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21/11/2019 | FRANCE | N°19NC00420

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 21 novembre 2019, 19NC00420


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 22 juin 2018 par lequel le préfet du Haut-Rhin lui a refusé le bénéfice d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1804642 du 27 novembre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 février 2019, M. B...,

représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 27 novembre 2018 du tri...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 22 juin 2018 par lequel le préfet du Haut-Rhin lui a refusé le bénéfice d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1804642 du 27 novembre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 février 2019, M. B..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 27 novembre 2018 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 22 juin 2018 du préfet du Haut-Rhin, en tant qu'il lui refuse un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour revêtu de la mention " vie privée et familiale ", subsidiairement de réexaminer sa demande de titre dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision contestée est insuffisamment motivée ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen particulier des circonstances de l'espèce ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les dispositions des articles L. 313-11 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie privée et familiale ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mai 2019, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 janvier 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience du 24 octobre 2019.

Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant monténégrin, né en 1980, est entré pour la dernière fois en France en janvier 2016, selon ses déclarations. Le 21 août 2017, il a sollicité un titre de séjour revêtu de la mention " vie privée et familiale " en application du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L.313-14 du même code. Par arrêté du 22 juin 2018, le préfet du Haut-Rhin lui a refusé le bénéfice d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Par le jugement attaqué du 27 novembre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 juin 2018.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a eu, de sa relation avec une ressortissante serbe, un fils, Fabian, né en France le 20 août 2009, et qu'après la séparation des parents, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Lyon a fixé la résidence chez le père par un jugement du 13 juillet 2011. Toutefois, par le même jugement, il a également attribué l'autorité parentale conjointe ainsi qu'un droit de visite à la mère de l'enfant dont il n'est pas utilement contesté qu'elle réside en France en qualité de réfugiée. Dans ces conditions, eu égard à l'âge de l'enfant à la date de l'arrêté attaqué et au risque de perte de toute possibilité de rétablissement de ses liens avec sa mère, le préfet doit être regardé par son refus de délivrer un titre de séjour à M. B... comme ayant méconnu l'intérêt supérieur de l'enfant.

4. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 juin 2018 portant refus de titre de séjour.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".

6. Eu égard au motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt implique que soit délivré à M. B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous réserve d'un changement de circonstances de droit et de fait à la date de la nouvelle décision du préfet du Haut-Rhin. Il y a lieu, par suite, en application des dispositions précitées de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de délivrer ce titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Son avocat peut, par suite, se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me C..., avocat du requérant, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C... de la somme de 1 500 euros.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 27 novembre 2018 et l'arrêté du 22 juin 2018 du préfet du Haut-Rhin sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Haut-Rhin de délivrer à M. B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me C... une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me C... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

2

N° 19NC00420


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19NC00420
Date de la décision : 21/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Jérôme DIETENHOEFFER
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : RODRIGUES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-11-21;19nc00420 ?
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