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02/10/2020 | FRANCE | N°20NT00103

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 02 octobre 2020, 20NT00103


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes, en premier lieu, d'annuler les décisions du 19 novembre 2019 par lesquelles le préfet de Maine-et-Loire d'une part a décidé son transfert auprès des autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile, et d'autre part, a prononcé son assignation à résidence dans le département de Maine-et-Loire, en deuxième lieu, d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de transmettre sa demande

pour examen à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, et e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes, en premier lieu, d'annuler les décisions du 19 novembre 2019 par lesquelles le préfet de Maine-et-Loire d'une part a décidé son transfert auprès des autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile, et d'autre part, a prononcé son assignation à résidence dans le département de Maine-et-Loire, en deuxième lieu, d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de transmettre sa demande pour examen à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, et en dernier lieu, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à son conseil au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par une ordonnance n° 1913261 du 9 décembre 2019, le vice-président désigné du tribunal administratif de Nantes a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B... à fin d'annulation et d'injonction, et a rejeté ses conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 janvier 2020, Mme F... D... C..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1913261 du 9 décembre 2019 du tribunal administratif de Nantes en tant qu'elle a rejeté la demande fondée sur les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 au titre de la procédure suivie devant le tribunal administratif de Nantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 550 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que depuis 2006 la jurisprudence administrative admet que le non-lieu à statuer ne fait pas obstacle au prononcé d'une condamnation au titre des frais irrépétibles ; l'équité et le droit fondent cette solution dès lors qu'en l'absence de décision illégale, M. B... n'aurait pas engagé de frais de procédure ; en l'espèce, ce n'est qu'en raison de la saisine du tribunal que le préfet a décidé de décider de retirer l'arrêté litigieux qui était entaché au moins d'une insuffisance de motivation ; il lui sera alors versé à ce titre la somme de 1 800 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juin 2020, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que lorsque le juge de première instance prononce un non-lieu à statuer, il n'est pas tenu de condamner l'Etat sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; il n'est pas démontré que des frais particuliers que ne couvriraient pas l'aide juridictionnelle perçue auraient été supportés par le requérante en première instance ; le montant de l'aide juridictionnelle a été réduit de moitié du fait du non-lieu à statuer.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E..., première conseillère,

- les conclusions de M. Besse, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... C... relève appel de l'ordonnance n° 1913261 du 9 décembre 2019 du tribunal administratif de Nantes en tant que, par son article 2, elle a rejeté la demande fondée sur les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et demande à la cour que soit mis à la charge de l'Etat au titre des frais de première instance le versement de la somme de 1 800 euros.

2. Aux termes du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, partielle ou totale, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. / Si l'avocat du bénéficiaire de l'aide recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat. (...) ". L'article 111 du décret du 19 décembre 1991 dispose que : " En cas d'extinction de l'instance pour une autre cause qu'un jugement ou une transaction, le juge peut, sur demande de l'avocat, allouer à celui-ci une rétribution dont il fixe le montant en fonction des diligences accomplies au cours de l'instance et, le cas échéant, des pourparlers transactionnels ayant échoué ou d'une procédure participative n'ayant pas abouti à un accord total, sans qu'il y ait lieu à l'imputation prévue au premier alinéa de l'article 118-8. / Il en est de même, à la demande de l'avocat, en cas de radiation ou de retrait du rôle ou, devant les juridictions administratives, en cas de non-lieu ou de désistement. / Dans tous les cas, le montant de cette rétribution ne peut excéder la moitié de celle fixée par le barème applicable en aide totale sans autre imputation à ce titre ".

3. En cas de non-lieu, qu'il soit prononcé par une ordonnance en application de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ou par un jugement du tribunal administratif, la part contributive de l'État à la rétribution de l'avocat intervenant au titre de l'aide juridictionnelle est calculée conformément aux dispositions du dernier alinéa de l'article 111 du décret du 19 décembre 1991. La somme mise le cas échéant à la charge de l'autre partie non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peut être inférieure au montant de la part contributive de l'État ainsi calculé.

