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08/04/2021 | FRANCE | N°19NC01578

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 08 avril 2021, 19NC01578


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010, 2011 et 2012, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1701426 du 29 janvier 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 mai 2019, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :>
1°) d'annuler ce jugement du 29 janvier 2019 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010, 2011 et 2012, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1701426 du 29 janvier 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 mai 2019, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 janvier 2019 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, il ne s'est pas borné à soutenir devant eux que le montant des frais remboursés " était normal pour une personne exerçant sa fonction " puisqu'il a également soutenu que les allocations en litige étaient conformes au " Spesenrèglement " du Canton de Bâle-Campagne et au guide d'établissement du certificat de salaire suisse ;

- l'administration a interprété de façon erronée ce guide en indiquant dans la proposition de rectification du 26 novembre 2013 que la case figurant sur la ligne 13-1-1 de ses bulletins de salaire, correspondant au remboursement des frais réels, n'était pas cochée, alors que ses bulletins de salaire sont conformes au " Spesenreglement " ;

- il peut prétendre à l'exonération de ces remboursements forfaitaires de frais, sur le fondement des dispositions du 1° de l'article 81 du code général des impôts, dès lors que les frais remboursés par ces allocations constituent des frais de représentation normaux pour un commercial et compensent les frais réels qu'il a dû exposer en raison de ses importantes fonctions au sein de la société Vitra AG ; il ne doit être pénalisé du fait que le " Spesenrèglement " du Canton de Bâle-Campagne, par souci de simplification administrative, ne prévoit pas de remboursement de frais réels concernant les frais de représentation ;

- l'administration a méconnu sa doctrine référencée BOI-RSA-CHAMP-20-50-10-10.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 décembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966 ;

- l'accord du 11 avril 1983 passé entre le gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relatif à l'imposition des rémunérations des travailleurs frontaliers ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de Mme Haudier, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a exercé des fonctions commerciales au sein de la société suisse Vitra AG alors qu'il était résident fiscal français. Il a fait l'objet d'un contrôle sur pièces portant sur les années 2010, 2011 et 2012, au terme duquel, par une proposition de rectification, établie selon la procédure de rectification contradictoire, l'administration l'a informé de la réintégration dans son revenu imposable des allocations versées par son employeur suisse au titre des années précitées pour des montants respectifs de 10 200 francs suisses, 11 820 francs suisses et 12 450 francs suisses et conséquemment de son assujettissement à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu s'élevant, en droits et pénalités, à 1 228 euros, 2 707 euros et 2 918 euros. M. C... relève appel du jugement du 29 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur le bien fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 4A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. / Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française. ". Aux termes de l'article 4 B du même code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A :/a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ;(... "). Enfin, aux termes de l'article 1er de l'accord franco-suisse du 11 mars 1983 relatif à l'imposition des rémunérations des travailleurs frontaliers : " Les salaires, traitements et autres rémunérations similaires reçus par les travailleurs frontaliers ne sont imposables que dans l'Etat où ils sont les résidents, moyennant une compensation financière au profit de l'autre Etat. ". Il est constant que pendant la période en litige, M. C..., travailleur frontalier, résidait en France. Il était par conséquent résident fiscal français au sens des dispositions précitées de l'article 4A du code général des impôts et sa situation était donc soumise au régime fiscal français.

3. D'autre part, aux termes de l'article 79 du code général des impôts : " Les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu ". Aux termes de l'article 81 du même code : "Sont affranchis de l'impôt : 1° Les allocations spéciales destinées à couvrir les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi et effectivement utilisées conformément à leur objet...". Les contribuables salariés qui entendent bénéficier de ces dispositions à raison de sommes que leur a versées leur employeur doivent être en mesure de justifier que ces sommes ont couvert des frais qu'ils ont réellement exposés, ainsi que l'exigeaient leurs fonctions au sein de l'entreprise, dans l'intérêt de cette dernière.

4. M. C... soutient que les allocations forfaitaires en litige, qui lui ont été versées par son employeur, la société Vitra AG, et qui figurent à la ligne 13.2 de ses bulletins de salaire, lesquels ont été établis conformément au " guide d'établissement du certificat de salaire et de l'attestation des rentes " et vérifiés en application du règlement des remboursements de frais dit " Spesenreglement " agréé par l'autorité fiscale du canton de Bâle Campagne, justifient qu'il a exposé d'importants frais de représentation pendant les années en litige, en raison de ses fonctions de " commercial " exercées au sein de cette société. Toutefois, en se bornant à se prévaloir des mentions ainsi portées sur sa fiche de paie sans apporter d'éléments justificatifs concrets et précis, et alors que les montants chiffrés indiqués à la ligne 13.2 des certificats de salaire de l'intéressé visent des frais forfaitaires de représentation qui ne correspondent pas à des remboursements de frais réels dépassant les seuils légaux suisses, lesquels figurent à la ligne 13.1, M. C... ne saurait être regardé en l'espèce comme apportant les justifications nécessaires et suffisantes qui auraient permis d'établir que les sommes en litige correspondent à des frais inhérents à son emploi qu'il a réellement exposés, exigés par ses fonctions au sein de l'entreprise, dans l'intérêt de cette dernière. Dans ces conditions, ces sommes sont légalement imposables sur le fondement des dispositions précitées de l'article 79 du code général des impôts.

En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :

5. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " (...) Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ".

6. D'une part, M. C... ne peut utilement se prévaloir des dispositions du § 140 de la documentation administrative de base reprise dans la base Bofip-Impôts sous la référence BOI-RSA-CHAMP-20-50-10-10 selon laquelle : "Il convient de ne pas rejeter systématiquement, pour le seul motif que leur emploi ne ferait pas l'objet de justifications précises, les allocations pour frais au sujet desquelles le titulaire apporte toutes indications utiles quant à leur raison d'être et quant à leur utilisation, permettant ainsi à l'administration d'en apprécier le bien-fondé (...) ", qui ne donnent pas une interprétation différente de la loi fiscale dont il a été fait application précédemment et ne comporte qu'une simple recommandation, dans une hypothèse au demeurant non remplie au cas d'espèce, ne pouvant à ce titre être opposée à l'administration sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

7. D'autre part, le contribuable ne peut utilement se prévaloir du " guide d'établissement du certificat de salaire et de l'attestation des rentes " ni du règlement des remboursements de frais dit " Spesenreglement " agréé par l'autorité fiscale du canton de Bâle Campagne qui n'émanent pas d'une autorité fiscale française et qui, au demeurant, ne font pas état du caractère non imposable des allocations forfaitaires en litige.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

2

N° 19NC01578


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC01578
Date de la décision : 08/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-02-07 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Traitements, salaires et rentes viagères.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : JUDICIA CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-04-08;19nc01578 ?
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