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20/04/2021 | FRANCE | N°20NT01771

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 20 avril 2021, 20NT01771


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a renouvelé son assignation à résidence pour une durée de huit jours du 21 janvier 2020 au 1er février 2020.

Par jugement n° 2000907 du 30 janvier 2020, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 juin 2020, M. A..., représenté par Me E... C..., deman

de à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2020 par lequel l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a renouvelé son assignation à résidence pour une durée de huit jours du 21 janvier 2020 au 1er février 2020.

Par jugement n° 2000907 du 30 janvier 2020, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 juin 2020, M. A..., représenté par Me E... C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a renouvelé son assignation à résidence pour une durée de huit jours ;

3°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens ainsi que le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- la décision contestée est insuffisamment motivée ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'elle se fonde sur la circonstance qu'il n'a effectué aucune diligence en vue d'exécuter la mesure de transfert vers l'Espagne dont il est l'objet ;

- la décision contestée a été prise en méconnaissance de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que la mesure de renouvellement n'est pas nécessaire et qu'elle porte une atteinte disproportionnée à sa liberté de déplacement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 août 2020, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen, né le 28 septembre 1991, est entré irrégulièrement en France le 22 mars 2019. Sa demande d'asile a été enregistrée le 14 mai 2019 par les services préfectoraux de la Loire-Atlantique. Le relevé de ses empreintes digitales a révélé que celles-ci avaient été enregistrées en Espagne le 11 janvier 2019. Les autorités espagnoles, saisies le 15 mai 2019 d'une demande de prise en charge sur le fondement de l'article 13.1 du règlement européen du 26 juin 2013, dit " Dublin III ", ont expressément admis leur responsabilité le 23 mai 2019. Par deux arrêtés du 28 juin 2019, le préfet de Maine-et-Loire a d'une part, décidé le transfert de M. A... aux autorités espagnoles, responsables de l'examen de sa demande d'asile et, d'autre part, décidé son assignation à résidence dans le département de la Loire-Atlantique. Les requêtes présentées contre ces arrêtés ont été rejetées le 1er août 2019 par un jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes. L'appel interjeté par M. A... contre ce jugement a été rejeté par une ordonnance du 9 avril 2020. Par un jugement du 3 janvier 2020, le magistrat désigné a annulé la décision du 9 décembre 2019 par laquelle le préfet de Maine-et-Loire avait renouvelé l'assignation à résidence de M. A... pour une durée de 39 jours. Par un nouvel arrêté du 8 janvier 2020, cette même autorité a assigné M. A... à résidence dans le département de la Loire-Atlantique pour une nouvelle durée de 8 jours, du 21 janvier 2020 au 1er février 2020 inclus. M. A... relève appel du jugement du 30 janvier 2020 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions tendant à l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Par une décision du 4 juin 2020, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, ses conclusions tendant à l'octroi de l'aide juridictionnelle provisoire sont devenues sans objet. Il n'y a ainsi pas lieu d'y statuer.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 8 janvier 2020 :

3. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) / 1° bis Fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 (...) Les huit derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve que la durée maximale de l'assignation ne puisse excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable (...) trois fois pour les cas relevant du 1°bis. /L'article L. 551-1 est applicable lorsqu'un étranger assigné à résidence en application du présent article : a) Ne présente plus de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque mentionné au 3° du II de l'article L. 511-1 ; b) Présente un risque non négligeable de fuite, tel que défini aux 1° à 12° du II de l'article L. 551-1, dans le cas d'un étranger faisant l'objet d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge, en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 précité, ou d'une décision de transfert notifiée conformément à l'article L. 742-3.(...) ".

4. En premier lieu, l'arrêté contesté vise notamment les dispositions des articles L. 561-2 I/1° bis et R. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et fait référence à l'arrêté du 28 juin 2019 portant transfert aux autorités espagnoles dont M. A... fait l'objet. Il précise que le renouvellement de l'assignation à résidence de l'intéressé permet de vérifier sa présence sur le territoire français dans l'attente de son transfert. Il indique également que le requérant, qui n'avait pas effectué les diligences nécessaires en vue de son départ, présentait toutefois des garanties de représentation effective au regard de sa domiciliation auprès de l'association France-Terre-d'asile située à Nantes, garanties de représentations propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'exécution de la décision de transfert dont il fait l'objet. Ainsi, l'arrêté contesté reprend les éléments essentiels relatifs à la situation personnelle de l'intéressé et mentionne avec suffisamment de précisions les motifs de droit et circonstances de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.

