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29/10/1998 | FRANCE | N°96PA00475;96PA03049

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 29 octobre 1998, 96PA00475 et 96PA03049


(2ème chambre)
VU I) la requête, enregistrée sous le n 96PA00475 le 26 février 1996 au greffe de la cour administrative d'appel, présentée par la société anonyme SERVICES ET TRANSPORTS CRUSE LINES 2, dont le siège est à Mata Utu, Ile Wallis, représentée par son président-directeur général ; la société demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9500175 en date du 15 décembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Nouméa a rejeté sa demande en décharge de la contribution des patentes à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1992, 1993 et 1

994 ainsi que la sanction fiscale afférente à l'imposition de l'année 1994 ;
2...

(2ème chambre)
VU I) la requête, enregistrée sous le n 96PA00475 le 26 février 1996 au greffe de la cour administrative d'appel, présentée par la société anonyme SERVICES ET TRANSPORTS CRUSE LINES 2, dont le siège est à Mata Utu, Ile Wallis, représentée par son président-directeur général ; la société demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9500175 en date du 15 décembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Nouméa a rejeté sa demande en décharge de la contribution des patentes à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1992, 1993 et 1994 ainsi que la sanction fiscale afférente à l'imposition de l'année 1994 ;
2 ) de lui accorder la décharge demandée ;
3 ) de prononcer le sursis de paiement de la sanction fiscale jusqu'au prononcé de l'arrêt ;
VU II) la requête, enregistrée sous le n 96PA03049 le 11 octobre 1996 au greffe de la cour administrative d'appel, présentée par la société anonyme SERVICES ET TRANSPORTS CRUSE LINES 2 dont le siège social est à Mara Utu, Ile Wallis, représentée par son président-directeur général ; la société demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9600080 en date du 10 juillet 1996 par lequel le tribunal administratif de Nouméa a rejeté sa demande en décharge de l'imposition à la patente à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1995 ;
2 ) de lui accorder la décharge demandée ;
3 ) de prononcer le sursis de paiement de l'imposition contestée ;
4 ) de joindre cette requête à celle enregistrée sous le n 96PA00475 ;
VU les autres pièces des dossiers ;
VU le code territorial des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 octobre 1998 :
- le rapport de M. MORTELECQ, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme MARTEL, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que les requêtes de la société anonyme SERVICES ET TRANSPORTS CRUSE LINES 2 sont dirigées contre deux jugements du 15 décembre 1995 et du 10 juillet 1996 du tribunal administratif de Nouméa rejetant ses demandes en décharge de la contribution des patentes à laquelle elle a été assujettie, d'une part, au titre des années 1992, 1993 et 1994 et, d'autre part, au titre de l'année 1995 ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;
Sur le moyen tiré de l'erreur commise sur l'identité du redevable de l'imposition, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des requêtes :
Considérant qu'aux termes de l'article 206 du code territorial des impôts de Nouvelle-Calédonie : "L'inscription au rôle de la contribution des patentes est obligatoire pour toute personne physique ou morale qui entreprend dans le territoire l'exercice d'un commerce, d'une industrie ou d'une profession, pour son propre compte et dans un but lucratif, sauf exemption expressément prévue par le présent titre et sous réserve des dispositions des articles 207 et 235" ; que ce texte doit être interprété comme excluant de l'assujettissement à la contribution des patentes les personnes salariées ainsi que celles, physiques ou morales, qui, agissant sous la dépendance d'autres personnes, ne peuvent être regardées comme exerçant une activité pour leur propre compte ;
Considérant que la copropriété du navire "Club Med 2", constituée, en vue de la construction, l'armement et l'exploitation de ce navire, de 36.000 parts de co-propriétés réparties à concurrence de 35.996 et de quatre entre la société de banque et de transactions et la société SERVICES ET TRANSPORTS CRUSE LINES 2, a, par l'article 20 de ses statuts établis le 31 juillet 1990, désigné comme gérante la société SERVICES ET TRANSPORTS CRUISE LINES 2 ; que, par un mandat de gestion du même jour, elle a confié à cette même société la gérance du navire ; qu'en raison de l'exploitation du bâtiment à partir du port de Nouméa, le territoire de la Nouvelle-Calédonie a assujetti la société SERVICES ET TRANSPORTS CRUISE LINES 2 à la contribution des patentes, au titre des années 1992 à 1995, en application des dispositions précitées de l'article 206 du code territorial des impôts, et lui a infligé, au titre de l'année 1994, une sanction fiscale pour absence d'inscription au rôle ; que l'intéressée fait appel des jugements des 15 décembre 1995 et 10 juillet 1996 par lesquels le tribunal administratif de Nouméa a refusé de lui accorder décharge de ces cotisations et de cette sanction en faisant valoir, à titre principal, que l'article 206 du code territorial des impôts ne lui est pas applicable dès lors qu'elle n'exerce pas son activité pour son propre compte mais pour celui de la copropriété ; que le territoire soutient que la société a été à juste titre imposée en sa qualité d'armateur chargé de l'exploitation du navire qui ne peut, compte tenu des pouvoirs dont il dispose en vertu du mandat de gestion, être regardé comme mandataire de la copropriété mais qui assume au contraire l'exploitation à ses risques et pour son compte ;

