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12/11/1999 | FRANCE | N°95NT01525

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3e chambre, 12 novembre 1999, 95NT01525


Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 1995 au greffe de la Cour, présentée pour M. Patrice Y..., demeurant "An Divarzh", route de la Chapelle-Erbrée, 35500 Erbrée, par Me Thierry X..., avocat au barreau de Rennes ;
M. Y... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement nos 89-1090, 89-1875, 89-1967, 90-1269, 90-1948, 90-2026, 91-2538, 92-5290 et 92-5757 du Tribunal administratif de Rennes, en date du 5 juillet 1995, en tant que, par ce jugement, le Tribunal a, d'une part, constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de ses demandes tendant à l'annulation

pour excès de pouvoir des notations initiales qui lui ont été...

Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 1995 au greffe de la Cour, présentée pour M. Patrice Y..., demeurant "An Divarzh", route de la Chapelle-Erbrée, 35500 Erbrée, par Me Thierry X..., avocat au barreau de Rennes ;
M. Y... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement nos 89-1090, 89-1875, 89-1967, 90-1269, 90-1948, 90-2026, 91-2538, 92-5290 et 92-5757 du Tribunal administratif de Rennes, en date du 5 juillet 1995, en tant que, par ce jugement, le Tribunal a, d'une part, constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de ses demandes tendant à l'annulation pour excès de pouvoir des notations initiales qui lui ont été attribuées au titre des années 1990 et 1991, a, d'autre part, rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur, en date du 5 avril 1989, rejetant le recours hiérarchique présenté par l'intéressé contre sa notation de 1988 et aux fins de révision de sa carrière, à l'annulation de ses notations au titre des années 1985 à 1992, ainsi qu'à l'annulation des tableaux préparatoires et tableaux d'avancement au grade d'agent d'administration principal au titre des années 1985 à 1989 et au groupe VI de rémunération du grade de commis au titre des années 1981 à 1988, et a, enfin, rejeté ses conclusions tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une indemnité de 10 000 F en réparation du préjudice moral qu'il a subi ;
2 ) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du ministre de l'intérieur, en date du 5 avril 1989, ses notations au titre des années 1985 à 1992, les tableaux préparatoires et tableaux d'avancement au grade d'agent d'administration principal au titre des années 1985 à 1989 et au groupe VI au titre de ces années 1981 à 1988, ainsi que les promotions prononcées sur le fondement de ces tableaux ;
3 ) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité en réparation de son préjudice moral ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n 83-634 du 13 juillet 1983, modifiée ;
Vu la loi n 84-16 du 11 janvier 1984, modifiée ;
Vu le décret n 59-308 du 14 février 1959, modifié ;
Vu le décret n 82-389 du 10 mai 1982, modifié ;
Vu le décret n 82-390 du 10 mai 1982, modifié ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 octobre 1999 :
- le rapport de M. LAINE, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme COËNT-BOCHARD, commissaire du
gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'à supposer même que le président du Tribunal administratif de Rennes ait été amené à participer, pour ce qui concerne les personnels du greffe placés sous son autorité, à des réunions d'harmonisation des notations des agents du cadre national des préfectures, aucun membre de ce Tribunal ne se trouvait en cause, au sens des dispositions de l'article R.61 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, dans les litiges soulevés par les demandes de M. Y... ; qu'ainsi, le requérant n'est pas fondé à prétendre qu'en vertu de ces dispositions l'affaire aurait dû être renvoyée à un autre Tribunal désigné par le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R.115 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "L'Etat est représenté en défense par le préfet ou le préfet de région lorsque le litige, quelle que soit sa nature, est né de l'activité des administrations civiles de l'Etat dans le département ou la région, à l'exception toutefois des actions et missions mentionnées à l'article 7 du décret n 82-389 du 10 mai 1982 et à l'article 6 du décret n 82-390 du 10 mai 1982" ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet de la région de Bretagne, préfet du département d'Ille-et-Vilaine, avait qualité pour défendre l'Etat dans les instances introduites par M. Y... devant le Tribunal administratif de Rennes et qui étaient relatives à la notation et à la carrière d'un adjoint administratif du cadre national des préfectures, affecté à la préfecture d'Ille-et-Vilaine ;
Considérant que la circonstance que le dispositif du jugement attaqué ne mentionne pas qu'une copie devait être transmise au préfet d'Ille-et-Vilaine en application de l'article R.216 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, est sans influence sur la régularité dudit jugement ;
Considérant que, dès lors qu'elle avait reçu pouvoir à cet effet de la part du préfet, Mme Z..., adjointe au chef du bureau du contentieux de la préfecture, pouvait valablement présenter des observations à l'audience du Tribunal administratif de Rennes qui s'est tenue le 21 juin 1995 ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet d'Ille-et-Vilaine a, au cours de l'instance devant le Tribunal, retiré les décisions fixant les notations initiales attribuées à M. Y... pour 1990 et pour 1991 afin de leur substituer, de nouvelles notations, notifiées le 2 novembre 1992 à l'intéressé ; que ce retrait a rendu sans objet les conclusions des demandes du requérant tendant à ce que le Tribunal annule les notations initiales susmentionnées ; que M. Y... n'est, par suite, pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le Tribunal administratif a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur ces conclusions ;
