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03/12/2020 | FRANCE | N°19NC00035

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 03 décembre 2020, 19NC00035


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1700086 du 8 novembre 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 janvier 2019, M. C..., re

présenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 novembre 2018 ;

2°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1700086 du 8 novembre 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 janvier 2019, M. C..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 novembre 2018 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, les dispositions de l'article 150 VB du code général des impôts ne faisaient pas obstacle à la majoration du prix d'acquisition des travaux réalisés par la société Aniss'Immo dès lors que c'est cette société qui a acquis les matériaux de construction ;

- c'est à tort que le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a écarté les factures de travaux relatives aux lots n°5, 6 et 7 dès lors que la réalité des opérations de construction et leur paiement par M. C..., en sa qualité de gérant de la SCI, pour le compte de la société Aniss'Immo, ne sont pas contestés ;

- concernant le lot n°5, doivent être pris en compte les factures de la société Aniss'Immo du 25 janvier 2011 pour des montants respectifs de 35 999,60 euros toutes taxes comprises (TTC) et 78 457,60 euros TTC, le règlement direct par la SCI du matériel auprès de Point P pour un montant de 72 417,77 euros TTC et la facture de la société Auboise Etanchéité du 14 juin 2012 pour un montant de 7 000 euros TTC, soit un total justifié de 114 457 euros TTC sont justifiés ;

- s'agissant du lot n°6, doivent être pris en compte la facture de la société AnissI'mmo pour un montant de 70 922,80 euros TTC ainsi que le règlement direct par la SCI requérante de matériaux auprès de Point P pour un montant de 41 437,97 euros TTC ;

- concernant le lot n°7, doivent être prises en compte la facture de la société Aniss'Immo d'un montant de 66 043,12 euros alors même qu'il s'agit d'une facture de gros oeuvre ainsi que les factures de la société Auboise Etanchéité à hauteur de 19.000 euros TTC.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 et le décret n° 2020-1405 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- et les conclusions de Mme Haudier, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. M. C... est le gérant de la SCI Sud Provence qui a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les périodes du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013. Par une proposition de rectification du 24 mars 2015, l'administration fiscale a réintégré dans les bénéfices imposables de cette société les plus-values de cessions de trois immeubles intervenues au cours des exercices 2012 et 2013. Par une proposition de rectification du même jour, des redressements en matière de cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des mêmes années ont été notifiés à M. ou Mme C..., selon la procédure de rectification contradictoire. M. C... relève appel du jugement du 8 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de l'ensemble des impositions mis à sa charge.

Sur le bien fondé de l'imposition :

2. Il est constant que la SCI Sud Provence a fait construire, sur un terrain situé à Troyes, qu'elle avait acquis par acte notarié du 7 mai 2010, huit maisons entre les années 2010 et 2013. Deux lots ont été mis en location en 2011 et 2012, un lot est occupé par M. C... et trois lots (lots 5, 6 et 7) ont été vendus en 2012 et 2013, le dernier lot ayant été vendu postérieurement aux années en litige. Pour les trois lots cédés en 2012 et 2013, la société Sud Provence a déclaré une absence de plus-values à l'administration fiscale, justifiée par la majoration du prix d'acquisition du terrain d'assiette par les dépenses correspondant aux travaux de construction des maisons. Dans ses propositions de rectification précitées, l'administration a refusé de tenir compte des factures présentées par la SCI Sud Provence au motif que les matériaux de construction avaient été achetés par M. C... auprès du fournisseur Point P mais qu'ils avaient été installés par une autre entreprise, la société Aniss'Immo. Puis, au stade de la réclamation préalable, le service a également motivé son refus en se fondant sur le fait que M. C... ne justifiait pas que les dépenses dont il demandait la prise en compte ont été effectivement engagées pour les travaux de construction des lots n° 5, 6 et 7 vendus au cours des années 2012 et 2013.

