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02/07/1992 | FRANCE | N°91NT00805

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Pleniere, 02 juillet 1992, 91NT00805


VU, 1°) sous le n° 91NT00805, la requête enregistrée au greffe le 9 octobre 1991, présentée pour la société BILFINGER-BERGER dont le siège est à MANNHEIM, B.P 100562, (Allemagne), par Me NAUDIN avocat à la Cour de PARIS ;
La société BILFINGER-BERGER demande :
1°) de réformer l'ordonnance rendue par le président du Tribunal administratif de ROUEN, le 23 septembre 1991, en ce qu'elle n'a pas répondu à certaines de ses conclusions ;
2°) de compléter la mission de l'expert ;
3°) de modifier la mission confiée à ce dernier ;

VU, 2°) sous le n° 91NT008

07, la requête enregistrée au greffe le 15 octobre 1991, présentée pour le G.I.E PONT DE N...

VU, 1°) sous le n° 91NT00805, la requête enregistrée au greffe le 9 octobre 1991, présentée pour la société BILFINGER-BERGER dont le siège est à MANNHEIM, B.P 100562, (Allemagne), par Me NAUDIN avocat à la Cour de PARIS ;
La société BILFINGER-BERGER demande :
1°) de réformer l'ordonnance rendue par le président du Tribunal administratif de ROUEN, le 23 septembre 1991, en ce qu'elle n'a pas répondu à certaines de ses conclusions ;
2°) de compléter la mission de l'expert ;
3°) de modifier la mission confiée à ce dernier ;

VU, 2°) sous le n° 91NT00807, la requête enregistrée au greffe le 15 octobre 1991, présentée pour le G.I.E PONT DE NORMANDIE dont le siège est à PARIS La Défense (92079), Tour American International, par Me GRANGE avocat à la Cour de PARIS ;
Le G.I.E PONT DE NORMANDIE demande :
1°) l'annulation de l'ordonnance de référé du 23 septembre 1991 ;
2°) la suppression des I, 5ème alinéa, IV, 4ème alinéa et des six premiers mots du IV, 5ème alinéa de la requête en référé de la Chambre de commerce et d'industrie du HAVRE ;
3°) d'ordonner un complément d'expertise ; VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi du 29 juillet 1881 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 juin 1992 :
- le rapport de M. MARCHAND, président rapporteur,
- les observations de Me NAUDIN, avocat de la société BILFINGER-BERGER,
- les observations de Me GRANGE, avocat du G.I.E PONT DE NORMANDIE,
- les observations de Me PARMENTIER, avocat de la Chambre de commerce et d'industrie du HAVRE,
- et les conclusions de M. CADENAT, commissaire du gouvernement,

Considérant que les requêtes susvisées sont relatives à l'exécution du même marché de travaux publics et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu par suite de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
Considérant que le groupement d'intérêts économiques (G.I.E) PONT DE NORMANDIE et la société BILFINGER-BERGER demandent l'annulation de l'ordonnance susvisée du président du Tribunal administratif de ROUEN en date du 23 septembre 1991 en soutenant que celui-ci aurait omis de se prononcer, d'une part, sur certaines de leurs demandes contenues dans leurs mémoires en défense et relatives à une modification de la mission d'expertise initialement sollicitée par la Chambre de commerce et d'industrie (C.C.I) du HAVRE, d'autre part, sur les conclusions tendant à la suppression d'écrits injurieux et diffamatoires ;
Considérant que le juge administratif des référés, auquel est adressée une demande d'expertise, détermine librement l'étendue de la mission de l'expert sans être lié par les termes des demandes dont il est saisi ; que la circonstance qu'ayant jugé utile d'ordonner cette mesure d'instruction il ne l'ait pas étendue à l'examen de tous les points de fait indiqués par les parties ne saurait, dès lors, avoir pour effet d'entacher son ordonnance d'irrégularité ; que, par suite, le G.I.E PONT DE NORMANDIE et la société BILFINGER-BERGER ne sont pas fondées à soutenir qu'en ne se prononçant pas explicitement sur certaines de leurs demandes aux fins d'extension de la mission d'expertise sollicitée par la C.C.I, le président du Tribunal administratif de ROUEN, après avoir visé les mémoires présentés en cours d'instance, aurait entaché son ordonnance d'irrégularité ;
Considérant, en revanche, que dans son ordonnance attaquée le juge des référés a omis de répondre aux conclusions tendant à la suppression d'écrits injurieux et diffamatoires ; qu'il y a lieu en conséquence pour la Cour d'annuler ladite ordonnance en tant qu'elle ne s'est pas prononcée sur ces conclusions, de statuer sur ces dernières par voie d'évocation et de se prononcer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions ;
Sur la mission de l'expert :
Considérant qu'aux termes de l'article R.128 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Le président du tribunal administratif ou de la cour administrative ou le magistrat que l'un d'eux délègue peut, sur simple requête qui, devant le tribunal administratif, sera recevable même en l'absence d'une décision administrative préalable, prescrire toutes mesures utiles d'expertise ou d'instruction" ;
En ce qui concerne l'évaluation des préjudices :

