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20/02/2020 | FRANCE | N°19NC03159

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 20 février 2020, 19NC03159


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cougnaud Construction a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nancy de condamner la communauté de communes du territoire de Fresnes-en-Woëvre à lui verser, à titre provisionnel, la somme de 412 756,82 euros TTC.

Par une ordonnance n° 1900145 du 18 octobre 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 novembre 2019, et un mémoire en réplique enregist

ré le 27 janvier 2020, la société Cougnaud Construction, représentée par Me B..., demande à la cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cougnaud Construction a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nancy de condamner la communauté de communes du territoire de Fresnes-en-Woëvre à lui verser, à titre provisionnel, la somme de 412 756,82 euros TTC.

Par une ordonnance n° 1900145 du 18 octobre 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 novembre 2019, et un mémoire en réplique enregistré le 27 janvier 2020, la société Cougnaud Construction, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 18 octobre 2019 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy ;

2°) de condamner la communauté de communes du territoire de Fresnes-en-Woëvre à lui verser, à titre provisionnel, la somme de 413 660,10 euros TTC ;

3°) de mettre à la charge de la communauté de communes du territoire de Fresnes-en-Woëvre la somme de 3 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa créance, qui s'élève à l'intégralité des déductions libérées aux termes du décompte général et définitif, soit à la somme de 413 660,10 euros TTC, ne présente aucune contestation sérieuse, la somme de 903,28 euros TTC, perçue après notification du décompte général correspondant au solde de la révision des prix ;

- si le décompte général et définitif, arrêté à la somme non contestée de 2 875 855,54 euros TTC, rapporte bien le montant des pénalités provisoires retenues au titre des " autres déductions ", le premier juge a fait abstraction de ce que ce montant est constitué de deux sommes : celle de 2 462 195,14 euros TTC, effectivement réglée, et celle de 413 660,10 euros TTC restant due ;

- au surplus, la communauté de communes du territoire de Fresnes-en-Woëvre a, pour justifier les pénalités retenues, indiqué qu'elle souhaitait que le complexe pût ouvrir en septembre 2018, faisant abstraction, d'une part, de la durée d'exécution globale du marché fixée à huit mois à compter de la notification du marché et, d'autre part, de la date effective de cette notification, le 12 février 2018.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 décembre 2019, la communauté de communes du territoire de Fresnes-en-Woëvre, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de la société Cougnaud Construction ;

2°) de confirmer l'ordonnance attaquée ;

3°) de mettre à la charge de la société Cougnaud Construction la somme de 4 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les délais d'exécution figuraient parmi les critères de sélection des offres du marché, le marché a été passé en lots séparés, or la société Cougnaud Construction n'a pas respecté le calendrier des travaux afférent à son lot ni le délai d'exécution global du marché ;

- la position de la société requérante repose, à cet égard, sur une confusion entre le délai global du marché et le délai d'exécution auquel elle était soumise ;

- elle n'a jamais entendu renoncer aux pénalités de retard dues et justifiées et la lecture du décompte général faite par la société Cougnaud Construction est erronée ;

- l'obligation dont se prévaut la société requérante est sérieusement contestable.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre de la réalisation d'un pôle " Enfance et jeunesse ", la communauté de communes du territoire de Fresnes-en-Woëvre (CCTFW) a confié la maîtrise d'oeuvre du projet au groupe Acanthe et aux sociétés Setecba Ingénierie et Prévost Ingénierie. Le lot n° 2 du marché de construction " construction modulaire " a été attribué à la société Cougnaud Construction. L'acte d'engagement de cette société lui a été notifié le 12 février 2018. En cours de chantier, l'entreprise a fait l'objet de pénalités de retard, constatées par la maîtrise d'oeuvre, qui ont été déduites des acomptes n° 3, 4 et 5, pour un montant global de 413 660,10 euros. Cette somme a été portée au décompte général afin de tenir compte des prélèvements déjà effectués à ce titre. Le décompte général du lot a été notifié à la société Cougnaud Construction qui l'a retourné signé le 7 mars 2019. Entretemps, le 16 janvier 2019, l'entreprise avait saisi le juge des référés du tribunal administratif de Nancy d'une demande tendant à condamner la CCFTW à lui verser, à titre de provision, une somme de 412 756, 82 euros TTC correspondant, selon elle, aux pénalités de retard déduites à tort du décompte général. Elle fait appel de l'ordonnance du 18 octobre 2019 par laquelle le juge des référés a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. (...) ". Il résulte de ces dispositions que pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude. Dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état.

