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12/11/2018 | FRANCE | N°18NT01897

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 12 novembre 2018, 18NT01897


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 28 janvier 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté le recours formé contre la décision prise le 15 octobre 2015 par le préfet de la Haute-Garonne ajournant à deux ans sa demande de naturalisation.

Par un jugement n°1603901 du 16 janvier 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 mai 2018, MmeA..

., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal admini...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 28 janvier 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté le recours formé contre la décision prise le 15 octobre 2015 par le préfet de la Haute-Garonne ajournant à deux ans sa demande de naturalisation.

Par un jugement n°1603901 du 16 janvier 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 mai 2018, MmeA..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 16 janvier 2018 ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa demande et d'y faire droit ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision attaquée est disproportionnée dès lors qu'elle n'a aucune condamnation pénale et son historique, non confirmé par des éléments probants, ne saurait faire obstacle à l'acquisition de la nationalité française ;

- la décision attaquée est insuffisamment motivée et entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 juin 2018, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- il renvoie à ses écritures de première instance qu'il reprend subsidiairement.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 avril 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Picquet.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A...relève appel du jugement du 16 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 28 janvier 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation.

2. En premier lieu, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision litigieuse doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

3. En second lieu, aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " et aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " (...) Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande ". En vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite. Dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ainsi que son degré d'insertion professionnelle.

4. Le ministre de l'intérieur, chargé des naturalisations, a estimé dans sa décision du 28 janvier 2016 que Mme A...n'avait pas réalisé pleinement son insertion professionnelle en France et qu'elle avait fait l'objet d'une procédure de délaissement de mineur de moins de quinze ans le 4 avril 2015, ayant donné lieu à un rappel à la loi. La circonstance que la décision préfectorale mentionnait, à tort, qu'elle était coupable d'un délit de fuite est sans influence sur la légalité de la décision ministérielle attaquée, qui s'y est substituée.

5. D'une part, il est constant que Mme A...s'est rendue coupable de l'infraction mentionnée au point 4 en laissant seul chez elle son enfant de trois ans afin d'aller aider une amie, ce qui a donné lieu à un rappel à la loi.

6. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que, si Mme A...travaille en tant qu'aide ménagère auprès de l'association la Passerelle, les bulletins de salaire produits pour la fin de l'année 2015, dans le cadre de contrats à durée déterminée, font état de revenus très faibles variant entre 32 et 135 euros nets mensuels et il est constant qu'elle perçoit des prestations sociales pour subvenir à ses besoins et ceux de sa famille, reconnaissant elle-même que les pères de ses trois enfants ne participent à leur entretien que de manière très limitée. Si Mme A...se prévaut de sa qualité de mère isolée de trois enfants, une telle circonstance ne fait cependant pas obstacle à elle seule à l'exercice d'une activité professionnelle pérenne de nature à lui procurer une autonomie matérielle. De plus, la requérante ne saurait utilement se prévaloir de la circulaire du ministre de l'intérieur du 16 octobre 2012, dépourvue de portée réglementaire.

7. La circonstance, à la supposer établie, que Mme A...mène une vie normale, loyale aux valeurs de la société française est sans incidence sur la légalité de la décision contestée eu égard au motif qui la fonde.

8. Il suit de là, et alors même que les faits pris en compte, qui n'étaient ni anciens à la date de la décision attaquée, ni dépourvus de gravité, n'auraient pas donné lieu à condamnation pénale, que le ministre chargé des naturalisations, dans le cadre de son large pouvoir d'appréciation de l'opportunité d'accorder la naturalisation, a pu ajourner à deux ans, compte tenu des éléments défavorables recueillis sur l'intéressée et de son absence d'insertion professionnelle réussie depuis son arrivée en France, la demande de naturalisation de MmeA..., sans entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort, que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 19 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Dussuet, président de chambre,

- M. Degommier, président assesseur,

- Mme Picquet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 12 novembre 2018.

Le rapporteur,

P. PICQUET

Le président,

J-P. DUSSUET

Le greffier,

C. POPSE

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°18NT01897


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT01897
Date de la décision : 12/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUSSUET
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : MAINIER-SCHALL

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-11-12;18nt01897 ?
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