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27/11/2020 | FRANCE | N°19NT02143

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 27 novembre 2020, 19NT02143


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme X... AH... et autres ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 3 mars 2017 par lequel le préfet de la Manche a délivré à l'EURL Monteole un permis de construire un parc éolien composé de trois éoliennes et d'un poste de livraison sur le territoire de la commune de Montabot, ainsi que la décision implicite rejetant leur recours gracieux.

Par un jugement avant dire droit n°1701559 du 4 avril 2019, le tribunal administratif de Caen, après avoir écarté les autres moye

ns de leur demande, a décidé, sur le fondement des dispositions de l'article L. 600...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme X... AH... et autres ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 3 mars 2017 par lequel le préfet de la Manche a délivré à l'EURL Monteole un permis de construire un parc éolien composé de trois éoliennes et d'un poste de livraison sur le territoire de la commune de Montabot, ainsi que la décision implicite rejetant leur recours gracieux.

Par un jugement avant dire droit n°1701559 du 4 avril 2019, le tribunal administratif de Caen, après avoir écarté les autres moyens de leur demande, a décidé, sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, de sursoir à statuer sur les conclusions à fin d'annulation afin de permettre la délivrance d'un permis de construire venant régulariser les vices tirés du défaut de consultation du conseil municipal de Gouvets et de l'insuffisance du document graphique présenté à l'appui de la demande de permis de construire.

Par un jugement n° n°1701559 du 18 septembre 2019, le tribunal administratif de Caen, après avoir constaté que les vices affectant l'arrêté du 3 mars 2017 avaient été régularisés par le permis de construire de régularisation du 4 juin 2019, a rejeté la demande de Mme X... AH... et des autres requérants.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 5 juin 2019 sous le n°19NT02143 et un mémoire enregistré le 11 février 2020, M. et Mme AG... T..., M. Z... AQ..., Mme X... AH..., M. N... L..., Mme AO... L..., M. et Mme D... T..., M. AL... AE..., M. AB... AN..., Mme AC... S..., M. et Mme Y... I..., M. AI... L..., Mme M... L..., M. V... U..., Mme Q... U..., M. et Mme J... B..., M. AA... AJ..., Mme P... AJ..., M. W... AD..., Mme AM... G..., M. H... K... et M. AS... O..., représentés par Me Bouthors-Neveu, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement avant dire droit du tribunal administratif de Caen du 4 avril 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Manche du 3 mars 2017 et sa décision implicite rejetant leur recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de l'EURL Monteole la somme globale de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- leur requête est recevable dès lors qu'ils ont justifié de leur propriété et de leur domicile ainsi que disposer, chacun, d'un intérêt à agir ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, les vices dont le permis de construire contesté est entaché ne peuvent donner lieu à régularisation sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et viole les dispositions de l'article 15 de l'ordonnance n°2017-80 dès lors qu'il vaut autorisation environnementale ; ces vices ne sont, en tout état de cause, pas régularisables ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a écarté les autres moyens de leur demande tirés de la méconnaissance de l'article L. 181-3 du code de l'environnement ainsi que des articles R. 431-10, R. 423-56-1, R. 111-2, R. 111-26, R. 111-27 et R. 111-14 du code de l'urbanisme ; dès lors que le permis de construire méconnaît ces articles, il ne peut être régularisé par un permis de construire modificatif.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2019, l'EURL Monteole, représentée par M. C... E..., par la SELARL Juris'VoxA, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme globale de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors que les requérants n'établissent pas leur intérêt à agir.

- aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2020, le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions de la requête dirigées contre le jugement attaqué en tant qu'il met en oeuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme sont privées d'objet du fait de l'intervention du permis de construire régularisant les vices retenus par le tribunal administratif ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

II. Par une requête enregistrée le 19 novembre 2019 sous le n°19NT04460 et un mémoire enregistré le 11 février 2020, M. et Mme AG... T..., M. N... L..., Mme AO... L..., M. AL... AE..., M. AB... AN..., Mme AC... S..., M. Y... I..., Mme AK... I..., M. AI... L..., Mme M... L..., M. V... U..., Mme Q... U..., M. J... B..., Mme AF... B..., M. AA... AJ..., Mme P... AJ..., M. W... AD..., Mme AM... G..., M. H... K... et M. R... O..., représentés par Me Bouthors-Neveu, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 18 septembre 2019 ;

2°) d'annuler les arrêtés du préfet de la Manche des 3 mars 2017 et 4 juin 2019 et sa décision implicite rejetant leur recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de l'EURL Monteole la somme globale de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- leur requête est recevable dès lors qu'ils ont justifié de leur propriété et de leur domicile ainsi que disposer, chacun, d'un intérêt à agir ;

- le jugement attaqué méconnaît les dispositions de l'article 15 de l'ordonnance n°2017-80 modifiée dès lors que le permis de construire initial constituant une l'autorisation environnementale ne pouvait être régularisé par un permis de construire modificatif ; il méconnaît les dispositions de l'article L. 181-3 du code de l'environnement dès lors que les irrégularités précédemment opposées portent atteinte aux intérêts visés à l'article L. 511-1 du même code ;

- les vices retenus par le tribunal administratif dans son jugement avant dire droit du 4 avril 2019 n'ont pas été régularisés par le permis de construire modificatif du 4 juin 2019 dès lors que le défaut de consultation du conseil municipal de Gouvets entachait le permis de construire initial d'un vice substantiel nécessitant de reprendre dans son intégralité la procédure et que les photomontages produits sont entachés d'insuffisance ne permettant pas de régulariser le second vice retenu par le tribunal alors qu'en tout état de cause, une régularisation ne serait possible que par la délivrance d'une autorisation environnementale modificative soumise aux règles de procédure des articles L. 181-1 et R. 181-1 et suivants du code de l'environnement ;

- le permis de construire méconnaît les dispositions de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme dès lors que n'était pas joint à la demande de permis de construire l'avis de l'autorité environnementale ;

- alors que l'étude acoustique est insuffisante, le permis méconnaît les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dès lors que l'émergence sonore dépassera les limites réglementaires ;

- il méconnaît les dispositions de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme compte tenu des atteintes portées aux chiroptères ;

- il méconnaît les dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme eu égard aux atteintes portées à l'intérêt paysager des lieux ;

- il viole les dispositions de l'article R. 111-14 du code de l'urbanisme dès lors que le projet est situé dans une zone agricole sans qu'il y ait eu une contractualisation des conditions d'implantation des éoliennes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 février 2020, l'EURL Monteole, représentée par M. C... E..., par la SELARL Juris'VoxA, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme globale de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors que les requérants n'établissent pas leur intérêt à agir.

- aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2020, le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

Une note en délibéré, présentée pour M. et Mme T... et autres a été enregistrée le 10 novembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'ordonnance n°2017-80 du 26 janvier 2017 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. L'hirondel,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- et les observations de Me Bouthors-Neveu, représentant M. et Mme T..., représentants uniques des requérants.

Considérant ce qui suit :

1. L'EURL Monteole a présenté, le 31 juillet 2014, une demande de permis de construire pour l'édification, sur le territoire de la commune de Montabot (50), d'un parc éolien composé de trois éoliennes et d'un poste de livraison. Par un arrêté du 3 mars 2017, le préfet de la Manche a délivré à la pétitionnaire le permis de construire sollicité. M. et Mme T... et autres requérants ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler cet arrêté. Par un jugement avant dire droit du 4 avril 2019, le tribunal, après avoir écarté comme non fondés les autres moyens de la demande, a, sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sursis à statuer sur les conclusions à fin d'annulation jusqu'à la régularisation des vices tirés, d'une part, du défaut de consultation du conseil municipal de Gouvets et, d'autre part, de l'insuffisance du document graphique contenu dans la demande de permis de construire. Par un arrêté du 4 juin 2019, le préfet de la Manche a délivré à l'EURL Monteole un permis de construire modificatif en vue de régulariser le permis de construire du 3 mars 2017. Par un jugement du 18 septembre 2019, le tribunal administratif de Caen, prenant acte de cette régularisation, a rejeté la demande tendant à l'annulation du permis de construire du 3 mars 2017. M. et Mme T... et autres requérants relèvent appel de ces deux jugements.

