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18/09/2014 | FRANCE | N°13NT01224

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 18 septembre 2014, 13NT01224


Vu la requête, enregistrée le 26 avril 2013, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Jegu, avocat au barreau de Rouen ; M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 12-1768 en date du 14 mars 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à l'indemniser des préjudices consécutifs à l'accident médical survenu lors de sa prise en charge par le centre hospitalier universitaire

de Rouen du 3 au 22 mars 2005 ;

2°) de condamner l'ONIAM à lui verse...

Vu la requête, enregistrée le 26 avril 2013, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Jegu, avocat au barreau de Rouen ; M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 12-1768 en date du 14 mars 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à l'indemniser des préjudices consécutifs à l'accident médical survenu lors de sa prise en charge par le centre hospitalier universitaire de Rouen du 3 au 22 mars 2005 ;

2°) de condamner l'ONIAM à lui verser la somme de 131 900 euros en réparation des préjudices subis ;

3°) de mettre à la charge de l'ONIAM les dépens et la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- les premiers juges ont fait une lecture erronée des rapports d'expertise en écartant tout lien de causalité entre les préjudices invoqués et l'angioplastie qu'il a subie le 4 mars 2005 ; l'hémorragie spontanée au niveau de l'artère corticale du rein gauche est survenue lors de l'artériographie pratiquée ce jour-là et résulte du risque d'accident connu lié aux anticoagulants administrés ; il n'y a pas eu de faute du service hospitalier mais l'accident constitue bien un aléa thérapeutique en lien avec l'intervention qu'il a subie ; les deux rapports d'expertise sont concordants sur ce point ;

- par ailleurs sa demande est recevable en application des dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique ; ses préjudices remplissent les conditions de gravité pour être indemnisés dans le cadre de la solidarité nationale ; il a subi un arrêt temporaire de ses activités professionnelles pendant plus de six mois sur une période de douze mois consécutifs du fait des séquelles de l'hématome rénal gauche ; en effet, son état a été consolidé le 23 mars 2006, et si le taux de déficit fonctionnel permanent a été fixé à 5 %, en revanche le déficit fonctionnel temporaire a été évalué à neuf mois et vingt jours ;

- le déficit fonctionnel temporaire à retenir doit être fixé à 100 % entre le 2 mars et le 2 septembre 2005, puis à 50 % jusqu'au 23 mars 2006, date de sa consolidation ; l'indemnité demandée à ce titre est de 900 euros ; les souffrances endurées, évaluées à 2,5 sur une échelle de 7 seront réparées par l'octroi d'une indemnité de 8 000 euros ; le préjudice esthétique temporaire évalué à 1,5 sur la même échelle sera indemnisé à concurrence de 5 000 euros ; l'indemnité demandée au titre des pertes de gains professionnels et de l'incidence professionnelle est de 100 000 euros ; ce préjudice est en totale relation avec l'accident médical ; le déficit fonctionnel permanent qu'il conserve, fixé à 5 %, sera réparé par l'octroi d'une indemnité de 10 000 euros ; l'indemnité demandée au titre du préjudice esthétique permanent, évalué à 1,5 sur une échelle de 7, est de 5000 euros ; enfin, il subit un préjudice sexuel pour lequel l'indemnité demandée est de 3 000 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 mai 2014, présenté pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) par Me Welsch, avocat au barreau de Paris ; l'ONIAM conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir que :

- les conditions d'une indemnisation par la solidarité nationale ne sont pas remplies ; le traitement administré comportait un risque connu d'accident par hémorragie spontanée ; le risque a été pris en raison de la pathologie que présentait M. A... ; dès lors, les conséquences de ce traitement ne peuvent être regardées comme anormales au regard de l'état de santé antérieur de M. A... ; par ailleurs, les préjudices subis n'atteignent pas l'un des seuils de gravité prévu par les textes ; la durée du déficit fonctionnel temporaire retenue par l'expert désigné par la CRCI de Haute Normandie n'est pas conforme aux conclusions des experts judiciaires et ne peut être opposée en l'absence de caractère contradictoire du rapport sur ce point ; l'inaptitude à exercer l'activité professionnelle qui était celle du requérant avant l'accident médical n'est pas établie ;

- subsidiairement, les préjudices dont il est demandé réparation soit ne sont pas établis soit ont été évalués de manière excessive ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er septembre 2014 :

- le rapport de Mme Specht, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Giraud, rapporteur public ;

