Vu le recours, enregistré le 1er juin 2007, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 1er du jugement 05-2997/3 du 8 février 2007 par lequel le Tribunal administratif de Melun a déchargé M. et Mme X des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ainsi que de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1997, 1998 et 1999 ;
2°) de rétablir, à la charge de M. et Mme X, les rappels en droits et en pénalités de l'impôt sur le revenu ainsi que des contributions sociales des années 1997, 1998 et 1999 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2009 :
- le rapport de Mme Brin, rapporteur,
- et les conclusions de Mme de Lignières, rapporteur public ;
Considérant que la SCI Etoile Foncière, société de personnes non soumise à l'impôt sur les sociétés , assure la gérance d'un patrimoine immobilier, situé 106-108 rue de la Jarry à Vincennes en sa qualité de porteur de parts de la SCI Cité Industrielle de Vincennes, laquelle est propriétaire de l'ensemble immobilier situé à cette adresse et gère les charges de cet immeuble ; que M. X détient 7 876 des 21 142 parts de la SCI Etoile Foncière ; qu'à l'issue du contrôle sur place des documents comptables de cette dernière SCI, l'administration a procédé au rehaussement de ses résultats au titre des années 1997, 1998 et 1999 ; que, par jugement du 8 février 2007, le Tribunal administratif de Melun, au motif de l'irrégularité de la procédure d'imposition de cette société, a déchargé M. et Mme X des impositions supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de ces mêmes années qui ont résulté entre leurs mains de ce rehaussement et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 435,20 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE fait appel de ce jugement ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'en vertu de l'article 172 bis du code général des impôts et des articles 46 B à D de l'annexe III audit code, les sociétés civiles immobilières non soumises à l'impôt sur les sociétés qui donnent leurs immeubles en location ou en confèrent la jouissance à leurs associés sont tenues de présenter à toute réquisition du service des impôts tous documents comptables et autres pièces justificatives de nature à justifier de l'exactitude des renseignements portés sur leurs déclarations fiscales ; que l'administration peut légalement procéder à un contrôle sur place de ces documents, dans le respect des garanties bénéficiant à l'ensemble des contribuables vérifiés ; que la SCI Etoile Foncière ayant déduit une quote-part des charges de l'immeuble du 106 rue de la Jarry lui incombant, le service, conformément aux dispositions précitées, était en droit de lui demander , dans le cadre du contrôle sur place dont elle a fait l'objet , de justifier de la réalité et du bien-fondé desdites charges ; qu'il résulte de l'instruction que les factures correspondant à ces charges, qui ont été émises par la SCI Cité Industrielle de Vincennes, ont été demandées par la vérificatrice au gérant de la SCI Etoile Foncière, M. Y, qui les a produites spontanément ; qu'il s'ensuit que contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, ces factures n'ont pas été obtenues par l'administration auprès de la SCI Cité Industrielle de Vincennes dans le cadre de l'exercice de son droit de communication; que, par suite, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a déchargé M. et Mme X pour le motif de l'irrégularité de la procédure d'imposition ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme X devant le tribunal administratif et devant elle ;
Sur le bien-fondé des redressements :
En ce qui concerne les résultats déclarés par la SCI Etoile Foncière et l'évaluation de ses recettes par l'administration :
Considérant que si les sociétés civiles immobilières qui donnent leurs immeubles en location ou en confèrent la jouissance à leurs associés ne sont pas soumises à l'obligation de tenir une comptabilité commerciale, il résulte des dispositions des articles 46 C et 46 D de l'annexe III au code général des impôts qu'elles sont notamment tenues de présenter au service des impôts les pièces justifiant la part des revenus des immeubles de la société correspondant aux droits de chacun des associés et déterminée dans les conditions prévues aux articles 28 à 31 du code général des impôts ; que l'administration, si elle estime que les pièces justificatives produites par une telle société civile immobilière n'ont pas un caractère probant, est en droit de procéder à une évaluation du revenu net foncier des associés, sans que, ce faisant, elle puisse être regardée comme ayant procédé à un rejet de la comptabilité de la société contrôlée, alors que cette société n'est pas astreinte à la tenue d'une comptabilité ;
