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18/05/2017 | FRANCE | N°16NT03436

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 18 mai 2017, 16NT03436


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...C...et Mme A...F...épouse D...ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les arrêtés du 12 février 2016 du préfet de la Loire-Atlantique refusant de leur délivrer un titre de séjour, de renouveler leur attestation de demande d'asile, leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits d'office.

Par un jugement n° 1602797-1602798 du 12 juillet 2016, le tribunal administr

atif de Nantes a, à l'article 1er, annulé les décisions portant refus de titre de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...C...et Mme A...F...épouse D...ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les arrêtés du 12 février 2016 du préfet de la Loire-Atlantique refusant de leur délivrer un titre de séjour, de renouveler leur attestation de demande d'asile, leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits d'office.

Par un jugement n° 1602797-1602798 du 12 juillet 2016, le tribunal administratif de Nantes a, à l'article 1er, annulé les décisions portant refus de titre de séjour, et à l'article 3 rejeté le surplus de leur demande d'annulation.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 octobre 2016 et un mémoire complémentaire enregistré le 23 mars 2017, M. et MmeC..., représentés par MeB..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'article 3 de ce jugement ;

2°) d'annuler les décisions du 12 février 2016 du préfet de la Loire-Atlantique refusant de renouveler leur attestation de demande d'asile, leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant leur pays de renvoi d'office éventuel ;

3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer leur situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Clémenten application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, moyennant la renonciation de ce conseil à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Ils soutiennent que :

- la décision portant refus de renouveler leur attestation de demande d'asile n'a pas été signée par une autorité compétente ; elle méconnaît l'article L. 743-1 et le 4° de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français séjour n'a pas été signée par une autorité compétente ; elle méconnaît l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et le 6° du I de l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ; elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire, enregistré le 20 mars 2017, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens présentés ne sont pas fondés et s'en remet à ses écritures de première instance.

M. et Mme C...ont été admis chacun au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 septembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Delesalle.

1. Considérant que M. E...C...et Mme A...F...épouseD..., de nationalité russe et d'origine daghestanaise, nés respectivement en 1976 et en 1981, sont entrés irrégulièrement en France le 3 avril 2013 ; que leur demande de reconnaissance du statut de réfugié a été rejetée par une décision du 20 juin 2014 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée le 23 décembre 2014 par la Cour nationale du droit d'asile ; que le préfet de la Loire-Atlantique a alors pris à leur encontre, le 23 février 2015, deux arrêtés portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant leur pays de destination ; que les intéressés ayant sollicité, le 16 novembre 2015, le réexamen de leurs demandes d'asile, le préfet leur a délivré des attestations de demande d'asile en application de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, à l'issue d'un examen préliminaire, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a estimé, par deux décisions du 9 décembre 2015, que les demandes de réexamen ne répondaient pas aux conditions prévues par l'article L. 723-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les a rejetées comme irrecevables en application du 3° de l'article L. 723-11 de ce code ; que le préfet a alors estimé que M. et Mme C...se trouvaient dans le cas prévu par le 4° de l'article L. 743-2 et avaient perdu leur droit au maintien sur le territoire français ; que, par deux arrêtés du 12 février 2016, il a alors refusé de renouveler leurs attestations de demande d'asile, a rejeté leur demande de titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits d'office à l'expiration de ce délai ; que M. et Mme C...ont alors saisi le tribunal administratif de Nantes, lequel, après avoir joint leurs demandes, a, par un jugement du 20 juillet 2016, annulé les décisions portant refus de titre de séjour, à l'article 1er, et rejeté le surplus de leurs conclusions à fin d'annulation, à l'article 3 ; que M. et Mme C...relèvent appel de l'article 3 de ce jugement ;

Sur les décisions portant refus de renouvellement des attestations de demande d'asile :

2. Considérant qu'il y a lieu par adoption des motifs retenus par les premiers juges d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent. " ; qu'aux termes de l'article L. 743-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 743-1 (...) le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : / (...) 4° L'étranger n'a introduit une première demande de réexamen, qui a fait l'objet d'une décision d'irrecevabilité par l'office en application du 3° de l'article L. 723-11, qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement (...) " ;