2. Les deux requêtes sont relatives au même permis de construire et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre et de statuer par le même arrêt.

Sur les conclusions dirigée contre le jugement avant dire droit du 4 avril 2019 :

En ce qui concerne la mise en oeuvre l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

3. Lorsqu'un tribunal administratif, après avoir écarté comme non fondés des moyens de la requête, a cependant retenu l'existence d'un vice entachant la légalité d'un permis de construire dont l'annulation lui était demandée et a alors décidé de surseoir à statuer en faisant usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour inviter l'administration à régulariser ce vice, l'auteur du recours formé contre ce jugement avant dire droit peut contester le jugement en tant qu'il a écarté comme non-fondés les moyens dirigés contre le permis de construire initial et également en tant qu'il a fait application de ces dispositions de l'article L 600-5-1. Toutefois, à compter du jugement rejetant le recours dirigé contre le permis de construire, après avoir constaté que le vice avait été régularisé, les conclusions dirigées contre le jugement avant dire droit en tant qu'il met en oeuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme sont privées d'objet.

4. Dès lors qu'un permis modificatif a été délivré, le 4 juin 2019, postérieurement à l'introduction de la requête, et que le tribunal administratif de Caen a, par jugement du 18 septembre 2019, rejeté la demande dirigée contre le permis de construire, il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n°19NT02143 dirigées contre le jugement avant dire droit du 4 avril 2019 en tant que ce jugement met en oeuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :

5. Il ressort des pièces du dossier que les requérants ont justifié être propriétaires ou locataires de maisons situées soit sur la commune de Montabot, soit sur celle de Gouvets, toutes situées au nord du terrain d'assiette du projet, d'où le parc sera le plus visible. En outre, celles de M. H... K..., de M. AL... AE..., de M. AB... AN... et Mme AC... S..., de M. Z... AQ..., de M. et Mme AG... T..., de M. et Mme N... L... et de M. et Mme J... B... sont situées à des endroits de prise du son pour la réalisation de l'étude acoustique, endroits qui ont été choisis pour être les plus susceptibles de subir des nuisances sonores. Par suite, les intéressés justifient d'un intérêt à agir suffisant pour contester le permis de construire en litige. Il suit de là que la fin de non-recevoir opposée à la demande de 1ère instance et tirée du défaut d'intérêt à agir des requérants doit être écartée.

En ce qui concerne les conclusions dirigées contre le jugement avant dire droit en tant qu'il écarte les moyens dirigés contre l'autorisation initiale d'urbanisme :

S'agissant de la composition du dossier de demande de permis de construire :

6. Aux termes de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas : / a) L'étude d'impact ou la décision de l'autorité environnementale dispensant le projet d'évaluation environnementale lorsque le projet relève du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement. L'autorité compétente pour délivrer l'autorisation d'urbanisme vérifie que le projet qui lui est soumis est conforme aux mesures et caractéristiques qui ont justifié la décision de l'autorité environnementale de ne pas le soumettre à évaluation environnementale ; (...) ". Selon le tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement et s'agissant des parcs éoliens, sont soumis à évaluation environnementale, ceux mentionnés par la rubrique 2980 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement, et soumis à examen au cas par cas, ceux soumis à enregistrement. La rubrique 2980 soumet à autorisation les installations terrestres de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent et regroupant un ou plusieurs aérogénérateurs, d'une part, celles comprenant au moins un aérogénérateur dont le mât à une hauteur supérieure ou égale à 50 mètres et, d'autre part, celles comprenant uniquement des aérogénérateurs dont le mât à une hauteur inférieure à 50 mètres et au moins un aérogénérateur dont le mât à une hauteur maximale supérieure ou égale à 12 mètres pour une puissance totale installée supérieure ou égale à 20 MW. Dans cette seconde hypothèse, si la puissance totale est inférieure à 20 MW, l'installation est soumise à la procédure de déclaration.