Considérant que lors du contrôle de la SCI Etoile Foncière, il a été constaté que celle-ci ne disposait pas de livre de dépenses, que de nombreuses irrégularités entachaient la tenue du livre de recettes telles que des ratures, des feuilles rajoutées, l'absence de mention de certains locataires ainsi que d'opérations datées et numérotées, des mentions manuscrites portées au crayon de plusieurs sommes inexactes ; que seuls huit contrats de bail ont été présentés alors que les loyers sont révisables à chaque période triennale ; qu'à défaut de document de résiliation et de livre de banque ventilant les recettes par nature et par locataire, les listes de locataires fournies n'ont pas pu être rapprochées du livre de recettes et des quittances présentées ; que seules des photocopies de bordereaux de dépôt de chèques ont pu être examinées qui ne comportent pas toutes la date du dépôt ni le cachet de la banque attestant de leur remise à l'encaissement ; qu'enfin, alors que tous les chèques sont libellés à l'ordre de la SCI Etoile Foncière, celle-ci n'a apporté aucune justification d'une répartition détaillée entre les différents porteurs de parts ; que, dans ces conditions, le service a pu regarder à bon droit les documents comptables présentés comme ne justifiant pas des résultats déclarés et, par suite, procéder à l'évaluation des recettes de cette société ;
Considérant que la vérificatrice a retenu les recettes ressortant des crédits enregistrés sur les seuls comptes bancaires de la SCI Etoile Foncière en faisant abstraction des sommes ne correspondant pas à des recettes d'après les documents fournis ; que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme X, les sommes portées sur les comptes bancaires de la SCI Cité Industrielle de Vincennes n'ont pas été prises en compte ; que si ces derniers soutiennent que cette méthode serait viciée en ce que, la SCI Etoile Foncière , agissant comme mandataire de certains copropriétaires, encaisse pour leur compte des loyers et que le service aurait donc dû extourner de ses recettes celles revenant aux autres copropriétaires, aucun élément de nature à justifier cette allégation n'a été produit ;
Considérant que M. et Mme X se prévalent du jugement du Tribunal administratif de Versailles, n° 0407387, en date du 2 juillet 2007, statuant sur le litige opposant M. Y, gérant de la SCI Etoile Foncière, et l'administration fiscale ; que ce jugement se référant à des documents comptables produits par ce dernier devant le tribunal et établis par l'expert-comptable mandaté par l'administrateur provisoire de cette SCI, a prononcé la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme Y ont été assujettis au titre des années 1997 et 1998 compte tenu des résultats de la SCI Etoile Foncière tels qu'ils résultent de ces documents comptables ; que, toutefois, ce jugement n'est pas devenu définitif et n'est pas revêtu de l'autorité de la chose jugée ; que la cour, en conséquence, et en tout état de cause, ne saurait faire droit aux conclusions de M. et Mme X tendant à une réduction des impositions mises à leur charge qui résulterait de la décision rendue par le Tribunal administratif de Versailles ;
Considérant qu'il n'incombe pas à la cour de demander, par mesure d'instruction, la communication des documents produits devant ce tribunal dès lors qu'il s'agit de documents versés par des requérants différents dans le cadre d'une procédure contentieuse distincte ;
En ce qui concerne l'indemnité versée par la SA Trophy Radiologie :
Considérant que l'administration a réintégré dans les résultats de la SCI Etoile Foncière au titre de l'exercice 1998 la somme de 1 034 482 F correspondant à l'indemnité que lui a versée la société Trophy Radiologie , à l'occasion de son départ des locaux qu'elle occupait rue de la Jarry, par la remise des 80 parts sociales sur 116 qu'elle détenait dans la SCI Cité Industrielle de Vincennes ;
Considérant qu'aux termes de l'article 29 du code général des impôts : Sous réserve des dispositions des articles 33 ter et 33 quater, le revenu brut des immeubles ou parties d'immeubles donnés en location est constitué par le montant des recettes brutes perçues par le propriétaire, augmenté du montant des dépenses incombant normalement à ce dernier et mises par les conventions à la charge des locataires et diminué du montant des dépenses supportées par le propriétaire pour le compte des locataires. Les subventions et indemnités destinées à financer les charges déductibles sont comprises dans le revenu brut. Dans les recettes brutes de la propriété sont comprises notamment celles qui proviennent de la location du droit d'affichage ou du droit de chasse, de la concession du droit d'exploitation des carrières, de redevances tréfoncières ou autres redevances analogues ayant leur origine dans le droit de propriété ou d'usufruit. ; qu'en vertu de l'article 31 du code général des impôts, les charges déductibles pour la détermination du revenu net comprennent pour les propriétés urbaines les dépenses de réparation et d'entretien ;