5. En deuxième lieu, l'article 30 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 prévoit " que les coûts nécessaires au transfert d'un demandeur d'asile sont à la charge de l'État membre procédant au transfert et (...) ne peuvent être mis à la charge des personnes à transférer en vertu du présent règlement ". D'une part, si le préfet de Maine-et-Loire a relevé, dans la décision contestée, que M. A... n'avait effectué aucune diligence en vue d'exécuter la mesure de transfert vers l'Espagne dont il est l'objet, cette décision n'a eu ni pour objet, ni pour effet de mettre à sa charge les coûts du transfert en cause. D'autre part, il ressort de la décision contestée que le préfet de Maine-et-Loire, pour décider de renouveler la mesure d'assignation à résidence, a retenu la circonstance que M. A..., qui fait l'objet d'une des mesures visées au 1° bis de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, remplissait les conditions énoncées à cet article dès lors que son éloignement demeurait une perspective raisonnable. Ce motif était, en tout état de cause, suffisant pour fonder sa décision. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de Maine-et-Loire aurait, en prenant l'arrêté contesté du 8 janvier 2020, fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article 30 du règlement n° 604/2013 ne peut qu'être écarté.

6. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article R. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " L'autorité administrative détermine le périmètre dans lequel l'étranger assigné à résidence en application des articles L. 561-1, L. 561-2, L. 744-9-1 ou L. 571-4 ou d'une des mesures prévues aux articles L. 523-3, L. 523-4 et L. 523-5 est autorisé à circuler muni des documents justifiant de son identité et de sa situation administrative et au sein duquel est fixée sa résidence. Elle lui désigne le service auquel il doit se présenter, selon une fréquence qu'il fixe dans la limite d'une présentation par jour, en précisant si cette obligation s'applique les dimanches et les jours fériés ou chômés. ".

7. Si les décisions d'assignation à résidence prévues par les dispositions précitées de l'article L. 561-2 ne sont pas assimilables à des mesures privatives de liberté, elles doivent être, dans leur principe comme dans leurs modalités, adaptées, nécessaires et proportionnées aux finalités qu'elles poursuivent.

8. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, que l'exécution de l'éloignement de M. A..., demeurait, à la date de la décision en cause, une perspective raisonnable et que ce dernier présentait, ainsi qu'il a été rappelé au point précédent, des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à cette mesure d'éloignement permettant d'éviter son placement en rétention. D'autre part, l'arrêté qui prévoit une obligation de se présenter les lundis, mardis, mercredis et jeudis, sauf les jours fériés, alors que M. A... n'apporte aucun élément sur sa situation qui s'opposerait à ces modalités de pointage ne constitue pas, eu égard aux buts en vue desquels il a été pris, une atteinte excessive à la liberté d'aller et de venir de l'intéressé. Le moyen, énoncé au demeurant dans des termes très généraux, tiré de ce que cet arrêté serait injustifié et présenterait un caractère disproportionné ne peut, par suite, qu'être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 janvier 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a renouvelé son assignation à résidence pour une durée de 8 jours.

Sur les frais liés au litige :

10. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais liés au litige.

11. D'autre part, en l'absence de dépens exposés dans l'instance, les conclusions présentées par M. A... tendant au versement par l'Etat d'une somme à ce titre ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'admission provisoire de M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Le surplus de la requête de M. A... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée pour information au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 2 avril 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président,

- M. B..., président-assesseur,

- Mme Gélard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 avril 2021.

Le rapporteur,

O. B...Le président,

O. GASPON

La greffière,

P. CHAVEROUX

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision

N° 20NT01771 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT01771
Date de la décision : 20/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : RODRIGUES DEVESAS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-04-20;20nt01771 ?
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