La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/03/2019 | FRANCE | N°18NC01086-18NC01115-18NC01397

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 19 mars 2019, 18NC01086-18NC01115-18NC01397


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Moselle a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler le protocole transactionnel conclu le 9 décembre 2015 entre la communauté d'agglomération du Val de Fensch et la société NC Numéricable, tendant, d'une part, à la résiliation anticipée de la convention du 30 septembre 1993 relative à l'établissement et à l'exploitation, sur le territoire de la commune de Florange, du réseau câblé de radiodiffusion et de télévision et, d'autre part, à la fixation de l'indemnité d

e résiliation due à la société Numéricable et à la cession à cette dernière du rése...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Moselle a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler le protocole transactionnel conclu le 9 décembre 2015 entre la communauté d'agglomération du Val de Fensch et la société NC Numéricable, tendant, d'une part, à la résiliation anticipée de la convention du 30 septembre 1993 relative à l'établissement et à l'exploitation, sur le territoire de la commune de Florange, du réseau câblé de radiodiffusion et de télévision et, d'autre part, à la fixation de l'indemnité de résiliation due à la société Numéricable et à la cession à cette dernière du réseau câblé et du génie civil associé.

Par un jugement n° 1602374 du 7 février 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé le protocole transactionnel à compter du 15 mai 2018.

Procédure devant la cour :

I- Par une requête enregistrée le 5 avril 2018 sous le n° 18NC01086 et des mémoires complémentaires, enregistrés les 13 et 29 décembre 2018 et le 17 janvier 2019, la communauté d'agglomération du Val de Fensch, représentée par MeA..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler, pour irrégularité, le jugement du 7 février 2018 et de se déclarer incompétente au profit de la juridiction judiciaire ;

2°) d'annuler le jugement du 7 février 2018 et de rejeter le déféré du préfet de la Moselle ;

3°) de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue des discussions menées entre la direction nationale d'interventions domaniales (DNID) du ministère des finances et des comptes publics et la société SFR Numéricable ;

4°) subsidiairement, de surseoir à statuer et d'ordonner une expertise avant dire droit ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative n'est pas compétente pour se prononcer dès lors que le protocole transactionnel porte sur une cession à une personne privée, de biens relevant, non de son domaine public mais de son domaine privé, qu'il ne met pas en oeuvre des prérogatives de puissance publique et qu'il n'aboutit pas à la participation du cocontractant à une mission de service public ;

- le courrier que lui a adressé le préfet de la Moselle le 26 février 2016 n'était pas susceptible de proroger le délai de recours contentieux et par conséquent, le déféré préfectoral aurait dû être rejeté comme tardif ;

- le recours au mode transactionnel était justifié sur tous les points visés par le protocole y compris s'agissant de l'indemnité de résiliation ou de la cession de biens ;

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, elle n'a consenti aucune libéralité à la société SFR Numéricable car même si la détermination du prix de cession du réseau câblé et du génie civil associé fait référence, dans le protocole, à la valeur nette comptable, il est apparu, en utilisant la méthode d'estimation dite " des comparables " qu'elle correspondait bien, eu égard aux données locales, à la valeur réelle de ces biens ;

- le tribunal ne pouvait valablement retenir, dans les éléments d'appréciation à prendre en compte, la possibilité de réutiliser une partie des équipements existants ;

- cette méthode des comparables est plus pertinente que celle, dite des cash-flows, qu'a proposée la direction nationale d'interventions domaniales qui repose sur une analyse contestable, sans lien avec la situation locale, ce que confirme la production, en cours d'instance, d'une nouvelle estimation réalisée par cette direction ;

- la cession du réseau câblé et des ouvrages de génie civil visait bien à satisfaire un intérêt général justifié par des contreparties suffisantes en termes de modernisation du réseau et de couverture complète du territoire en très haut débit ;

