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08/12/2020 | FRANCE | N°19NT04639

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 08 décembre 2020, 19NT04639


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 23 juin 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation, ainsi que la décision du 17 novembre 2016 par laquelle le ministre a rejeté le recours gracieux formé contre cette décision.

Par un jugement n° 1700905 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 décembr

e 2019, M. D... B..., représenté par Me Ruffel, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 23 juin 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation, ainsi que la décision du 17 novembre 2016 par laquelle le ministre a rejeté le recours gracieux formé contre cette décision.

Par un jugement n° 1700905 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 décembre 2019, M. D... B..., représenté par Me Ruffel, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 octobre 2019 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision du 23 juin 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation, ainsi que la décision du 17 novembre 2016 par laquelle le ministre a rejeté le recours gracieux formé contre cette décision ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de procéder à sa naturalisation, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision contestée du 23 juin 2016 a été signée par une autorité ne justifiant pas d'une délégation à cet effet ;

- les décisions sont entachées d'une erreur de droit, en ce qu'elles se fondent sur une condamnation ayant donné lieu à une réhabilitation de plein droit, en application de l'article 133-13 du code pénal ;

- les décisions sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard tant de l'ancienneté des faits qui lui sont reprochés, que de son insertion professionnelle et de ses attaches privées et familiales en France.

Par un mémoire en défense, enregistré 8 janvier 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Frank.

Considérant ce qui suit :

1. Par jugement du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. D... B... tendant à l'annulation de la décision du 23 juin 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation, ainsi que la décision du 17 novembre 2016 par laquelle le ministre a rejeté le recours gracieux formé contre cette décision. M. B... relève appel de ce jugement.

Sur la légalité de la décision du 23 juin 2016 :

2. En premier lieu, par une décision du 27 mai 2016, régulièrement publiée au journal officiel de la République française, la directrice de l'accueil, de l'intégration et de la nationalité au ministère de l'intérieur, qui bénéficie d'une délégation du ministre en application de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005, a donné à M. F... G..., attaché principal d'administration de l'Etat, délégation à l'effet de signer, au nom du ministre de l'intérieur, toutes décisions relevant de ses attributions au sein du bureau des décrets et de la gestion des flux, rattaché à la sous-direction de l'accès à la nationalité française en vertu de l'arrêté du 12 août 2013 portant organisation interne de la direction générale des étrangers en France. Il n'est pas établi que la décision contestée attaquée ne relèverait pas de ces attributions. Par suite, le moyen tiré de ce que M. G... n'était pas compétent pour signer la décision contestée manque en fait.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger. ". Aux termes de l'article 48 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 : " (...) / Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation (...) sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions (...) ". En vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite. Dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le postulant.

4. Il ressort des pièces du dossier que pour ajourner à deux ans la demande de naturalisation de M. B..., le ministre de l'intérieur s'est fondé sur le motif tiré de ce que l'intéressé avait été l'auteur de trafic de stupéfiants en avril 2002 à Sète, de violence avec arme en décembre 2005 à Sète, et de conduite d'un véhicule sans permis en août 2007, ce dernier fait ayant donné lieu à une condamnation à une amende délictuelle de 350 euros par le tribunal correctionnel de Montpellier le 27 novembre 2007.

5. D'une part, à supposer même que M. B... aurait bénéficié de la réhabilitation de plein droit prévue à l'article 133-13 du code pénal pour la condamnation infligée le 27 novembre 2007, ce qui ne ressort pas des pièces du dossier, cette circonstance ne fait en tout état de cause pas obstacle à ce que le ministre chargé des naturalisations puisse prendre en considération, pour ajourner la demande de naturalisation, les faits qui ont fondé cette condamnation. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

6. D'autre part, M. B... ne conteste pas être l'auteur des faits qui lui sont reprochés par le ministre de l'intérieur au sein des décisions contestées. Dans ces conditions, compte tenu de leur gravité et de leur caractère réitéré, et alors même qu'à la date de la décision contestée, les plus récents dataient de neuf ans, le ministre de l'intérieur, eu égard au large pouvoir dont il dispose pour apprécier l'opportunité d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite, n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en ajournant à deux ans la demande de naturalisation de M. B....

7. En dernier lieu, les circonstances alléguées par M. B..., selon lesquelles il séjourne en France depuis plus de vingt ans, est parfaitement inséré professionnellement et détient ses attaches privées et familiales en France, sont sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, eu égard au motif qui la fonde.

Sur la légalité de la décision du 17 novembre 2016 :

8. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 7, que M. B... n'établit pas que la décision du 23 juin 2016 ajournant à deux ans sa demande de naturalisation est entachée d'illégalité. Par suite, les conclusions dirigées contre la décision du ministre qui se borne à rejeter son recours gracieux, dont les vices propres ne peuvent au demeurant être utilement contestés, doivent être rejetées par voie de conséquence.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 20 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme Buffet, présidente-assesseur,

- M. Frank, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 décembre 2020.

Le rapporteur,

A. FrankLe président,

T. CELERIER

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT04639


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Alexis FRANK
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Date de la décision : 08/12/2020
Date de l'import : 19/12/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19NT04639
Numéro NOR : CETATEXT000042658999 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-12-08;19nt04639 ?
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