3. Aux termes de l'article 150 U du CGI dans sa rédaction applicable au litige : " I.-Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH. (...) ". Aux termes de l'article 150 V du code général des impôts : " La plus ou moins-value brute réalisée lors de la cession de biens ou droits mentionnés aux articles 150 U à 150 UC est égale à la différence entre le prix de cession et le prix d'acquisition par le cédant. " ; que selon l'article 150 VB du même code, dans sa version applicable au litige : " I.-Le prix d'acquisition est le prix effectivement acquitté par le cédant, tel qu'il est stipulé dans l'acte, étant précisé que ce prix s'entend de l'existant et des travaux dans le cas d'une acquisition réalisée selon le régime juridique de la vente d'immeuble à rénover. Lorsqu'une dissimulation du prix est établie, le prix porté dans l'acte doit être majoré du montant de cette dissimulation. En cas d'acquisition à titre gratuit, le prix d'acquisition s'entend de la valeur retenue pour la détermination des droits de mutation à titre gratuit. A défaut, selon le cas, de prix stipulé dans l'acte ou de valeur retenue pour la détermination des droits de mutation à titre gratuit, le prix d'acquisition s'entend de la valeur vénale réelle à la date d'entrée dans le patrimoine du cédant d'après une déclaration détaillée et estimative des parties. (...) / II.-Le prix d'acquisition est, sur justificatifs, majoré : (...) / 4° Des dépenses de construction, de reconstruction, d'agrandissement ou d'amélioration, supportées par le vendeur et réalisées par une entreprise depuis l'achèvement de l'immeuble ou son acquisition si elle est postérieure, lorsqu'elles n'ont pas été déjà prises en compte pour la détermination de l'impôt sur le revenu et qu'elles ne présentent pas le caractère de dépenses locatives. (...) ". Enfin, aux termes de l'article 74 SI de l'annexe II au même code : " Les pièces justifiant des frais ou charges mentionnés au III de l'article 150 VA et au II de l'article 150 VB du code général des impôts sont fournies par le contribuable sur demande de l'administration. (...) ".

4. En premier lieu, en application des dispositions susmentionnées, le cédant d'un immeuble peut majorer, pour la détermination du montant de sa plus-value immobilière, le prix d'acquisition de ce dernier du montant des dépenses qu'il a exposées pour y faire réaliser, par une entreprise, une ou plusieurs des prestations de travaux qu'elles mentionnent. Il résulte cependant de la lettre même de ces dispositions qu'elles font obstacle à ce que le cédant puisse majorer ce prix d'acquisition des dépenses qu'il a supportées pour acquérir lui-même les matériaux nécessaires à la réalisation de ces travaux, dès lors que ces dépenses ne sont pas des dépenses exposées par une entreprise dans le cadre des prestations prévues par ces dispositions. Est sans incidence à cet égard la circonstance que le cédant confie à une entreprise la réalisation de travaux en vue desquels il a procédé à cette acquisition de matériaux.

5. Il résulte de l'instruction que l'administration a, dans les propositions de rectification du 24 mars 2015, refusé la prise en compte, dans le prix d'acquisition des trois biens cédés en 2012 et 2013, de certaines dépenses supportées par M. C..., par l'intermédiaire de son compte personnel ou avec celui de la SCI Sud Provence, au motif qu'elles correspondaient à des matériaux directement achetés par les intéressés. Il est constant que les matériaux ont été achetés par le contribuable à l'entreprise Point P et qu'ils ont été installés par la société Aniss'Immo qui a procédé à la construction des trois maisons en litige. C'est donc à bon droit que l'administration a considéré que les dispositions de l'article 150 VB du code général des impôts faisaient obstacle à ce que le prix d'acquisition des matériaux et celui de leur pose ou installation soient pris en compte.

