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26/11/2015 | FRANCE | N°14PA05241

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 26 novembre 2015, 14PA05241


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 janvier 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n°1401475/6-3 du 9 octobre 2014, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté attaqué, d'autre part, enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la situation administrative de M. B... A..., et, enfin, mis à la charge de l'Etat une somme de 750 euros en application des dispositio

ns de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 janvier 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n°1401475/6-3 du 9 octobre 2014, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté attaqué, d'autre part, enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la situation administrative de M. B... A..., et, enfin, mis à la charge de l'Etat une somme de 750 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 24 décembre 2014 et 20 janvier 2015, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1401475/6-3 du 9 octobre 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...A...devant le Tribunal administratif de Paris.

Il soutient que :

- en rejetant la demande de titre de séjour de M.A..., il n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que M. A... n'a pas présenté de passeport en cours de validité, ni tout autre document susceptible de lui permettre de fixer la durée de validité du titre dont il sollicitait le renouvellement ;

- les autres moyens invoqués par l'intéressé devant le Tribunal administratif de Paris ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2015, M. B...A..., représenté par Me Desseix, conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demande à la Cour d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le même délai et sous la même astreinte, et, enfin, à ce que le versement de la somme de 1 000 euros soit mis à la charge de l'Etat sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la requête est tardive ;

- le préfet de police a commis une erreur de droit en subordonnant sa demande de titre de séjour à la production d'un passeport en cours de validité alors même qu'il ne peut se rapprocher des autorités consulaires de son pays et qu'il était déjà titulaire d'une carte de séjour temporaire ;

- l'arrêté méconnait les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que la durée de son séjour en France est supérieure à huit ans et qu'il est inséré professionnellement et socialement ;

-il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus ;

- il méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il est considéré comme déserteur dans son pays d'origine et qu'il est de confession pentecôtiste.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 9 avril 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

-le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

-la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

-le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Larsonnier a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant érythréen, né le 13 octobre 1979, entré en France selon ses déclarations en 2005, a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté en date du 3 janvier 2014, le préfet de police a rejeté la demande de M. A...; que le préfet de police fait appel du jugement du 9 octobre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté, lui a enjoint de réexaminer la situation de l'intéressé dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat la somme de 750 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, par la voie de l'appel incident, M. A...demande à la Cour de réformer ce jugement en tant que, par celui-ci, le tribunal a seulement enjoint au préfet de police de réexaminer sa situation ;

Sur l'appel principal du préfet de police :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La durée de validité de la carte de séjour temporaire ne peut être supérieure à un an et ne peut dépasser la durée de validité des documents et visas mentionnés à l'article L. 211-1 du présent code. L'étranger doit quitter la France à l'expiration de la durée de validité de sa carte à moins qu'il n'en obtienne le renouvellement ou qu'il ne lui soit délivré une carte de résident. " ; qu'aux termes de l'article L. 211-1 de ce code : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : 1° Des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ;(... ) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-1 du même code : " L'étranger qui, n'étant pas déjà admis à résider en France, sollicite la délivrance d'une carte de séjour temporaire présente à l'appui de sa demande : 1° Les indications relatives à son état civil et, le cas échéant, à celui de son conjoint et de ses enfants à charge ; 2° Les documents, mentionnés à l'article R. 211-1, justifiant qu'il est entré régulièrement en France ; (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-2 de ce code : " Ne sont pas soumis aux dispositions du 2° de l'article R. 313-1 les étrangers mentionnés à l'article (...) L. 313-14 (...)." ;

3. Considérant qu'il ressort des termes de l'arrêté contesté que le préfet de police a refusé de renouveler le titre de séjour de M. A...au motif que celui-ci ne présentait pas de passeport, ni même d'attestation de dépôt de demande de passeport, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile selon lesquelles la durée de validité d'une carte de séjour temporaire délivrée à un étranger ne peut pas dépasser la durée de validité du passeport du demandeur ou du titre de voyage en tenant lieu ; que si l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile impose à tout étranger, pour entrer en France, d'être muni des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur, donc s'agissant d'un ressortissant érythréen, d'un passeport muni d'un visa, et si l'article L. 311-1 du même code subordonne en principe la délivrance de la carte de séjour temporaire à la production par l'étranger de ces documents en cours de validité, il résulte des dispositions de l'article R. 313-1 du même code que ne sont pas soumis aux dispositions du 2° de l'article R. 313-1 de ce code imposant à l'étranger qui sollicite la délivrance d'une carte de séjour temporaire de présenter à l'appui de sa demande les documents justifiant qu'il est entré régulièrement en France, les étrangers déjà admis à séjourner en France ; qu'au surplus, il ressort des termes mêmes de l'article R. 313-2 du même code que les étrangers mentionnés à l'article L. 313-14 ne sont pas soumis aux dispositions du 2° de l'article R. 313-1 susmentionné ; qu'il s'ensuit que la présentation d'un passeport en cours de validité ou d'une attestation de dépôt de demande de passeport ne saurait être imposée à un étranger qui sollicite le renouvellement de son titre de séjour délivré sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, comme une condition pour le renouvellement de ce titre ; que, par suite, le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que le motif tiré du défaut de présentation du passeport de M. A... justifiait légalement sa décision ;

4. Considérant, en outre, que si le préfet de police entend soutenir que M. A...n'a pas justifié de son identité conformément aux dispositions du 1° de l'article R. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ressort toutefois des pièces du dossier que dans le cadre de l'instruction de sa demande de renouvellement de titre de séjour, M. A...a présenté un extrait d'acte de naissance délivré le 20 janvier 2013 par les services de l'état civil de la municipalité d'Asmara à l'encontre duquel le préfet de police ne produit aucun élément permettant d'en contester sérieusement l'authenticité et la valeur probante ; que, par suite, le préfet de police n'est pas fondé à soutenir qu'il ne pouvait pas faire droit au renouvellement du titre de séjour de l'intéressé en raison des incertitudes pesant sur son identité ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 3 janvier 2014 ;

Sur l'appel incident de M. A...:

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 de ce code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;

7. Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal a enjoint au préfet de police de réexaminer la situation administrative de M. A...dans un délai de trois mois ; que, toutefois, eu égard au motif d'annulation retenu par le jugement attaqué, confirmé par le présent arrêt, et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose à M. A...une nouvelle décision de refus, il y a lieu de faire droit aux conclusions incidentes de M. A...tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ; que, par suite, M. A...est fondé à demander la réformation du jugement attaqué en tant que, par celui-ci, le tribunal a seulement enjoint au préfet de police de réexaminer sa situation ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

8. Considérant que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Desseix, avocat de M.A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Desseix d'une somme de 1 000 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. A...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le jugement n° 1401475/6-3 du 9 octobre 2014 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2 du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Desseix, avocat de M.A..., une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Desseix renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. B...A..., au préfet de police et à Me Desseix.

Délibéré après l'audience du 12 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Coiffet, président assesseur,

- Mme Larsonnier, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 26 novembre 2015.

Le rapporteur,

V. LARSONNIERLe président,

S.-L. FORMERY Le greffier,

L. GUINET La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA05241


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA05241
Date de la décision : 26/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : DESSEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-11-26;14pa05241 ?
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