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26/05/2015 | FRANCE | N°14PA00264

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 26 mai 2015, 14PA00264


Vu la requête, enregistrée le 20 janvier 2014, présentée pour la société Dafil, dont le siège est au 30 avenue Guy Môquet à Joinville (94340), représentée par son gérant en exercice, par la Selarl VHA ; la société Dafil demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105496/7 du 28 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions sociales auxquelles elle a assujettie au titre des années 2005 et 2006 et des pénalités correspondante

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2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspon...

Vu la requête, enregistrée le 20 janvier 2014, présentée pour la société Dafil, dont le siège est au 30 avenue Guy Môquet à Joinville (94340), représentée par son gérant en exercice, par la Selarl VHA ; la société Dafil demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105496/7 du 28 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions sociales auxquelles elle a assujettie au titre des années 2005 et 2006 et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- les charges dont la déduction a été refusée pour un montant de 211 107 euros au titre de l'exercice 2005 et de 236 397 euros au titre de l'année 2006 correspondent à l'application de la clause de retour à meilleure fortune à la suite des abandons de créances consentis par

M. B...son dirigeant à compter du 12 août 1987 ;

- son gérant a été relaxé des poursuites pénales engagées pour abus de biens ou de crédits d'une SARL par son gérant à des fins personnelles suivant jugement du Tribunal de grande instance de Paris du 20 novembre 2006 ; que ce jugement établit le caractère certain de la dette de la société à son égard ;

- qu'à tout le moins ces charges doivent être considérées comme le paiement d'arriérés de loyers en vertu du bail commercial du 30 septembre 1994 et ses différents avenants ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 mai 2014, présenté par le ministre des finances et des comptes publics qui conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'aucun des moyens de la société requérante n'est fondé ;

Vu l'ordonnance en date du 7 septembre 2014 fixant la clôture d'instruction au 8 octobre 2014, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2015 :

- le rapport de Mme Amat, premier conseiller,

- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour la société Dafil ;

1. Considérant que la SARL Dafil, qui exerce une activité d'import-export d'appareils industriels, notamment des filtres à air, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices clos en 2005 et 2006, selon la procédure de rectification contradictoire ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration a mis à sa charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions sociales procédant de la réintégration à ses résultats imposables d'abandons de créances avec clause de retour à meilleure fortune regardés comme non déductibles à hauteur de 211 107 euros au titre de l'exercice 2005 et de 236 397 euros au titre de l'exercice 2006 ; que la SARL Dafil relève régulièrement appel du jugement du

28 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions ;

2. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que, notamment, il appartient aux contribuables qui entendent se prévaloir des conséquences d'un abandon de créance de justifier au préalable de la réalité de ladite créance ;

3. Considérant, en premier lieu, que la SARL Dafil soutient qu'elle était fondée à déduire de ses résultats imposables des charges exceptionnelles consécutives aux remboursements d'abandons de créances consentis par son gérant à compter du 12 août 1987 en application d'une clause de retour à meilleure fortune ; que toutefois, comme le relève l'administration et ainsi qu'il résulte de la proposition de rectification du 9 octobre 2008 la SARL n'a enregistré que 748 453 euros de produits exceptionnels de 1992 à 1996 et a comptabilisé 1 081 901 euros de charges exceptionnelles au titre du remboursement des sommes avancées par son dirigeant de 1997 à 2002 ; que les charges exceptionnelles étant supérieures aux produits correspondants, la requérante ne saurait donc valablement comptabiliser en 2005 et 2006 des charges exceptionnelles qui ne correspondent plus à aucun produit exceptionnel dès lors que ceux-ci ont déjà été absorbés par les charges exceptionnelles comptabilisées de 1997 à 2002 ; que si la société soutient néanmoins que les versements effectués par son gérant,

