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09/07/2020 | FRANCE | N°19NC03293

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 09 juillet 2020, 19NC03293


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I... C..., représenté par Me D..., a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 22 décembre 2016 par laquelle le préfet du Haut-Rhin a refusé de l'admettre au séjour et de condamner l'Etat à verser à son conseil une somme de 1 800 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Mme F... E... épouse C..., représentée par Me D..., a également demandé au tribunal administratif de Str

asbourg d'annuler la décision du 22 décembre 2016 par laquelle le préfet du Haut-Rh...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I... C..., représenté par Me D..., a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 22 décembre 2016 par laquelle le préfet du Haut-Rhin a refusé de l'admettre au séjour et de condamner l'Etat à verser à son conseil une somme de 1 800 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Mme F... E... épouse C..., représentée par Me D..., a également demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 22 décembre 2016 par laquelle le préfet du Haut-Rhin a refusé de l'admettre au séjour et de condamner l'Etat à verser à son conseil une somme de 1 800 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

M. H... C..., représenté par Me D..., a enfin demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 22 décembre 2016 par laquelle le préfet du Haut-Rhin a refusé de l'admettre au séjour et de condamner l'Etat à verser à son conseil une somme de 1 800 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement no 1702337, 1702338 et 1702339 du 30 septembre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé ces trois décisions et, dans son article 2, mis à la charge de l'Etat la somme de 800 euros à verser à Me D..., au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 novembre 2019, Mme A... D..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 30 septembre 2019 en tant qu'il fixe à 800 euros la somme mise à la charge de l'Etat au titre des frais non compris dans les dépens ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 560 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle est recevable à contester le jugement en tant qu'il fixe le montant de l'indemnité à la charge de l'Etat en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

- les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ont été méconnues dès lors que l'indemnité ne pouvait pas être inférieure à la rétribution qu'elle aurait reçue au titre de l'aide juridictionnelle pour chacun des dossiers laquelle devait, compte tenu d'un montant de 640 euros hors taxe, être au moins équivalente à 2304 euros TTC ;

- la somme mise à la charge de l'Etat pour chaque dossier n'est pas excessive ; en admettant une diminution pour le dossier concernant le fils de M. et Mme C..., le montant de l'indemnité doit être évalué à 4 560 euros.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. G...,

- et les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., avocate, fait appel du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 30 septembre 2019 en tant qu'il a seulement mis, en son article 2, à la charge de l'Etat, pour les trois demandes d'annulation qu'elle avait déposées pour M. et Mme C... et leur fils majeur, tous bénéficiaires de l'aide juridictionnelle totale, une somme globale de 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, partielle ou totale, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ". Aux termes de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 dans sa version applicable : " Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre (...)./ Si l'avocat du bénéficiaire de l'aide recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat. (...) ". Aux termes de l'article 109 du décret du 19 décembre 1991 : " La part contributive versée par l'Etat à l'avocat choisi ou désigné pour assister plusieurs personnes dans une procédure reposant sur les mêmes faits en matière pénale ou dans un litige reposant sur les mêmes faits et comportant des prétentions ayant un objet similaire dans les autres matières est réduite de 30 % pour la deuxième affaire, de 40 % pour la troisième, de 50 % pour la quatrième et de 60 % pour la cinquième et s'il y a lieu pour les affaires supplémentaires ".

3. L'article 27 de la loi du 10 juillet 1991 dispose que : " (...) / Le montant, hors taxe sur la valeur ajoutée, de l'unité de valeur de référence est fixé, pour les missions dont l'admission à l'aide juridictionnelle est prononcée à compter du 1er janvier 2017, à 32 € ".

