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25/02/2020 | FRANCE | N°18NC02057

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 25 février 2020, 18NC02057


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 26 février 2015 par laquelle le maire de la commune d'Ottmarsheim a refusé son détachement et d'enjoindre à la commune, à titre principal, de le réintégrer dans l'emploi de détachement dans le délai d'un mois à compter du jugement à intervenir et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai.

M. A... a par ailleurs demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décisi

on du 29 avril 2015 par laquelle le maire de la commune d'Ottmarsheim a refusé son déta...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 26 février 2015 par laquelle le maire de la commune d'Ottmarsheim a refusé son détachement et d'enjoindre à la commune, à titre principal, de le réintégrer dans l'emploi de détachement dans le délai d'un mois à compter du jugement à intervenir et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai.

M. A... a par ailleurs demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 29 avril 2015 par laquelle le maire de la commune d'Ottmarsheim a refusé son détachement et d'enjoindre à la commune, à titre principal, de le réintégrer dans l'emploi de détachement dans le délai d'un mois à compter du jugement à intervenir et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai.

M. A... a, enfin, demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, d'annuler la décision du 25 juillet 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur, après avis de la commission des recours des militaires, a rejeté son recours dirigé contre son arrêté du 13 mars 2015 par lequel il a annulé l'arrêté ordonnant son détachement en qualité de brigadier-chef de police municipale à compter du 1er mars 2015 auprès de la ville d'Ottmarsheim et l'a remis à disposition de la région de gendarmerie des Pays-de-la-Loire et, d'autre part, d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1501381, 1502443 et 1604777 du 17 mai 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté l'ensemble de ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 23 juillet 2018, 8 janvier et 18 février 2019, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 17 mai 2018 ;

2°) d'annuler les décisions des 26 février et 29 avril 2015 par lesquelles le maire de la commune d'Ottmarsheim a refusé son détachement et la décision du 25 juillet 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur, après avis de la commission des recours des militaires, a rejeté son recours dirigé contre l'arrêté du 13 mars 2015 par lequel il a annulé l'arrêté ordonnant son détachement en qualité de brigadier-chef de police municipale à compter du 1er mars 2015 auprès de la ville d'Ottmarsheim et l'a remis à disposition de la région de gendarmerie des Pays-de-la-Loire ;

3°) d'enjoindre à la commune d'Ottmarsheim, à titre principal, de le réintégrer dans l'emploi de détachement dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Ottmarsheim une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant de la décision du 26 février 2015 :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé s'agissant du moyen relatif au vice de procédure dont cette décision est entachée ;

- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'elle a été prise pour des motifs disciplinaires, impliquant que l'administration le convoque à un entretien individuel préalable et lui communique son dossier personnel ;

- le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il a considéré que les manquements qui lui étaient reprochés, qui ne sont pas établis, justifiaient un refus de détachement ;

- le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il a considéré que la décision litigieuse n'était pas une sanction déguisée ;

- en ne mettant pas à sa disposition les moyens nécessaires à l'exercice de ses fonctions, la commune ne lui a pas permis de démontrer ses aptitudes professionnelles ;

S'agissant de la décision du 29 avril 2015 :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé s'agissant du moyen relatif au vice de procédure dont cette décision est entachée ;

- le jugement est entaché d'erreurs de fait concernant cette décision ;

- le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il a considéré que la décision attaquée n'était pas entachée d'un vice de procédure alors qu'elle a été prise pour des motifs disciplinaires, impliquant que l'administration le convoque à un entretien individuel préalable et lui communique son dossier personnel ;

- le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il a considéré que la décision en cause n'était pas entachée d'un détournement de pouvoir ;

- le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il a considéré que la décision en cause ne méconnaissait pas l'autorité de la chose jugée par le juge des référés ;

- le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il a considéré que les manquements qui lui étaient reprochés, qui ne sont pas établis, justifiaient un refus de détachement ;

