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08/04/2021 | FRANCE | N°19NC03074-19NC03075

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 08 avril 2021, 19NC03074-19NC03075


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. L... F... et Mme M... H... épouse F... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 15 mai 2019 par lesquels le préfet du Bas-Rhin a refusé d'une part, de renouveler l'attestation de demande d'asile de M. F... et de délivrer un titre de séjour à Mme F... et d'autre part, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et leur a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

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r un jugement n° 1904048, 1904049 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de St...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. L... F... et Mme M... H... épouse F... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 15 mai 2019 par lesquels le préfet du Bas-Rhin a refusé d'une part, de renouveler l'attestation de demande d'asile de M. F... et de délivrer un titre de séjour à Mme F... et d'autre part, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et leur a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 1904048, 1904049 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le n°19NC03074 le 29 octobre 2019, M. L... F..., représenté par Me P..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 mai 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", à défaut une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et ce sous astreinte de cent cinquante euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- en écartant le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte, les premiers juges ont commis une erreur de fait dès lors que si l'arrêté le concernant a été signé par Mme A... en l'absence de Mme D..., l'arrêté notifié le même jour à son épouse l'a été par Mme D... ; il est impossible que Mme D... ait été absente ou empêchée pour signer un seul des deux arrêtés alors que ces deux décisions concernent la même famille et qu'ils ont nécessairement été pris au même moment ;

- les premiers juges ont insuffisamment motivé leur jugement et ont commis une erreur de fait au regard du moyen tiré de la méconnaissance par le refus de séjour de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Sur la légalité de l'arrêté du 15 mai 2019 :

- l'arrêté est entaché d'un vice de compétence ;

- les premiers juges ont commis une erreur de fait en retenant que leur fils vit en Serbie ;

- l'arrêté méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le préfet a entaché ses décisions d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur sa situation familiale dès lors que l'état de santé de sa fille N... est incompatible avec la mesure d'éloignement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 janvier 2021, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.

II. Par une requête, enregistrée sous le n°19NC03075 le 29 octobre 2019, Mme M... H... épouse F..., représentée par Me P..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 mai 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", à défaut une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et ce sous astreinte de cent cinquante euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- les premiers juges ont insuffisamment motivé leur jugement et ont commis une erreur de fait au regard du moyen tiré de la méconnaissance par le refus de séjour de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Sur la légalité de l'arrêté du 15 mai 2019 :

- l'arrêté contesté est entaché d'incompétence ;

- l'arrêté contesté a été pris au terme d'une procédure qui méconnait les articles L.311-12 et R. 313-22 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que l'avis du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ne lui a jamais été communiqué ; elle a été privée d'une garantie dès lors qu'elle n'a pas été mise en mesure d'apprécier, préalablement à l'édiction de l'arrêté contesté, la composition régulière du collège de médecins de l'OFII ;

- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les premiers juges ont commis une erreur de fait en retenant que leur fils vit en Serbie ;

- l'arrêté méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le préfet a entaché ses décisions d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur sa situation dès lors que l'état de santé de sa fille N... est incompatible avec la mesure d'éloignement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 janvier 2021, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

M. et Mme F... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 11 février 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme J... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme F..., de nationalité serbe, nés respectivement le 2 octobre 1987 et le 28 décembre 1985, sont entrés régulièrement en France le 22 septembre 2017 pour y solliciter l'asile. Ils étaient accompagnés des deux enfants mineurs, I... et N... O..., que Mme F... a eu d'une première union. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) du 21 février 2018, confirmées par des décisions de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 14 septembre 2018. Le 2 mai 2018, Mme H... a sollicité son admission au séjour en raison de l'état de santé de sa fille mineure. Toutefois, par deux arrêtés du 15 mai 2019, le préfet du Bas-Rhin a refusé d'admettre Mme H... au séjour et a refusé de renouveler l'attestation de demandeur d'asile à M. F..., leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et leur a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an. M. et Mme F... relèvent appel du jugement du 3 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces arrêtés du 15 mai 2019.

Sur la jonction :

2. Les requêtes n°19NC03074 et n°19NC03075 présentent à juger la situation d'un couple au regard de son droit au séjour et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre par un même jugement.