3. L'ensemble des opérations auxquelles donne lieu l'exécution d'un marché de travaux publics est compris dans un compte dont aucun élément ne peut être isolé et dont seul le solde arrêté lors de l'établissement du décompte général et définitif détermine les droits et obligations définitifs des parties. L'ensemble des conséquences financières de l'exécution du marché sont retracées dans ce décompte même lorsqu'elles ne correspondent pas aux prévisions initiales.

4. Aux termes de l'article 7.3.1. " Pénalités de retard journalières " du cahiers des clauses administratives particulières (CCAP) du marché : " Par dérogation à l'article 20.1 du CCAG Travaux, l'entrepreneur subira en cas de retard dans l'exécution des prestations et travaux, les pénalités journalières suivantes à retenir sur le montant des acomptes mensuels : / du simple fait de la constatation du retard par le maître d'oeuvre, sans mise en demeure préalable, l'entrepreneur encourt une retenue journalière fixée à 1 / 200e du montant HT du marché (montant considéré à la date d'expiration du délai contractuel d'exécution). / Ces dispositions s'appliquent aux délais intermédiaires définis dans le calendrier d'exécution. Toutefois, le maître d'ouvrage se réserve la possibilité, au cas où le retard serait résorbé, de remettre les pénalités. ".

5. Il ressort des pièces du dossier et notamment de l'acte d'engagement auquel était annexé un calendrier d'exécution globale des travaux et un calendrier prévisionnel que la durée d'exécution globale de l'ensemble des travaux était fixée à 8 mois à compter de la notification des marchés. La société Cougnaud Construction a été retenue par le maître d'ouvrage essentiellement pour son engagement à respecter les délais imposés. En cours de chantier, aucun accord n'ayant pu être trouvé quant au calendrier d'exécution, l'entreprise a accumulé des retards, constatés par le maître d'oeuvre au cours des mois d'août, septembre et décembre 2018, qui ont fait l'objet de pénalités déduites des acomptes n° s 3, 4 et 5 pour un montant global de 413 660,10 euros.

6. La CCTFW a notifié le décompte général le 18 février 2019 à la société Cougnaud Construction qui l'a retourné au maitre d'ouvrage signé sans réserves par courrier du 7 mars 2019. Ce décompte général fait apparaître un montant global du marché, incluant la révision des prix, de 2 875 855,54 euros TTC. Les acomptes perçus par l'entreprise sont listés et leur montant global prend en compte les retenues effectuées au titre des pénalités évoquées au point précédent. Si la société Cougnaud Construction soutient que la CCTFW a entendu renoncer aux pénalités de retard qu'elle lui a infligées, elle n'apporte aucun élément probant de nature à corroborer cette allégation qui, par ailleurs, ne ressort de manière certaine, ni de l'établissement du décompte général qu'elle a signé, ni des autres pièces du dossier. Dès lors, c'est sans commettre d'erreur que le premier juge a relevé que le solde du décompte général s'élevait à 0.

7. Enfin, et en tout état de cause, si le bien-fondé des pénalités de retard appliquées à la société Cougnaud Construction par le maître d'ouvrage, au regard des délais d'exécution auxquels elle était soumise et des conditions de réception l'ouvrage, n'est pas établi de manière certaine en l'état de l'instruction, les données invoquées par la CCTFW, corroborées par les comptes rendus du maître d'oeuvre ont pour effet de rendre la créance dont se prévaut la société requérante contestable au sens des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, telles que définies au point 2, tant dans son principe que dans son étendue.

8. Il résulte de ce qui précède que la société Cougnaud Construction n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a refusé de faire droit à sa requête.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la CCFTW, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que réclame la société Cougnaud Construction au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Cougnaud Construction une somme de 2 000 euros au titre des mêmes dispositions.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de la société Cougnaud Construction est rejetée.

Article 2 : La société Cougnaud Construction versera à la communauté de communes du territoire de Fresnes-en-Woëvre une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Cougnaud Construction et à la communauté de communes du territoire de Fresnes-en-Woëvre.

Fait à Nancy, le 20 février 2020.

La présidente de la cour

Signé : Françoise Sichler

La République mande et ordonne au préfet de la Meuse, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

A. Siffert

2

19NC03159


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro d'arrêt : 19NC03159
Date de la décision : 20/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS ATLANTIC JURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-02-20;19nc03159 ?
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