Sur les conclusions dirigées contre les documents respectivement communiqués à M. Y... les 29 septembre 1989 et 19 juin 1990 :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la note définitive attribuée à M. Y... au titre de l'année 1989, n'a été fixée que le 9 octobre 1989 ; qu'ainsi, comme l'a jugé à bon droit le Tribunal administratif, la proposition de note communiquée à l'intéressé le 29 septembre 1989 ne constituait pas une décision lui faisant grief, mais présentait le caractère d'un acte préparatoire insusceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; qu'il en va de même du formulaire de notation transmis à M. Y... le 19 juin 1990 ; que, par suite, les conclusions de ses demandes tendant à l'annulation de ces actes étaient irrecevables ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation des notations attribuées à M. Y... au titre des années 1985 à 1987, ainsi qu'à l'annulation des tableaux d'avancement au grade d'agent d'administration principal et au groupe VI de rémunération du grade de commis au titre des années antérieures à 1988 :
Considérant que M. Y... ne conteste pas, en appel, les fins de non-recevoir opposées par le Tribunal administratif aux conclusions susanalysées ; que, par suite, celles-ci ne peuvent être accueillies ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur, en date du 5 avril 1989 :
Considérant que, si, pour rejeter, par sa décision du 5 avril 1989, le recours hiérarchique présenté par M. Y... contre sa notation au titre de 1988 et aux fins de révision de sa carrière, le ministre de l'intérieur s'est référé à l'avis émis le 16 novembre 1988 par la commission administrative paritaire, ainsi qu'à la décision du préfet, en date du 25 novembre suivant, rejetant un recours gracieux de l'intéressé, il ne ressort pas des pièces du dossier, contrairement à ce que prétend ce dernier, que le ministre aurait méconnu sa propre compétence en omettant de procéder au contrôle hiérarchique qui lui incombait ;
Sur la légalité des notations attribuées à M. Y... au titre des années 1988 à 1992 et des tableaux d'avancement au grade d'agent d'administration principal établis au titre des années 1988 et 1989 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 55 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : "Le pouvoir de fixer les notes et appréciations générales exprimant la valeur professionnelle des fonctionnaires dans les conditions définies à l'article 17 du titre 1er du statut général est exercé par le chef de service. - Les commissions administratives paritaires ont connaissance des notes et appréciations ; à la demande de l'intéressé, elles peuvent proposer la révision de la notation" ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret n 82-389 du 10 mai 1982 susvisé : "Le représentant de l'Etat dans le département porte le titre de préfet ... - Il dirige sous leur autorité les services des administrations civiles de l'Etat, dans les conditions définies par le présent décret ..." ; que l'article 4 du même décret dispose : "Le préfet est assisté dans l'exercice de ses fonctions d'un secrétaire général, des chefs des services déconcentrés de l'Etat, de sous-préfets, ainsi que des services de la préfecture ..." ; qu'il ressort de ces dispositions que le préfet d'Ille-et-Vilaine avait, au sens de l'article 55 précité de la loi du 11 janvier 1984, la qualité de chef de service détenteur du pouvoir de notation à l'égard de M. Y..., commis intégré, à compter du 1er ao t 1990, dans le corps des adjoints administratifs, affecté à la préfecture au cours des années susmentionnées, et, en dernier lieu, à la direction des actions de l'Etat et de la déconcentration ; que le requérant ne saurait, dès lors, prétendre que son supérieur hiérarchique ayant le grade de directeur était seul compétent pour fixer ses notes et appréciations générales ; qu'en vertu des 1 et 4 de l'article 17 du décret n 82-389 du 10 mai 1982, le préfet pouvait déléguer sa signature en la matière au secrétaire général et au directeur de cabinet ;
Considérant que, si le préfet d'Ille-et-Vilaine a, sans y être tenu, décidé de saisir la commission administrative paritaire locale avant d'attribuer à M. Y... sa notation pour les années 1988 à 1992, il ressort des pièces du dossier qu'il a bien déterminé lui-même cette notation, après que la commission e t formulé un simple avis, et qu'il n'a, ainsi, pas méconnu sa propre compétence ; que l'intéressé n'apporte aucune précision de nature à établir que le préfet aurait pris en compte d'autres éléments que ceux susceptibles d'exprimer sa valeur professionnelle ;
Considérant que le requérant ne peut prétendre à la prise en compte de la bonification d'ancienneté pour services militaires dont il a bénéficié lors de sa titularisation le 1er mars 1985, dès lors qu'il résulte des dispositions précitées de la loi du 11 janvier 1984 que la notation doit être fondée uniquement sur la manière de servir de l'agent, et non sur son ancienneté de grade ou d'échelon ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y... s'est vu attribuer les notes chiffrées de 16,5 en 1988, 17 en 1989, 1990 et 1991, et 17,5 en 1992, ainsi que des appréciations générales correspondant à ces notes et prenant en compte, contrairement à ce qu'il soutient, la nature et le niveau de ses responsabilités professionnelles ; que, dans ces conditions, les notations contestées ne sont entachées d'aucune erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant que les moyens tirés de l'irrégularité de la "note" du préfet d'Ille-et-Vilaine, en date du 30 octobre 1992, par laquelle ont été communiquées à l'intéressé ses nouvelles notations pour les années 1990 et 1991, sont sans influence sur la légalité de ces notations elles-mêmes ; qu'est également inopérant le moyen tiré des irrégularités qui affecteraient la mise en oeuvre du fichier nominatif d'information sur la gestion du personnel de la préfecture ;
Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté les conclusions de ses demandes tendant à l'annulation de ses notations, ainsi que des tableaux d'avancement au grade d'agent d'administration principal et au groupe VI de rémunération du grade de commis ;
Sur les conclusions aux fins d'indemnité ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les services de la préfecture d'Ille-et-Vilaine aient commis une quelconque faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat à l'égard de M. Y... ; qu'il suit de là que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif a rejeté ses conclusions tendant à obtenir réparation du préjudice moral qu'il aurait subi ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. Y... la somme de 5 000 F que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Y... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 95NT01525
Date de la décision : 12/11/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE AUTORITES DISPOSANT DU POUVOIR REGLEMENTAIRE - AUTORITES DISPOSANT DU POUVOIR REGLEMENTAIRE - PREFET.