- en ne différant l'annulation qu'ils ont prononcée qu'à la date du 15 mai 2018, les premiers juges ont fait une mauvaise appréciation des conséquences de cette annulation en ne permettant pas aux parties de négocier un nouveau protocole dans des termes de nature à garantir la pérennité du déploiement d'un réseau d'initiative privée ;

- en se bornant à renvoyer à ses écritures de première instance, le préfet ne permet pas à la cour d'identifier les moyens qu'il entend maintenir en cause d'appel ;

- le moyen de première instance tiré de l'existence d'une aide d'Etat n'était pas juridiquement étayé et en tout état de cause, cette qualification ne saurait être retenue ;

- le principe de non-discrimination n'a pas été méconnu ;

- aucune mise en concurrence n'est nécessaire préalablement à une cession de biens.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2018, et des mémoires complémentaires enregistrés les 3,16 et 25 janvier 2019, le préfet de la Moselle, dans le dernier état de ses écritures, conclut au rejet de la requête et demande, avant dire droit et dans un contexte de négociations en cours entre l'opérateur et la DNID, la désignation d'un expert pour déterminer le coût des travaux de modernisation du réseau.

Il soutient que :

- la juridiction administrative est compétente pour se prononcer sur le litige dès lors que le contrat de transaction constitue un contrat administratif ayant pour objet de régler ou de prévenir un litige relevant de la compétence de la juridiction administrative, que l'engagement transactionnel est pris par une personne publique et que la cession porte sur des biens relevant du domaine public ;

- son déféré n'était pas tardif dès lors que sa demande d'informations et de pièces complémentaires portait sur des documents nécessaires à l'exercice du contrôle de légalité ;

- la cession en litige méconnaît le principe constitutionnel de protection de la propriété publique qui fait interdiction de céder des biens publics en dessous de leur valeur réelle lorsque le cessionnaire poursuit des fins d'intérêt privé ;

- la valeur nette comptable ne peut constituer une référence pertinente pour déterminer le prix de vente d'un bien qu'elle conduit à sous-estimer ;

- la valeur proposée n'est pas suffisamment étayée alors qu'il importait bien de tenir compte, en l'espèce, du potentiel du réseau, à travers la possibilité de réutiliser les câbles coaxiaux pénétrant dans les immeubles grâce à la technique du FttLA ce qui aboutit, même en neutralisant le mécanisme de compensation procédant de l'indemnité de résiliation, à une libéralité interdite et à l'attribution d'une aide d'Etat ;

- aucun motif d'intérêt général ne justifie une telle libéralité qui méconnait le droit communautaire de la concurrence ;

- contrairement à ce que soutient la requérante, la méthode des cash-flows proposée par la DNID est universellement utilisée et elle permet d'intégrer la valeur commerciale procurée par l'avantage économique que l'acheteur du réseau détient sur ses concurrents, celui-ci pouvant réutiliser les branchements coaxiaux du réseau câblé dans le cadre d'une modernisation ;

- la dette de la communauté d'agglomération est fictive, dès lors qu'il n'est pas établi qu'une indemnité de résiliation soit due ;

- le tribunal a bien pris en compte, en déterminant la date d'effet de l'annulation prononcée, l'intérêt général lié au déploiement du réseau à très haut débit et la communauté d'agglomération conserve toujours la possibilité de régulariser le protocole transactionnel en tenant compte de la valeur réelle des réseaux.

Par un mémoire enregistré le 14 décembre 2018, et un mémoire complémentaire enregistré le 17 janvier 2019, la SAS SFR Fibre, venant aux droits de la société NC Numéricable, représentée par Me B...conclut aux mêmes fins que la requête d'appel et les mémoires complémentaires de la communauté d'agglomération du Val de Fensch et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative n'était pas compétente ;

- le déféré préfectoral était tardif, faute pour le courrier du préfet de la Moselle du 26 février 2016 d'avoir valablement prolongé le délai de recours dès lors qu'il portait sur une demande de transmission de documents qui n'étaient pas utiles au contrôle de légalité, ou se présentait comme une simple demande d'information ;

- la cession ne méconnaît pas le principe constitutionnel de protection de la propriété publique ;