Considérant que M. et Mme X soutiennent que la société Trophy Radiologie avait procédé à un réaménagement important des locaux pour l'exercice de son activité sans l'accord du propriétaire, ce qui aurait nécessité après son départ une remise en état des lieux et que la somme litigieuse ayant été reçue en compensation d'un préjudice subi par la SCI Etoile Foncière au moyen d'une l cession de parts à son profit , elle présente un caractère indemnitaire non imposable ; que, selon eux, ainsi qu'il ressortirait du rapport de l'expert désigné lors du litige qui a évalué le coût des travaux, soit 1 500 000 F, les travaux couverts par cette indemnité ont la nature de travaux de reconstruction qui, par application des dispositions de l'article 31 du code général des impôts, sont des charges non déductibles ;
Considérant, toutefois, qu'aux termes de l'acte de cession des 80 parts en date du 15 mai 1998 : Ce prix est payé à due concurrence par compensation avec les sommes dont le cédant est redevable au cessionnaire au titre des frais de réparation et de remise en état des locaux dont la société Trophy Radiologie était occupante dans l'immeuble de la Cité Industrielle ; qu'il ne ressort pas du rapport de l'expert établi le 6 juillet 1998 que les travaux dont il fait état entrent dans la catégorie des travaux de reconstruction ; que dans ces conditions, la somme en cause doit être regardée comme une indemnité destinée à financer des charges déductibles ; que cette somme , qui correspond au montant résultant de l'acte de cession du15 mai 1998 et réellement perçu par la SCI Etoile Foncière, doit, par suite être comprise dans le revenu brut ;
En ce qui concerne les charges déductibles :
Considérant que M. et Mme X demandent que soient déduits des revenus fonciers de la SCI Etoile Foncière un montant de taxe foncière sur les propriétés bâties résultant des modalités prévues par la documentation administrative de base 5D-2228 n° 6 du 10 mars 1999 ;
Considérant qu'en principe, en vertu de l'article 31 I 1°c) du code général des impôts, la taxe foncière ne peut-être déduite que si elle a été effectivement payée en cours de l'année d'imposition ; que, toutefois, la doctrine susmentionnée énonce : même si elle a été payée, elle est admise en charge à déduire des revenus fonciers : - pour son montant exact, si le contribuable a reçu son avis d'imposition ; dans le cas contraire, dans la limite des sommes payées au titre de cette même taxe pour l'année précédente. Ces déductions sont régularisées l'année suivante ; qu'il est constant que la SCI Etoile Foncière ne s'est acquittée de la taxe foncière pour aucune des années 1997, 1998 et 1999 ; que si les contribuables produisent des extraits de rôle, établis en 2005, concernant chacune de ces années, au nom de la SCI Cité Industrielle de Vincennes, ils ne sont assortis d'aucun détail comptable justifiant que les sommes portées sur ces extraits de rôle ont été effectivement supportées par la SCI Etoile Foncière ; que, par suite, M. et Mme X, ni sur le terrain de la loi fiscale, ni sur celui de la doctrine administrative invoquée sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, ne peuvent remettre en cause les montants des dépenses retenus à ce titre par le service ;
Sur les modalités d'imposition de l'année 1998 :
Considérant que M. et Mme X revendiquent l'application du quotient au revenu foncier perçu, en 1998, en qualité de porteur de parts de la SCI Etoile Foncière, dans le cadre du litige opposant cette dernière à la société Trophy Radiologie ;
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 163-0 A du code général des impôts que l'application du système du quotient qu'elles prévoient en matière de revenus exceptionnels ou différés constitue une faculté dont le contribuable doit faire la demande expresse, notamment par voie de réclamation auprès du service des impôts dans le délai légal ; qu'il résulte de l'instruction que la notification de redressement adressée à M. et Mme X date du 4 décembre 2000 et que la mise en recouvrement du rôle est en date du 31 juillet 2002 ; que le délai de réclamation prévu par l'article R. 196-3 du même livre expirait le 31 décembre 2003 et celui prévu par l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, le 31 décembre 2004 ; que les intéressés ayant sollicité pour la première fois l'application du quotient dans leur requête introductive enregistrée au greffe au Tribunal administratif de Melun le 19 mai 2005, leur demande n'est pas recevable et doit être rejetée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE est fondé, à demander, d'une part, l'annulation des articles 1er et 2 du jugement du Tribunal administratif de Melun, qu'il attaque, d'autre part, que M. et Mme X soient rétablis en droits et intérêts de retard au rôle de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales au titre des années 1997, 1998 et 1999 ; que, par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. et Mme X devant la cour tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 05-2997/3 en date du 8 février 2007 du Tribunal administratif de Melun est annulé.
Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, en droits et intérêts de retard, auxquelles M. et Mme X ont été assujettis au titre des années 1997, 1998 et 1999 sont remises à leur charge.
Article 3 : Les conclusions de M. et Mme X présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 07PA01900