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03/06/2021 | FRANCE | N°20NC02573

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 03 juin 2021, 20NC02573


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance du 20 décembre 2019, enregistrée le 23 décembre suivant au greffe du tribunal administratif de Nancy, la présidente de la 9ème chambre du tribunal administratif de Lyon a transmis au tribunal administratif de Nancy la requête, enregistrée le 13 décembre 2019 au greffe du tribunal administratif de Lyon, présentée par M. B... A....

M. B... A... a demandé au tribunal, d'une part, d'annuler l'arrêté du 29 novembre 2019 par lequel le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le ter

ritoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et, d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance du 20 décembre 2019, enregistrée le 23 décembre suivant au greffe du tribunal administratif de Nancy, la présidente de la 9ème chambre du tribunal administratif de Lyon a transmis au tribunal administratif de Nancy la requête, enregistrée le 13 décembre 2019 au greffe du tribunal administratif de Lyon, présentée par M. B... A....

M. B... A... a demandé au tribunal, d'une part, d'annuler l'arrêté du 29 novembre 2019 par lequel le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation administrative en lui délivrant, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 1903791 du 27 février 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée sous le n° 20NC02573 le 3 septembre 2020, M. B... A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 27 février 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône du 29 novembre 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation administrative en lui délivrant, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me C... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé, en fait comme en droit, et sa motivation est stéréotypée ;

- il est entaché d'un défaut d'examen personnalisé de sa situation ;

- il méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 25 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Favret, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant sénégalais né le 23 mars 1973, est entré régulièrement en France le 28 mai 2008. Il a bénéficié de titres de séjour régulièrement renouvelés jusqu'au 15 avril 2013, en qualité de conjoint d'une Française, et s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français depuis cette date. A la suite d'un contrôle de police effectué le 29 novembre 2019 à la gare de Lyon Perrache, le préfet du Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination, par un arrêté du 29 novembre 2019, pris sur le fondement du 4° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. A... fait appel du jugement du 27 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 29 novembre 2019 :

2. En premier lieu, l'arrêté du préfet du Rhône obligeant M. A... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination, qui n'est pas stéréotypé, mentionne les textes dont il fait application, notamment le 4° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article L. 513-2 du même code, et précise que l'intéressé a bénéficié de titres de séjour régulièrement renouvelés jusqu'au 15 avril 2013 et s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français depuis cette date. Alors que le préfet n'était pas tenu de mentionner dans son arrêté l'ensemble des éléments relatifs à la situation de M. A..., il relève également que la décision portant obligation de quitter le territoire français ne porte pas une atteinte excessive ou disproportionnée au droit de l'intéressé à la protection de sa vie privée et familiale, dès lors notamment que M. A... avait lui-même a déclaré être séparé de son épouse et ne pas avoir d'enfant à charge. L'arrêté contesté précise enfin que l'intéressé n'établit pas que sa vie ou sa liberté serait menacée ou qu'il serait exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en cas de retour dans son pays d'origine. Il comporte, dès lors, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cet arrêté doit être écarté.

3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Rhône n'aurait pas procédé à l'examen de la situation particulière de M. A..., avant de l'obliger à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et de fixer le pays à destination. Dès lors, le moyen tiré de ce que préfet n'aurait pas procédé à un tel examen doit être écarté.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...)7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France le 28 mai 2008, à l'âge de 35 ans, pour y épouser une Française le 5 juillet 2008, et qu'il a ainsi bénéficié de titres de séjour régulièrement renouvelés jusqu'au 15 avril 2013, année au cours de laquelle il s'est, ainsi qu'il le reconnaît lui-même, définitivement séparé de son épouse. S'il résidait ainsi sur le territoire français depuis plus de onze ans à la date de l'arrêté préfectoral contesté, la durée de sa présence sur le territoire français s'explique en grande partie par le fait qu'il s'est maintenu irrégulièrement en France à partir de 2013 et jusqu'à son interpellation par les services de police le 29 novembre 2019. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il serait dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à son arrivée en France et où résident sa mère et ses frères et soeurs. Par ailleurs, l'intéressé n'établit pas, par les pièces qu'il produit, l'intensité de liens sociaux et amicaux qu'il aurait tissés en France. Dans ces conditions, et nonobstant la circonstance qu'il a travaillé au sein de la société Fruité SAS et de l'association " Pour le bateau de Genève ", M. A..., séparé et sans enfant, n'est pas en mesure d'établir l'existence de liens personnels ou familiaux en France d'une ancienneté et d'une stabilité telles que l'arrêté litigieux porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Par suite, les moyens tirés de ce que l'arrêté contesté méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés. Compte tenu des circonstances qui viennent d'être analysées, le préfet du Rhône n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de son pouvoir de régularisation.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône du 29 novembre 2019. Ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation administrative en lui délivrant, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour doivent être rejetées par voie de conséquence.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

8. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le conseil de M. A... demande au titre des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

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N° 20NC02573


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Jean-Marc FAVRET
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : ANNIE LEVI-CYFERMAN - LAURENT CYFERMAN

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Date de la décision : 03/06/2021
Date de l'import : 15/06/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 20NC02573
Numéro NOR : CETATEXT000043629387 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-06-03;20nc02573 ?
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