7. En l'espèce, le parc éolien contesté, qui comprend trois éoliennes d'une hauteur de mât de 49,5 mètres pour une puissance totale de 2,4 MW, est soumis, en vertu des dispositions précitées, au régime de la déclaration. Par suite, n'étant soumis ni à autorisation, ni à enregistrement, le projet n'avait pas à faire l'objet d'une évaluation environnementale, ni d'un examen au cas par cas. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme faute pour la demande de permis de construire de contenir la décision de l'autorité environnementale prévue par les dispositions de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme ne peut être qu'écarté.

S'agissant de l'atteinte portée par le projet à la sécurité publique :

8. D'une part, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé (...) ". Aux termes de l'article L.512-8 du même code dans sa rédaction alors applicable : " Sont soumises à déclaration les installations qui, ne présentant pas de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1, doivent néanmoins respecter les prescriptions générales édictées par le préfet en vue d'assurer dans le département la protection des intérêts visés à l'article L. 511-1. " Aux termes de l'article L. 512-15 du code de l'environnement dans sa rédaction alors applicable : " L'exploitant est tenu d'adresser sa demande d'autorisation ou d'enregistrement, ou sa déclaration en même temps que sa demande de permis de construire. (...) ". La production de la justification de la demande de permis de construire a pour objet d'assurer la coordination de la procédure d'instruction de ce permis et de l'autorisation d'installation classée

9. D'autre part, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". Pour l'application de ces dernières dispositions, il n'appartient pas à l'autorité administrative d'assortir le permis de construire délivré pour une installation classée de prescriptions relatives à son exploitation et aux nuisances qu'elle est susceptible d'occasionner. Il lui incombe, en revanche, le cas échéant, de tenir compte des prescriptions édictées au titre de la police des installations classées ou susceptibles de l'être.

10. Si les requérants allèguent que les éoliennes sont susceptibles d'apporter une gêne aux riverains en raison de nuisances sonores, ils n'établissent pas, ni même n'allèguent que ces nuisances seraient d'une particulière intensité pour porter atteinte à la sécurité publique au sens des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, ni que ces gênes trouveraient leur cause du fait de l'implantation des éoliennes autorisée par le permis de construire contesté sur le fondement des dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation du sol, lequel n'a pas pour objet d'autoriser leur exploitation.

