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06/02/2009 | FRANCE | N°07NT02961

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 06 février 2009, 07NT02961


Vu la requête, enregistrée le 20 septembre 2007, présentée pour M. Jean-Luc X, demeurant ..., par Me Brand, avocat au barreau de Caen ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-501 du 5 juillet 2007 du Tribunal administratif de Caen en tant qu'il a limité à 12 396,94 euros le montant de la somme que la commune de Deauville a été condamnée à lui payer en réparation des préjudices qu'il a subis du fait de l'accident dont il a été victime le 21 juin 1994 ;

2°) de condamner la commune de Deauville à lui payer les sommes de 10 000 euros au titre de s

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Vu la requête, enregistrée le 20 septembre 2007, présentée pour M. Jean-Luc X, demeurant ..., par Me Brand, avocat au barreau de Caen ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-501 du 5 juillet 2007 du Tribunal administratif de Caen en tant qu'il a limité à 12 396,94 euros le montant de la somme que la commune de Deauville a été condamnée à lui payer en réparation des préjudices qu'il a subis du fait de l'accident dont il a été victime le 21 juin 1994 ;

2°) de condamner la commune de Deauville à lui payer les sommes de 10 000 euros au titre de son incapacité permanente partielle, 27 920 euros au titre de son incapacité temporaire totale et des troubles apportés à ses conditions d'existence, 10 000 euros au titre des souffrances qu'il a endurées, 20 000 euros au titre de son préjudice professionnel, 3 000 euros au titre de son préjudice d'agrément et 5 000 euros au titre de son préjudice moral ;

3°) de condamner la commune de Deauville à lui payer la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, modifiée, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2009 :

- le rapport de M. Faessel, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Villain, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, agent d'entretien de la commune de Deauville, était occupé à des travaux de nettoyage des gouttières d'un bâtiment municipal lorsqu'il a, le 21 juin 1994, fait une chute d'une hauteur de 7,50 m, occasionnant divers traumatismes graves ; qu'après avoir été soigné, il a pu reprendre son service le 17 novembre 1994 ; que si son état a été reconnu comme consolidé à compter du 10 septembre 1996, avec un taux d'incapacité permanente de 2 %, il a cependant continué à souffrir de lombalgies persistantes et a subi, le 19 décembre 2002, une opération chirurgicale en vue de la résorption d'une hernie discale ; que l'intéressé interjette appel du jugement du 5 juillet 2007 du Tribunal administratif de Caen limitant à 12 396,94 euros le montant de la somme que la commune de Deauville a été condamnée à lui payer en réparation des préjudices qu'il a subis du fait de l'accident de service dont il a été victime ; que, par la voie de l'appel incident, la commune de Deauville demande à la Cour d'annuler ledit jugement en tant qu'il l'a condamnée à payer à la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Calvados la somme de 3 603,06 euros en remboursement des prestations servies par celle-ci à M. X et la somme de 923 euros au titre de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

Sur la prise en charge de M. X au titre de l'accident de service :

Considérant qu'aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'expert désigné par le président de la Cour a conclu dans son rapport déposé le 12 octobre 2005 que les troubles ayant justifié le placement de M. X en congé de maladie en raison de ses lombalgies ainsi que l'intervention chirurgicale susévoquée étaient en relation unique, directe et certaine avec l'accident du 21 juin 1994 et que l'incapacité permanente partielle de l'intéressé devait être fixée à 5 % ; qu'ainsi, les soins et congés dont M. X a bénéficié à compter du 10 septembre 1996 devaient être pris en charge par la commune de Deauville, non pas au titre d'une maladie ordinaire, mais selon le régime applicable aux accidents dont sont victimes les agents dans l'exercice de leurs fonctions ; que, par suite, le requérant est fondé à demander que la commune soit condamnée à lui payer les sommes correspondant aux pertes de rémunération qu'il a subies du fait de son placement en congé de maladie ordinaire, ainsi qu'au complément de remboursement dont il aurait dû bénéficier à l'occasion des soins médicaux qui lui ont été nécessaires ;

Considérant toutefois que l'état de l'instruction ne permet pas de déterminer l'indemnité due à M. X ; qu'il y a lieu de renvoyer celui-ci devant la commune de Deauville pour qu'il soit procédé à la liquidation de cette indemnité en application des dispositions précitées ;

Sur la réparation des autres préjudices de M. X :

Considérant que les dispositions législatives et réglementaires déterminant forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions ne font cependant obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d'agrément, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l'atteinte à l'intégrité physique, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ;

En ce qui concerne la responsabilité de la commune de Deauville :