- la décision en cause, prise sur le fondement de faits étrangers à l'intérêt du service, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- en ne mettant pas à sa disposition les moyens nécessaires à l'exercice de ses fonctions, la commune ne lui a pas permis de démontrer ses aptitudes professionnelles ;

- le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il a considéré que la décision litigieuse n'était pas une sanction déguisée ;

S'agissant de la décision du 25 juillet 2016 :

- le tribunal a omis de statuer sur l'une de ses requêtes tendant à l'annulation de cette décision ;

- le jugement est entaché d'une erreur de droit en ce qu'il a considéré que le ministre de l'intérieur était tenu de le réintégrer à la suite de la décision de la commune refusant son détachement ;

- en s'estimant en situation de compétence liée, le ministre a commis une erreur de droit ;

- le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en écartant le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision de la commune refusant le détachement ;

- la décision attaquée sera annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision du 26 février 2015.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 janvier 2019, la commune d'Ottmarsheim, représentée par la Selarl Soler-Couteaux / Llorens, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me Erckel, avocat de la commune d'Ottmarsheim.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., gendarme, sous-officier au sein d'un peloton motorisé situé dans la Sarthe, a été admis, par une décision du 11 décembre 2014, à suivre un stage probatoire de deux mois préalablement à un détachement au sein de la commune d'Ottmarsheim en qualité de brigadier-chef principal de la police municipale à compter du 1er janvier 2015. Par un arrêté du 10 février 2015, le ministre de l'intérieur a placé M. A... en position de détachement pour une durée d'un an, à compter du 1er mars 2015, auprès de la commune. Par un arrêté du 26 février 2015, le maire d'Ottmarsheim s'est opposé au détachement de l'intéressé. A la suite de la suspension de cette décision ordonnée par le juge des référés, le maire d'Ottmarsheim s'est, par un nouvel arrêté du 29 avril 2015, à nouveau opposé au détachement de M. A.... Par une décision du 25 juillet 2016, le ministre de l'intérieur, après avis de la commission des recours des militaires, a rejeté le recours de M. A... dirigé contre l'arrêté du 13 mars 2015 par lequel il a, d'une part, annulé l'arrêté ordonnant son détachement en qualité de brigadier-chef de police municipale à compter du 1er mars 2015 auprès de la ville d'Ottmarsheim et, d'autre part, remis l'intéressé à disposition de la région de gendarmerie des Pays-de-la-Loire. M. A... relève appel du jugement du 17 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes d'annulation des décisions du maire de la commune d'Ottmarsheim des 26 février et 29 avril 2015 et de la décision du ministre de l'intérieur du 25 juillet 2016.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Il ressort des pièces du dossier que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments avancés par les parties, ont répondu de manière suffisamment motivée au moyen tiré du vice de procédure dont serait entachée la décision du 26 février 2015 ainsi qu'à l'ensemble des moyens dirigés contre la décision du 29 avril 2015. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que ce jugement serait entaché d'irrégularité.

4. En second lieu, aux termes de l'article R. 4125-1 du code de la défense, dans ses dispositions en vigueur à la date de la décision en litige : " Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. / Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. (...) ". Aux termes de l'article R. 4125-9 du même code : " La commission recommande au ministre compétent ou, le cas échéant, aux ministres conjointement compétents au sens du II de l'article R. 4125-4, soit de rejeter le recours, soit de l'agréer totalement ou partiellement. Son avis ne lie pas le ministre compétent ou, le cas échéant, les ministres conjointement compétents. ". Aux termes de l'article R. 4125-10 de ce code : " Dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine, la commission notifie à l'intéressé la décision du ministre compétent, ou le cas échéant, des ministres conjointement compétents. La décision prise sur son recours, qui est motivée en cas de rejet, se substitue à la décision initiale. (...) L'absence de décision notifiée à l'expiration du délai de quatre mois vaut décision de rejet du recours formé devant la commission. ".

5. Il résulte de ces dispositions combinées que l'institution d'un recours administratif préalable obligatoire à la saisine du juge a pour effet de laisser à l'autorité compétente pour en connaître le soin d'arrêter définitivement la position de l'administration. Dès lors, la décision prise à la suite de ce recours, qui se substitue nécessairement à la décision initiale ainsi que le prévoit expressément l'article R. 4125-10 du code de la défense, est seule susceptible d'être déférée au juge administratif.