11. Au surplus, si les requérants soutiennent que l'étude acoustique réalisée en mars 2016 était insuffisante pour avoir fait l'objet de trois avis défavorables de l'agence régionale de santé en date des 21 juin 2016, 12 août 2016 et 3 novembre 2016, ces avis étaient motivés non pas pour des raisons de fond mais seulement du fait de données insuffisantes et erronées contenues dans l'étude en ce qui concerne les distances d'éloignement entre les éoliennes et les secteurs habités. Une étude acoustique complémentaire a alors été réalisée en novembre 2016 afin de préciser le choix des points de mesure et identifier les lieux d'habitation les plus proches du projet qui font l'objet du calcul de l'impact sonore en reprenant les distances d'éloignement vis-à-vis des trois éoliennes projetées. En particulier, des relevés ont été effectués au lieu-dit " Le Chêne Guérin " qui est également très impacté par les bruits des exploitations agricoles. Si aucune mesure n'a été effectuée au lieu-dit " Le vieux Presbytère ", l'étude justifie ce choix, notamment par les courbes de niveaux, au motif que s'il s'agit d'un lieu isolé situé au milieu d'arbres et relativement protégé du site, préférant alors effectuer des mesures au lieu-dit " le Hamel T... ". Il ne ressort pas, par ailleurs, des pièces du dossier, que les résultats enregistrés au lieu-dit " Le Rambu " seraient tronqués dès lors que, si les mesures ont été prises au sein d'une ferme, le sonomètre est orienté, ainsi qu'il résulte des photographies, vers le site projeté et un espace ouvert. Quant au lieu-dit " L'Antillère ", si l'étude note effectivement qu'avant travaux, l'émergence la plus importante est constatée avec un vent de 6 m/s pour un dépassement de 63 Hz, elle précise toutefois que l'émergence globale reste néanmoins conforme et que l'influence des trois éoliennes est faible sur le niveau sonore existant, le niveau de bruit avec un vent d'ouest de 6m/s étant de 37.3 dBA soit une émergence de 1.3 dBA. C'est dans ces conditions que, suite à cette dernière étude, l'agence régionale de santé a émis un avis favorable en soulignant notamment que " les résultats montrent que, en décibels A, en période de nuit où l'émergence admise est la plus faible et où les bruits de l'environnement sont généralement moins importants, aucun dépassement d'émergence ne devrait être constaté. Une émergence spectrale serait susceptible d'apparaître aux lieux-dits l'Antillère, le Hamel T... et le Vieux Presbytère mais des mesures correctives sont envisagées pour y remédier ". La circonstance que l'étude mentionne l'absence, chez la population locale, de réticences particulières envers le parc éolien est sans incidence sur ses modalités de réalisation et sur ses résultats. Si enfin, elle a été réalisée avant la mise en service du parc éolien de Montbray Margueray distant d'un kilomètre du site, les requérants n'établissent pas en quoi cette circonstance eût été de nature à modifier les résultats de l'étude acoustique portant sur le calcul de l'émergence sonore. En tout état de cause, le permis de construire contesté comporte, en son article 3, une prescription tenant à la réalisation de mesures acoustiques après la mise en fonctionnement du parc et portant obligation, si besoin, de définir et de mettre en oeuvre les mesures correctives nécessaires afin de respecter la réglementation en vigueur dont les requérants n'établissent pas qu'elle ne permettrait pas d'assurer le respect des seuils réglementaires.

12. Par suite les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les nuisances sonores provoquées par le fonctionnement des éoliennes n'auraient pu être appréciées de manière pertinente, qu'elles seraient de nature à créer un risque pour la santé des riverains et que le permis litigieux serait ainsi entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

S'agissant des atteintes portées par le projet à l'environnement :

13. Aux termes de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme : " Le permis ou la décision prise sur la déclaration préalable doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. Ces prescriptions spéciales tiennent compte, le cas échéant, des mesures mentionnées à l'article R. 181-43 du code de l'environnement. ".

14. Si les requérants allèguent que le projet est de nature à porter à la préservation des chiroptères, ce risque résulte, non de l'installation des machines au regard de leur configuration et du respect des règles tenant à l'utilisation du sol, mais de leurs conditions d'exploitation. Dans ces conditions, et pour le même motif que celui énoncé aux points 9 et 10, le moyen ne peut être qu'écarté. En tout état de cause, et alors que l'étude chiroptérologique a été produite, les requérants, en se bornant à faire valoir que le projet, qui devait initialement comporter cinq machines, a été amputé de deux, en raison de l'atteinte portée à ces mammifères, n'établissent pas en quoi cette atteinte perdurerait avec le projet autorisé par le permis de construire contesté, qui ne comporte plus que trois éoliennes.

S'agissant des atteintes portées par le projet aux intérêts mentionnés à l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme :

15. Aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ". Il résulte de ces dispositions que si les constructions projetées portent atteinte aux paysages naturels avoisinants, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site. Les dispositions de cet article excluent qu'il soit procédé dans le second temps du raisonnement, pour apprécier la légalité des permis de construire délivrés, à une balance d'intérêts divers en présence, autres que ceux visés à l'article R. 111-21 cité ci-dessus.

