VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 24 août 1995, présentée pour M. Jean Y..., demeurant ... par la SCPA BERGER-PARUELLE-VOISIN-BIGOT, MOREAU-VOORHOEVE, avocat ; M. Y... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 914692 du 6 juin 1995 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande de condamnation de la commune de Villiers-le-Bel à lui verser une somme en réparation d'une décision de préemption illégale ;
2°) de condamner la commune de Villiers-le-Bel à lui verser la somme de 80.935,73 F avec intérêts au taux légal à compter du 6 mai 1991 ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code de l'urbanisme ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 juin 1996 :
- le rapport de M. SPITZ, conseiller,
- les observations de la SCP BERGER-PARUELLE-VOISIN-BIGOT, MOREAU-VOORHOEVE, avocat, pour M. Y...,
- et les conclusions de M. PAITRE, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que, par jugement du 14 décembre 1993, devenu définitif, le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 25 avril 1988 par laquelle le maire de Villiers-le-Bel a exercé le droit de préemption de la commune sur un appartement formant un lot d'un ensemble immobilier en copropriété sis ... dont M. Y... avait été déclaré adjudicataire par un jugement du 14 avril 1988 du tribunal de grande instance de Pontoise ; que l'illégalité dont est entachée la décision du 25 avril 1988 constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Villiers-le-Bel vis-à-vis de M. Y... ;
Considérant que M. Y... a subi, du fait du maintien dans l'appartement de Mlle Le Graet, occupant sans droit ni titre, durant la période qui s'est écoulée entre le 25 avril 1988 et le 24 octobre 1989, date de la transmission au greffe du tribunal de grande instance de l'arrêté du 28 septembre 1989 par lequel le maire de Villiers-le-Bel a révoqué la décision de préemption, un préjudice qui peut être regardé comme la conséquence directe de celle-ci, laquelle a privé M. Y..., durant la période susmentionnée, de sa qualité de propriétaire et des prérogatives qui y sont attachées et notamment l'a empêché de prendre les mesures propres à assurer la fin de l'occupation ;
Considérant que la commune de Villiers-le-Bel ne peut utilement soutenir, pour échapper à son obligation de réparer ledit préjudice, que M. Y... dispose de voies de droit contre l'occupant de l'appartement, alors même qu'il a exercé ces voies de droit en obtenant, le 6 juin 1990, un jugement du tribunal d'instance de Gonesse condamnant cet occupant à lui rembourser les charges de l'appartement durant, en particulier, la période du 25 avril 1988 au 24 octobre 1989, et à lui verser une indemnité mensuelle d'occupation de 3.900 F ;
Considérant que si l'évaluation par l'autorité judiciaire de l'indemnité d'occupation que M. Y... pouvait, compte tenu des caractéristiques de l'appartement, réclamer à son occupant ne s'impose pas à la cour dans le présent litige, il peut en être tenu compte pour évaluer le préjudice dont le requérant est fondé à demander réparation à la commune, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle est exagérée ; que, compte tenu de ladite évaluation et du montant des charges locatives de l'appartement durant la période considérée et de la durée de cette période, il sera fait une juste évaluation du préjudice subi par M. Y... du fait de la décision du 25 avril 1988 en fixant à 80.000 F le montant de l'indemnité destinée à le réparer ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que, dans son jugement du 6 juin 1995, le tribunal administratif de Versailles a refusé de condamner la commune de Villiers-le-Bel à lui verser la somme de 80.000 F ; qu'il y a lieu de condamner la commune à verser cette somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 mai 1991, date de la demande préalable dont l'a saisie M. Y..., et de la subroger dans les droits et actions de celui-ci à l'encontre de Mlle X... dans la limite du montant de l'indemnité ainsi fixée ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles du 6 juin 1995 est annulé.
Article 2 : La commune de Villiers-le-Bel est condamnée à verser à M. Y... la somme de 80.000 F laquelle portera intérêts au taux légal à compter du 6 mai 1991.
Article 3 : La commune de Villiers-le-Bel est subrogée dans les droits et actions de M. Y... à l'encontre de Melle X..., dans la limite du montant de la condamnation mentionnée à l'article 2 du présent arrêt.