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27/01/2022 | FRANCE | N°21NC00554

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 27 janvier 2022, 21NC00554


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 4 septembre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit.

Par un jugement n° 2006371 du 21 janvier 2021 le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des m

moires enregistrés les 24, 25 février et 28 mars 2021, M. A..., représenté par Me Costes, demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 4 septembre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit.

Par un jugement n° 2006371 du 21 janvier 2021 le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 24, 25 février et 28 mars 2021, M. A..., représenté par Me Costes, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 21 janvier 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 septembre 2020 pris à son encontre par la préfète du Bas-Rhin ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et dans l'intervalle une autorisation provisoire de séjour, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le même délai et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur la décision de refus de titre de séjour :

- la décision a été prise au terme d'une procédure irrégulière en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, en méconnaissance du deuxième alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est en droit de pouvoir bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi :

- les décisions encourent l'annulation par exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

La requête a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

La demande d'aide juridictionnelle de M. A... a été déclarée caduque par une décision du 4 octobre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Picque a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant sénégalais, né le 3 avril 1987, entré en France pour la première fois le 12 octobre 2006 muni d'un visa long séjour, a bénéficié d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " du 1er décembre 2006 au 2 novembre 2017. Il a quitté le territoire français au mois de novembre 2017 et y est retourné irrégulièrement au mois d'avril 2018, après que sa demande de visa long séjour a été refusée. Le 19 juillet 2019, il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Puis, le 19 février 2020, il a demandé son admission exceptionnelle au séjour en application de l'article L. 313-14 du même code. M. A... fait appel du jugement du 21 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 septembre 2020 de la préfète du Bas-Rhin refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il serait reconduit.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ".

3. M. A... soutient qu'à la date du refus de titre de séjour contesté, il résidait habituellement en France depuis plus de dix ans. Toutefois, s'il a séjourné en France, en situation régulière, du mois d'octobre 2006 au mois de novembre 2017, le requérant ne conteste pas qu'il a quitté le territoire à l'expiration de son dernier titre de séjour et qu'il n'est retourné en France qu'au mois d'avril 2018, en situation irrégulière cette fois-ci. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier, plus particulièrement de la copie du passeport de M. A... produite en première instance, que l'intéressé est également titulaire d'un visa délivré par les Etats-Unis d'Amérique valable du 3 mars 2015 au 1er mars 2025 et qu'il s'est rendu dans ce pays au mois de mai 2018. La date à laquelle il a quitté les Etats-Unis n'est pas connue. De plus, ce même document révèle que M. A... est également retourné au Sénégal le 21 octobre 2018. Enfin, par les pièces qu'il produit, le requérant, ne justifie de sa présence continue sur le territoire français qu'à compter du mois de juillet 2019, la date précise à laquelle il est retourné en France n'étant pas établie. Dans ces conditions, M. A... ne démontre pas qu'il séjournait habituellement en France entre la fin de l'année 2017 et le deuxième semestre de l'année 2019. Compte tenu de la rupture de continuité du séjour de M. A..., qui ne peut être regardée comme ponctuelle et isolée, la préfète n'était donc pas tenue de soumettre sa demande d'admission exceptionnelle au séjour à l'avis de la commission du titre de séjour en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 313-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. M. A..., ainsi qu'il vient d'être dit, après avoir séjourné en France d'octobre 2006 à novembre 2017, n'établit résider à nouveau habituellement en France que depuis le mois de juillet 2019. L'intéressé est célibataire, sans charge de famille. Par la seule durée de ses séjours et la justification de l'exercice d'une activité professionnelle, il ne démontre pas qu'il aurait tissé en France des liens personnels d'une particulière intensité. Par ailleurs, il ne conteste pas que ses parents, deux frères et trois sœurs vivent au Sénégal, pays qu'il a quitté pour la première fois à l'âge de 20 ans et dans lequel il est retourné en 2018. Dans ces conditions, la décision de refus de séjour n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A... une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ". Il appartient à l'autorité administrative, en application de ces dispositions, de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention "vie privée et familiale" répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire".

7. D'une part, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, la préfète n'a pas apprécié de façon manifestement inexacte la situation personnelle et familiale de M. A... en refusant de l'admettre exceptionnellement au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention "vie privée et familiale". D'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. A... est titulaire d'une licence en sciences humaines et sociales, mention sociologie, obtenue en 2010, et d'une maîtrise en sciences humaines et sociales, mention démographie, décernée en 2013. Le 19 juillet 2019, l'académie de Mayotte a donné un avis favorable à la candidature de M. A... pour un poste d'enseignant contractuel en Histoire-Géographie. Cependant le requérant ne justifie d'aucune qualification pour ce métier et ses seules expériences professionnelles, comme agent de sécurité, ne sont pas en rapport avec ses diplômes. Dans ces conditions, c'est sans entacher sa décision d'erreur manifeste d'appréciation que la préfète a pu refuser de l'admettre exceptionnellement au séjour par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ".

8. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... aurait sollicité de la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " recherche d'emploi ou création d'entreprise " sur le fondement de l'article L. 313-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. De plus, la préfète n'a pas examiné, de sa propre initiative, s'il avait vocation à bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions. Par suite, le requérant ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance de ces dispositions à l'appui de la contestation de la décision de refus de titre de séjour en litige.

9. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la préfète aurait apprécié de façon manifestement inexacte les conséquences de la décision sur sa situation personnelle en refusant de lui délivrer un titre de séjour.

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire et fixation du pays de renvoi :

10. Il résulte de ce qui précède que l'illégalité de la décision de refus de séjour n'est pas établie. Par suite, le moyen tiré de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi doivent être annulées en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions de la préfète du Bas-Rhin du 4 septembre 2020. Ses conclusions à fin d'annulation, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, dès lors, être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

2

N° 21NC00554


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Légalité externe.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. SAMSON-DYE
Rapporteur ?: Mme Anne-Sophie PICQUE
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : COSTES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Date de la décision : 27/01/2022
Date de l'import : 01/02/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 21NC00554
Numéro NOR : CETATEXT000045083940 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-01-27;21nc00554 ?
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