16. Le projet litigieux consiste en l'implantation, à une altitude de 233 mètres, de trois éoliennes d'une hauteur de 79 mètres en bout de pale et d'un poste de livraison sur le territoire de la commune de Montabot. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'étude paysagère initiale et de celle réalisée en mars 2019, que ce parc éolien s'insérera dans un paysage au relief très marqué par la présence de collines et de crêtes et dans un vaste tènement bocager caractérisé par un paysage agraire mixte avec des prairies servant à l'élevage et des champs dédiés aux grandes cultures. La commune de Montabot est par ailleurs située au carrefour de plusieurs espaces naturels sensibles et s'ouvre sur deux unités paysagères bien distinctes : une unité paysagère ouverte sur la vallée de la Vire au Nord et une unité paysagère constituée de petits plateaux et de vallées au Sud. Il résulte de ces études que les vues donnant sur le parc éolien projeté sont, au nord, soit " en balcon ", lorsqu'elles sont à flanc de coteau, soit " dominante " en partie sommitale du Mont Robin. Selon les photographies et photomontages réalisés, les vues sur le parc éolien y sont toutefois lointaines n'entraînant pas d'impact significatif sur le paysage. Il en est de même des vues se rapportant au chemin de randonnée " Sur les traces des fondeurs de cloches " situé sur une crête, qui, selon l'étude, présente des qualités paysagères indéniables. Les vues, à partir du sud, de l'est et de l'ouest du projet, sont très souvent filtrées par les haies bocagères et les boisements, même aux points les plus hauts, ce qui permet de réduire en partie ou totalement, selon les points de vue, l'impact visuel des éoliennes. Quant aux vues à partir du site, elles s'ouvrent sur un paysage vallonné ou agraire et la covisibilité avec le tissu urbain est rare même s'il est possible de distinguer le lieu-dit " Le chêne Guérin ". Le bourg de Montabot, situé en fond de vallée, reste épargné des vues directes. Il résulte de ce qui précède que, malgré l'intérêt du paysage bocager que peut présenter le site, l'impact du parc éolien, qui est au demeurant d'une taille relativement modeste eu égard au nombre de machines devant être installées et à leur hauteur, reste limité. Les pièces versées par les requérants, notamment les photographies et les vidéos ne sont pas de nature à établir le caractère erroné de l'étude paysagère et les atteintes portées aux paysages. En particulier, elles n'établissent pas que la covisibilité avec le parc éolien du Parc de Montbray - Margueray, situé à un kilomètre du projet et composé de dix machines implantées en deux lignes quasi parallèles avec une orientation principale Nord-est / Sud-ouest, créerait le risque de saturation du paysage allégué par les requérants, ce qui ne résulte, au demeurant pas, des photomontages de l'étude complémentaire. Par ailleurs, compte-tenu de la distance séparant le terrain d'assiette du projet des sites Natura 2000 du " Bassin de l'Airou ", à 18,7 km à l'Ouest et du " Bassin de la Souleuvre ", à 16,8 km au Nord-Est, lesquels sont, en outre, classés, à ce titre, en raison de la présence d'espèces aquatiques et de la nécessité de protéger la ressource en eau, le projet en litige n'est pas de nature à porter atteinte à ces sites. Les requérants n'établissent pas l'intérêt présenté par le bois de la Bruyère Castel, ni l'atteinte qui lui serait portée, alors même que, selon l'étude, il présente un grand intérêt pour les marcheurs. Il suit de là qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu des nombreuses coupures formées par le relief et la végétation limitant l'impact visuel, que les éoliennes en cause présenteraient une visibilité significative sur le paysage. Par suite, l'appréciation à laquelle s'est livré le préfet de la Manche pour accorder le permis contesté n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme.

S'agissant des atteintes portées à l'activité agricole :

17. Si les requérants soutiennent, que l'implantation du projet éolien dans une zone agricole et sur des terres exploitées méconnaissent les dispositions de l'article R. 111-14 du code de l''urbanisme, en l'absence de toute contractualisation sur ses conditions d'implantation, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 19 de leur jugement avant dire droit du 4 avril 2019.

18. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du jugement avant dire droit du 4 avril 2019 en tant qu'il écarte comme non fondés les moyens présentés à l'encontre du permis initial.

