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05/10/2021 | FRANCE | N°21NC00539

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 05 octobre 2021, 21NC00539


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 27 mai 2020 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière.

Par un jugement n° 2004769 du 21 octobre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la co

ur :

Par une requête, enregistrée sous le n° 21NC00539 le 23 février 2021, Mme B... A...,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 27 mai 2020 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière.

Par un jugement n° 2004769 du 21 octobre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée sous le n° 21NC00539 le 23 février 2021, Mme B... A..., représenté par Me Roussel, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2004769 du tribunal administratif de Strasbourg du 21 octobre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 27 mai 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un certificat de résidence ou, à défaut, dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, durant ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de délivrance d'un certificat de résidence a été prise par une autorité incompétente ;

- la décision en litige est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les stipulations du 7) du deuxième alinéa de l'article 6 de la convention franco-algérienne du 27 décembre 1968 relative à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- elle méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme te des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise par une autorité incompétente ;

- la décision en litige est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant fixation du pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du second alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2021, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par Mme A... ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 janvier 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention franco-algérienne du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Meisse, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A... est une ressortissante algérienne, née le 2 août 1953. Elle est entrée régulièrement en France, le 28 juin 2018, sous couvert de son passeport revêtu d'un visa de court séjour à entrées multiples. Le 7 octobre 2019, elle a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence en qualité d'étranger malade sur le fondement des stipulations du 7) du deuxième alinéa de l'article 6 de la convention franco-algérienne du 27 décembre 1968, relative à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles. Toutefois, à la suite de l'avis défavorable du collège de médecins de l'Office frnaçais de l'immigration et de l'intégration du 14 février 2020, le préfet du Haut-Rhin, par un arrêté du 27 mai 2020, a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière. Mme A... a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 27 mai 2020. Elle relève appel du jugement n° 2004769 du 21 octobre 2020 qui rejette sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un certificat de résidence :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la décision en litige a été signée, " pour le préfet et par délégation ", par M. Jean-Claude Geney, secrétaire général de la préfecture du Haut-Rhin. Or, par un arrêté du 23 mars 2020, régulièrement publié le même jour au recueil n° 25 des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Haut-Rhin a consenti à l'intéressé une délégation de signature à l'effet de signer notamment, en toutes matières, tout arrêté ou décision relevant des attributions de l'Etat dans le département, à l'exception de certaines catégories d'actes au nombre desquelles ne figurent les mesures relatives au séjour et à l'éloignement des étrangers. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte manque en fait et il ne peut, dès lors, qu'être écarté.

3. En deuxième lieu, la décision en litige énonce, dans ses visas et motifs, les considérations de droit et de fait, qui en constituent le fondement. Elle est suffisamment motivée au regard des exigences de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation manque également en fait et il ne peut dès lors qu'être écarté.

4. En troisième lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article 6 de la convention franco-algérienne du 27 décembre 1968, relative à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ".

5. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser d'admettre Mme A... au séjour en qualité d'étranger malade, le préfet du Haut-Rhin s'est notamment fondé sur l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 14 février 2020. Selon cet avis, si l'état de santé de la requérante nécessite une prise en charge médicale, dont le défaut est susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il lui permet de voyager sans risque à destination de son pays d'origine, où, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé, elle peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié à ses pathologies. Si Mme A... fait valoir qu'elle souffre d'un cancer du sein traité par hormonothérapie, les pièces médicales versées aux débats ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation à laquelle s'est livré le préfet du Haut-Rhin sur la disponibilité effective du traitement dans le pays d'origine. En outre, en se bornant à indiquer en termes identiques et sans autre précision que " l'état de santé de Mme A... ne permet pas le déplacement de la patiente ", les certificats médicaux des 5 août et 1er septembre 2020, qui sont postérieurs à la décision en litige, ne suffisent pas davantage à infirmer l'appréciation portée par l'autorité préfectorale sur la capacité de l'intéressée, eu égard à son état de santé à la date de la décision en litige, à voyager sans risque. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 7) du deuxième alinéa de l'article 6 de la convention franco-algérienne du 27 décembre 1968 ne peut être accueilli.

6. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... est arrivée sur le territoire français le 28 juin 2018 à l'âge de soixante-quatre ans. Elle est célibataire et sans enfant à charge. En dehors d'un frère qui l'héberge, elle ne justifie d'aucune attache familiale ou personnelle, ni d'une intégration particulière en France. Elle n'établit pas être isolée en Algérie, où vivent encore quatre membres de sa fratrie. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, il y a lieu d'écarter les moyens tirés respectivement de l'incompétence du signataire de la décision en litige et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. En second lieu, aux termes du premier paragraphe de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger (...). / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III / (...) ".

10. Ainsi qu'il a été dit, au point 3 du présent arrêt, la décision relative au séjour étant suffisamment motivée en droit et en fait, la décision en litige, conformément aux dispositions, alors en vigueur, du deuxième alinéa du premier paragraphe de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision portant fixation du pays de destination :

11. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes du second alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

12. Mme A..., qui peut voyager sans risque à destination de l'Algérie et y bénéficier effectivement d'un traitement approprié à ses pathologies, n'établit pas qu'elle risquerait d'être exposée à des traitements prohibés par les stipulations et les dispositions précitées. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations et de ces dispositions doit être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 27 mai 2020. Par suite, elle n'est pas davantage fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

N° 21NC00163 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21NC00539
Date de la décision : 05/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REES
Rapporteur ?: M. Eric MEISSE
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : ROUSSEL

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-10-05;21nc00539 ?
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