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27/02/2020 | FRANCE | N°18NC02429

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 27 février 2020, 18NC02429


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Irepa Laser a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013 ainsi que des suppléments d'impôts sur les sociétés mis à sa charge au titre des années 2011, 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1604160 du 10 juillet 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a partiellement fait droit à

sa demande, s'agissant de l'impôt sur les sociétés de l'année 2012, et a rejeté le sur...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Irepa Laser a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013 ainsi que des suppléments d'impôts sur les sociétés mis à sa charge au titre des années 2011, 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1604160 du 10 juillet 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a partiellement fait droit à sa demande, s'agissant de l'impôt sur les sociétés de l'année 2012, et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 septembre 2018, ainsi qu'un mémoire complémentaire enregistré le 27 juin 2019, l'association Irepa Laser, représentée par Me Alleki, demande à la Cour :

1°) de prononcer l'annulation de l'article 4 du jugement du 10 juillet 2018 ;

2°) de lui accorder, le cas échéant après avoir saisi la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle en matière de taxe sur la valeur ajoutée, la décharge des impositions et pénalités contestées et de la rétablir dans ses droits au titre du crédit d'impôt recherche ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que l'administration et le tribunal ont considéré qu'elle avait la qualité d'assujetti partiel à raison des subventions qu'elle percevait pour la réalisation de ses opérations de recherche alors que ces opérations réalisées à titre onéreux au profit des preneurs entrent de plein droit dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée tandis que la taxe d'amont qu'elle a exposée est entièrement affectée à la réalisation d'opérations taxables, peu important à cet égard qu'une partie de ces dépenses aient été financée par des subventions publiques dès lors qu'elles ne sont pas liées au prix de ses prestations ; en tout état de cause le coefficient forfaitaire unique de déduction retenu par l'administration n'est pas conforme aux dispositions de l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts puisque l'administration n'a pas la faculté d'user du coefficient unique pour les biens et services mixtes, cette faculté n'étant reconnue par le 1° du 1 du V de l'article 206 qu'au seul redevable et qu'en outre c'est à tort que l'administration a appliqué ce coefficient à l'ensemble de ses dépenses alors qu'elle n'aurait dû le faire que pour celles à usage mixte, l'administration ne pouvant légalement fonder une telle solution sur sa propre doctrine (BOI-TVA-DED-20-10-10, n° 30 et 40) ; c'est en renversant la charge de la preuve que l'administration et le tribunal ont exigé qu'elle établisse que le coefficient retenu par le service ne reflétait pas la part d'affectation réelle des dépenses d'amont à ses différentes activité ; en tout état de cause, c'est à tort que le service a retenu le montant des subventions dans le coefficient de taxation puisque de son point de vue elles n'étaient pas directement liées au prix de ses prestations ;

- le versement de 100 000 euros en exécution d'un contrat de licence de brevet ne doit être retenu, en application du 2 de l'article 38 du code général des impôts, que pour 12 jours sur l'exercice 2012 et il s'ensuit qu'une somme supplémentaire de 19 342 euros doit être déduite du résultat de cet exercice ;

- c'est à tort qu'ont été exclues du crédit d'impôt recherche les dépenses de veille technologiques qui ne se rapportaient pas à des projets éligibles au crédit d'impôt recherche alors que ces dépenses bénéficient du dispositif quelle que soit la nature de l'opération de recherche, qu'elle soit éligible ou non au crédit d'impôt ; ces dépenses de veille technologique se rapportent à des contrats (Total Citeph et Projet A51) que l'administration et le tribunal qualifie pourtant d'éligibles au crédit d'impôt recherche chez les donneurs d'ordre ;

- c'est à tort que le service et le jugement ont considéré que les sommes encaissées en qualité de sous-traitant pour les projets Total Citeph et Projet A51 devaient être déduites de l'assiette de son crédit d'impôt recherche au motif que ces projets auraient bénéficié chez les donneurs d'ordre de ce même crédit d'impôt, alors qu'elle n'avait pas compris ces sommes dans son propre crédit d'impôt et que pour y parvenir, le vérificateur a d'office inclus les dépenses de personnel dans l'assiette du crédit afin de déduire les sommes perçues.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par l'association Irepa Laser ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Agnel ;

- les conclusions de Mme Peton, rapporteur public ;

- et les observations de Me Steinmetz substituant Me Alliki, représentant l'association requérante.

