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24/01/2020 | FRANCE | N°18NT03573

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 24 janvier 2020, 18NT03573


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 18 août 2017 du directeur du centre hospitalier de Bayeux portant rétrogradation au grade d'agent des services hospitaliers qualifié à compter du 1er septembre 2017.

Par un jugement n° 1701787 du 20 juillet 2018 le tribunal administratif de Caen a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 septembre 2018, le centre hospitalier de Bayeux, représenté par Me C...,

demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 20 juillet 2018 du tribunal administratif d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 18 août 2017 du directeur du centre hospitalier de Bayeux portant rétrogradation au grade d'agent des services hospitaliers qualifié à compter du 1er septembre 2017.

Par un jugement n° 1701787 du 20 juillet 2018 le tribunal administratif de Caen a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 septembre 2018, le centre hospitalier de Bayeux, représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 20 juillet 2018 du tribunal administratif de Caen ;

2°) de rejeter la demande de Mme A... ;

3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif a accueilli à tort le moyen tiré de ce que la sanction de la rétrogradation ne pouvait être légalement infligée à Mme A... ; la sanction litigieuse n'a pas eu pour effet d'évincer Mme A... de son corps d'origine, les agents des services hospitaliers qualifiés et les aides-soignants appartenant au même corps ;

- aucun des moyens invoqués par Mme A... devant le tribunal n'est fondé.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 novembre 2018 Mme A..., représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge du centre hospitalier de Bayeux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif est fondé ;

- l'avis du conseil de discipline est insuffisamment motivé ;

- l'avis du conseil de discipline est irrégulier dès lors que le procès-verbal du conseil de discipline ne comporte pas la mention que son conseil, qui assistait à la séance, a été invité à présenter d'ultimes observations ;

- la procédure suivie devant le conseil a été irrégulière en ce que celui-ci s'est en premier lieu prononcé sur une sanction qui n'était pas celle proposée par le centre hospitalier ;

- le centre hospitalier a insuffisamment informé les membres du conseil sur la sanction finalement infligée ;

- les faits qui lui sont reprochés n'ont pas été présentés de manière conforme à la réalité, aucun témoignage direct n'ayant été produit ;

- son comportement vis-à-vis des patients est exempt de brutalité et de violence volontaire ;

- en l'absence de faits d'une particulière gravité la sanction qui lui a été infligée est excessive ; il n'a pas été tenu compte de sa situation personnelle et de son mal-être récurrent.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n°89-822 du 7 novembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires relevant de la fonction publique hospitalière ;

- le décret n° 2007-1188 du 3 août 2007 portant statut particulier du corps des aides-soignants et des agents des services hospitaliers qualifiés de la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

- et les observations de Me F..., substituant Me D..., représentant Mme A....

Une note en délibéré présentée pour Mme A... a été enregistrée le 10 janvier 2020.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., aide-soignante de classe normale au centre hospitalier de Bayeux, a fait l'objet le 18 août 2017 de la sanction disciplinaire de la rétrogradation au grade d'agent des services hospitaliers qualifié à compter du 1er septembre 2017. Par un jugement du 20 juillet 2018 le tribunal administratif de Caen a annulé cette décision. Le centre hospitalier de Bayeux relève appel de ce jugement.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 81 de la loi du 9 janvier 1986 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Premier groupe : L'avertissement, le blâme ; / Deuxième groupe : La radiation du tableau d'avancement, l'abaissement d'échelon, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ; /Troisième groupe : La rétrogradation, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans ; Quatrième groupe : La mise à la retraite d'office, la révocation. / (...) ". Aux termes de l'article 3 du décret du 3 août 2007 : " Le corps des aides-soignants et des agents des services hospitaliers qualifiés comprend : / 1° Les aides-soignants, les auxiliaires de puériculture, les aides médico-psychologiques et les accompagnants éducatifs et sociaux, spécialité accompagnement de la vie en structure collective ; 2° Les agents des services hospitaliers qualifiés. ". Selon l'article 6 du décret du 3 août 2007 : " Les personnels mentionnés au 1° de l'article 3 sont recrutés : 1° Parmi les élèves aides-soignants qui viennent d'obtenir, au terme de leur scolarité, au titre de l'année au cours de laquelle le recrutement est organisé, l'un des diplômes mentionnés aux articles L. 4391-1et L. 4392-1du code de la santé publique et à l'article D. 451-88 du code de l'action sociale et des familles complété par le certificat de spécialité mentionné au deuxième alinéa du II de l'article D. 451-89 du même code ; 2° Pour 25 % au plus des recrutements effectués dans l'année, parmi les agents des services hospitaliers qualifiés, justifiant d'au moins huit ans d'ancienneté dans le corps, qui ont été admis à suivre, après sélection professionnelle et avis de la commission administrative paritaire compétente, une formation préparant à ces fonctions, qui a été validée ; 3° S'agissant des emplois d'aides-soignants, parmi les personnes ayant satisfait, après 1971, à l'examen de passage de première en deuxième année du diplôme d'Etat d'infirmier ou, après 1979, du diplôme d'infirmier de secteur psychiatrique, et titulaire du diplôme d'Etat d'aide-soignant dans les conditions de l'article 25 de l'arrêté du 22 octobre 2005 relatif à la formation conduisant au diplôme d'aide-soignant ; 4° Dans la limite des emplois qui ne pourront être pourvus au titre des dispositions des 1°, 2° et 3°, par concours sur titres ouverts aux candidats titulaires de l'un des titres mentionnés aux articles L. 4391-2 et L. 4392-2 du code de la santé publique et à l'article D. 451-88 du code de l'action sociale et des familles complété par le certificat de spécialité mentionné au deuxième alinéa du II de l'article D. 451-89 du même code (...) ". Enfin, selon l'article 7 du même décret : " Les élèves aides-soignants sont recrutés :1° Parmi les candidats reconnus aptes à suivre l'enseignement préparatoire à l'un des titres mentionnés au 1° de l'article 6 ;2° A raison de 35 % de l'effectif en formation parmi les agents des services hospitaliers qualifiés réunissant au moins trois ans de fonctions en cette qualité et ayant fait l'objet d'une sélection professionnelle et d'un avis de la commission administrative paritaire compétente ; ce plafond peut, le cas échéant, être dépassé lorsque la procédure prévue au 1° du présent article n'a pas permis de pourvoir 65 % des emplois d'élève aide-soignant. (...) ".