6. En l'espèce, par une décision du 25 juillet 2016, le ministre de l'intérieur, après avis de la commission des recours des militaires, a rejeté le recours de M. A... dirigé contre l'arrêté du 13 mars 2015 par lequel il a, d'une part, annulé l'arrêté ordonnant son détachement en qualité de brigadier-chef de police municipale à compter du 1er mars 2015 auprès de la ville d'Ottmarsheim et, d'autre part, remis l'intéressé à disposition de la région de gendarmerie des Pays-de-la-Loire. Cette décision s'est ainsi substituée à la décision du 13 mars 2015. Toutefois, le tribunal a statué sur la décision du 13 mars 2015 et a omis de se prononcer sur les conclusions de M. A... tendant à l'annulation de la décision du 25 juillet 2016. Il a, par suite, entaché son jugement d'une omission à statuer.

7. Il suit de là, que le jugement du 17 mai 2018 du tribunal administratif de Strasbourg doit être annulé en tant qu'il omet de statuer sur les conclusions présentées par M. A... tendant à l'annulation de la décision du 25 juillet 2016 du ministre de l'intérieur.

8. Il y a lieu de statuer, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par M. A... tendant à l'annulation de la décision du 25 juillet 2016 devant le tribunal administratif de Strasbourg et, par l'effet dévolutif de l'appel, sur ses autres conclusions.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la légalité de la décision du 26 février 2015 :

9. En premier lieu, un militaire ayant, à la suite de sa demande de détachement dans un emploi relevant d'un cadre d'emplois d'une collectivité territoriale, la qualité de stagiaire, se trouve dans une situation probatoire et provisoire. Il en résulte qu'alors même que la décision de ne pas faire suite à sa demande de détachement en fin de stage est fondée sur l'appréciation portée par l'autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne, elle n'est pas - sauf à revêtir le caractère d'une mesure disciplinaire - au nombre des mesures qui ne peuvent légalement intervenir sans que l'intéressé ait été mis à même de faire valoir ses observations ou de prendre connaissance de son dossier, et n'est soumise qu'aux formes et procédures expressément prévues par les lois et les règlements.

10. La décision attaquée s'oppose au détachement de M. A... au motif qu'il " n'a pas donné satisfaction et qu'il a, à de multiples reprises, outrepassé sa fiche de poste en s'immisçant dans les affaires ne relevant pas de sa compétence. Ainsi, dans ce contexte, il a manqué à ses obligations de discrétion, de réserve et de confidentialité ". Contrairement à ce que soutient le requérant, si cette décision, qui était fondée sur l'insuffisance professionnelle de l'intéressé, a été prise en considération de sa personne, elle ne l'a pas été au regard de motifs disciplinaires et ne constitue pas une sanction déguisée. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée aurait été prise à la suite d'une procédure irrégulière, faute pour lui d'avoir eu préalablement accès à son dossier et d'avoir bénéficié d'un entretien individuel.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 4139-2 du code de la défense, dans sa version applicable au litige : " Le militaire, remplissant les conditions de grade et d'ancienneté fixées par décret, peut, sur demande agréée, après un stage probatoire, être détaché pour occuper des emplois vacants et correspondant à ses qualifications au sein des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales, de la fonction publique hospitalière et des établissements publics à caractère administratif, nonobstant les règles de recrutement pour ces emplois (...) ". Aux termes de l'article R. 4139-25 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " (...) En cas d'acceptation, le militaire est mis à la disposition de la collectivité ou de l'établissement public d'accueil pour effectuer un stage probatoire d'une durée de deux mois. Pendant cette période, il reste en position d'activité au sein des forces armées et conserve sa rémunération. Le militaire servant en vertu d'un contrat voit, le cas échéant, celui-ci prorogé pour la durée du stage probatoire. S'il a donné satisfaction, le militaire est placé à l'issue du stage probatoire en position de détachement, par décision conjointe du ministre de la défense, ou au ministre de l'intérieur pour les militaires de la gendarmerie nationale, et de l'autorité territoriale compétente ".

