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27/11/2020 | FRANCE | N°20NT00661

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 27 novembre 2020, 20NT00661


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé contre une décision des autorités consulaires françaises à Kinshasa refusant de délivrer un visa de long séjour en France à l'enfant G... H... au titre du regroupement familial.

Par un jugement n° 1907462 du 10 janvier 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.


Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 février 2020 sous le n°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé contre une décision des autorités consulaires françaises à Kinshasa refusant de délivrer un visa de long séjour en France à l'enfant G... H... au titre du regroupement familial.

Par un jugement n° 1907462 du 10 janvier 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 février 2020 sous le n°20NT00661, M. B..., agissant au nom de G... H..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 10 janvier 2020 ;

2°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer un visa d'entrée et de long séjour à l'enfant G... H... dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 75-1 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le tribunal a commis une erreur de fait en regardant sa requête comme dirigée contre une décision consulaire en date du 29 novembre 2018 alors qu'il conteste l'existence d'une décision explicite du consulat ;

- il n'est pas établi que les documents d'état civil produits pour justifier du lien de filiation étaient frauduleux ; l'anomalie liée à la transcription à deux reprises d'un même jugement supplétif, dont l'inauthenticité n'est pas démontrée, n'est pas de nature à établir le caractère irrégulier des actes ;

- la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 août 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la Cour a désigné Mme C..., présidente assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Pérez, président de la 2ème chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant congolais né le 2 mars 1988, a formulé une demande de regroupement familial en faveur de son fils allégué G... H..., né le 11 novembre 2005. Par une décision du 1er octobre 2018, le préfet du Rhône a autorisé le regroupement sollicité. Le 29 novembre 2018 une demande de visa est déposée pour l'enfant auprès des autorités consulaires françaises à Kinshasa. Une décision implicite de rejet nait du silence gardé par l'autorité consulaire pendant plus de deux mois. Le recours formé contre cette décision par M. B... devant la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France, réceptionné le 15 avril 2019, a été implicitement rejeté. M. B... a saisi le tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à l'annulation de cette décision. Par un jugement n° 1907462 du 10 janvier 2020, le tribunal a rejeté sa demande. M. B..., agissant au nom de l'enfant mineur G..., demande à la cour d'annuler ce jugement et la décision en litige.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Il ressort des écritures du ministre de l'intérieur que le refus de visa est fondé sur le caractère apocryphe des actes d'état civil produits et l'absence d'éléments de possession d'état.

3. Ont été produits, à l'appui de la demande de visa, deux actes de naissance référencé pour le premier " Volet 00533, n°394/017, volume V, Folio n° DXXXlH ", transcrit le 22 mars 2017, indiquant une naissance de l'enfant au 10 novembre 2005 et, pour le second, " Volet 0142, n°1966/18, Volume IV, Folio n° CXUI ", transcrit le 6 octobre 2018, indiquant une date de naissance de l'enfant au 11 novembre 2005. Puis, pour justifier de son lien familial avec l'enfant G... H... M. B... a versé aux débats un jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance du tribunal pour enfants K... démocratique du Congo), n° RC. 2525 du 31 janvier 2017 qui fait état de la naissance le 11 novembre 2005 de G... H... de l'union de M. B... H... et Mme F... D.... Il ressort des pièces du dossier que les actes n°394/017 et n°1966/18 ci-dessus mentionnés ont tous deux été transcrits à la suite du jugement supplétif du 31 janvier 2017.

4. Il n'appartient pas aux autorités administratives françaises, hormis les cas de fraude, de mettre en doute le bien-fondé d'une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère.

5. Pour remettre en cause la validité de ce jugement, le ministre de l'intérieur fait valoir qu'il a été rendu à la demande non des parents de G... H... mais de Mme J..., tante paternelle de l'enfant, chez qui il serait hébergé, sans toutefois préciser quelles dispositions du droit civil congolais auraient été méconnues sur ce point, que cette déclaration de naissance a été effectuée opportunément après l'obtention par M. B... de son titre de séjour et qu'aucun élément ne démontre de liens entre l'enfant et le regroupant. Toutefois ces seuls éléments ne permettent pas d'établir le caractère frauduleux du jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance. Ce jugement doit être regardé comme établissant le lien de filiation avec M. B....

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction, sous astreinte :

7. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique nécessairement, sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, la délivrance à G... H... d'un visa d'entrée et de long séjour en France. Il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros à M. B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 10 janvier 2020 et la décision par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé contre la décision refusant un visa de long séjour à G... H... sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à l'enfant G... H... un visa d'entrée et de long séjour en France dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 200 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... B... et ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

- Mme C..., présidente,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

- Mme Bougrine, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 novembre 2020.

L'assesseur le plus ancien,

M. I...

Le rapporteur,

H. C...

Le greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT00661


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT00661
Date de la décision : 27/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DOUET
Rapporteur ?: Mme Hélène DOUET
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SELARL BS2A BESCOU et SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-11-27;20nt00661 ?
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