(2ème Chambre)
VU la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au greffe de la cour les 14 juin et 14 septembre 1994 présentés pour M. Jean-Paul Y... demeurant à Tiarei PK 29 côté Montagne ... par Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; M. Y... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 29 mars 1994 par lequel le tribunal administratif de Papeete a rejeté sa demande ;
2°) de condamner le territoire à lui verser une somme de 2.920.000 F CFP représentant l'indemnité mensuelle de 50.000 F CFP prévue par lettre n° 4537 PR du 9 avril 1985, capitalisée du 1er janvier 1985 à la date de la requête, une somme de 2.920.000 F CFP représentant l'indemnité de chef de service d'un taux mensuel de 40.000 F CFP prévue par l'arrêté n° 575 CM du 6 juin 1987, capitalisée du 6 juin 1987 à la date de la requête, avec les intérêts capitalisés sur les sommes susmentionnées, une somme de 200.000 F CFP au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel pour la première instance et une somme de 300.000 F CFP pour l'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi n° 84-820 du 6 septembre 1984 modifiée ;
VU la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
VU le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mai 1996 :
- le rapport de M. RATOULY, président-rapporteur,
- les observations de la SCP de CHAISEMARTIN-COURJON, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour le territoire de la Polynésie française,
- et les conclusions de M. GIPOULON, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que le tribunal a soulevé d'office, sans le soumettre à la discussion des parties conformément aux dispositions de l'article R.153-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le moyen tiré de ce que la situation de détachement de M. Y... avait pris fin au 1er janvier 1990 en l'absence d'arrêté renouvelant son détachement ; qu'ainsi le jugement du tribunal administratif de Papeete du 29 mars 1994 doit être annulé ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Papeete ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le territoire :
Considérant que M. Y... conteste le refus opposé par le territoire à sa demande du 29 mai 1992 tendant à ce que lui soient versées dans le cadre des fonctions de chef du service territorial des transports terrestres qu'il assume depuis le 7 mars 1992 les indemnités mensuelles de 50.000 F CFP et de 40.000 F CFP instituées respectivement par lettre du président du Gouvernement du territoire du 9 avril 1985 et par arrêté n° 575 CM du 5 juin 1985 du conseil des ministres ;
Considérant qu'aux termes de l'article 45 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 : "le détachement est la position du fonctionnaire placé hors de son corps d'origine ... A l'expiration de son détachement le fonctionnaire est obligatoirement réintégré dans son corps d'origine ..." ; qu'aux termes de l'article 15 du décret susvisé du 16 septembre 1985 : "Tout détachement de fonctionnaire est prononcé par arrêté du ministre dont il relève et, le cas échéant, du ministre auprès duquel il est détaché" ; qu'aux termes de l'article 16-3° du même décret : "Sont prononcés par arrêté du seul ministre dont ils relèvent dans leur corps d'origine, après accord du ou, le cas échéant, des ministres intéressés : a) le renouvellement du détachement lorsque ses conditions demeurent identiques ..." ; qu'aux termes de l'article 21 de ce décret : "le détachement de longue durée ne peut excéder cinq années. Il peut toutefois être renouvelé par période n'excédant pas cinq années ..." ;
Considérant que M. Y..., fonctionnaire d'Etat appartenant au corps des attachés de préfecture depuis le 6 décembre 1980, a été, par arrêté du 27 mai 1987 pris par le Premier ministre, placé en position de détachement auprès du territoire de la Polynésie française à compter du 1er janvier 1985 ; que conformément aux dispositions précitées de l'article 21 du décret du 16 septembre 1985, le détachement a pris fin au 1er janvier 1990 ; qu'aucune décision de renouvellement du détachement n'étant intervenue, M. Y... ne se trouvait plus en situation de détachement auprès du territoire de la Polynésie française à compter de cette date ; qu'il n'est dès lors, en tout état de cause, pas fondé à demander au territoire de la Polynésie française le paiement des indemnités litigieuses ;
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que le territoire de la Polynésie française qui n'est pas la partie perdante soit condamné à payer à M. Y... la somme qu'il demande au titre des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application des dispositions de l'article susvisé et de condamner M. Y... à payer au territoire de la Polynésie française la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Papeete du 29 mars 1994 est annulé.
Article 2 : La demande de M. Y... présentée devant le tribunal administratif de Papeete et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.