Considérant ce qui suit :

1. L'association " Industrialisation des recherches sur les procédés et les applications du Laser ", ci-après désignée Irepa Laser, dont le siège est à Illkirch Graffenstaden (Bas-Rhin), est un centre de ressources technologiques, faisant partie du réseau des instituts Carnot, en l'occurrence Carnot Mica, ayant pour activité la diffusion et le développement auprès des entreprises de la technologie laser et de ses applications ainsi que des technologies connexes par le biais de contrats de prestations de recherche, la concession de droits de propriété industrielle ainsi que la formation. A la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a assigné à l'association des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et a procédé à divers rehaussements de son bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés au titre des années 2011, 2012 et 2013. L'association Irepa Laser lui ayant soumis une partie de ces rectifications, le tribunal administratif de Strasbourg, par le jugement attaqué du 10 juillet 2018, n'a que partiellement fait droit à sa demande.

Sur la taxe sur la valeur ajoutée :

2. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ". Aux termes de l'article 168 de la directive du 28 novembre 2006, ci-dessus visée, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée : "Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l'assujetti a le droit, dans l'Etat membre dans lequel il effectue ces opérations, de déduire du montant de la taxe dont il est redevable les montants suivants: / a) la taxe sur la valeur ajoutée due ou acquittée dans cet Etat membre pour les biens qui lui sont ou lui seront livrés et pour les services qui lui sont ou lui seront fournis par un autre assujetti ". Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération / (...) II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : /a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ". Aux termes de l'article 205 de l'annexe II au même code : " La taxe sur la valeur ajoutée grevant un bien ou un service qu'un assujetti à cette taxe acquiert, importe ou se livre à lui-même est déductible à proportion de son coefficient de déduction ". L'article 206 de la même annexe prescrit que : " I. - Le coefficient de déduction mentionné à l'article 205 est égal au produit des coefficients d'assujettissement, de taxation et d'admission. II. - Le coefficient d'assujettissement d'un bien ou d'un service est égal à sa proportion d'utilisation pour la réalisation d'opérations imposables. Les opérations imposables s'entendent des opérations situées dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu des articles 256 et suivants du code général des impôts, qu'elles soient imposées ou légalement exonérées (...) V.-1. L'assujetti peut, par année civile, retenir :1° Pour l'ensemble de ses biens et services utilisés concurremment à des opérations imposables et à des opérations non imposables, un coefficient d'assujettissement unique, sous réserve d'en justifier ". Il résulte de ces dispositions applicables à compter du 1er janvier 2008 que la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens et services que les assujettis à cette taxe acquièrent n'est déductible que si ceux-ci sont utilisés pour la réalisation d'opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée.

3. A l'occasion de la vérification de la comptabilité de l'association requérante, le service, estimant que l'activité de cette dernière se répartissait, d'une part, en une activité de recherche située en dehors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, rémunérée par des subventions dépourvues de lien direct avec une contrepartie pour l'organisme les ayant versées et, d'autre part, en une activité de prestations au bénéfice des entreprises entrant quant à elle dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée, a limité le droit à déduction de l'association requérante de la taxe sur la valeur ajoutée sur ses dépenses en faisant application d'un coefficient d'assujettissement.

4. Cependant, il résulte de l'instruction, et notamment des statuts de l'association requérante, du document circonstancié établi par elle au cours de la vérification de comptabilité intitulé " Détermination du coefficient de déduction ", des pièces produites à la suite de la mesure d'instruction ordonnée par la cour, ainsi que de son site internet public www.irepa-laser.com, que l'association Irepa Laser consacre la totalité de son activité à la diffusion auprès des entreprises des procédés utilisant les technologies Laser en concluant avec elles des contrats de prestations de services de recherche, de formation professionnelle ainsi que de concessions de droits de propriété industrielle. Si pour les besoins de cette activité, l'association requérante se livre à une activité de recherche scientifique, dont les résultats demeurent d'ailleurs sa propriété, le plus souvent en collaboration avec d'autres organismes et au moyen de subventions versées par des entités qui ne sont pas ses clients, cette activité demeure orientée vers la réalisation de son objet social qui est de permettre aux entreprises d'accéder aux technologies qu'elle est chargée de promouvoir. Dans ces conditions, l'activité de recherche développée par l'association Irepa Laser, qui s'inscrit dans une perspective de valorisation économique, doit être regardée comme indissociable de celle relative aux prestations qu'elle fournit aux entreprises, ouvrant ainsi droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, sans que puisse être opposée à l'association la circonstance qu'une partie de ses dépenses de recherche grevées de la taxe sur la valeur ajoutée est financée par des subventions publiques dès lors que l'administration reconnaît que celles-ci ne constituent ni la contrepartie d'une opération imposable ni le complément de prix d'une telle opération. Par suite, c'est en faisant une inexacte application des dispositions ci-dessus reproduites que l'administration, requalifiant l'association d'assujetti partiel, a entendu limiter les droits à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les dépenses de l'association Irepa Laser. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner ses autres moyens, l'association Irepa Laser est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg lui a refusé la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités qui lui ont été assignés à ce titre pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013.

