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08/04/2020 | FRANCE | N°18NC00690

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 08 avril 2020, 18NC00690


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1505478 du 18 janvier 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande, à l'exception de deux déplacements professionnels à Stuttgart le 18 août 2011 et à Neckarsulum le 12 décembre 2012.
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Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1505478 du 18 janvier 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande, à l'exception de deux déplacements professionnels à Stuttgart le 18 août 2011 et à Neckarsulum le 12 décembre 2012.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 mars et 29 octobre 2018, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande, à l'exception de deux déplacements professionnels à Stuttgart le 18 août 2011 et à Neckarsulum le 12 décembre 2012 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les notes de frais qu'il a présentées à l'administration constituent des justifications suffisantes du caractère professionnel de ses déplacements dès lors qu'elles sont détaillées et précises et que l'administration a pu consulter celles qui avaient été remises à la société et qui étaient toutes datées ;

- les pièces produites, qui illustrent son activité de démarchage auprès de plusieurs éditeurs, caractérisent la nature professionnelle de ses déplacements ;

- il est dans l'impossibilité d'apporter l'ensemble des justifications de ses déplacements dès lors qu'il n'a pas conservé l'intégralité des courriels et échanges qu'il a eus avec ses clients et fournisseurs et que la société Abo Press, qu'il a quittée le 1er janvier 2014, refuse de lui adresser les justifications qu'elle détient ;

- il est impossible, eu égard à ses obligations professionnelles, qu'à titre privé il ait pu parcourir le nombre de 88 766 kilomètres, ce qui n'est pas remis en cause par l'administration ;

- il n'est pas cohérent que certaines dépenses relatives à des déplacements aient été admise en déduction alors que le caractère professionnel des trajets a été refusé ;

- la réalité des kilomètres effectués est attestée par les procès-verbaux de contrôles techniques réalisés et les factures d'entretien du véhicule ;

- la pénalité pour manquement délibéré n'est pas justifiée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 août 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'une vérification de comptabilité de la SARL Abo Press dont il était le gérant en 2011 et 2012, M. C... A... s'est vu notifier, par une proposition de rectification du 20 mai 2014, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à raison de la réintégration de frais kilométriques dans les bases imposables de cette société, non admis en charges déductibles et imposés entre ses mains en tant que revenus distribués. Le contribuable relève appel du jugement du 18 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions supplémentaires, à l'exception de deux déplacements professionnels à Stuttgart le 18 août 2011 et à Neckarsulum le 12 décembre 2012.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. D'une part, aux termes de l'article 39 du code général des impôts : "1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre (...) / Toutefois, les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursement de frais (...). / 5. Sont également déductibles les dépenses suivantes : / a) les rémunérations directes et indirectes, y compris les remboursements de frais versés aux personnes les mieux rémunérées ; / b) les frais de voyage et de déplacement exposés par ces personnes (...) / Les dépenses ci-dessus énumérées peuvent également être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure où elles sont excessives et où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise (...)".

3. D'autre part, aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ; ".

4. Il résulte de l'instruction que pour remettre en cause la déductibilité d'une partie des frais de véhicule de M. A..., comptabilisés au compte n° 625100 de la société Abo Press, l'administration a retenu qu'ils n'avaient pas été exposés dans l'intérêt de l'exploitation de cette société en l'absence de justificatifs probants tenant notamment à l'objet des déplacements de l'intéressé. Si ce dernier soutient qu'il a dû réaliser de nombreux déplacements pour démarcher de nouveaux clients, ni la société Abo Press, ni lui-même n'ont produit d'élément permettant de considérer que les frais de véhicule rejetés correspondaient à des déplacements auprès de clients ou de prospects et auraient été effectués dans l'intérêt de l'entreprise, à l'exception des deux déplacements effectués par M. A... à Stuttgart le 18 août 2011 et à Neckarsulum le 12 décembre 2012 et reconnus comme des dépenses professionnelles par les premiers juges en raison de leur justification par des convocations de la société Presse Union datées des 5 août 2011 et 18 octobre 2012. S'agissant des autres déplacements, les notes de frais mensuelles produites, dont certaines sont non datées et procèdent à des regroupements kilométriques, sont insuffisamment précises et détaillées, notamment en ce qu'elles ne précisent pas la teneur du déplacement ou son objet, ce qui ne permet pas de déterminer si ces déplacements ont été entrepris dans l'intérêt de l'entreprise. Les autres documents produits, consistant essentiellement en des courriels échangés entre le requérant et des professionnels de l'édition, ne précisent pas l'objet des déplacements qu'ils évoquent et dont il est par conséquent impossible de déterminer s'ils ont été entrepris dans l'intérêt de l'entreprise. Si les deux procès-verbaux de contrôle technique du véhicule personnel de M. A... permettent d'identifier qu'entre le 19 avril 2011 et le 30 avril 2013 il a effectué 77 837 kilomètres, ces documents ne sont pas probants dès lors qu'ils couvrent un intervalle de temps qui excède la période vérifiée et ne permettent pas de justifier du kilométrage parcouru au cours de cette période. Quant aux factures d'entretien du véhicule, en se bornant à lister les pièces changées et les réparations réalisées, elles ne justifient pas de la nature des déplacements réalisés par le requérant. La circonstance, au demeurant non démontrée, l'intéressé est dans l'impossibilité d'apporter l'ensemble des justifications de ses déplacements au motif que la société Abo Press, qu'il a quitté le 1er janvier 2014, refuse de lui adresser les documents qu'elle détient est inopérante. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe que ces frais de véhicule n'ont pas été engagés dans l'intérêt direct de la société Abo Press, à l'exception des deux déplacements précités. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a analysé ces dépenses comme des revenus distribués, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement des dispositions précitées du c) de l'article 111 du code général des impôts.

Sur les pénalités :

5. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ". Il résulte de ces dispositions que la majoration pour manquement délibéré a pour seul objet de sanctionner la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour établir le caractère délibéré du manquement reproché au contribuable, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.

6. Pour justifier l'application des pénalités prévues par les dispositions précitées du a) de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration fiscale a relevé le caractère répété des irrégularités comptables découvertes au cours de la vérification, lesquelles étaient, en l'absence de justifications du caractère professionnel de plusieurs déplacements, de nature à faire obstacle à la distinction entre les dépenses personnelles et les dépenses professionnelles, et a précisé que des irrégularités de même nature avaient déjà été constatées au cours d'un précédent contrôle de la société Gesti Press dont M. A... fut également le gérant. Ce faisant, outre les manquements du contribuable à ses obligations déclaratives, l'administration démontre l'intention de M. A... d'éluder l'impôt, sans que celui-ci puisse utilement faire valoir la réalité des 88 766 kilomètres effectués avec son véhicule personnel. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les rappels d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 ont été assortis de la majoration pour manquement délibéré prévue à l'article 1729 susvisé du code général des impôts.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Claude A... et au ministre de l'action et des comptes publics.

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N° 18NC00690


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués. Notion de revenus distribués. Imposition personnelle du bénéficiaire.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : MDC ET ASSOCIES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Date de la décision : 08/04/2020
Date de l'import : 21/04/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18NC00690
Numéro NOR : CETATEXT000041806335 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-04-08;18nc00690 ?
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