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31/12/2010 | FRANCE | N°10PA03378

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 31 décembre 2010, 10PA03378


Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2010, présentée pour Mme Malika A, demeurant chez ..., par Me Trorial ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001940/4 en date du 20 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 février 2010 du préfet du Val-de-Marne rejetant sa demande d'admission au séjour, l'obligeant à quitter le territoire et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté litigieux ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, au pré

fet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de 15 jours suiva...

Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2010, présentée pour Mme Malika A, demeurant chez ..., par Me Trorial ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001940/4 en date du 20 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 février 2010 du préfet du Val-de-Marne rejetant sa demande d'admission au séjour, l'obligeant à quitter le territoire et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté litigieux ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, ou à défaut de réexaminer sa demande de titre de séjour dans les mêmes conditions, en l'autorisant au séjour durant le temps de ce réexamen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 décembre 2010 :

- le rapport de M. Privesse, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Seulin, rapporteur public ;

Considérant que Mme A, née le 8 septembre 1968 et de nationalité marocaine, s'est vue délivrer une carte de séjour temporaire en qualité de conjointe de français, valable du 10 avril 2006 au 9 avril 2007 et l'autorisant à travailler, à la suite de son mariage le 28 mars 2005 avec un ressortissant français, cette carte n'ayant pas été renouvelée par le préfet du Val-de-Marne en raison de l'absence de vie commune, par une première décision en date du 6 juillet 2007, assortie d'une obligation de quitter le territoire français ; que cette obligation ayant été mise à exécution, Mme A est revenue sur le territoire, selon ses déclarations le 22 septembre 2007, et a de nouveau sollicité son admission au séjour en qualité de " salarié ", par un courrier reçu en préfecture le13 février 2009, sur le fondement, cette fois, des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par l'arrêté litigieux en date du 23 février 2010 assorti d'une obligation de quitter le territoire français, le préfet du Val-de-Marne a rejeté cette demande en estimant d'une part, que l'intéressée ne remplissait pas les conditions prévues par l'article L. 313-14 du code précité, et, d'autre part, qu'elle ne pouvait se prévaloir de liens privés et familiaux sur le territoire, inscrits dans la durée et la stabilité ; que Mme A relève régulièrement appel du jugement du 20 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce même arrêté, en soutenant notamment qu'elle satisfait bien aux dispositions de l'article L. 313-14 du code précité et que le préfet du Val-de-Marne, auquel elle avait transmis tous éléments utiles, n'a pas vérifié et n'a pas indiqué dans la décision contestée les raisons pour lesquelles elle ne remplirait pas les conditions lui permettant de prétendre à la délivrance du titre de séjour sollicité en qualité de " salariée ", entachant dès lors sa décision d'un défaut de motivation ;

Sur la légalité externe de l'arrêté litigieux et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du même code : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. La carte porte la mention " salarié " lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois. Elle porte la mention " travailleur temporaire " lorsque l'activité est exercée pour une durée déterminée inférieure à douze mois. Si la rupture du contrat de travail du fait de l'employeur intervient dans les trois mois précédant le renouvellement de la carte portant la mention " salarié ", une nouvelle carte lui est délivrée pour une durée d'un an (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail, qui s'est substitué à l'article L. 341-2 de ce code : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. " ; qu'aux termes enfin de l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse : " La situation de l'emploi ou l'absence de recherche préalable de candidats déjà présents sur le marché du travail n'est pas opposable à une demande d'autorisation de travail présentée pour un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse souhaitant exercer une activité professionnelle dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur la liste annexée au présent arrêté " ;

Considérant qu'au regard de l'obligation de motiver les refus d'autorisation, imposée par l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979, le préfet doit, s'il estime devoir rejeter une demande de carte de séjour temporaire présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 40 de la loi du 20 novembre 2007, faire connaître les motifs pour lesquels ladite demande est rejetée, en indiquant les faits de l'espèce qu'il retient ou écarte ; qu'à cette fin, le préfet peut relever soit que la demande, faute de tendre à l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisée par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national, laquelle est aujourd'hui annexée à l'arrêté susmentionné du 18 janvier 2008, ne se situe pas dans le champ de l'admission exceptionnelle au séjour ainsi sollicitée, soit que les éléments de la situation personnelle de l'intéressé, qu'il lui appartient de préciser, tels que, par exemple, l'insuffisance de son expérience et de sa qualification professionnelles, l'absence de perspective réelle d'embauche pour l'intéressé dans l'une des activités susmentionnées, ou la faible durée de son séjour en France, font obstacle à ce que sa demande puisse être regardée comme relevant d'un motif exceptionnel ;

Considérant que Mme A fait valoir qu'elle avait transmis à l'appui de sa demande de titre de séjour, un contrat de travail daté du 20 janvier 2009 et un engagement de versement de la redevance forfaitaire auprès de l'ANAEM, ainsi que selon ses dires, un engagement ferme d'embauche de son employeur sollicitant sa régularisation en qualité d'agent de service de nettoyage, qualification retenue sur la liste fixée par l'arrêté du 18 janvier 2008 sous les codes 11213 et 11214, et qu'elle disposait des qualités professionnelles reconnues ; que de telles allégations, étayées par les documents joints au dossier, ne sont nullement contredits par le préfet du Val-de-Marne, lequel n'a produit en défense ni en instance ni en appel ; que celui-ci, en se bornant à indiquer à Mme A, dans l'arrêté litigieux, que " sa demande d'admission exceptionnelle au séjour n'est justifiée ni par des motifs exceptionnels ni par des considérations humanitaires " et qu'elle " ne remplit aucune des conditions pour prétendre à la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " en application de l'article L. 313-14 du code précité ", n'a pas satisfait aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 ; qu'il y a lieu dès lors, d'annuler pour ce motif, l'arrêté litigieux du 23 février 2010 en tant qu'il porte refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français intervenue le même jour en conséquence de ce refus, et par voie de conséquence, d'annuler le jugement attaqué ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ... prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ; qu'en application de ces dispositions et compte tenu de ce que le motif d'annulation de l'arrêté litigieux retenu par le présent arrêt est le seul susceptible de remettre en cause sa légalité, il y a lieu seulement d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de procéder, dans le délai maximum de deux mois, au réexamen de la situation de Mme A au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de prendre une nouvelle décision dûment motivée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros que sollicite Mme A au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1001940/4 en date du 20 mai 2010 du Tribunal administratif de Melun et l'arrêté en date du 23 février 2010 du préfet du Val-de-Marne sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de procéder au réexamen de la situation de Mme A au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de prendre une nouvelle décision dûment motivée, dans un délai maximum de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. L'administration tiendra le greffe (service de l'exécution) immédiatement informé des décisions prises en vertu de la présente injonction.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par Mme A est rejeté.

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N° 10PA03378


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. ROTH
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PRIVESSE
Rapporteur public ?: Mme SEULIN
Avocat(s) : TRORIAL

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Date de la décision : 31/12/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10PA03378
Numéro NOR : CETATEXT000023429126 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-12-31;10pa03378 ?
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