6. En deuxième lieu, d'une part, M. C... produit deux factures émises par la société Aniss'Immo portant les références n° FC0167 et n° FC0169, établies le 25 janvier 2011, pour des montants respectifs de 35 999,60 euros TTC et 78 457,60 euros TTC. Or, comme l'ont retenu les premiers juges, la facture n° FC0167 ne comporte aucune mention permettant de déterminer à quel lot elle se rattache et la seule mention manuscrite " lot n° 5 " sur la facture n° FC0169 est insuffisante pour l'affecter à ce même lot. En appel, est produite pour la première fois une attestation de l'ancien gérant de la société Aniss'Immo, M. B..., dans laquelle ce dernier affirme que les factures susvisées concernent les biens immobiliers n° 5 à 7. Toutefois, cette attestation n'apparaît pas probante dès lors qu'outre son absence de date, elle indique de manière contradictoire que M. C... a procédé, en plusieurs règlements, au paiement intégral des sommes facturées, alors que ces dernières incluent les frais de matériaux censés avoir été acquittés préalablement par le requérant. Par ailleurs, concernant les règlements effectués par la SCI ou M. C... à la SARL Aniss'Immo, les seuls apurements avérés correspondent à des paiements partiels sous forme d'acomptes variables, allant de 4.000 € à 45.579 euros sur la période du 15 mai 2010 au 5 juillet 2012 qui ne font état d'aucune précision quant à leur affectation à un lot particulier ou à une pièce de facture identifiée. En outre, il résulte de l'instruction que sur l'ensemble de la période vérifiée, n'a pu être présentée aucune facture établie par la société Point P au nom de M. C... ou de la SCI Sud Provence. Enfin, le compte client Aniss'Immo ouvert auprès du magasin Point P comptabilise des achats au titre des années 2010 et 2011 pour des montants respectifs de 65.000 euros et 31.290,80 euros, soit un total de 96.290,80 euros, alors que sur la même période, les règlements de la SCI au même fournisseur sont de 110.873 euros, auxquels s'ajoutent des paiements de 21.152,70 euros sur l'année 2013. Pour ces raisons, les versements comptabilisés par la SCI Sud Provence sur le compte fournisseur de la société Aniss'Immo ne permettent pas de reconstituer les montants initialement facturés, tant au niveau des sommes globales que pour la seule main d'oeuvre facturée.

7. D'autre part, le requérant produit la facture n°2013-01-115 émise par la " Société Auboise du Bâtiment " pour un montant de 4000 euros TTC et les deux factures n°2011-03-255 et 2011-03-256 édictées par la " Société Auboise d'Etanchéité " pour des montants respectifs de 9017,84 euros TTC et de 16 983,20 euros TTC. L'intéressé produit également une attestation de l'ancien directeur de ces deux sociétés, M. A..., en date du 4 janvier 2019, dans laquelle ce dernier indique que la facture 2011-03-255 concerne le lot n°5, que la facture 2011-03-256 concerne les lots n° 6 et 7 et que la facture 2013-01-115 concerne le lot n° 6. Cependant, les deux factures n° 2011-03-255 et n° 2011-03-256 émises par la société Auboise d'Etanchéité sont dépourvues d'en-tête et leur objet, visant respectivement un " bâtiment 2 et 6 logements " et un " bâtiment 1 ", ne permet pas de les rattacher aux lots en litige. En outre, la facture n° 2011-03-256 censée concerner les lots n° 6 et 7 fait état de travaux d'étanchéité d'une terrasse qui sont identiques à ceux évoqués dans la facture n°2013-01-115 émise par la " Société Auboise du Bâtiment " pour le même lot. Dans ces conditions, eu égard au caractère peu probants de ces documents, c'est à bon droit que l'administration fiscale a refusé de les prendre en compte pour admettre la majoration des prix d'acquisition des trois lots en litige. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le prix d'acquisition retenu pour le calcul des plus-values réalisées au titre des ventes des lots n° 5, 6 et 7 aurait été sous-estimé.

8. Pour les mêmes raisons que celles indiquées aux points 4, 5 et 6 du présent arrêt, le requérant n'est pas fondé à soutenir, à titre subsidiaire, que le coût de la main d'oeuvre devait être pris en compte pour le calcul des plus-values réalisées au titre des ventes des lots n° 5, 6 et 7.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2: Le présent arrêt sera notifié à Abdelkrim C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

2

N° 19NC00035


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC00035
Date de la décision : 03/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-02-08-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Plus-values des particuliers. Plus-values immobilières.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : ALCYA CONSEIL FICSAL-AVIGNON

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-12-03;19nc00035 ?
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