M.B..., depuis 1987 seraient supérieurs de 1 706 935 euros aux remboursements qu'elle aurait effectués au titre de la clause de retour à meilleure fortune, elle n'établit pas cette circonstance par la production de tableaux récapitulatifs intitulés synthèse des opérations effectuées en application de la clause de retour à meilleure fortune et preuves des mouvements de la clause de retour à meilleure fortune ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la société Dafil soutient que l'existence d'une dette certaine à l'égard de son gérant, M.B..., qui serait redevenue exigible du fait d'un retour à meilleure fortune, est confirmée par le jugement du Tribunal de grande instance de Créteil du 20 novembre 2006 devenu définitif relaxant son gérant du délit d'abus de bien ou de crédit d'une SARL par un gérant à des fins personnelles ;

5. Considérant que les constatations de fait qui sont le support nécessaire d'un jugement définitif rendu par le juge pénal s'imposent au juge de l'impôt ; qu'en revanche, l'autorité de la chose jugée par la juridiction pénale ne saurait s'attacher aux motifs d'une décision de relaxe tirés de ce que les faits reprochés au contribuable ne sont pas établis et de ce qu'un doute subsiste sur leur réalité et, notamment, sur la nature des opérations effectuées ; que par suite, en présence d'un jugement définitif de relaxe rendu par le juge répressif, il appartient au juge de l'impôt, avant de porter lui-même une appréciation sur la matérialité et la qualification des faits au regard de la loi fiscale, de rechercher si cette relaxe était ou non fondée sur des constatations de fait qui s'imposent à lui ;

6. Considérant qu'il ressort des termes du jugement du 20 novembre 2006 invoqué par la SARL Dafil que si le Tribunal de grande instance de Créteil a constaté que son gérant avait apporté des éléments de nature à justifier une créance sur la société antérieure aux années 90 non comptabilisée par les commissaires aux comptes, un doute subsistait néanmoins sur le montant de la créance du prévenu sur la société ; que, contrairement à ce que soutient la SARL Dafil, il ne résulte de ces motifs aucune constatation de fait imposant au juge de l'impôt, en vertu de l'autorité de la chose jugée, de considérer que les somme en litige représentaient une créance de son dirigeant sur la société correspondant aux abandons de créances qu'il lui aurait consentis sans qu'elle ne comptabilise les produits exceptionnels correspondants ;

7. Considérant, en dernier lieu, que la SARL Dafil soutient que les charges exceptionnelles litigieuses correspondent à des loyers qu'elle doit à son dirigeant qui lui a permis d'occuper les locaux dont il est propriétaire à titre gratuit compte tenu de ses difficultés financières ; qu'elle produit à l'appui de ses allégations les balances générales des exercices clos les 28 février 2002 et 2003 et le 29 février 2004 faisant état de l'absence de comptabilisation des loyers litigieux, portés en engagements hors bilan, et l'avenant n° 2 au bail du 30 septembre 1994 conclu avec son gérant et enregistré le 10 mai 2001 à la recette des impôts de Paris 8ème Roule-Artois ; que, cependant, et bien que la réalité de ces charges soit établie par les pièces fournies, ce défaut de comptabilisation au compte 613 " locations " doit être regardé comme ayant eu un caractère délibérément irrégulier et constitue une décision de gestion opposable à la société requérante ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Dafil n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Dafil est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Dafil et au ministre des finances et comptes publics. Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris (Pôle fiscal de Paris centre et services spécialisés).

Délibéré après l'audience du 12 mai 2015 à laquelle siégeaient :

M. Krulic, président,

M. Luben, président assesseur,

Mme Amat, premier conseiller,

Lu en audience publique le 26 mai 2015.

Le rapporteur,

N. AMAT Le président,

J. KRULIC

Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA00264


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA00264
Date de la décision : 26/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Détermination du revenu imposable - Charges déductibles du revenu global.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Évaluation de l'actif - Théorie du bilan - Décision de gestion et erreur comptable.


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: Mme Nathalie AMAT
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : VHA

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-05-26;14pa00264 ?
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