12. La décision refusant le détachement de M. A... à l'issue de son stage de deux mois est fondée sur le positionnement inadapté du requérant au sein de l'équipe municipale. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a refusé de transmettre à la directrice générale adjointe des services certaines informations, alors que le maire lui en avait donné l'ordre, au motif qu'elle n'aurait pas été habilitée, selon le requérant, à accéder à de telles informations. En outre, le 17 février 2015, il a indiqué à un agent de la commune auquel le maire avait demandé de préparer une salle pour une réunion publique, qu'il participait ce faisant à la commission d'une infraction pénale dès lors que le maire agissait en tant que candidat aux élections et non en tant que maire. Il a ensuite évoqué cette situation en comité de direction le lendemain. Ces agissements, qui sont étrangers aux missions assignées à M. A..., témoignent de la difficulté pour l'intéressé de se positionner en qualité de policier municipal. Si M. A... fait valoir l'absence de délivrance ou l'obtention tardive de certains éléments inhérents à sa fonction, telles que certaines parties de sa tenue, sa carte professionnelle ou son assermentation, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que cette carence de l'autorité a eu des répercussions sur l'accomplissement par M. A... de ses fonctions, que la commune aurait prises en compte pour refuser le détachement. Dans ces conditions, en refusant son détachement à l'issue du stage probatoire, le maire de la commune n'a pas entaché son appréciation de l'aptitude de M. A... à occuper ses fonctions d'une erreur manifeste.

13. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que la décision litigieuse a été prise dans l'intérêt du service, eu égard aux insuffisances de M. A..., à exercer les fonctions pour lesquelles il avait été admis à suivre un stage probatoire, et non dans le but de sanctionner l'intéressé. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision en cause constituerait une sanction déguisée.

En ce qui concerne la légalité de la décision du 29 avril 2015 :

14. En premier lieu, à la suite de la suspension de l'exécution de la décision du 26 février 2015 ordonnée par le juge des référés, le maire de la commune d'Ottmarsheim a procédé au réexamen de la situation de M. A... et s'est à nouveau opposé à son détachement en se fondant sur les mêmes motifs et également sur des faits ayant eu lieu postérieurement à l'intervention de la première décision. Ces faits ne présentent pas un caractère disciplinaire mais se fondent également sur le positionnement inadapté de l'intéressé au sein de la commune. Par suite, et pour les mêmes motifs que ceux figurant au point n° 9, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée aurait été prise à la suite d'une procédure irrégulière, faute pour lui d'avoir eu préalablement accès à son dossier et d'avoir bénéficié d'un entretien individuel.

15. En deuxième lieu, si, eu égard à leur caractère provisoire, les décisions du juge des référés n'ont pas, au principal, l'autorité de la chose jugée, elles sont néanmoins, conformément au principe rappelé à l'article L. 11 du code de justice administrative, exécutoires et, en vertu de l'autorité qui s'attache aux décisions de justice, obligatoires. Il en résulte notamment que lorsque le juge des référés a prononcé la suspension d'une décision administrative et qu'il n'a pas été mis fin à cette suspension, l'administration ne saurait légalement reprendre une même décision sans qu'il ait été remédié au vice que le juge des référés avait pris en considération pour prononcer la suspension.

