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03/12/2020 | FRANCE | N°19NC00541

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 03 décembre 2020, 19NC00541


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des majorations pour manquement délibéré prévues à l'article 1729 du code général des impôts, mises à leur charge au titre des années 2012, 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1700712 du 27 décembre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 21 février 2019 et le 6 mars 2020,

M. et Mme A..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 décem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des majorations pour manquement délibéré prévues à l'article 1729 du code général des impôts, mises à leur charge au titre des années 2012, 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1700712 du 27 décembre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 21 février 2019 et le 6 mars 2020, M. et Mme A..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande ;

2°) de prononcer la décharge de ces pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5000 euros au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est entaché d'une motivation insuffisante dès lors que les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de ce que l'administration aurait dû intervenir pour rectifier les erreurs commises lors des déclarations antérieures, à l'origine des majorations en litige ;

- les éléments retenus par le tribunal administratif pour justifier les pénalités en litige, à savoir l'importance et la répétition des erreurs déclaratives, la profession de M. A... et la circonstance que les avis d'imposition des années 2009 et 2010 indiquaient les montants à reporter ne sont pas suffisants pour caractériser l'intention d'éluder l'impôt ;

- ils ont clairement expliqué à l'administration les raisons qui les conduits à commettre les erreurs reprochées sans qu'ils n'aient eu de volonté d'éluder l'impôt ;

- l'administration fiscale porte une importante responsabilité dans l'existence et l'importance des manquements déclaratifs litigieux ;

- l'administration a implicitement validé les modalités déclaratives retenues par les contribuables ;

- la procédure de liquidation de l'impôt est entachée de dysfonctionnements dès lors que pendant plusieurs années ils ont bénéficié d'un report de soldes de réduction d'impôt s'élevant à plusieurs dizaines de milliers d'euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 juillet 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 et le décret n° 2020-1405 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Haudier, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant M. et Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... ont bénéficié au titre des années 2012 à 2014 de réductions d'impôt sur le revenu, en application des articles 199 sexvicies et 199 septvicies du code général des impôts, à raison de deux investissements immobiliers locatifs réalisés en 2009 et 2010 pour des montants respectifs de 151 670 euros et 293 135 euros. A la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale, constatant des erreurs dans les déclarations de revenus des requérants, a remis en cause ces avantages fiscaux et les a assujettis en conséquence à des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu au titre des année 2012 à 2014. Ces rappels d'impositions ont été assortis de la majoration pour manquement délibéré de 40 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts, pour un montant global de 47 816 euros. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 27 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à la décharge des majorations pour manquement délibéré mises à leur charge.

Sur la régularité du jugement contesté:

2. Contrairement à ce qu'affirment les requérants dans leur requête, les premiers juges n'ont pas omis de répondre au moyen tiré de ce que l'administration aurait dû intervenir pour rectifier les erreurs commises lors des déclarations antérieures. Par suite, M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que le jugement serait, pour ce motif, entaché d'irrégularité.

Sur le bien-fondé des pénalités :

3. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ". Il résulte de ces dispositions que la majoration pour manquement délibéré a pour seul objet de sanctionner la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour établir le caractère délibéré du manquement reproché au contribuable, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.

4. Pour justifier l'application des pénalités prévues par les dispositions précitées du a) de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration fiscale a notamment relevé la répétition systématique des mêmes erreurs déclaratives au titre des années contrôlées ainsi que l'importance des réductions indûment obtenues par les requérants sur le fondement des articles 199 sexvicies et 199 septvicies du code général des impôts. Elle a ainsi retenu que le montant de la réduction obtenue sur le fondement de l'article 199 sexvicies précité est, concernant le bien immobilier acquis en 2009, supérieur à sa valeur d'acquisition d'un montant de 151 670 euros. Le service a également constaté que, s'agissant de la réduction obtenue sur le fondement de l'article 199 septivicies précité, l'avantage fiscal équivaut quasiment, en seulement trois ans, au montant total des réductions à répartir sur neuf ans.

5. L'administration a également relevé que M. A... était un professionnel du secteur de l'immobilier dès lors qu'il était le dirigeant de la société anonyme (SA) CKD, laquelle a une activité de construction de bâtiments professionnels, de résidences seniors et logements sociaux et que Mme A... en était l'administratrice. Le service a également constaté que d'une part, le bien acquis en 2009, faisant l'objet du dispositif d'investissement dit " Scellier ", était commercialisé par la société I.C.K, dont M. A... est dirigeant depuis février 2011 et qui a pour activité principale notamment la promotion immobilière de logements et de résidences hôtelières et que d'autre part, le bien acquis par les requérants en 2010, objet du dispositif d'investissement dit " Censi-Bouvard ", était commercialisé par la SC RSST dont le gérant est la SAS C3A, elle-même dirigée et représentée par M. A.... Or, il n'est pas contesté que, comme le fait valoir l'administration en défense, les documents de commercialisation destinés aux acquéreurs font état d'études de marchés tant locatifs qu'immobiliers ainsi que de l'intérêt fiscal et financier lié aux avantages des biens vendus.

6. Le service a enfin relevé que les avis d'imposition des années 2009 et 2010 indiquaient clairement, pour chacun des deux biens acquis, les montants d'investissement locatif à reporter sur les années suivantes et que M. et Mme A... avaient, malgré ces informations, reporté des montants plus élevés. Ce faisant, l'administration démontre l'intention des requérants d'éluder l'impôt, comme l'exigent les dispositions de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales. Dans ces conditions, demeurent sans incidence les circonstances invoquées par les époux A... tirées d'une part, de la récurrence de leurs erreurs déclaratives, d'autre part, de la complexité et de la variabilité des modalités de déclaration des différents investissements immobiliers locatifs auxquels ils avaient procédé et enfin, de l'absence de remise en cause, par l'administration, de leurs déclarations antérieures.

7. C'est par conséquent à bon droit que l'administration a fait application de la majoration de 40 % prévue par le paragraphe a. de l'article 1729 du code général des impôts aux impositions supplémentaires notifiées à raison de la remise en cause des avantages fiscaux susvisés au titre des années 2012, 2013 et 2014.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2: Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

2

N° 19NC00541


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC00541
Date de la décision : 03/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-01-04-03 Contributions et taxes. Généralités. Amendes, pénalités, majorations. Pénalités pour manquement délibéré (ou mauvaise foi).


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-12-03;19nc00541 ?
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