Sur les conclusions dirigées contre le jugement du 18 septembre 2019 mettant fin à l'instance en rejetant la demande des requérants :

19. Lorsque le juge a fait usage de la faculté de surseoir à statuer ouverte par l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, qu'un permis modificatif a été délivré et que le juge a mis fin à l'instance par un second jugement, l'auteur d'un recours contre ce jugement peut contester la légalité du permis de construire modificatif par des moyens propres et au motif que le permis initial n'était pas régularisable.

En ce qui concerne les moyens relatifs à la procédure applicable à la délivrance du permis de régularisation :

20. D'une part, aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 modifiée relative à l'autorisation environnementale : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : / 1° Les autorisations délivrées au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement dans leur rédaction antérieure à la présente ordonnance, ou au titre de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014, avant le 1er mars 2017, ainsi que les permis de construire en cours de validité à cette même date autorisant les projets d'installation d'éoliennes terrestres sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont contrôlées, modifiées, abrogées, retirées, renouvelées, transférées, contestées ou lorsque le projet autorisé est définitivement arrêté et nécessite une remise en état ; / 2° Les demandes d'autorisation au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, ou de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable ; (...) ". Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".

21. D'autre part, l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme permet au juge, lorsqu'il constate qu'un vice entachant la légalité du permis de construire peut être régularisé par un permis modificatif, de rendre un jugement avant dire droit par lequel il fixe un délai pour cette régularisation et sursoit à statuer sur le recours dont il est saisi. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation. Un vice de procédure, dont l'existence et la consistance sont appréciées au regard des règles applicables à la date de la décision litigieuse, doit en principe être réparé selon les modalités prévues à cette même date. S'agissant des vices entachant le bien-fondé du permis de construire, le juge doit se prononcer sur leur caractère régularisable au regard des dispositions en vigueur à la date à laquelle il statue et constater, le cas échéant, qu'au regard de ces dispositions, le permis ne présente plus les vices dont il était entaché à la date de son édiction. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial.

22. Il ressort des pièces du dossier que le permis de construire contesté du 3 mars 2017 répond à une demande déposée par l'EURL Monteole le 4 mars 2016. Par suite, et alors même qu'en application de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017, ce permis de construire doit désormais être regardé comme une autorisation environnementale, il a été régulièrement instruit et délivré, compte tenu de la date du dépôt de la demande, selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 26 janvier 2017 soit, en l'espèce, selon celles relatives à l'utilisation du sol. En l'espèce, le permis de régularisation en date du 4 juin 2019 auquel renvoie l'article L.600-5-1 du code de l'urbanisme a, pour sa part, pour seul objet d'effacer les vices du permis initial tenant à une insuffisance du dossier de demande de permis et à une formalité qui a été omise tant que le permis initial n'est pas devenu définitif. Par suite, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, la régularisation devait intervenir par la délivrance d'un permis de construire instruit et délivré selon les mêmes formes et procédure que le permis de construire initial. Il suit de là que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le permis de régularisation délivré le 4 juin 2019 à la suite de la mise en oeuvre par les premiers juges des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ne serait pas de nature à purger les vices retenus dans le jugement avant dire droit. Par voie de conséquence, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 181-3 du code de l'environnement, applicables à la délivrance des autorisations environnementales, doit être écarté comme inopérant.

En ce qui concerne le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude paysagère figurant dans le dossier de la demande :

23. Selon l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; / c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; / d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; / e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; / f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. ". selon l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : / a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; / b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. ".

24. Si la régularité de la procédure d'instruction du permis de construire requiert la production par le pétitionnaire de l'ensemble des documents exigés par les dispositions des articles R. 431-4 et suivants du code de l'urbanisme, le caractère insuffisant de l'un de ces documents au regard de ces dispositions ne constitue pas nécessairement une irrégularité de nature à entacher la légalité de l'autorisation si l'autorité compétente est en mesure, grâce aux autres pièces produites, d'apprécier l'ensemble des critères énumérés par les dispositions précitées.

