La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/04/2013 | FRANCE | N°11PA05382

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 08 avril 2013, 11PA05382


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 décembre 2011 et

10 janvier 2012, présentés pour M. A... C...et Mme G...C..., demeurant..., par Me B...; M. et Mme C...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0811156/6-1 du 28 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris à leur verser la somme de 250 000 euros en réparation des préjudices subis par leur fils H...C...à l'occasion de sa prise en charge par l'hôpital Cochin en 2005 et

2006 ;

2°) d'ordonner, avant dire droit, une nouvelle expertise tendant à p...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 décembre 2011 et

10 janvier 2012, présentés pour M. A... C...et Mme G...C..., demeurant..., par Me B...; M. et Mme C...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0811156/6-1 du 28 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris à leur verser la somme de 250 000 euros en réparation des préjudices subis par leur fils H...C...à l'occasion de sa prise en charge par l'hôpital Cochin en 2005 et 2006 ;

2°) d'ordonner, avant dire droit, une nouvelle expertise tendant à préciser :

- dans quelle mesure et dans quelles conditions l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) devait surveiller la mise en oeuvre de la radiothérapie à visée palliative qu'elle avait prescrite et qui a été effectuée par un centre privé, dénommé centre de radiologie de traitement des tumeurs ;

- les conditions d'information du patient quant au choix, à la nécessité de ce traitement et aux risques inhérents à celui-ci ;

- l'origine de l'infection nosocomiale dont il a souffert et si elle est susceptible d'avoir précipité son décès ;

- le taux de risque auquel il a été exposé du fait de l'absence de réalisation de la radiothérapie post-opératoire à visée curative initialement envisagée en octobre 2005 ;

3°) de condamner l'AP-HP à leur verser la somme de 250 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2008, tous préjudices confondus ;

4°) de mettre à la charge de l'AP-HP les dépens ainsi qu'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 26 avril 2012, admettant

M. et Mme C...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mars 2013 :

- le rapport de Mme Bailly, rapporteur,

- les conclusions de M. Ladreyt, rapporteur public,

- les observations de MeD..., pour les consortsC...,

- et les observations de MeE..., pour l'AP-HP, puis celles de Me F...pour le centre de radiologie de traitement des tumeurs ;

1. Considérant que M. H...C..., alors âgé de 24 ans et souffrant d'importantes douleurs au flanc gauche, a été adressé à l'hôpital Cochin où une biopsie chirurgicale réalisée le 24 mai 2005 a conduit au diagnostic d'un ostéosarcome de haut grade de malignité ; qu'après avoir subi quatre cures de chimiothérapie durant l'été 2005, le patient a été opéré le

30 août 2005 en vue de l'exérèse chirurgicale de la tumeur ; qu'au vu des résultats anatomopathologiques, l'équipe de l'unité d'oncologie lui a proposé une radiothérapie post-opératoire associée à une chimiothérapie adjuvante complémentaire ; qu'entre le 4 octobre 2005 et le 20 février 2006, sept cures de ce dernier traitement lui ont été administrées, qui permettront de le considérer comme étant en rémission complète à sept mois de l'intervention, soit le

29 mars 2006 ; que cependant, une IRM réalisée en urgence le 13 mai suivant, en raison de douleurs très importantes et invalidantes apparues le 27 avril, a confirmé l'existence d'une récidive hyper-algique de la tumeur ; qu'a alors été proposée à M. C...une radiothérapie à visée palliative, qui a été effectuée au centre de radiologie et de traitement des tumeurs de Meudon entre le 22 mai et le 2 juin 2006 mais qui s'est révélée inefficace et a conduit à son hospitalisation en unité de soins palliatifs du 29 août au 21 septembre 2006 à l'Hôtel Dieu, puis à l'hôpital de Houdan jusqu'au 16 octobre suivant ; que pris ensuite en charge dans le cadre d'une hospitalisation à domicile, le patient est décédé chez lui le 15 mars 2007 ; que ses parents relèvent régulièrement appel du jugement du 28 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à être indemnisés des préjudices résultant de ce décès ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que le Tribunal administratif de Paris a expressément répondu aux moyens contenus dans les mémoires produits par les consorts C...; qu'en particulier, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'ont pas omis de répondre au moyen tiré de la faute qu'aurait commise l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris dans le suivi de la radiothérapie réalisée en mai 2006 au centre de radiologie de traitement des tumeurs, ni aux conclusions aux fins d'indemnisation du fait de l'infection nosocomiale contractée par l'intéressé, qui ont été rejetées en raison de l'absence de préjudice en lien avec ladite infection ; que, par suite, M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité, faute d'être suffisamment motivé ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'infection nosocomiale :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic et de soins qu'en cas de faute. Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. " ;