16. Par une ordonnance du 13 avril 2015, le juge des référés a suspendu l'exécution de la décision du 26 février 2015 au motif que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation était de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision et a enjoint au maire de réexaminer la situation de M. A.... Ce dernier a procédé à un nouvel examen de l'aptitude de M. A... à occuper les fonctions de brigadier-chef principal au sein de la police municipale en se fondant sur les mêmes faits que ceux ayant fondé la décision du 26 février 2015 ainsi que sur des éléments complémentaires et, notamment, la remise en cause par M. A... des attributions de la directrice générale adjointe des services, l'absence de lien de subordination, selon lui, avec cette dernière, y compris concernant la détermination de ses horaires de travail et le fait qu'il ait modifié de son propre chef les caractéristiques de la flotte de téléphonie mobile de toute la commune. Si le grief relatif à la modification des caractéristiques de la flotte de téléphonie mobile, sans obtenir l'aval du supérieur hiérarchique intéressé, n'est pas établi, contrairement à ce qu'ont jugé les premiers juges, il résulte cependant de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur les autres griefs, qui révèlent les difficultés de M. A... à se positionner comme un agent de police municipale de la commune. La circonstance que M. A... a été placé en arrêt maladie du 28 février 2015 au 31 mars 2015 ne faisait pas obstacle à ce que le maire tienne compte de son attitude hostile à l'égard de l'équipe communale manifestée postérieurement à la première décision. Si M. A... fait valoir l'absence de délivrance ou l'obtention tardive de certains éléments inhérents à sa fonction, telles que certaines parties de sa tenue, sa carte professionnelle ou son assermentation, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que cette carence de l'autorité a eu des répercussions sur l'accomplissement par l'intéressé de ses fonctions, que la commune aurait prises en compte pour refuser le détachement. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en prenant la décision litigieuse, le maire aurait méconnu l'autorité qui s'attache aux décisions prises par le juge des référés.

17. En troisième lieu, pour les mêmes motifs qu'énoncés au point précédent, le maire de la commune n'a pas entaché son appréciation de l'aptitude de M. A... à occuper ses fonctions d'une erreur manifeste.

18. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que la décision litigieuse a été prise dans l'intérêt du service, eu égard aux insuffisances de M. A..., à exercer les fonctions pour lesquelles il avait été admis à suivre un stage probatoire, et non dans le but de sanctionner l'intéressé. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision en cause constituerait une sanction déguisée.

19. En dernier lieu, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

En ce qui concerne la légalité de la décision du 25 juillet 2016 :

20. Il résulte des dispositions de l'article R. 4139-25 du code de la défense que le militaire admis à effectuer le stage probatoire d'une durée de deux mois est mis à disposition de la collectivité qui l'accueille. Si la collectivité estime qu'il n'a pas donné satisfaction, le ministre est tenu de mettre un terme à sa mise à disposition.

21. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point n° 20 que le tribunal n'a pas commis d'erreur de droit en estimant que le ministre de l'intérieur était tenu de réintégrer l'intéressé à la suite de la décision de la commune refusant son détachement.

22. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs qu'énoncés aux points n° 20 et 21, le ministre de l'intérieur n'a pas commis d'erreur de droit en s'estimant tenu de réintégrer le requérant dans son corps d'origine et de retirer le détachement qu'il avait prononcé le 10 février 2015 dès lors que, postérieurement, la commune s'est opposée au détachement de M. A....

23. En dernier lieu, les moyens dirigés contre la décision du 26 février 2015 ayant été écartés, le moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté par voie de conséquence.

24. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est fondé ni à demander l'annulation de la décision du 25 juillet 2016, ni à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté le surplus de ses demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Ottmarsheim, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. A... demande le versement au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En outre, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme demandée par la commune d'Ottmarsheim au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 17 mai 2018 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé en ce qu'il omet de statuer sur les conclusions présentées par M. A... tendant à l'annulation de la décision du 25 juillet 2016.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Strasbourg tendant à l'annulation de la décision du 25 juillet 2016 est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions d'appel de M. A... et les conclusions de la commune d'Ottmarsheim présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune d'Ottmarsheim.

2

N° 18NC02057


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC02057
Date de la décision : 25/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Détachement et mise hors cadre - Détachement.

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Détachement et mise hors cadre - Détachement - Réintégration.

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Licenciement - Stagiaires.


Composition du Tribunal
Président : M. DEVILLERS
Rapporteur ?: Mme Sandrine ANTONIAZZI
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : SELARL SOLER-COUTEAUX / LLORENS

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-02-25;18nc02057 ?
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