Sur la régularité du jugement :

3. En premier lieu, M. F... ne saurait soutenir que le tribunal administratif de Strasbourg a entaché d'irrégularité son jugement en écartant de manière erronée le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté pris à son encontre dès lors que cette critique des motifs du jugement ne concerne pas la régularité du jugement mais son bien-fondé.

4. En deuxième lieu, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments avancés par les requérants, ont, au point 13 du jugement, écarté comme non fondé le moyen tiré de la violation de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant entachant d'illégalité les arrêtés contestés en retenant que les intéressés n'établissent pas par la production d'élément probant que leur fille N... ne pourrait bénéficier d'une scolarité adaptée en Serbie, " où elle a vécu à l'instar de sa famille la majeure partie de sa vie et où résident son frère, ses grands-parents et oncles et tantes ". Dans ces conditions, le moyen invoqué par M. et Mme F... tiré de l'insuffisance de motivation du jugement doit être écarté comme manquant en fait, nonobstant la circonstance que n'y soit pas évoquée l'interruption de la scolarité de l'enfant N... qui accuse un retard de plusieurs années.

5. En troisième lieu, les requérants ne sauraient soutenir que le tribunal administratif a entaché d'irrégularité son jugement en indiquant de manière erronée que leur fils réside en Serbie dès lors que cette critique des motifs du jugement ne concerne pas la régularité du jugement mais son bien-fondé.

6. Il s'ensuit que les moyens tirés de l'irrégularité du jugement de première instance ne peuvent qu'être écartés.

Sur les conclusions à fin d'annulation des arrêtés du 15 mai 2019 :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des arrêtés du 15 mai 2019 pris à l'encontre de M. et Mme F... :

7. En premier lieu, par un arrêté du 26 mars 2019, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 27 mars 2019, le préfet du Bas-Rhin a donné délégation à Mme G... D..., directrice des migrations et de l'intégration par intérim, à l'effet de signer tous arrêtés et décisions relevant des attributions dévolues à cette direction, à l'exception de certaines catégories d'actes au nombre desquelles ne figurent pas les décisions attaquées. Cet arrêté prévoit expressément qu'en cas d'absence ou d'empêchement de cette dernière, la délégation sera exercée, à l'exclusion des refus de séjour et dans l'ordre, par Mme K... A..., M. R... E... et Mme C... Q....

8. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté litigieux refusant le renouvellement de la demande d'asile de M. F..., pris à la suite du rejet définitif de sa demande d'asile, a été signé par Mme A..., alors que l'arrêté concernant la situation de Mme H..., qui fait l'objet d'un refus de séjour, a été signé par Mme D..., toutes deux compétentes pour ce faire, en vertu de la délégation de signature précitée. Contrairement à ce qu'affirme M. F... dans sa requête d'appel, la seule circonstance que l'arrêté attaqué du 15 mai 2019 a été signé par Mme A... en l'absence de Mme D..., alors que l'arrêté notifié le même jour à son épouse a été signé par Mme D... ne saurait justifier que cette dernière n'aurait pas été absente ou empêchée lors de la signature de l'arrêté pris à son encontre ni d'ailleurs que les arrêtés en litige ont " nécessairement été pris au même moment ". Par suite, le moyen tiré de ce que les arrêtés litigieux auraient été signés par une autorité incompétente manque en fait et doit être écarté.

En ce qui concerne les autres moyens :

9. D'une part, aux termes de l'article L.311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si leur présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour est délivrée aux parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, ou à l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité parentale sur ce mineur, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée". Aux termes du 11° de l'article L.313-11 du même code : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. (...)". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " (...) le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...) Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. ".

10. D'autre part, l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise enfin que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

11. Par un avis du 28 août 2017, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a indiqué que si l'état de santé de la fille de Mme F... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de ce pays.

12. En premier lieu, il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire que le préfet devait communiquer à la requérante l'avis du collège des médecins de l'OFII avant l'édiction de l'arrêté litigieux.