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCEDURE - PROCEDURE CONSULTATIVE - EFFETS DE LA CONSULTATION SUR LE POUVOIR DE DECISION DE L'AUTORITE ADMINISTRATIVE.

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - MOTIFS - ERREUR MANIFESTE - ABSENCE.

COLLECTIVITES TERRITORIALES - DEPARTEMENT - ORGANISATION DU DEPARTEMENT - REPRESENTANTS DE L'ETAT DANS LE DEPARTEMENT - POUVOIRS DU PREFET.

COMPETENCE - COMPETENCE A L'INTERIEUR DE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE - COMPETENCE EN PREMIER RESSORT DES TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS - COMPETENCE TERRITORIALE.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - NOTATION ET AVANCEMENT - NOTATION.

PROCEDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - DECISIONS POUVANT OU NON FAIRE L'OBJET D'UN RECOURS - ACTES NE CONSTITUANT PAS DES DECISIONS SUSCEPTIBLES DE RECOURS - MESURES PREPARATOIRES.

PROCEDURE - INCIDENTS - NON-LIEU - EXISTENCE - DECISION RETIREE.

PROCEDURE - JUGEMENTS - TENUE DES AUDIENCES.

PROCEDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GENERALES - MOYENS - MOYENS INOPERANTS.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - AGISSEMENTS ADMINISTRATIFS SUSCEPTIBLES D'ENGAGER LA RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R61, R115, R216, L8-1
Décret 82-389 du 10 mai 1982 art. 1, art. 4, art. 17
Loi 84-16 du 11 janvier 1984 art. 55


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. LAINE
Rapporteur public ?: Mme COËNT-BOCHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1999-11-12;95nt01525 ?
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