1. Considérant que M. A..., né en 1952, a été admis en urgence le 2 mars 2005 au centre hospitalier d'Evreux pour des douleurs thoraciques ; qu'après que le diagnostic d'un infarctus du myocarde eut été posé, il a été transféré le lendemain au centre hospitalier universitaire (CHU) de Rouen où il a subi, le 4 mars, une coronarographie et une angioplastie sur l'artère coronaire droite moyenne avec mise en place d'un stent ; que durant l'intervention M. A... s'est plaint de douleurs au flanc gauche ; qu'un hématome rétro-péritonéal gauche refoulant le rein gauche vers l'avant a été diagnostiqué le même jour, et traité par un drainage chirurgical le 11 mars 2005 ; que M. A..., qui a conservé d'importantes douleurs au flanc gauche, a été placé en invalidité de première catégorie à compter du 1er juillet 2007, puis licencié pour inaptitude physique le 16 juillet 2007 ; que, par une ordonnance du 31 janvier 2007, le juge des référés du tribunal administratif de Rouen a, à la demande de M. A..., ordonné une expertise contradictoire en présence du CHU de Rouen et de l'ONIAM aux fins de déterminer les causes de l'hématome rénal ; que les professeurs Azorin et Haertig, experts désignés ont remis leur rapport le 23 novembre 2007 ; que M. A... a saisi le 28 avril 2009 la commission régionale de conciliation et d'indemnisation (CRCI) de Haute-Normandie d'une demande d'indemnisation des préjudices subis ; qu'après avoir ordonné une nouvelle expertise et désigné à cette fin le docteur Vaislic, qui a remis son rapport le 30 mars 2010, la CRCI de Haute Normandie s'est déclarée incompétente le 10 mars 2011 ; que M. A... relève appel du jugement du 14 mars 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans, saisi par lui le 18 mai 2012 de conclusions dirigées contre l'ONIAM, a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'office à l'indemniser, au titre de la solidarité nationale, des conséquences de l'accident médical dont il a été victime ;

Sur l'indemnisation au titre de la solidarité nationale :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " (...) / II- Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire. / Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret. " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction et en particulier du rapport d'expertise du 23 novembre 2007 des professeurs Azorin et Haertig et du rapport d'expertise du 30 mars 2010 du docteur Vaislic, désigné par la CRCI de Haute Normandie, qui peut être retenu à... ; que cette complication peut être la conséquence de l'association des médicaments modifiant la coagulation du sang devant être administrés dans le cadre de l'intervention chirurgicale d'angioplastie coronaire pour traiter l'infarctus du myocarde, cette intervention étant elle-même impérative dès lors que le pronostic vital du patient était engagé ; que ce traitement médicamenteux indispensable en l'espèce présente un risque connu d'hémorragie spontanée ; que, compte tenu l'état de santé de M. A..., qui présentait des facteurs de risques cardiaques antérieurs, notamment une hypercholestérolémie et une hypertension artérielle, l'accident qui s'est produit doit être regardé comme résultant de la réalisation d'un risque connu d'hémorragie lié à sa pathologie ; que, par suite, les conséquences de la complication survenue en cours d'intervention ne peuvent être qualifiées d'anormales au regard de l'état de santé antérieur de M. A... comme de l'évolution prévisible de cet état au sens du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique ; qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin de prendre en compte la durée du déficit fonctionnel temporaire invoquée par le requérant, l'accident médical dont M. A... a été victime n'est pas susceptible d'ouvrir droit à réparation au titre de la solidarité nationale ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les frais et honoraires d'expertise :

5. Considérant qu'il y a lieu de maintenir à la charge définitive de M. A... les frais de l'expertise ordonnée en référé par le tribunal administratif de Rouen taxés et liquidés par une ordonnance du 29 janvier 2008 du président du tribunal administratif de Rouen à la somme de 2.000 euros pour le professeur Azorin et à la somme de 1.000 euros pour le professeur Haertig, soit un montant total de 3.000 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'ONIAM, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les frais et honoraires d'expertise sont maintenus à la charge définitive de M. A....

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2014, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- Mme Specht, premier conseiller,

- M. Lemoine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 septembre 2014.

Le rapporteur,

F. SPECHTLe président,

I. PERROT

Le greffier,

A. MAUGENDRE

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT01224
Date de la décision : 18/09/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Frédérique SPECHT
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SCP JULIA JEGU BOURDON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-09-18;13nt01224 ?
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