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22/09/2020 | FRANCE | N°19NC02349

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 22 septembre 2020, 19NC02349


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 18 février 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1902115 du 27 juin 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 juillet 2019, M. B...,

représenté par Me Mengus, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 18 février 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1902115 du 27 juin 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 juillet 2019, M. B..., représenté par Me Mengus, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 27 juin 2019 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 18 février 2019 du préfet du Bas-Rhin ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 200 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant de la décision de refus de séjour :

- elle a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est entachée d'une méconnaissance des articles L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 août 2020, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller,

- et les observations de Me Boukara, substituant Me Mengus, pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant marocain, né le 10 septembre 1947, est entré sur le territoire français le 29 novembre 2015. Le 17 février 2017, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 18 février 2019, le préfet du Bas-Rhin a rejeté cette demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement forcé. M. B... relève appel du jugement du 27 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. L'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré en France en novembre 2015, accompagné de son épouse, qui est décédée le 9 décembre 2016 et a été inhumée à Strasbourg. Ses quatre enfants sont présents sur le territoire français, deux sous couvert de titre de séjour et deux, de nationalité française, et le prennent en charge. A la date de la décision litigieuse, il était âgé de 71 ans et était hébergé par un de ses fils. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la présence en France de l'ensemble de sa famille proche et alors même que ses frères et soeurs vivent encore au Maroc, l'arrêté contesté doit être regardé comme ayant porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Dès lors, M. B... est fondé à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et à en demander, pour ce motif, l'annulation.

4. Les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi doivent, par voie de conséquence, être annulées.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation des décisions de refus de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

6. Eu égard au motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement la délivrance à M. B... d'une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale ". Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin, sous réserve d'un changement de circonstance de droit ou de fait, de délivrer ce titre à M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et dans cette attente, en application de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de lui délivrer immédiatement une autorisation provisoire de séjour. En revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais de l'instance :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1902115 du tribunal administratif de Strasbourg du 27 juin 2019 et l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 18 février 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Bas-Rhin de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et dans cette attente, de lui délivrer immédiatement une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

2

N° 19NC02349


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC02349
Date de la décision : 22/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sandrine ANTONIAZZI
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : MENGUS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-09-22;19nc02349 ?
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