Sur l'impôt sur les sociétés :

En ce qui concerne la rémunération du contrat de licence du 21 novembre 2012 :

5. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par les dispositions de l'article 209 du même code : " 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation./ (...) 2 bis. Pour l'application des 1 et 2, les produits correspondant à des créances sur la clientèle ou à des versements reçus à l'avance en paiement du prix sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient la livraison des biens pour les ventes ou opérations assimilées et l'achèvement des prestations pour les fournitures de services. / Toutefois, ces produits doivent être pris en compte : /a. Pour les prestations continues rémunérées notamment par des intérêts ou des loyers et pour les prestations discontinues mais à échéances successives échelonnées sur plusieurs exercices, au fur et à mesure de l'exécution ".

6. Il n'est plus contesté que la somme de 100 000 euros versée le 20 décembre 2012, date d'entrée en vigueur du contrat de concession de brevets, marques et savoir-faire signé le 21 novembre 2012 avec la SAS Beam, rémunère une prestation continue au sens des dispositions ci-dessus reproduites, s'échelonnant sur une durée de cinq ans à compter de la date d'entrée en vigueur du contrat. Le tribunal administratif de Strasbourg a ainsi rattaché à l'exercice 2012 1/5ème de cette somme. Cependant, dès lors que l'intensité de la prestation délivrée au preneur est uniforme sur toute la durée du contrat, l'association Irepa Laser est fondée à soutenir que seule la fraction de cette somme de 100 000 euros se rapportant aux douze jours de l'année 2012 durant lesquels la société preneuse a bénéficié du contrat de licence doit être retenue dans les bénéfices de l'exercice à hauteur de 658 euros. Par suite, l'association Irepa Laser est fondée à demander que soit déduite de son bénéfice imposable au titre de l'année 2012 la somme de 19 342 euros.

En ce qui concerne le crédit d'impôt recherche de l'année 2013 :

S'agissant des dépenses de veilles technologiques :

7. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) / II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont :/ (...) j) Les dépenses de veille technologique exposées lors de la réalisation d'opérations de recherche, dans la limite de 60 000 € par an ". L'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts dispose que : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique :/a. Les activités ayant un caractère de recherche fondamentale, qui pour apporter une contribution théorique ou expérimentale à la résolution des problèmes techniques, concourent à l'analyse des propriétés, des structures, des phénomènes physiques et naturels, en vue d'organiser, au moyen de schémas explicatifs ou de théories interprétatives, les faits dégagés de cette analyse ;/b. Les activités ayant le caractère de recherche appliquée qui visent à discerner les applications possibles des résultats d'une recherche fondamentale ou à trouver des solutions nouvelles permettant à l'entreprise d'atteindre un objectif déterminé choisi à l'avance. / Le résultat d'une recherche appliquée consiste en un modèle probatoire de produit, d'opération ou de méthode ; / c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté ".

8. Il résulte nécessairement de ces dispositions que les dépenses de veille technologique doivent être exposées lors de la réalisation d'opérations de recherche répondant à la définition des opérations de recherche scientifique donnée par l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts. Il ne résulte cependant pas de ces dispositions que ces dépenses doivent être directement liées à des projets présentés au titre du crédit d'impôt recherche de l'année.

9. Afin de remettre en cause la prise en compte au titre du crédit d'impôt recherche de l'année 2013 des dépenses de veille technologiques exposées par l'association Irepa Laser, l'administration a relevé qu'elles ne se rapportaient pas à des projets présentés au titre du crédit d'impôt recherche. Il ressort de l'annexe 18 à la proposition de rectification que ces dépenses se rapportent essentiellement à la participation à des colloques, congrès et séminaires scientifiques dans les domaines d'activité de l'association requérante. Il ne résulte pas de l'instruction que ces dépenses ont été exposées lors de la réalisation d'opérations de recherche réalisées par l'association elle-même alors même qu'elles n'auraient pas encore débouché sur un projet éligible au crédit d'impôt recherche. Par suite, l'association Irepa Laser n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a exclu ces sommes de la base de calcul du crédit d'impôt recherche au titre de l'année 2013.

