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28/10/2021 | FRANCE | N°21NC01466

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 5ème chambre, 28 octobre 2021, 21NC01466


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 24 août 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2006395 du 3 décembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la

cour :

Par une requête enregistrée le 20 mai 2021, M. A..., représenté par Me Snoeckx, deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 24 août 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2006395 du 3 décembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 mai 2021, M. A..., représenté par Me Snoeckx, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 3 décembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 août 2020 pris à son encontre par la préfète du Bas-Rhin ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

- elle méconnaît l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- l'annulation de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour emporte par voie de conséquence l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision attaquée méconnaît l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

sur la décision fixant le pays d'éloignement :

- l'annulation des décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français emporte par voie de conséquence l'annulation de la décision fixant le pays d'éloignement.

La requête a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par ordonnance du 4 août 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 6 septembre 2021.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 15 avril 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Laubriat a été entendu au cours de l'audience publique.

1. M. A..., ressortissant géorgien, est entré sur le territoire français le 10 novembre 2018 afin d'y solliciter la reconnaissance du statut de réfugié. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 28 février 2019, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 28 août 2019. Le 28 juin 2019, M. A... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 24 août 2020, la préfète du Bas-Rhin lui a opposé un refus, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. M. A... fait appel du jugement du 3 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".

3. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

4. En l'espèce, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a indiqué dans son avis du 13 décembre 2019 que si l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut toutefois, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a ajouté que l'état de santé de M. A... lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine.

5. M. A... fait valoir qu'il souffre à la fois d'un symptôme post-traumatique et d'une infection à l'hépatite B et qu'il ne peut bénéficier de soins appropriés dans son pays d'origine. A l'appui de ses allégations, il produit les mêmes pièces que celles déjà versées en première instance. M. A... produit ainsi deux certificats établis les 10 septembre et 3 novembre 2020 par des médecins généralistes selon lesquels son infection à l'hépatite B serait prise en charge par le service d'hépatologie de l'hôpital civil de Strasbourg. M. A... ne produit toutefois pas d'autre document confirmant le diagnostic de ces médecins et précisant la nature exacte de la prise en charge dont il ferait l'objet à l'hôpital civil. Il produit également une copie d'une traduction d'un courrier du 8 juillet 2020 émanant du chef du département de la politique de santé de Géorgie selon lequel " concernant le programme d'Etat de la gestion des hépatites B et D, qui couvre tant des examens diagnostiques que des soins avec des médicaments spécifiques antiviraux, un programme d'Etat pareil à ce jour ne fonctionne pas en Géorgie ". Il ressort toutefois de ce même document -dont, au demeurant, l'original n'est pas produit- " qu'il est prévu qu'un traitement hospitalier utilisant le principe de ticket modérateur soit fourni pour les hépatites virales chroniques (y compris les hépatites B et D) (...). Cependant, ces services ne couvrent pas les médicaments antiviraux spécifiques ". Il ressort ainsi des propres documents produits par M. A... que les hépatites virales chroniques sont prises en charge en Géorgie. A supposer établie que cette prise en charge ne couvre pas les antiviraux spécifiques, cette circonstance serait au cas d'espèce sans incidence dès lors que M. A... ne fournit aucun élément sur la nature de la prise en charge dont il bénéficie en France. S'agissant de sa pathologie psychiatrique, il ressort du certificat médical établi le 2 octobre 2019 par un praticien hospitalier de l'établissement public de santé Alsace Nord que M. A... bénéficie d'un suivi psychothérapeutique à raison d'une consultation par mois depuis mai 2019 couplé avec un traitement médicamenteux associant un neuroleptique, un anxiolytique et un hypnotique. Il ressort toutefois de la fiche MedCOI relative à l'état sanitaire de la Géorgie produite par la préfète du Bas-Rhin en première instance que des soins appropriés aux troubles psychiatriques sont dispensés dans ce pays, qu'une prise en charge spécialisée y est proposée et que les antidépresseurs, anxiolytiques et hypnotiques nécessaires y sont disponibles. Les documents généraux produits par le requérant - notamment le rapport établi en 2018 par l'organisation suisse d'aide aux réfugiés - ne suffisent donc pas à remettre en cause l'appréciation de la préfète - qui s'est appropriée l'avis émis par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration- selon laquelle M. A... peut effectivement bénéficier dans son pays d'origine d'un traitement adapté à son état de santé. Enfin si M. A... soutient que son renvoi en Géorgie sur les lieux de son trauma risque de provoquer de provoquer une aggravation de sa symptomatologie, il ressort des pièces du dossier que sa demande d'asile a été rejetée tant par l'office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile au motif que les menaces et les persécutions dont il faisait état dans sa demande d'asile n'étaient pas avérées. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-11 11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté, ainsi que celui tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. A....

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ne peut qu'être écarté.

7. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, doit être écarté.

8. En troisième et dernier lieu, M. A... reprend en appel, sans apporter d'éléments nouveaux ni critiquer utilement les motifs de rejet qui lui ont été opposés en première instance, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus, à juste titre, par le tribunal administratif de Strasbourg dans son jugement du 3 décembre 2020 et énoncés aux points 8 et 9 dudit jugement.

Sur la décision fixant le pays d'éloignement :

9. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays d'éloignement devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation des décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

4

N° 21NC01466


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC01466
Date de la décision : 28/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAUBRIAT
Rapporteur ?: M. Alain LAUBRIAT
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : SNOECKX

Origine de la décision
Date de l'import : 09/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-10-28;21nc01466 ?
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