- aucune disposition ni aucun principe n'interdit que le prix de cession d'un bien puisse être déterminé au regard de sa valeur nette comptable ;

- en tout état de cause, un cabinet d'expertise financière et technique spécialisé a procédé à l'évaluation du réseau par le biais d'une méthode différente ayant approché en valeur absolue celui de la valeur nette comptable des biens ;

- contrairement à ce que soutient le préfet, la récupération des branchements coaxiaux existants ne constitue pas nécessairement un avantage concurrentiel ;

- l'appréciation retenue par le jugement pour déterminer le prix du réseau repose sur une méthode d'actualisation contestable ;

- rien ne permet d'écarter l'application de la méthode des comparables, utilisée par les parties ;

- la circonstance qu'une procédure prévue à l'article 108 § 2 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ait été ouverte est inopérante ;

- rien n'établit que la situation d'espèce caractériserait une aide d'Etat.

II- Par une requête enregistrée le 7 avril 2018 sous le n° 18NC01115, et des mémoires complémentaires, enregistrés les 3 et 17 janvier 2019, la SAS SFR Fibre, venant aux droits de la société NC Numéricable, représentée par MeB..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler, pour irrégularité, le jugement du 7 février 2018 et de se déclarer incompétente au profit de la juridiction judiciaire ;

2°) d'annuler le jugement du 7 février 2018 et de rejeter le déféré du préfet de la Moselle ;

3°) de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue des discussions menées entre la direction nationale d'interventions domaniales (DNID) du ministère des finances et des comptes publics et la société SFR-Numéricable ;

4°) subsidiairement, de surseoir à statuer et d'ordonner une expertise avant dire droit ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative n'était pas compétente ;

- le déféré préfectoral était tardif, faute pour le courrier du préfet de la Moselle du 26 février 2016 d'avoir valablement prolongé le délai de recours dès lors qu'il portait sur une demande de transmission de documents qui n'étaient pas utiles au contrôle de légalité, ou se présentait comme une simple demande d'information ;

- la cession ne méconnaît pas le principe constitutionnel de protection de la propriété publique ;

- aucune disposition ni aucun principe n'interdit que le prix de cession d'un bien puisse être déterminé au regard de sa valeur nette comptable ;

- en tout état de cause, un cabinet d'expertise financière et technique spécialisé a procédé à l'évaluation du réseau par le biais d'une méthode différente ayant approché en valeur absolue celui de la valeur nette comptable des biens ;

- contrairement à ce que soutient le préfet, la récupération des branchements coaxiaux existants ne constitue pas nécessairement un avantage concurrentiel ;

- l'appréciation retenue par le jugement pour déterminer le prix du réseau repose sur une méthode d'actualisation contestable ;

- rien ne permet d'écarter l'application de la méthode des comparables, utilisée par les parties ;

- c'est à tort que le jugement a estimé que les parties ne poursuivaient pas un but d'intérêt général.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2018, et des mémoires complémentaires, enregistrés les 3, 16 et 25 janvier 2019, le préfet de la Moselle, dans le dernier état de ses écritures, conclut au rejet de la requête et demande, avant dire droit et dans un contexte de négociations en cours entre l'opérateur et la DNID, la désignation d'un expert pour déterminer le coût des travaux de modernisation du réseau.

Il soutient que :

- la juridiction administrative est compétente pour se prononcer sur le litige dès lors que le contrat de transaction constitue un contrat administratif ayant pour objet de régler ou de prévenir un litige relevant de la compétence de la juridiction administrative, que l'engagement transactionnel est pris par une personne publique et que la cession porte sur des biens relevant du domaine public ;

- son déféré n'était pas tardif dès lors que sa demande d'informations et de pièces complémentaires portait sur des documents nécessaires à l'exercice du contrôle de légalité ;

- la cession en litige méconnaît le principe constitutionnel de protection de la propriété publique qui fait interdiction de céder des biens publics en dessous de leur valeur réelle lorsque le cessionnaire poursuit des fins d'intérêt privé ;