S'agissant des prestations de sous-traitance :

10. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : (...) / d bis) Les dépenses exposées pour la réalisation d'opérations de même nature confiées à des organismes de recherche privés agréés par le ministre chargé de la recherche, ou à des experts scientifiques ou techniques agréés dans les mêmes conditions. / d ter) Les dépenses mentionnées aux d et d bis entrent dans la base de calcul du crédit d'impôt recherche dans la limite globale de deux millions d'euros par an. Cette limite est portée à 10 millions d'euros pour les dépenses de recherche correspondant à des opérations confiées aux organismes mentionnés aux d et d bis, à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance (...) entre l'entreprise qui bénéficie du crédit d'impôt et ces organismes (...) / III. Les subventions publiques reçues par les entreprises à raison des opérations ouvrant droit au crédit d'impôt sont déduites des bases de calcul de ce crédit, qu'elles soient définitivement acquises par elles ou remboursables. Il en est de même des sommes reçues par les organismes ou experts désignés au d et au d bis du II, pour le calcul de leur propre crédit d'impôt. Lorsque ces subventions sont remboursables, elles sont ajoutées aux bases de calcul du crédit d'impôt de l'année au cours de laquelle elles sont remboursées à l'organisme qui les a versées ".

11. Il résulte des dispositions précitées que les sommes reçues par les organismes de recherche privés agréés mentionnés au d bis du II de l'article 244 quater B du code général des impôts pour la réalisation d'opérations de recherche qui leur sont confiées par des entreprises entrant elles-mêmes dans le champ des bénéficiaires du crédit d'impôt recherche, et qui constituent pour ces entreprises des dépenses éligibles à ce crédit, ne peuvent être incluses dans la base de calcul du crédit d'impôt recherche propre de l'organisme sous-traitant.

12. Il résulte de l'instruction que l'association Irepa Laser n'a pas inclus dans l'assiette de son crédit d'impôt recherche de l'année 2013 les dépenses, de personnel et de fonctionnement, se rapportant aux projets Total Citeph et Projet A51 constituant des opérations de recherche effectuées en qualité de sous-traitant des sociétés Total et Beam, non plus que les sommes perçues en rémunérations de ces opérations. Ce faisant, l'association requérante a exactement appliqué les règles ci-dessus rappelées. En conséquence, elle n'avait pas à déduire de son crédit d'impôt recherche les sommes reçues des sociétés Total et Beam en rémunération de ces contrats de recherche. Dès lors, c'est en faisant une inexacte application des règles ci-dessus reproduites que l'administration a réintégré dans l'assiette du crédit d'impôt recherche les dépenses de fonctionnement et de personnel afférentes à ces projets pour ensuite déduire du crédit d'impôt le montant des sommes encaissées par l'association au titre de ces deux projets. Par suite, l'association requérante est fondée à demander la décharge du supplément d'impôt sur les sociétés qui lui a été assigné à ce titre.

13. Il résulte de tout ce qui précède que l'association Irepa Laser est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg, par le jugement attaqué du 10 juillet 2018, a rejeté sa demande tendant d'une part, à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge en conséquence de la limitation de ses droits à déduction, et d'autre part, à la réduction du supplément d'impôt sur les sociétés qui lui avait été assigné au titre de l'année 2012 en ce qui concerne la concession de brevets ainsi que la réduction du supplément d'impôt sur les sociétés qui lui avait été assigné au titre de l'année 2013 en ce qui concerne la rémunération des contrats de recherche en sous traitance dans le cadre de son crédit d'impôt recherche. Par suite, l'association requérante est fondée à demander dans cette mesure la réformation du jugement du 10 juillet 2018.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à l'association requérante de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle dans la présente instance.

D E C I D E :

Article 1er : L'association Irepa Laser est déchargée des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013 résultant de la limitation de ses droits à déduction.

Article 2 : Il est déduit du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés de l'année 2012 la somme de 19 342 euros au titre des prestations continues.

Article 3 : Il y a lieu d'annuler la réduction de l'assiette du crédit d'impôt recherche opérée par l'administration pour les sommes concernant les contrats de sous-traitance Total Citeph et Projet A51 et de rétablir dans cette mesure le crédit d'impôt recherche au titre de l'année 2013.

Article 4 : L'association Irepa Laser est déchargée des suppléments d'impôt sur les sociétés et des pénalités qui lui ont été assignés, au titre des années 2012 et 2013, dans la mesure de la réduction de base et du rétablissement du crédit d'impôt recherche décidés par les articles 2 et 3 ci-dessus.

Article 5 : L'Etat versera à l'association Irepa Laser la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 10 juillet 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Irepa Laser et au ministre de l'action et des comptes publics.

2

N° 18NC02429


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Calcul de l'impôt.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Personnes et opérations taxables - Opérations taxables.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : SCHMITT

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Date de la décision : 27/02/2020
Date de l'import : 25/08/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18NC02429
Numéro NOR : CETATEXT000042239105 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-02-27;18nc02429 ?
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