25. Il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire initial déposée par l'EURL Monteole comprenait notamment l'étude paysagère qui avait été réalisée par le cabinet " Parcoret, paysage et urbanisme " dans le cadre de l'instruction du dossier déposé au titre de la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement. Ce document, qui comprend près de 125 pages, décrit le site dans lequel doit s'inscrire le projet, notamment en ce qui concerne le milieu naturel, les caractéristiques paysagères, patrimoniales, architecturales et culturelles. Les interactions du projet avec les parcs éoliens de Montbray et Margueray à l'échelle du grand paysage sont également précisées. Le fonctionnement et la perception du parc éolien sur les paysages sont justifiés aux pages 41 et suivantes de cette étude. Les commentaires sont illustrés par des cartes et de nombreuses photographies. Si les documents graphiques comportaient, toutefois, une insuffisance quant à la représentation des éoliennes dans le paysage, cette lacune a été comblée par le dépôt, dans le cadre de la demande du permis de régularisation, d'une étude paysagère complémentaire réalisée en mars 2019 qui est composée de photomontages sur lesquels la représentation des éoliennes est suffisante pour permettre à l'autorité administrative apprécier correctement l'atteinte susceptible d'être portée au paysage et aux lieux environnants. Par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions c) et d) de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme doit, en raison de la régularisation intervenue, être écarté comme inopérant.

En ce qui concerne le moyen relatif au défaut de consultation de la commune de Gouvets :

26. Aux termes de l'article R.423-56-1 du code de l'urbanisme : " Dans le cas d'un projet éolien soumis à permis de construire, l'autorité compétente recueille, conformément aux dispositions prévues au XI de l'article 90 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, l'avis des communes et des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de plan local d'urbanisme ou d'autorisations d'urbanisme limitrophes de l'unité foncière d'implantation du projet. "

27. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, le vice tiré du défaut de consultation de la commune de Gouvets présentait, ainsi que l'on considéré à bon droit les premiers juges au point 27 de leur jugement du 4 avril 2019, un caractère régularisable au sens des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, alors même que ce vice a été susceptible, en l'espèce, d'exercer une influence sur le sens de la décision contestée.

28. Il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'en a justifié l'EURL Monteole après le jugement avant dire droit du 4 avril 2019, que la commune de Gouvets a été consultée et que son conseil municipal a émis, par une délibération du 22 mars 2019, un avis défavorable au projet. Le préfet de la Manche, après avoir eu connaissance de cet avis, alors même qu'il a été défavorable, a confirmé sa décision initiale en délivrant le permis de régularisation, lequel a ainsi été de nature à purger le vice dont était atteint le permis de construire initial. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions, citées au point précédent, de l'article R. 423-56-1 du code de l'urbanisme, doit être écarté comme inopérant.

29. Il résulte de tout ce qui précède, que M. et Mme T... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 18 septembre 2019, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

30. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de M. et Mme T... et autres requérants la somme que l'EURL Monteole demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les dispositions du même article font par ailleurs obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par M. et Mme T... et autres requérants soit mise à la charge de l'Etat et de l'EURL Monteole, qui n'ont pas la qualité de partie perdante.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 19NT02143 tendant à l'annulation du jugement du 4 avril 2019 en tant qu'il a sursis à statuer sur la demande en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête n° 19NT02143 et la requête n° 19NT04460 sont rejetés.

Article 3 : Les conclusions de l'EURL Monteole tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme AG... T..., représentants uniques désignés par Me Bouthors-Neveu, mandataire, au ministre de la Transition écologique et solidaire et à l'EURL Monteole.

Copie en sera adressée pour son information au préfet de la Manche.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Couvert-Castéra, président de la cour,

- Mme Douet, présidente-assesseur,

- M. L'hirondel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 novembre 2020.

Le rapporteur,

M. L'HIRONDELLe président,

O. COUVERT-CASTÉRA

Le greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°s19NT02143,19NT04460


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT02143
Date de la décision : 27/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. COUVERT-CASTERA
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : BOUTHORS-NEVEU

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-11-27;19nt02143 ?
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