Considérant, en premier lieu, que si une copropriété de navire ne dispose pas de la propriété de ce bien, qui reste partagée entre les différents quirataires, cette forme de société a pour finalité, selon les termes mêmes de la loi du 3 janvier 1967 portant statut des navires, l'exploitation d'un navire, l'article 19 de ce texte stipulant que les copropriétaires participent aux profits et pertes de l'exploitation au prorata de leurs intérêts ; que, dans ces conditions, lorsque, conformément à l'article 14 de cette même loi, la copropriété confie, comme en l'espèce, la gestion du navire à l'un des copropriétaires, cette personne, alors même qu'elle acquiert de ce fait la qualité d'armateur et se charge de l'exploitation du navire, ne peut être regardée comme l'exploitant de ce navire ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'examen du mandat de gestion du 31 juillet 1990 que si ce document, dans un souci de protection des tiers, et reprenant en cela les dispositions des articles 17 et 20 de la loi du 3 janvier 1967, prévoit que le gérant jouit, vis-à-vis des tiers, dans le cadre de son mandat, de tous pouvoirs pour les besoins de son exploitation et notamment de celui de conclure en son nom, et rappelle qu'il est tenu indéfiniment et solidairement des dettes de la copropriété à l'égard de ces tiers, ce même document indique également que les actes ainsi accomplis sont exécutés, dans le cadre des relations entre le gérant et les quirataires, "au profit ou à la charge" de ceux-ci ; que l'article 2 du mandat précise expressément que "d'une manière générale, le gérant exploite le navire comme le sien propre pour le compte et aux risques de la copropriété", les termes "comme le sien propre", qui mettent à la charge du gérant une obligation de particulière vigilance dans l'exercice de ses tâches, ne pouvant avoir pour effet de lui conférer une indépendance vis-à-vis de la copropriété ; que l'importance de la rémunération consentie à la société SERVICES ET TRANSPORTS CRUISE LINES 2 en sa double qualité de responsable de l'exploitation du navire et de gérante statutaire chargée de la gestion administrative et comptable de la copropriété ne saurait davantage, à elle seule, alors que le mandat de gestion prévoit par ailleurs une reddition très précise des comptes, caractériser une telle situation d'indépendance et suffire à établir que cette société a exercé l'activité en cause pour son propre compte ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante est fondée à soutenir qu'elle n'est pas le redevable légal de la contribution des patentes à laquelle elle a été assujettie ; qu'il y a lieu en conséquence d'annuler les jugements en date des 15 décembre 1995 et 10 juillet 1996 du tribunal administratif de Nouméa et de lui accorder décharge des contributions établies au titre des années 1992 à 1995 ainsi que de la sanction fiscale infligée au titre de l'année 1994 ;
Article 1er : Les jugements n 9500175 du 15 décembre 1995 et n 9600080 du 10 juillet 1996 du tribunal administratif de Nouméa sont annulés.
Article 2 : La société anonyme SERVICES ET TRANSPORTS CRUSE LINES 2 est déchargée de la contribution des patentes à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1992, 1993, 1994 et 1995 ainsi que de la sanction fiscale établie en la matière au titre de l'année 1994.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 96PA00475;96PA03049
Date de la décision : 29/10/1998
Sens de l'arrêt : Annulation décharge
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - AUTRES TAXES OU REDEVANCES - Contribution des patentes en Nouvelle Calédonie - Redevable légal - Personne exerçant pour son propre compte une activité taxable - Notion - Absence - Gestionnaire d'un navire en copropriété.

19-03-06 L'article 206 du code territorial des impôts de Nouvelle-Calédonie, qui prévoit que la contribution des patentes est due par une personne physique ou morale qui entreprend dans le territoire l'exercice d'une activité taxable pour son propre compte, doit être interprété comme excluant de l'assujettissement à cette contribution les personnes salariées ainsi que celles qui, agissant sous la dépendance d'autres personnes, ne peuvent être regardées comme exerçant une activité pour leur propre compte. La finalité de la copropriété d'un navire étant l'exploitation de ce navire, lorsqu'une copropriété en confie la gestion à l'un des copropriétaires, cette personne, alors même qu'elle acquiert de ce fait la qualité d'armateur et se charge de l'exploitation du navire, ne peut être regardée comme l'exploitant de ce navire et donc comme exerçant l'activité pour son propre compte au sens de l'article 206 du code territorial des impôts.

OUTRE-MER - DROIT APPLICABLE DANS LES DEPARTEMENTS ET TERRITOIRES D'OUTRE-MER - REGIME ECONOMIQUE ET FINANCIER - Contribution des patentes - Redevable légal - Personne exerçant pour son propre compte une activité taxable.

46-01-06 L'article 206 du code territorial des impôts de Nouvelle-Calédonie, qui prévoit que la contribution des patentes est due par une personne physique ou morale qui entreprend dans le territoire l'exercice d'une activité taxable pour son propre compte, doit être interprété comme excluant de l'assujettissement à cette contribution les personnes salariées ainsi que celles qui, agissant sous la dépendance d'autres personnes, ne peuvent être regardées comme exerçant une activité pour leur propre compte. La finalité de la copropriété d'un navire étant l'exploitation de ce navire, lorsqu'une copropriété en confie la gestion à l'un des copropriétaires, cette personne, alors même qu'elle acquiert de ce fait la qualité d'armateur et se charge de l'exploitation du navire, ne peut être regardée comme l'exploitant de ce navire et donc comme exerçant l'activité pour son propre compte, au sens de l'article 206 du code territorial des impôts.


Références :

Loi 67-5 du 03 janvier 1967 art. 17, art. 20


Composition du Tribunal
Président : Mme Lefoulon
Rapporteur ?: M. Mortelecq
Rapporteur public ?: Mme Martel

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1998-10-29;96pa00475 ?
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