4. Considérant qu'il résulte de la lettre des dispositions précitées que pour prétendre à une indemnisation en raison d'une infection nosocomiale, le demandeur doit établir l'existence d'un dommage en lien avec ladite infection ; qu'il résulte de l'instruction, ainsi que le Tribunal administratif de Paris l'a jugé par une exacte appréciation des faits, que si M. C...a souffert d'une surinfection urinaire en août 2006, conséquence d'un sondage vésical nécessité par l'état de sa vessie, cette infection a été immédiatement traitée avec succès par bi-antibiothérapie et n'a pas entrainé de dommages pour le patient ; que le Tribunal administratif de Paris a pu, ainsi, sans méconnaitre les dispositions précitées de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, à la fois reconnaitre le caractère d'infection nosocomiale à l'infection urinaire et dénier aux consorts C...tout droit à indemnisation ;

En ce qui concerne la réalisation d'une radiothérapie curative en post-opératoire :

5. Considérant que les consorts C...reprochent à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris de ne pas avoir administré à leur fils, après l'exérèse de la tumeur, le traitement complémentaire loco-régional par radiothérapie prévu dans les suites opératoires, en même temps que la deuxième phase de chimiothérapie ; qu'il résulte cependant des éléments du dossier médical de l'intéressé que, si cette prescription a été faite par le chef du service d'oncologie médicale le 21 septembre 2005 et si le 29 septembre suivant, une évaluation a été réalisée à l'hôpital Cochin pour la mise en oeuvre de ce traitement, le patient a précisé qu'il souhaitait qu'il soit réalisé près de son domicile et non à l'hôpital Cochin ; que le 6 octobre, lors de sa venue à l'hôpital pour une séance de chimiothérapie, un rendez-vous lui a été donné pour le 13 octobre suivant avec un médecin de Poissy, aux fins de réalisation de la radiothérapie prescrite ; qu'au cours du mois d'octobre, le patient ne s'est cependant rendu ni à ce rendez-vous du 13 octobre ni d'ailleurs à celui du 25 octobre à l'hôpital Cochin pour la séance prévue de chimiothérapie ; que le 8 novembre suivant, il est à nouveau noté dans le dossier hospitalier de l'intéressé que la " radiothérapie sera réalisée près de son domicile par le docteur Coscas " mais que le patient " n'a pas fait les repérages ni repris rendez-vous pour le début du traitement " ; que lors de cette visite de novembre à l'hôpital Cochin, un médecin a de nouveau donné les informations nécessaires à M. C...qui tenait cependant un discours négatif et a alors répété plusieurs fois qu'il venait pour la dernière fois ; que le 29 novembre, il est de nouveau noté dans son dossier que le patient n'a toujours pas reçu de radiothérapie post-opératoire ; qu'il résulte de ces éléments que l'abstention thérapeutique est, contrairement à ce que font valoir les requérants, la conséquence de la seule attitude de M. C...et ne saurait dès lors, compte tenu des prescriptions et rappels faits par le personnel de l'hôpital Cochin, engager la responsabilité pour faute de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris ;

En ce qui concerne la radiothérapie palliative réalisée en mai 2006 :

6. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que si le traitement palliatif administré en mai 2006 n'a pas permis de soulager ses douleurs, il n'a, selon les termes de l'expert, " en aucune façon précipité le décès de M.C..., directement lié à l'évolution de la pathologie tumorale agressive dont il était atteint " ;

7. Considérant, d'autre part, qu'il ressort du dossier médical de l'intéressé que celui-ci a été tenu au courant de l'évolution de sa pathologie ; qu'il avait notamment été informé dès le

29 mars 2006, lors d'une consultation avec le chef du service d'oncologie de l'hôpital, alors pourtant qu'il était considéré comme étant en rémission complète, des risques de rechute ; qu'il a ensuite été reçu le 19 mai 2006 au centre de radiologie de traitement des tumeurs, par le médecin responsable de son traitement, qui l'a informé des modalités thérapeutiques et des éventuels effets secondaires du traitement ; que les consorts C...ne sont par suite fondés à soutenir ni qu'il aurait reçu une information insuffisante ni qu'il n'aurait pas consenti à ce traitement qui était, en tout état de cause, impérieusement requis compte tenu de l'évolution de la tumeur ; que les consorts C...ne sauraient dans ces conditions rechercher la responsabilité pour faute de l'AP-HP de ce fait ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise complémentaire, que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'indemnisation du préjudice résultant du décès de leur fils ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par les consorts C...et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, en l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. et Mme C...la somme demandée par l'AP-HP au même titre ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme C...est rejetée.

Article 2: Les conclusions de l'AP-HP tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

''

''

''

''

2

N° 11PA05382


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA05382
Date de la décision : 08/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MILLE
Rapporteur ?: Mme Pascale BAILLY
Rapporteur public ?: M. LADREYT
Avocat(s) : GRESY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-04-08;11pa05382 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award