13. En deuxième lieu, il ressort des pièces produites par le préfet en première instance, notamment de l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII le 26 novembre 2018 et du bordereau de transmission daté du même jour émis à l'attention de la préfecture du Bas-Rhin, que le rapport sur l'état de santé de l'enfant N..., prévu à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'arrêté du 27 décembre 2016 susvisés, a été établi le 24 septembre 2018 par un médecin qui n'a pas siégé au sein du collège de médecins précité à l'origine de l'avis transmis au préfet, ce dernier étant composé de trois autres médecins régulièrement désignés par une décision du directeur général de l'OFII du 24 septembre 2018. Par suite, Mme F... n'est pas fondée à soutenir que la décision du préfet a été prise au terme d'une procédure qui n'aurait pas respecté les dispositions des articles R.313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il est établi que le médecin instructeur à l'origine du rapport médical n'a pas siégé au sein du collège de médecins de l'OFII.

14. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que pour refuser la délivrance à

Mme H... d'une autorisation provisoire de séjour en qualité de parent d'un mineur étranger malade, le préfet du Bas-Rhin s'est notamment fondé sur l'avis du 26 novembre 2018 du collège de médecins de l'OFII dont il ressort que si l'état de santé de l'enfant N... nécessite une prise en charge médicale, dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut effectivement bénéficier en Serbie d'un traitement approprié eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans ce pays et qu'elle peut voyager sans risque pour sa santé vers ce pays. Les requérants font valoir qu'en raison des discriminations subies par la communauté rom en Serbie, dont Mme F... et sa fille sont issues, cette dernière n'aura pas accès aux soins nécessités par son état de santé. Toutefois, et comme l'ont retenu les premiers juges, si les certificats médicaux relatifs à l'état de santé de l'enfant N... attestent la gravité de sa pathologie, qui n'est d'ailleurs pas contestée, ils n'établissent pas que cette dernière ne pourrait pas bénéficier effectivement en Serbie d'un traitement approprié. Par ailleurs, les extraits produits de rapports datant de 2005, 2012 et 2013 établis par la commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada, l'organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR) et la fondation Open Society relatifs à l'accès des personnes roms aux services de santé en Serbie, lesquels exposent de manière générale la situation des roms au regard de l'accès au système de santé en Serbie, ne sont pas davantage de nature à établir que l'enfant N... ne pourrait bénéficier d'une prise en charge médicale dans son pays d'origine. Dans ces conditions, dès lors que l'enfant N... ne remplit pas les conditions énoncées par le 11° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, Mme H... ne saurait soutenir que le préfet a méconnu les dispositions de l'article L.311-12 du même code en prenant la décision attaquée.

15. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

16. Pour les mêmes raisons que celles indiquées au point 14 du présent arrêt, les requérants ne produisent aucun document de nature à remettre en cause l'appréciation faite par le collège des médecins de l'OFII dans son avis du 26 novembre 2018 et par le préfet selon laquelle l'enfant N... peut bénéficier effectivement d'un traitement dans son pays d'origine. Par ailleurs, et comme l'ont indiqué les premiers juges, si elle bénéficie en France d'une scolarisation adaptée à sa pathologie et à son retard d'apprentissage, les requérants n'établissent pas, par les pièces qu'ils produisent, que la fille de Mme F... ne pourrait pas bénéficier d'une scolarité adaptée en Serbie, où elle a vécu avant son entrée sur le territoire français et où résident son frère, Igor O..., ses grands-parents et oncles et tantes. Il s'ensuit que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le préfet a méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant en prenant les arrêtés contestés. Pour les mêmes motifs, ils ne sont pas davantage fondés à soutenir que le préfet a entaché ses décisions d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur leur situation.

17. En dernier lieu, si les requérants soutiennent que les premiers juges ont commis une erreur de fait en indiquant que le fils de Mme F... vit en Serbie alors qu'il résiderait en France avec eux, il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme F... est la mère de trois enfants nés d'une première union et que son fils B... O... réside en Serbie avec son père qui est l'unique détenteur des droits parentaux. Ils ont d'ailleurs déclaré aux services préfectoraux que seuls I... et N... O... étaient entrés sur le territoire français avec eux. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté.

18. Il résulte de tout ce qui précède, que M. et Mme F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés attaqués. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes présentées respectivement par M. et Mme F... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. L... F... et Mme M... H... épouse F... et au ministre de l'intérieur.

Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

N° 19NC03074, 19NC03075 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC03074-19NC03075
Date de la décision : 08/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : BURKATZKI

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-04-08;19nc03074.19nc03075 ?
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