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04/06/2015 | FRANCE | N°14NT00691

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 04 juin 2015, 14NT00691


Vu la requête, enregistrée le 18 mars 2014, présentée pour M. E... A..., domicilé chez Mme D...A...47 bis rue du docteur Rahuel à Saint-Brieuc (22000), par Me Le Strat, avocat au barreau de Rennes ; M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1302481 du 8 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2013 du préfet des Côtes d'Armor refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays à d

estination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce d...

Vu la requête, enregistrée le 18 mars 2014, présentée pour M. E... A..., domicilé chez Mme D...A...47 bis rue du docteur Rahuel à Saint-Brieuc (22000), par Me Le Strat, avocat au barreau de Rennes ; M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1302481 du 8 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2013 du préfet des Côtes d'Armor refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Côtes d'Armor, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa demande et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle ;

il soutient que :

- sa requête, déposée dans le délai de recours contentieux, est recevable ;

- les premiers juges ont omis de statuer sur les moyens qu'il avait développés sur l'illégalité externe de la décision fixant la République du Congo comme pays de destination ;

- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé et le préfet n'a pas procédé à l'examen complet de sa situation personnelle puisqu'il a omis de prendre en considération la présence de ses parents, réfugiés politiques, sur le territoire français ; le préfet des Côtes d'Armor avait connaissance de ces éléments qu'il avait signalés dans sa demande d'asile ;

- eu égard à la présence en France de ses deux parents, l'arrêté contesté porte une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; contrairement à ce que lui a reproché le préfet des Côtes d'Armor, il ne pouvait bénéficier du regroupement familial puisqu'il était âgé de plus de 18 ans lorsqu'il a retrouvé la trace de ses parents en France ; les éléments du dossier attestent de l'intensité de ses liens avec sa mère qui lui envoyait de l'argent alors qu'il résidait au Maroc ;

- la décision fixant la République du Congo comme pays de destination n'est pas suffisamment motivée au regard des risques qu'il encourrait en retournant dans ce pays ; cette décision méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; ses parents ont respectivement obtenu en 2002 et 2008 la qualité de réfugié en raison des risques de persécution les visant en République du Congo ; il encourt des risques de mauvais traitement en cas de retour dans son pays d'origine ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 juin 2014, présenté par le préfet des Côtes d'Armor qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir que :

- l'arrêté contesté est suffisamment motivé et il a procédé à l'examen particulier de la situation personnelle de M. A... ; si ce dernier invoque la présence de ses parents en France, aucun élément ne confirme l'authenticité des liens familiaux avec M et Mme A...dès lors que le requérant a dissimulé son identité à deux reprises en s'opposant à la prise de ses empreintes digitales ;

- le requérant ne justifie ni s'être effectivement installé au Maroc avec son frère en 2005, ni qu'il aurait été empêché de solliciter le regroupement familial ; il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision ;

- dès lors que l'identité de M. A... n'est pas établie avec certitude du fait de la détérioration de ses empreintes digitales, la réalité des liens familiaux dont il se prévaut ne peut être établie ; ainsi, son arrêté ne peut être regardé comme méconnaissant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- M. A... n'établit pas plus devant lui que devant les instances compétentes en matière d'asile l'existence des menaces personnelles invoquées en cas de retour dans son pays d'origine ;

Vu la décision du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes en date du 12 février 2014, accordant le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. A... et désignant Me Le Strat pour le représenter dans la présente instance ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales signée le 4 novembre 1950 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mai 2015 :

- le rapport de M. Lemoine, premier conseiller,

- et les observations de MeB..., substituant Me Le Strat, avocat de M. A... ;

1. Considérant que M. A..., ressortissant de la République du Congo (Congo-Brazzaville), né le 15 août 1988, entré irrégulièrement en France le 12 décembre 2011 sous un passeport d'emprunt, selon ses déclarations, pour y solliciter la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire, relève appel du jugement du 8 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2013 du préfet des Côtes d'Armor refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ;

2. Considérant que les premiers juges n'ont pas répondu aux moyens, qui n'étaient pas inopérants, tirés par M. A... de ce que le préfet n'aurait pas suffisamment motivé sa décision fixant le pays de destination et qu'il n'aurait pas procédé à l'examen particulier de la situation personnelle de M. A... à cet égard ; que le jugement doit, en raison de ces omissions, être annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions du requérant tendant à l'annulation de cette décision ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Rennes dirigées contre la décision fixant le pays de destination contenue dans l'arrêté du 24 janvier 2013 du préfet des Côtes d'Armor et de statuer, par l'effet dévolutif de l'appel, sur les autres conclusions de M. A... ;

4. Considérant, en premier lieu, que la décision fixant le pays de destination, contenue dans l'arrêté contesté du 24 janvier 2013, vise les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui en constituent la base légale et indique que M. A... n'a pas présenté de nouveaux éléments qui n'auraient pas été soumis aux instances compétentes en matière d'asile et n'établit pas qu'il serait exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; que cette décision est suffisamment motivée au regard de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ; qu'il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que le préfet des Côtes d'Armor n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle et familiale de M. A... au regard de cette décision ;

5. Considérant, en second lieu et pour le surplus, que M. A... se borne à invoquer devant le juge d'appel, sans plus de précisions ou de justifications, les mêmes moyens que ceux qu'il a développés en première instance ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges et tirés de ce que l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive aux buts en vue desquels il a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de ce que l'arrêté contesté n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'étranger et de ce que la décision du préfet fixant la République du Congo comme pays de destination ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de la demande de M. A... tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination doivent être rejetées ; que, pour le surplus de sa requête, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ; que, dès lors que la présente décision qui rejette les conclusions de la demande de M. A... et le surplus des conclusions de sa requête n'appelle aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n°1302481 du 8 novembre 2013 du tribunal administratif de Rennes est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. A...tendant à l'annulation de la décision contenue dans l'arrêté du 24 janvier 2013 du préfet des Côtes d'Armor fixant la République du Congo comme pays de destination.

Article 2 : Les conclusions de la demande de M. A...tendant à l'annulation de la décision contenue dans l'arrêté du 24 janvier 2013 du préfet des Côtes d'Armor fixant la République du Congo comme pays de destination ainsi que le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Côtes d'Armor.

Délibéré après l'audience du 13 mai 2015 à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- Mme Gélard, premier conseiller,

- M. Lemoine, premier conseiller,

Lu en audience publique le 4 juin 2015.

Le rapporteur,

F. LEMOINE Le président,

I. PERROT

Le greffier,

M. C...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°14NT00691


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT00691
Date de la décision : 04/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. François LEMOINE
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : LE STRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-06-04;14nt00691 ?
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