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20/10/2020 | FRANCE | N°20NC00870

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 20 octobre 2020, 20NC00870


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 11 juin 2019 par lequel préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement no 1905050 du 15 octobre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 avril 2020, M. D... C..., rep

résenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 11 juin 2019 par lequel préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement no 1905050 du 15 octobre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 avril 2020, M. D... C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 octobre 2019 ;

2) d'annuler l'arrêté du 11 juin 2019 par lequel préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet à titre principal de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, et subsidiairement de réexaminer sa situation dans ce même délai et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- elle méconnaît l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dès lors que l'administration n'a conduit aucune enquête administrative et ne l'a pas entendu lui et son épouse ;

- la décision contestée est illégale dès lors que le préfet n'a pas examiné la régularité de son séjour à l'appui de sa demande sur le fondement de l'article 6-2 de l'accord franco-algérien ; le préfet a procédé à une discrimination liée à l'âge ;

- le préfet a commis une erreur de droit en procédant à un examen sur le seul fondement de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien alors qu'il avait sollicité un titre de séjour sur le fondement de l'article 6-2 de cet accord ;

- la décision contestée méconnaît les articles 6-2 et 6-5 de l'accord franco-algérien et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision contestée est irrégulière en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'il peut bénéficier d'un titre de séjour de plein droit ;

- elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle doit être annulée en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

Par un mémoire enregistré le 22 septembre 2020, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Un mémoire, présenté pour M. C..., a été enregistré le 28 septembre 2020, après la clôture de l'instruction.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle au taux de 55 % par une décision du 11 mars 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les observations de Me A... pour M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant algérien, né en 1989, est entré en France, selon ses déclarations, en 2016. L'intéressé a sollicité un titre de séjour en se prévalant de son état de santé. Par un arrêté du 5 janvier 2018, le préfet du Bas-Rhin a rejeté sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Le requérant a alors sollicité, le 27 février 2019, son admission au séjour. Par un arrêté du 11 juin 2019, le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit. Par un jugement du 15 octobre 2019, dont M. C... fait appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Il ressort des pièces du dossier, notamment d'un contrat de location du 1er août 2017 et de factures, que M. C... entretenait une communauté de vie, depuis le mois d'août 2017, avec une ressortissante française qu'il a épousée le 31 mars 2018. L'intéressé s'est également engagé, avec sa compagne, dans un projet d'adoption d'un enfant. Par ailleurs, le requérant justifie d'effort d'intégration, notamment du fait de son engagement auprès d'une association ayant pour objet les visites guidées de Strasbourg. Par suite, dans les circonstances particulières de l'espèce, le préfet du Bas-Rhin, en refusant de délivrer à M. C... un titre de séjour, a porté au droit de ce dernier au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision litigieuses a été prise et a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. Il s'ensuit, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 11 juin 2019 par laquelle le préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Le présent arrêt, qui annule l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 11 juin 2019, implique nécessairement que le préfet délivre à M. C... une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour. Il y a lieu, à cet effet, d'impartir au préfet du Bas-Rhin des délais d'un mois et de huit jours à compter de la notification du présent arrêt pour délivrer respectivement la carte de séjour et l'autorisation provisoire de séjour.

Sur les frais de l'instance :

6. M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle au taux de 55 %. Il n'allègue pas avoir engagé d'autres frais que ceux partiellement pris en charge à ce titre. L'avocat de M. C... a demandé que lui soit versée par l'Etat la somme correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamée à son client si ce dernier n'avait pas bénéficié de l'aide juridictionnelle. Dans ces conditions, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me A... de la somme de 1 500 euros, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement no 1905050 du 15 octobre 2019 du tribunal administratif de Strasbourg et l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 11 juin 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Bas-Rhin de délivrer à M. C... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de huit jours suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me A... la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Bas-Rhin.

N° 20NC00870 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00870
Date de la décision : 20/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : MENGUS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-10-20;20nc00870 ?
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