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22/12/2020 | FRANCE | N°20NC00753-20NC00756

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 22 décembre 2020, 20NC00753-20NC00756


Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... F... et Mme A... D... épouse F... ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 13 août 2019 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils sont susceptibles d'être reconduits.

Par un jugement nos 1902510 et 1902511 du 28 novembre 2019, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demand

e.

Procédures devant la cour :

I - Par une requête et un mémoire, enregistrés so...

Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... F... et Mme A... D... épouse F... ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 13 août 2019 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils sont susceptibles d'être reconduits.

Par un jugement nos 1902510 et 1902511 du 28 novembre 2019, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande.

Procédures devant la cour :

I - Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 20NC00753, les 19 mars et 29 septembre 2020, M. F... et Mme D..., représentés par Me B..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 novembre 2019 du tribunal administratif de Nancy ;

2°) d'annuler les arrêtés du 13 août 2019 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils sont susceptibles d'être reconduits ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de leur délivrer l'attestation d'asile prévue par l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de réexaminer leur situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- les arrêtés litigieux sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation ;

- ils se sont vus reconnaître la qualité de réfugié par une décision du 15 septembre 2020 de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), qui a annulé les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatride (OFPRA) du 30 avril 2020 ;

- les arrêtés litigieux, édictés sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont, en conséquence, dépourvus de base légale ;

- ils méconnaissent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 novembre 2020, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la reconnaissance du statut de réfugié de M. F... et de Mme D... est postérieure aux arrêtés litigieux à laquelle leur légalité doit être appréciée ;

- aucun des moyens soulevés par M. F... et Mme D... n'est fondé.

II - Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 20NC00756, les 19 mars et 29 septembre 2020, M. F... et Mme D..., représentés par Me B..., demandent à la cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement du 28 novembre 2019 de la magistrate désignée du tribunal administratif de Nancy et la suspension des décisions du 13 août 2019 du préfet de Meurthe-et-Moselle portant obligation de quitter le territoire français jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ;

2°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de leur délivrer l'attestation d'asile prévue par l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- leur requête est recevable ;

- leur éloignement aurait des conséquences difficilement réparables pour eux ;

- l'exécution du jugement attaqué doit être suspendue afin de préserver leur sécurité ;

- ils font état de moyens sérieux de nature à justifier la suspension du jugement attaqué en ce que d'une part, les arrêtés du 13 août 2019 sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation, d'autre part, qu'ils sont dépourvus de base légale, et enfin de ce qu'ils méconnaissent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- ils se sont vus reconnaître la qualité de réfugié par une décision du 15 septembre 2020 de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), qui a annulé les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 30 avril 2020 ;

- les arrêtés litigieux, édictés sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont, en conséquence, dépourvus de base légale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 novembre 2020, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. F... et Mme D... n'est pas fondé.

M. F... et Mme D... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions des 11 mars et 14 mai 2020.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C..., présidente assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. F..., ressortissant de double nationalité russe et géorgienne né le 20 septembre 1979 et Mme D... épouse F..., ressortissante géorgienne née le 9 septembre 1984, sont entrés en France le 20 décembre 2018 avec leurs trois enfants, nés en 2006, 2008 et 2014. Leur demande d'asile a été rejetée par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 30 avril 2019. Par des arrêtés du 13 août 2019, le préfet de Meurthe-et-Moselle les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils sont susceptibles d'être reconduits. Par un jugement du 28 novembre 2019, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du 13 août 2019. M. F... et Mme D... épouse F..., relèvent appel de ce jugement par une requête enregistrée sous le n° 20NC00753 et demandent qu'il soit sursis à son exécution par une requête enregistrée sous le n° 20NC00756, qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français :

2. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". Aux termes de l'article L. 511-5 du même code : " En cas de reconnaissance de la qualité de réfugié ou d'octroi de la protection subsidiaire, l'autorité administrative abroge l'obligation de quitter le territoire français qui, le cas échéant, a été prise. Elle délivre sans délai au réfugié la carte de résident prévue au 8° de l'article L. 314-11 (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 15 septembre 2020, la CNDA a annulé les décisions du 30 avril 2019 par lesquelles l'OFPRA avait rejeté la demande d'asile de M. F... et celle de Mme D... épouse F... et leur a reconnu la qualité de réfugié. La décision du 15 septembre 2020 de la CNDA, alors même qu'elle est postérieure aux décisions portant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours du 13 août 2019 du préfet de Meurthe-et-Moselle, a pour effet de les priver de base légale. Elles ne peuvent, en conséquence, qu'être annulées. Il y a lieu, par voie de conséquence, d'annuler également les décisions fixant le pays à destination duquel les requérants sont susceptibles d'être reconduits.

4. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. F... et Mme D... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Il résulte de l'instruction qu'un récépissé de demande de carte de séjour a été délivré à M. F... et à Mme D... dans l'attente de la fabrication de leur titre de séjour. Par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur leurs conclusions tendant à la délivrance d'une attestation d'asile et au réexamen de leur situation.

Sur les conclusions à fins de sursis à exécution du jugement attaqué :

6. Le présent arrêt statue sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement du 29 novembre 2019 du tribunal administratif de Nancy. Il n'y a, par suite, plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête, enregistrée sous le n° 20NC020756, de M. F... et de Mme D... qui doivent être regardées comme tendant exclusivement à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.

Sur les frais liés aux instances :

7. M. F... et Mme D... ont obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, leur avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me B... avocate de M. F... et de Mme D..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me B... de la somme de 1 500 euros.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 28 novembre 2019 de la magistrate désignée du tribunal administratif de Nancy et les arrêtés du 13 août 2019 du préfet de Meurthe-et-Moselle sont annulés.

Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 20NC00756 de M. F... et de Mme D... à fins de sursis à exécution du jugement du 29 novembre 2019 et sur leurs conclusions à fin d'injonction dans la requête n° 20NC00753.

Article 3 : L'Etat versera à Me B... une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... F..., à Mme A... D... épouse F..., au ministre de l'intérieur et à Me B....

Copie en sera adressée pour information au préfet de Meurthe-et-Moselle.

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Nos 20NC00753, 20NC00756


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Christine GRENIER
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : MARTIN

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Date de la décision : 22/12/2020
Date de l'import : 16/01/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 20NC00753-20NC00756
Numéro NOR : CETATEXT000042752846 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-12-22;20nc00753.20nc00756 ?
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