3. Il ressort des dispositions des articles 6 et 7 du décret du 3 août 2007 que les agents de services hospitaliers qualifiés et les aides-soignants appartiennent à un corps unique. Par suite, la rétrogradation de Mme A..., aide-soignante de classe normale au grade d'agent des services hospitaliers qualifié, n'a pas eu pour effet de l'évincer de son corps d'origine, la circonstance que cette dernière ne pourra à nouveau accéder au grade d'aide-soignant que par la voie de l'avancement et non par la voie du recrutement étant à cet égard sans incidence. Ainsi, le centre hospitalier de Bayeux est-il fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Caen a annulé sa décision du 18 août 2017 infligeant à Mme A... la sanction de la rétrogradation comme étant entachée d'erreur de droit.

4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A... devant le tribunal administratif.

5. Aux termes de l'article 6 du décret du 7 novembre 1989 : " (...) Le fonctionnaire et, le cas échéant, son ou ses défenseurs ainsi que l'autorité investie du pouvoir disciplinaire peuvent, à tout moment de la procédure devant le conseil de discipline, demander au président l'autorisation d'intervenir afin de présenter des observations orales. Ils doivent être invités à présenter d'ultimes observations avant que le conseil ne commence à délibérer. ".

6. En soutenant que le procès-verbal de la séance du conseil de discipline qui s'est tenue le 11 juillet 2017 ne comporte aucune mention de ce que, en application de l'article 6 du décret du 7 novembre 1989, son avocat, qu'elle avait chargé de la représenter, a été invité à présenter d'ultimes observations avant que le conseil ne commence à délibérer, Mme A... doit être regardée comme soulevant le moyen tiré de ce que la procédure disciplinaire suivie à son encontre est entachée d'irrégularité. Or, alors qu'aucune mention de cet ordre ne figure au procès-verbal de la séance, lequel fait foi jusqu'à preuve du contraire, le centre hospitalier n'apporte pas plus en appel qu'en première instance d'élément tendant à établir que l'avocat de Mme A... a effectivement été invité à présenter d'ultimes observations avant que le conseil ne délibère. La méconnaissance de cette formalité, prévue par les dispositions précitées de l'article 6 du décret du 7 novembre 1989, en ce qu'elle a privé l'intéressée d'une garantie, a entaché d'une irrégularité substantielle la procédure suivie devant le conseil de discipline et, par suite, entache d'illégalité la sanction disciplinaire finalement prise à l'encontre de Mme A....

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens d'annulation soulevés par Mme A..., que le centre hospitalier de Bayeux n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a annulé la décision du 18 août 2017 portant rétrogradation de Mme A... au grade d'agent des services hospitaliers qualifiés.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse au centre hospitalier de Bayeux la somme que celui-ci réclame au titre des frais exposés par lui non compris dans les dépens. Il y a en revanche lieu de mettre, au même titre, une somme de 1 500 euros à la charge du centre hospitalier au profit de Mme A....

D E C I D E :

Article 1er : La requête du centre hospitalier de Bayeux est rejetée.

Article 2 : Le centre hospitalier de Bayeux versera une somme de 1 500 euros à Mme A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Bayeux et à Mme E... A....

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme H..., présidente-assesseure,

- M. B..., premier conseiller,

- M. Berthon, premier conseiller.

Lu en audience publique le 24 janvier 2020.

Le rapporteur

A. B...La présidente

N. H...

Le greffier

M. G...

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 18NT03573 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT03573
Date de la décision : 24/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TIGER-WINTERHALTER
Rapporteur ?: M. Arnaud MONY
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SELARL HOUDART et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-01-24;18nt03573 ?
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