Considérant que, devant le juge des référés du tribunal administratif, la C.C.I du HAVRE avait demandé que l'expertise porte, notamment, sur le préjudice qui résulterait pour elle d'un manquement à leurs obligations contractuelles imputables au G.I.E PONT DE NORMANDIE et à la société BILFINGER-BERGER ; qu'une telle mesure qui, pour être utile, impliquerait qu'une appréciation soit portée par le juge des référés ou par l'expert sur l'étendue des obligations contractuelles des parties préjudicie au principal et ne saurait, par suite, être ordonnée sur le fondement des dispositions précitées de l'article R.128 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; qu'il en va de même de la demande d'évaluation des préjudices qu'auraient subis le G.I.E PONT DE NORMANDIE et la société BILFINGER-BERGER ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'annuler l'ordonnance attaquée en tant qu'elle a ordonnée une évaluation des préjudices subis par la C.C.I et rejeter les conclusions présentées, sur ce point, par les constructeurs ;
En ce qui concerne les autres éléments de l'expertise :
Considérant que, devant le juge des référés du Tribunal administratif de ROUEN, la C.C.I du HAVRE avait, par ailleurs, demandé que l'expert ait pour mission "de constater, d'une part, quels sont les moyens mis en oeuvre par le G.I.E PONT DE NORMANDIE sur la totalité de l'exécution du contrat et de rechercher si ces moyens sont suffisants pour parvenir à l'exécution des contrats dans les délais contractuellement prévus" ; que le G.I.E PONT DE NORMANDIE avait sollicité une extension de cette mission à "la détermination générale des causes et difficultés de toute nature rencontrées par les différents intervenants sur le chantier" ; que la société BILFINGER-BERGER avait également demandé que l'expertise soit étendue dans les mêmes conditions ; que le président du tribunal administratif, tenant compte de ces demandes d'extension, avait chargé l'expert "de dire si les délais de réalisation sont respectés et, dans la négative, de donner son avis sur les causes des retards observés et leurs conséquences prévisibles sur la poursuite du chantier et l'échéance de remise de l'ouvrage" ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient la C.C.I, les demandes d'extension de la mission d'expertise, présentées par les constructeurs et ci-dessus rappelées, ne tendaient pas à soumettre au juge des référés des questions distinctes de celles soulevées par la demande principale à laquelle elles se rattachent directement ; que, par ailleurs, les procédures préalables de règlement des différends, prévues par les articles 4-7 du cahier des clauses administratives particulières et 50 du cahier des clauses administratives générales applicables en l'espèce, ne font pas obstacle à ce que les entrepreneurs présentent des conclusions aux fins d'expertise devant le juge des référés ; qu'il n'y a pas lieu, cependant et comme le demandent les constructeurs, d'ordonner une nouvelle extension de l'expertise sur ce point, l'utilité de cette nouvelle extension n'apparaissant pas établie compte tenu de la mission déjà confiée à l'expert par le président du tribunal administratif ;
Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'eu égard aux développements qui précèdent et contrairement à ce qu'a décidé le président du tribunal administratif, les frais d'expertise, tels qu'ils seront liquidés et taxés, devront être avancés pour moitié par la C.C.I du HAVRE, et pour moitié par le G.I.E PONT DE NORMANDIE et la société BILFINGER-BERGER ;
Sur la demande de suppression d'écrits injurieux et diffamatoires :
Considérant que, contrairement à ce que soutient la C.C.I du HAVRE, les dispositions de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 ne font pas obstacle à ce que le juge des référés administratifs prononce la suppression d'écrits injurieux et diffamatoires ; que les passages du mémoire présenté devant le juge des référés du tribunal administratif par la C.C.I du HAVRE et constituant, respectivement, le I, 5ème alinéa, et IV, 4ème et 5ème alinéas dudit mémoire, ne présentent pas un caractère injurieux et diffamatoire ; que, par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence d'un délai de prescription invoqué par la C.C.I, il n'y a pas lieu d'en ordonner la suppression par application des dispositions de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Article 1er - L'ordonnance du 23 septembre 1991 du président du Tribunal administratif de ROUEN est annulée en tant qu'elle a, d'une part, omis de statuer sur les conclusions tendant à la suppression d'écrits injurieux et diffamatoires, d'autre part, ordonné une expertise aux fins d'évaluation des préjudices.
Article 2 - Les frais d'expertise seront avancés pour moitié par la C.C.I du HAVRE, et pour moitié par le G.I.E PONT DE NORMANDIE et la société BILFINGER-BERGER.
Article 3 - L'article 5 de l'ordonnance du 23 septembre 1991 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2 du présent arrêt.
Article 4 - Le surplus de la demande et des conclusions du G.I.E PONT DE NORMANDIE et de la société BILFINGER-BERGER ainsi que le surplus des conclusions de la C.C.I du HAVRE sont rejetés.
Article 5 - Le présent arrêt sera notifié à la société BILFINGER-BERGER, au G.I.E PONT DE NORMANDIE, à la Chambre de commerce et d'industrie du HAVRE et au ministre de l'équipement, du logement et des transports.


