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11/12/2012 | FRANCE | N°11PA02119

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 11 décembre 2012, 11PA02119


Vu la requête, enregistrée le 3 mai 2011, présentée pour M. ou Mme Marcel A, demeurant ...), par Me Hoin ; M. ou Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0719666 du 14 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur requête tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mis à leur charge au titre des années 2000 et 2001, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 980

euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée le 3 mai 2011, présentée pour M. ou Mme Marcel A, demeurant ...), par Me Hoin ; M. ou Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0719666 du 14 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur requête tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mis à leur charge au titre des années 2000 et 2001, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 980 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 novembre 2012 :

- le rapport de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur,

- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public,

- et les observations de Me Amadori, substituant Me Hoin, pour M. ou Mme A ;

1. Considérant qu'à l'issue de l'examen de situation fiscale personnelle portant sur les années 1999, 2000 et 2001 dont M. et Mme A ont fait l'objet, des sommes appréhendées par M. A en sa qualité de dirigeant de la société Intercraft et correspondant au règlement, par cette dernière, de factures émises par des fournisseurs ont été imposées entre leurs mains au titre des années 2000 et 2001 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement des dispositions du c. de l'article 111 du code général des impôts ; que M. ou Mme A font appel du jugement n° 0719666 du 14 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2000 et 2001, ainsi que des pénalités y afférentes, à raison des rectifications ainsi opérées ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne le moyen tiré du défaut d'entretien avec le supérieur hiérarchique du vérificateur :

2. Considérant qu'aux termes des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration " ; qu'il résulte de ces dispositions que les agents de l'administration sont tenus, pour l'exécution d'une des vérifications visées par cet article, de respecter les règles qui, ne trouvant pas de fondement légal dans d'autres articles du code général des impôts ou du livre des procédures fiscales, figurent néanmoins dans la charte des droits et obligations du contribuable vérifié en vigueur à la date à laquelle ce document est remis au contribuable, dès lors que ces règles ont pour objet de garantir les droits du contribuable vérifié ; qu'au cas où l'agent vérificateur méconnaîtrait ces règles, et notamment les formalités qu'elles comportent, il appartient au juge de l'impôt, saisi d'un litige portant sur ce point, d'apprécier si cette méconnaissance a eu le caractère d'une irrégularité substantielle portant atteinte aux droits et garanties reconnus par la charte au contribuable vérifié ; que les dispositions du paragraphe 5 du chapitre III de la charte remise au contribuable, dans sa version applicable à l'examen de la situation fiscale personnelle engagée au cours de l'année 2002, prévoit que : " Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur divisionnaire ou principal (...). Si, après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur " ; que ces dispositions assurent au contribuable la garantie substantielle de pouvoir obtenir, avant la clôture de la procédure de redressement, un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur, puis, le cas échéant, dans un second temps, avec l'interlocuteur spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur, sur les points sur lesquels persiste un désaccord ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'avis d'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, notifié le 4 novembre 2002 à M. ou Mme A, mentionne que, si le contribuable rencontrait des difficultés dans le déroulement ou à la conclusion de la vérification, il pourrait s'adresser à l'inspecteur principal, M. Michaud, chef de brigade et, en cas de divergences persistantes, auprès de l'interlocuteur, M. B, chargé, à la direction de contrôle fiscal centre, d'étudier personnellement les problèmes rencontrés par les contribuables à l'occasion des vérifications ; qu'à la suite des redressements notifiés le 29 octobre 2003, l'administration a répondu le 2 février 2004 aux observations du contribuable présentées le 13 décembre 2003 en l'invitant, sous un délai de trente jours, d'une part, à solliciter l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, de la commission départementale de conciliation et du comité consultatif pour la répression des abus de droit, d'autre part, à présenter ses éventuelles observations sur les sanctions fiscales présentées dans son courrier ; qu'en réponse aux nouvelles observations de M. A présentées par courrier reçu le 19 mars 2004, l'administration, en la personne de M. Michaud, inspecteur principal des impôts, et de M. C, vérificateur, a, par un courrier en date du 3 mai 2004, informé M. A qu'il ne serait pas donné suite à sa demande de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, ni de la commission départementale de conciliation au motif que le litige ne ressortait pas de la compétence de ces organismes et que le contribuable conservait la possibilité d'exercer un recours hiérarchique auprès de M. B, directeur divisionnaire à la direction de contrôle fiscal centre, puis, au stade de l'interlocution, auprès de Mme Meunier, directrice départementale de la même direction ; qu'à la suite du courrier du 16 juin 2004 de M. A adressé à M. C, vérificateur, présentant des observations nouvelles et sollicitant " le bénéfice des recours hiérarchiques tels qu'exposés dans la Charte ", M. B, directeur divisionnaire chargé des fonctions d'interlocution, a indiqué, dans ses lettres des 24 et 30 septembre 2004, que M. A avait sollicité, par son courrier du 16 juin, un recours hiérarchique auprès de l'interlocuteur de la direction de contrôle fiscal et qu'il lui proposait de le recevoir dans le cadre de l'interlocution ; qu'il ressort des correspondances de Mme Martine Meunier, directrice départementale, que l'entrevue accordée à M. A le 14 octobre 2005 s'est déroulée dans le cadre de l'interlocution interrégionale ;