4. Il résulte de la combinaison des dispositions de la loi du 10 juillet 1991 et du décret du 19 décembre 1991 pris pour son application que l'avocat perçoit en principe une rétribution pour toute mission de représentation d'une personne bénéficiaire de l'aide juridictionnelle dans une instance déterminée. Toutefois, lorsque plusieurs bénéficiaires de l'aide juridictionnelle présentent, dans une même instance ou dans plusieurs instances, des conclusions identiques en demande ou en défense conduisant le juge à trancher les mêmes questions, l'avocat les représentant au titre de l'aide juridictionnelle réalise à leur égard une seule et même mission. La réduction de la part contributive de l'Etat à la rétribution des missions d'aide juridictionnelle assurées par l'avocat devant la juridiction administrative, prévue par l'article 109 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 s'applique lorsque celui-ci assiste plusieurs bénéficiaires de l'aide juridictionnelle présentant des conclusions similaires en demande ou en défense et que le juge est conduit à trancher des questions semblables, soit dans le cadre d'une même instance, soit dans le cadre d'instances distinctes reposant sur les mêmes faits.

5. Le montant de la part contributive de l'État à la rétribution d'un avocat au titre de l'aide juridictionnelle, en deçà duquel ne saurait être fixée par le juge administratif la somme mise à la charge de l'autre partie non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, résulte de l'application du barème fixé par l'article 90 du décret du 19 décembre 1991 et, le cas échéant, des réductions prévues par les textes applicables, notamment par les articles 38 de la loi du 10 juillet 1991 et 109 du décret du 19 décembre 1991.

6. Il résulte du barème prévu à l'article 90 du décret du 19 décembre 1991, dans sa rédaction applicable au litige, que pour une instance au fond devant un tribunal administratif le nombre d'unités de valeur était fixé à 20. La rétribution de la requérante au titre de l'aide juridictionnelle aurait été calculée sur la base d'un coefficient de 20 multiplié par l'unité de valeur de 32 euros HT prévue à l'article 27 de la loi du 10 juillet 1991, soit une somme de 640 euros HT par dossier. Toutefois, il y a lieu, au cas d'espèce, de faire application de l'article 109 du décret du 19 décembre 1991 dès lors que ces trois affaires concernaient un couple et leur fils, placés dans la même situation administrative, pour lesquels ont été pris en compte les mêmes faits pour trancher des questions semblables et dont les prétentions avaient un objet similaire. Dès lors, compte tenu des abattements de 30 %, pour la deuxième affaire et de 40% pour la seconde affaire, prévus par l'article 109 du décret, la rétribution mise à la charge de l'Etat aurait été respectivement de 448 euros HT et 384 euros HT, soit un montant total pour les trois instances nos 1702337, 1702338 et 17022339 de 1 766,40 euros TTC (1 472 euros HT). Dès lors, en fixant la contribution mise à la charge de l'Etat pour les trois affaires à la somme globale de 800 euros, le tribunal administratif de Strasbourg a méconnu les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 selon lesquelles la somme mise à la charge de la partie perdante ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat.

7. Il ressort des pièces du dossier que les diligences accomplies par Mme D... justifiaient le remboursement d'une somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés par ses clients et non compris dans les dépens, aucune considération tirée de l'équité ou de la situation économique de la partie perdante ne justifiant qu'il ne soit pas fait application des dispositions de l'article 37 précité. Par suite, Mme D... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif a limité à cette somme le versement à son profit mis à la charge de l'Etat qu'il y a lieu de porter à 2 000 euros, ce versement entraînant pour celle-ci renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Sur les frais de l'instance :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme D... et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La somme de 800 euros mise à la charge de l'Etat au bénéfice de Mme D... par l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 30 septembre 2019 est portée à 2 000 euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 30 septembre 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme D... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme D... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Haut-Rhin.

N° 19NC03293 2


Type d'affaire : Administrative

Analyses

54-06-05-09 Procédure. Jugements. Frais et dépens. Aide juridictionnelle.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : MENGUS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Date de la décision : 09/07/2020
Date de l'import : 28/07/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19NC03293
Numéro NOR : CETATEXT000042115230 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-07-09;19nc03293 ?
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