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'antérieurement à la date à laquelle l'accident dont a été victime M. X s'est produit, la commune de Deauville n'avait pris aucune disposition pour assurer la sécurité de cet agent, alors que celui-ci, au sommet d'une échelle, devait exécuter des travaux nécessitant l'accomplissement de mouvements importants et la manipulation d'outils ; qu'à supposer même que la commune ait, ainsi qu'elle le soutient, mis à la disposition de l'intéressé un harnais destiné à limiter les conséquences d'une chute, un tel équipement aurait, en tout état de cause, été sans utilité en l'espèce, dès lors qu'il n'est pas établi qu'un dispositif d'ancrage adapté permettait sa mise en oeuvre ; que, par suite, en omettant de prendre ou de faire prendre les mesures de prévention nécessaires, le maire a commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ; que, dès lors, M. X est fondé à demander que la commune soit condamnée à réparer l'intégralité des préjudices qu'il a subis ;

En ce qui concerne les préjudices de M. X :

Considérant, en premier lieu, que l'expert a estimé que les souffrances physiques endurées par M. X devaient être évaluées à 2,5 sur une échelle de 7 ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice ainsi subi par l'intéressé en condamnant la commune de Deauville à lui payer une somme de 2 000 euros ;

Considérant, en deuxième lieu, que si M. X sollicite l'allocation d'une indemnité au titre de l'incapacité permanente partielle et de l'incapacité temporaire totale dont il reste atteint ainsi qu'au titre du préjudice professionnel qu'il estime avoir subi, il ne résulte pas de l'instruction que la réparation à laquelle il peut prétendre en application des dispositions législatives ou réglementaires relatives aux accidents de service et à la prise en compte des invalidités entraînées par ceux-ci, ne serait pas suffisante ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à demander que lui soit accordée une indemnité complémentaire à raison desdits chefs de préjudice ;

Considérant, en troisième lieu, que si M. X soutient qu'il a subi un préjudice d'agrément, il n'établit pas toutefois qu'antérieurement à son accident il se livrait effectivement à des activités de loisirs qui ne lui seraient plus accessibles à présent en raison de la réduction de son aptitude physique ; qu'il résulte, en revanche, de l'instruction que l'intéressé ne pourra plus exercer la profession de couvreur correspondant à sa formation initiale et qu'il a connu de longues périodes d'immobilisation à la suite de l'accident dont il a été victime et de sa nouvelle hospitalisation, en 2002 ; qu'il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence et du préjudice moral qu'il a ainsi subis en condamnant la commune de Deauville à lui payer une somme de 2 000 euros ;

Sur l'appel incident de la commune de Deauville :

Considérant que les conclusions de l'appel incident de la commune de Deauville, qui tendent à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il l'a condamnée à payer les sommes de 3 603,06 euros et 923 euros à la Caisse primaire d'assurance maladie du Calvados au titre des soins dont a bénéficié M. X, soulèvent un litige distinct de celui que cet agent a porté devant la Cour et ont été présentées après l'expiration du délai d'appel ; que lesdites conclusions sont, par suite, irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que M. X, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la commune de Deauville la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'une part, de condamner la commune de Deauville à verser à M. X une somme de 1 500 euros en remboursement des frais de même nature qu'il a supportés et, d'autre part, de laisser à la charge de la CPAM du Calvados les frais qu'elle a également exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : La commune de Deauville est condamnée à payer à M. X les sommes correspondant, d'une part, aux pertes de rémunération qu'il a subies postérieurement au 10 septembre 1996 à défaut de prise en charge selon le régime applicable aux accidents de service et, d'autre part, au complément de remboursement dont il aurait dû bénéficier à l'occasion des soins médicaux qui lui ont été nécessaires. M. X est renvoyé devant la commune de Deauville pour qu'il soit procédé à la liquidation desdites sommes.

Article 2 : La commune de Deauville versera à M. X une somme de 4 000 euros (quatre mille euros) en réparation des préjudices subis par celui-ci.

Article 3 : Le jugement du 5 juillet 2007 du Tribunal administratif de Caen est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de l'appel incident de la commune de Deauville sont rejetées.

Article 6 : La commune de Deauville versera à M. X une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Les conclusions de la commune de Deauville et de la CPAM du Calvados tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Luc X, à la commune de Deauville, aux mutuelles du Mans et à la Caisse primaire d'assurance maladie du Calvados.

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N° 07NT02961

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 07NT02961
Date de la décision : 06/02/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PIRON
Rapporteur ?: M. Xavier FAESSEL
Rapporteur public ?: M. VILLAIN
Avocat(s) : BRAND

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2009-02-06;07nt02961 ?
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