- la valeur nette comptable ne peut constituer une référence pertinente pour déterminer le prix de vente d'un bien qu'elle conduit à sous-estimer ;

- la valeur proposée n'est pas suffisamment étayée alors qu'il importait bien de tenir compte, en l'espèce, du potentiel du réseau, à travers la possibilité de réutiliser les câbles coaxiaux pénétrant dans les immeubles grâce à la technique du FttLA ce qui aboutit, même en neutralisant le mécanisme de compensation procédant de l'indemnité de résiliation, à une libéralité interdite et à l'attribution d'une aide d'Etat ;

- aucun motif d'intérêt général ne justifie une telle libéralité qui méconnait le droit communautaire de la concurrence ;

- contrairement à ce que soutient la requérante, la méthode des cash-flows proposée par la DNID est universellement utilisée et elle permet d'intégrer la valeur commerciale procurée par l'avantage économique que l'acheteur du réseau détient sur ses concurrents, celui-ci pouvant réutiliser les branchements coaxiaux du réseau câblé dans le cadre d'une modernisation ;

- la dette de la communauté d'agglomération est fictive, dès lors qu'il n'est pas établi qu'une indemnité de résiliation soit due ;

- le tribunal a bien pris en compte, en déterminant la date d'effet de l'annulation prononcée, l'intérêt général lié au déploiement du réseau à très haut débit et la communauté d'agglomération conserve toujours la possibilité de régulariser le protocole transactionnel en tenant compte de la valeur réelle des réseaux.

Par un mémoire enregistré le 29 décembre 2018, et un mémoire complémentaire, enregistré le 17 janvier 2019, la communauté d'agglomération du Val de Fensch, représentée par MeA..., conclut aux mêmes fins que la requête d'appel et les mémoires complémentaires de la société SFR Fibre et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative n'est pas compétente pour se prononcer dès lors que le protocole transactionnel porte sur une cession à une personne privée, de biens relevant, non de son domaine public mais de son domaine privé, qu'il ne met pas en oeuvre des prérogatives de puissance publique et qu'il n'aboutit pas à la participation du cocontractant à une mission de service public ;

- le courrier que lui a adressé le préfet de la Moselle le 26 février 2016 n'était pas susceptible de proroger le délai de recours contentieux et par conséquent, le déféré préfectoral aurait dû être rejeté comme tardif ;

- le recours au mode transactionnel était justifié sur tous les points visés par le protocole y compris s'agissant de l'indemnité de résiliation ou de la cession de biens ;

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, elle n'a consenti aucune libéralité à la société SFR Numéricable car même si la détermination du prix de cession du réseau câblé et du génie civil associé fait référence, dans le protocole, à la valeur nette comptable, il est apparu, en utilisant la méthode d'estimation dite " des comparables " qu'elle correspondait bien, eu égard aux données locales, à la valeur réelle de ces biens ;

- le tribunal ne pouvait valablement retenir, dans les éléments d'appréciation à prendre en compte, la possibilité de réutiliser une partie des équipements existants ;

- cette méthode des comparables est plus pertinente que celle, dite des cash-flows, qu'a proposée la direction nationale d'interventions domaniales qui repose sur une analyse contestable, sans lien avec la situation locale, ce que confirme la production, en cours d'instance, d'une nouvelle estimation réalisée par cette direction ;

- la cession du réseau câblé et des ouvrages de génie civil visait bien à satisfaire un intérêt général justifié par des contreparties suffisantes en termes de modernisation du réseau et de couverture complète du territoire en très haut débit ;

- en ne différant l'annulation qu'ils ont prononcée qu'à la date du 15 mai 2018, les premiers juges ont fait une mauvaise appréciation des conséquences de cette annulation en ne permettant pas aux parties de négocier un nouveau protocole dans des termes de nature à garantir la pérennité du déploiement d'un réseau d'initiative privée ;

- en se bornant à renvoyer à ses écritures de première instance, le préfet ne permet pas à la cour d'identifier les moyens qu'il entend maintenir en cause d'appel ;

- le moyen de première instance tiré de l'existence d'une aide d'Etat n'était pas juridiquement étayé et en tout état de cause, cette qualification ne saurait être retenue ;

- le principe de non-discrimination n'a pas été méconnu ;

- aucune mise en concurrence n'est nécessaire préalablement à une cession de biens.