4. Considérant que la saisine de l'interlocuteur départemental n'est pas de nature différente de celle du supérieur hiérarchique du vérificateur ; que la charte du contribuable n'assortit cette saisine d'aucune garantie particulière ; qu'elle ne fait pas non plus obstacle à ce que l'entretien organisé dans le cadre du recours hiérarchique de premier degré ait lieu avec l'interlocuteur départemental, ni à ce que le directeur remplace ce dernier dans le cadre de l'interlocution ; que, dans ces conditions, la circonstance que, lors de chacun des deux recours exercés par le contribuable, M. A ait rencontré l'autorité d'un rang hiérarchique plus élevé que celui que prévoient les dispositions susmentionnées de la charte du contribuable, après en avoir été informé par un courrier du 3 mai 2004, n'a pas eu pour effet de le priver du recours hiérarchique de premier degré, ni de l'interlocution ; que le requérant n'est, dès lors, pas fondé à soutenir qu'il aurait été privé d'une garantie substantielle offerte par la charte ;

En ce qui concerne le moyen tiré du défaut de motivation des prélèvements sociaux :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la procédure d'imposition en litige : " L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation " ; qu'aux termes de l'article L. 48 dudit livre, dans sa rédaction alors applicable : " A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des redressements sont envisagés, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la notification prévue à l'article L. 57, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces redressements " ; et qu'aux termes de l'article R.*57-1 du même livre : " La notification de redressement prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs du redressement envisagé [...] " ; qu'il ressort de l'examen de la notification de redressements en date du 29 octobre 2003 qu'elle mentionne la contribution sociale généralisée, la contribution pour le remboursement de la dette sociale ainsi que le prélèvement social parmi les impositions concernées par le redressement en indiquant leurs bases légales ainsi que leurs taux ; qu'en outre, la base de ces prélèvements sociaux correspond aux revenus de capitaux mobiliers réintégrés dans le revenu global imposable à l'impôt sur le revenu de M. A au titre des années 2000 et 2001 ; qu'ainsi, cette notification satisfait aux exigences de l'article L. 57 précité du livre des procédures fiscales et a pu servir de fondement à l'établissement des cotisations supplémentaires de contribution sociale généralisée, de contribution pour le remboursement de la dette sociale et de prélèvement social auxquelles M. A a été assujetti au titre des années 2000 et 2001 ;

En ce qui concerne l'absence de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires :

6. Considérant que les revenus de capitaux mobiliers ne sont pas au nombre des catégories de revenus qui relèvent de la compétence de la commission départementale des impôts telle qu'elle est prévue par les dispositions de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales ; qu'il est constant que les impositions litigieuses frappent les revenus de capitaux mobiliers ; que, dès lors, le moyen tiré par M. A de ce que le service, en lui refusant de soumettre le litige à cet organisme, l'aurait privé des garanties attachées à la procédure d'imposition ne peut qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la base légale du redressement :

7. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : ... ; c. Les rémunérations et avantages occultes " ; que M. A soutient que l'administration devait imposer les sommes en litige sur le fondement de l'article 92 du code général des impôts dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, et non sur le fondement des dispositions précitées du c. de l'article 111 dudit code en tant que revenus distribués dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; qu'il ressort des constatations effectuées par le juge pénal dans l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 18 novembre 2009, devenu définiti, et qui, en ce qui concerne l'existence matérielle des faits, a l'autorité absolue de la chose jugée, que la société Intercraft, dont M. A était le dirigeant, a acquitté des factures à caractère fictif émises par les sociétés CGE, Primum, Torafa et TTMI et que ces dernières ont reversé à l'intéressé 75 à 80 % du montant des factures susmentionnées sous la forme de remise d'espèces ; que, dans ces conditions, en l'absence de toute contrepartie aux versements d'espèces en cause, l'avantage ainsi octroyé à M. A procède de l'intention des sociétés CGE, Primum, Torafa et TTMI de lui accorder une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une redistribution de bénéfices au sens des dispositions du c. de l'article 111 susmentionné du code général des impôts ; que, par suite, c'est à bon droit que, pour imposer dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement des dispositions du c. l'article 111 susmentionné du code général des impôts, les sommes ainsi reçues et conservées par M. A, l'administration fiscale a considéré que ces sommes constituaient un avantage occulte concédé par les sociétés CGE, Primum, Torafa et TTMI ; qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander la décharge des impositions et pénalités mises à sa charge ;

En ce qui concerne le caractère approximatif du quantum du redressement :

8. Considérant qu'il ressort de l'arrêt susmentionné de la Cour d'appel de Paris du 18 novembre 2009, devenu définitif, que M. A a reconnu, lors de sa garde à vue, le caractère fictif des factures par lesquelles il a récupéré en numéraire 75 à 80 % de leur montant hors taxe et qu'il a déclaré avoir reçu, par ce moyen, une somme de 1,5 million de francs en espèces en provenance des sociétés CGE, Primum, Torafa et TTMI ; que, si M. A soutient que l'administration a retenu de façon abusive le pourcentage le plus élevé pour déterminer le montant des redressements mis à sa charge, il résulte de l'instruction que le montant des rehaussements effectués au titre des années 2000 et 2001, qui s'élève à 181 164 euros, soit 1 188 357 F, est nettement inférieur à celui que M. A a reconnu avoir perçu en provenance des sociétés CGE, Primum, Torafa et TTMI ; que, dans ces conditions, M. A n'est pas fondé à soutenir que les bases des redressements contestés seraient surévaluées ;

Sur les pénalités pour manoeuvres frauduleuses :

9. Considérant qu'eu égard aux fonctions de dirigeant exercées par M. A dans la société Intercraft et à la nature des sommes en litige issues d'un montage de fausse facturation destiné à égarer l'administration fiscale dans son pouvoir de contrôle en donnant une apparence réelle à des opérations fictives, l'administration doit être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme établissant l'intention délibérée d'éluder l'impôt de la part du requérant, qui ne pouvait ignorer ni l'existence des avantages occultes dont il a bénéficié par la perception d'espèces en contrepartie de chèques en règlement de fausses factures, ni le fait que les sommes dont il s'agit étaient imposables entre ses mains et auraient dû être déclarées ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que les redressements mis à la charge de M. A ont été assortis des pénalités pour manoeuvres frauduleuses prévues à l'article 1729 du code général des impôts ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. ou Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. ou Mme A est rejetée.

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N° 08PA04258

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N° 11PA02119


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: Mme Anne MIELNIK-MEDDAH
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : CABINET ANDRÉ HOIN et PARTENAIRES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Date de la décision : 11/12/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 11PA02119
Numéro NOR : CETATEXT000026787927 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-12-11;11pa02119 ?
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