comptes bancaires en France pour un montant de près de 25 000 euros et d'une assurance -vie de près de 35 000 euros et que leurs comptes bancaires en Iran, crédités d'environ 835 000 euros, produisent des intérêts ; que, dès lors qu'il ne ressort d'aucune disposition législative ou réglementaire que ces ressources à l'étranger ne devraient pas être prises en compte pour apprécier le caractère suffisant des ressources dont disposent les demandeurs d'une carte de résident longue durée-CE, M. et Mme B...doivent être regardées comme établissant disposer de ressources stables et suffisantes, au sens des dispositions précitées ;
4. Considérant que si le préfet de police demande que le motif tiré de l'absence d'intention de M. et Mme B...de s'installer durablement en France puisse être, le cas échéant, substitué à celui tiré de l'insuffisance de ressources, il ressort également des pièces du dossier que la présence en France des intéressés est établie depuis neuf ans, qu'ils y ont acquis des biens immobiliers et y détiennent des comptes bancaires servant à leurs opérations courantes ; qu'ainsi, et nonobstant la circonstance que leurs enfants résident à l'étranger où ils effectuent eux-mêmes de fréquents séjours, l'intention de M. et Mme B...de s'installer durablement en France doit être regardée comme établie ; que la demande de substitution de motif ne peut qu'être écartée ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé ses décisions en date du 23 septembre 2013 refusant à M et Mme B...la délivrance de cartes de résident mention " résident longue durée-CE " ;
Sur les conclusions des intimés aux fins d'injonction et d'astreinte :
6. Considérant que les motifs du présent arrêt, qui rejette les conclusions du préfet de police tendant à l'annulation du jugement du 23 septembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a enjoint à ce dernier de procéder au réexamen de la demande de M. et MmeB..., impliquent que le préfet de police délivre à ces derniers la carte de résident sollicitée dès lors qu'il résulte de l'instruction que par décisions du 14 janvier 2015, ce dernier a, dans le cadre du réexamen prévu par ce jugement, de nouveau rejeté la demande de cartes de résident mention " résident longue durée-CE " de M. et MmeB... ; qu'il y lieu, en conséquence d'enjoindre au préfet de police de leur délivrer ces titres dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à M. et Mme B...sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. et Mme B...deux cartes de séjour portant la mention " résident longue durée-CE " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme B...une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur au préfet et police et à M. C... B...et Mme A...B....
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Bouleau, premier vice-président,
- M. Polizzi, président assesseur,
- Mme Julliard, première conseillère,
Lu en audience publique, le 30 novembre 2015.
Le rapporteur,
M. JULLIARDLe président,
M. BOULEAU
Le greffier,
N. ADOUANE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA04789