Sens de l'arrêt : Annulation partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Référé

Analyses

PROCEDURE - PROCEDURES D'URGENCE - REFERE TENDANT AU PRONONCE D'UNE MESURE D'EXPERTISE OU D'INSTRUCTION - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE (1) - RJ1 Obligation pour le juge d'étendre la mission d'expertise à l'ensemble des éléments de fait indiqués par les parties - Absence (1) - (2) Pouvoir d'ordonner la suppression de passages injurieux et diffamatoires (art - 41 de la loi du 29 juillet 1881) - Existence.

54-03-011-03(1) Saisi d'une demande d'expertise sur le fondement de l'article R. 128 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le juge des référés détermine librement l'étendue de la mission de l'expert sans être lié par les termes des demandes dont il est saisi. Par suite n'est pas entachée d'irrégularité une ordonnance par laquelle le juge des référés n'a pas étendu une expertise à l'ensemble des éléments de fait indiqués par les parties et notamment par le défendeur dans ses observations en défense.

- RJ2 PROCEDURE - PROCEDURES D'URGENCE - REFERE TENDANT AU PRONONCE D'UNE MESURE D'EXPERTISE OU D'INSTRUCTION - CONDITIONS - Mesure ne devant pas préjudicier au principal - Condition non remplie en l'espèce - Mesure d'expertise d'un préjudice financier impliquant une appréciation de l'étendue des obligations contractuelles des parties (2).

54-03-011-04 Le juge des référés, saisi d'une demande d'expertise sur le fondement de l'article R. 128 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, ne peut préjudicier au principal. Il ne saurait dès lors ordonner une mesure d'expertise concernant d'éventuels préjudices financiers dès lors que, comme dans le cas de l'espèce, cette mesure, pour être utile, impliquerait qu'une appréciation soit portée sur l'étendue des obligations contractuelles des parties et préjudicierait ainsi au principal.

54-03-011-03(2) Le juge des référés, statuant sur le fondement de l'article R. 128 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, peut ordonner la suppression de certains passages des mémoires produits par les parties si lesdits passages présentent un caractère injurieux et diffamatoires au sens de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R128
Loi du 29 juillet 1881 art. 41

1.

Cf. CE, 1933-05-17, ville d'Essonnes, p. 526. 2.

Rappr. CE, 1989-01-06, Lovera, p. 3


Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Capion
Rapporteur ?: M. Marchand
Rapporteur public ?: M. Cadenat

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Pleniere
Date de la décision : 02/07/1992
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 91NT00805
Numéro NOR : CETATEXT000007519484 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1992-07-02;91nt00805 ?
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