4. Considérant, d'une part, qu'il est constant que les demandes des requérants de réexamen de leurs demandes d'asile ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par deux décisions d'irrecevabilité du 9 décembre 2015 prises en application des dispositions du 3° de l'article L. 723-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que ces demandes ne répondaient pas aux conditions prévues par l'article L. 723-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que si les requérants soutiennent, pour contester le caractère dilatoire de leurs demandes de réexamen, avoir produit des éléments nouveaux, il ressort de la décision de l'Office que celui-ci a estimé que ces éléments nouveaux n'augmentaient " pas de manière significative la probabilité qu'ils justifient des conditions requises pour prétendre à une protection " ; que, d'autre part, des mesures d'éloignement ont été prononcées à l'encontre des requérants avant l'introduction de leur demande de réexamen ; que, dans ces conditions, et en dépit de la circonstance que celle-ci a été présentée onze mois après le rejet des demandes d'asile par la Cour nationale du droit d'asile, M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que le préfet de la Loire-Atlantique a méconnu les articles L. 743-1 et L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant qu'il y a lieu par adoption des motifs retenus par les premiers juges d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI " ; qu'aux termes de l'article L. 511-1 du même code : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) " ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 4 que le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas méconnu le 6° du I de l'article L. 511-1 et l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que les requérants n'entraient pas dans le champ d'application de l'article L. 743-2 du même code ;

8. Considérant qu'à la date de la décision contestée, M. et Mme C...résidaient depuis moins de trois ans en France ; que si trois de leurs quatre enfants étaient scolarisés, respectivement en classes de 3ème, de 6ème et de cours préparatoire, ils ne font état d'aucune autre attache personnelle ou familiale en France ; qu'il n'est pas établi, compte tenu notamment de ce qui sera indiqué au point 10, que la cellule familiale ne pourrait pas se reconstituer en Russie, pays d'où ils sont originaires et où ils ont vécu respectivement jusqu'à l'âge de trente-sept et trente-deux ans ; que, dans ces conditions, les décisions portant obligation de quitter le territoire français n'ont pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur les décisions fixant le pays de destination :

9. Considérant, d'une part, qu'il résulte des points 5 à 8 que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français prises à l'encontre de M. et MmeC... doit être écarté ; que, d'autre part, l'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative que si cette dernière a été prise pour son application ou s'il en constitue la base légale ; que les décisions par lesquelles le préfet a fixé le pays de renvoi de M. et Mme C...n'ont pas été prises pour l'application des décisions portant refus de titre de séjour qui n'en constituent pas la base légale ; que, dès lors le moyen tiré, par voie de l'exception de l'illégalité, des décisions portant refus de titre de séjour, doit être écarté ;

10. Considérant, que M. et Mme C...soutiennent être menacés dans leur pays d'origine par les autorités daghestanaises dans la mesure où celles-ci reprochent au requérant d'avoir apporté de l'aide à des groupes armés wahhabites, d'une part, et par ces groupes qui l'ont contraint à les aider et qui, ayant été l'objet d'opérations des forces de l'ordre, l'accusent de trahison, d'autre part ; que, toutefois, si les requérants, dont les demandes d'asile ont, d'ailleurs, été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile, se prévalent d'un ensemble de documents, ceux-ci, produits en copie et parfois sans cachet officiel, sont dépourvus de garanties suffisantes d'authenticité ou de précisions ; que les attestations produites ont été rédigées en des termes imprécis ou convenus ; que, dans ces conditions, ils ne peuvent être regardés comme apportant des éléments suffisamment probants à l'appui de leurs allégations permettant d'établir qu'ils encourraient, en cas de retour dans leur pays, des risques pour leur vie ou leur liberté ou qu'ils y seraient exposés à des traitements inhumains ou dégradants ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté le surplus de leur demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...C...et Mme A...F...épouse D...et au ministre de l'intérieur.

Une copie sera transmise, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Aubert, président assesseur,

- M. Delesalle, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 mai 2017.

Le rapporteur,

H. DelesalleLe président,

F. Bataille

Le greffier,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT03436


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16NT03436
Date de la décision : 18/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Hubert DELESALLE
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : CLEMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-05-18;16nt03436 ?
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