4. Il ressort des pièces du dossier que par l'ordonnance n° 1913261 du 9 décembre 2019, le vice-président désigné du tribunal administratif de Nantes a, d'une part, constaté un non-lieu à statuer sur les conclusions en annulation présentées contre les décisions du préfet de Maine-et-Loire du 19 novembre 2019 portant transfert auprès des autorités italiennes et assignation à résidence de M. B..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale représenté par Me D...-C..., et, d'autre part, a rejeté la demande présentée par cette dernière sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier, notamment de la demande de première instance enregistrée le 3 décembre 2019, que l'avocate de M. B... avait invoqué la confusion de l'arrêté préfectoral du 19 novembre 2019 portant transfert quant au fondement de la responsabilité des autorités italiennes pour examiner la demande d'asile de l'intéressé, dès lors qu'il énonce simultanément qu'il ressort de la consultation du fichier Eurodac que l'intéressé a " déposé une première demande de protection internationale en Italie ", ce qui devrait mener à une décision de reprise en charge sur le fondement de l'article 18.1 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, et que ses empreintes digitales ont été enregistrées en Italie le 16 juillet 2018 sous le numéro " IT 2 RG02HZX ", c'est-à-dire avec un numéro d'enregistrement commençant par 2 qui indique qu'il a simplement franchi irrégulièrement les frontières italiennes mais n'a pas déposé de demande d'asile en Italie et relève donc de la procédure de prise en charge sur le fondement de l'article 13.1 du règlement n° 604/2013. Il ressort enfin des pièces du dossier que postérieurement à cette demande et avant l'audience publique, le préfet de Maine-et-Loire a par un arrêté du 6 décembre 2019 décidé de retirer les arrêtés du 19 novembre 2019 portant transfert auprès des autorités italiennes et assignation à résidence de M. B... en raison de l'" erreur matérielle quant à la mention du fondement de la demande de prise en charge adressée aux autorités italiennes ". Dans ces conditions Mme D... C..., qui établit que ses diligences ont été déterminantes sur le retrait de la décision de transfert initialement contestée et la disparition de l'objet du litige, est fondée à soutenir que c'est à tort que par l'article 2 de l'ordonnance contestée, le tribunal administratif de Nantes a refusé de mettre à la charge de l'Etat une somme en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

5. L'article 27 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique dispose que : " L'avocat qui prête son concours au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle perçoit une rétribution./ L'Etat affecte annuellement à chaque barreau une dotation représentant sa part contributive aux missions d'aide juridictionnelle accomplies par les avocats du barreau. / Le montant de cette dotation résulte, d'une part, du nombre de missions d'aide juridictionnelle accomplies par les avocats du barreau et, d'autre part, du produit d'un coefficient par type de procédure et d'une unité de valeur de référence. /Le montant, hors taxe sur la valeur ajoutée, de l'unité de valeur de référence est fixé, pour les missions dont l'admission à l'aide juridictionnelle est prononcée à compter du 1er janvier 2017, à 32 € ". Par ailleurs, l'article 111 du décret du 19 décembre 1991 dispose que : " Le juge peut, sur demande de l'avocat, allouer à celui-ci une rétribution dont il fixe le montant en fonction des diligences accomplies au cours de l'instance en cas : / (...) 3° De non-lieu ou de désistement devant les juridictions administratives. / Dans tous les cas, le montant de cette rétribution ne peut excéder la moitié de celle fixée par le barème applicable en aide totale sans autre imputation à ce titre ".

6. En vertu de l'article 90 du décret du 19 décembre 1991, la contribution de l'Etat à la rétribution des avocats qui prêtent leur concours au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale est affectée de 14 unités de valeur pour les recours dirigés contre les mesures prises en matière de droit des étrangers. Le montant d'une unité de valeur est fixé depuis les décisions des bureaux d'aide juridictionnelle intervenues postérieurement au 1er janvier 2017 à 32 euros hors taxe. Compte tenu des dispositions de l'article 111 du décret du 19 décembre 1991 qui imposent de réduire au moins de moitié la rétribution accordée à l'avocat en cas de non-lieu à statuer, il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat une somme de 400 euros à verser à Mme D...-C... en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 au titre de l'instance n° 1913261 devant le tribunal administratif de Nantes.

7. Enfin, il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions de Mme D...-C... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre de la présente instance.

DECIDE :

Article 1er : L'article 2 de l'ordonnance n° 1913261 du tribunal administratif de Nantes du 9 décembre 2019 est annulé.

Article 2 : L'Etat versera à Mme D...-C... la somme de 400 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 au titre de l'instance n° 1913261 devant le tribunal administratif de Nantes, sous réserve de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridique.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel de Mme D...-C... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... D... C... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 15 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Rivas, président-assesseur,

- Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique le 2 octobre 2020.

La rapporteure,

M. E...Le président,

L. LAINÉ

La greffière,

V. DESBOUILLONS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT00103


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT00103
Date de la décision : 02/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Marie BERIA-GUILLAUMIE
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : RODRIGUES-DEVESAS

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-10-02;20nt00103 ?
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