III- Par une requête enregistrée le 4 mai 2018 sous le n° 18NC01397, et des mémoires complémentaires, enregistrés les 13 et 29 décembre 2018, la communauté d'agglomération du Val de Fensch, agissant par son président en exercice et représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement n° 1602374 du tribunal administratif de Strasbourg du 7 février 2018 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'exécution du jugement, en ce qu'il compromet les engagements pris par l'opérateur SFR Numéricable relatifs à l'aménagement numérique du territoire de la communauté d'agglomération, sans rendre possible la régularisation du protocole transactionnel, emporte des conséquences difficilement réparables pour l'intérêt public qu'elle poursuit ;

- les moyens soulevés dans la requête n° 18NC01086 sont sérieux ;

- le protocole transactionnel ne s'oppose pas au principe de protection de la propriété publique ;

- la cession consentie dans le cadre du protocole transactionnel ne constitue nullement une aide d'Etat et ne méconnaît pas le principe de non-discrimination issus de la jurisprudence communautaire et du droit de la concurrence.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 juillet 2018, et des mémoires complémentaires, enregistrés les 3 et 16 janvier 2018, le préfet conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens invoqués par la communauté d'agglomération du Val de Fensch à l'appui de sa requête ne sont pas sérieux ;

- aucune situation d'urgence ne justifie de prononcer le sursis à exécution du jugement.

Un mémoire, produit pour la communauté d'agglomération du Val de Fensch et enregistré le 24 janvier 2019, n'a pas été communiqué.

Un mémoire, présenté par le préfet de la Moselle et enregistré le 25 janvier 2019, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Di Candia, premier conseiller,

- les conclusions de M. Louis, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour la communauté d'agglomération du Val de Fensch et de MeB..., pour la SAS SFR Fibre.

Des notes en délibéré enregistrées le 1er février 2019 ont été présentées pour la communauté d'agglomération du Val de Fensch dans les instances n° 18NC01086 et 18NC01115.

Considérant ce qui suit :

1. Par une convention du 30 septembre 1993, la commune de Florange a confié à la société TDF l'établissement et l'exploitation, sur son territoire, d'un réseau de distribution par câble des services de radiodiffusion sonore et de télévision, pour toute la durée de l'autorisation d'exploitation délivrée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, qui a été fixée à trente ans, par décision du 31 janvier 1995 publiée au Journal officiel le 21 février 1995. Par un arrêté du 16 octobre 2015, le préfet de la Moselle a transféré à la communauté d'agglomération du Val de Fensch, dont fait partie la commune de Florange, la compétence relative à l'aménagement numérique comprenant notamment l'exploitation des réseaux de télédistribution existants et le déploiement d'un réseau d'initiative privée de communications électroniques à très haut débit. Le 9 décembre 2015, la communauté d'agglomération du Val de Fensch a conclu avec la société NC Numéricable, venant aux droits de la société TDF, un protocole transactionnel ayant pour objet la résiliation anticipée au 31 décembre 2015, de la convention du 30 septembre 1993, le versement d'une indemnité de résiliation de 307 482 euros au titre de la valeur non amortie des biens de retour et la cession concomitante de l'intégralité du réseau câblé et des ouvrages de génie civil associé existant dans la commune de Florange pour un montant identique de 307 482 euros. Par des requêtes n° 18NC01086 et n° 18NC01115, la communauté d'agglomération du Val de Fensch, d'une part, et la SAS SFR Fibre, venant aux droits de la société NC Numéricable, d'autre part, font appel du jugement du 7 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a, à la demande du préfet de la Moselle, annulé, avec effet différé au 15 mai 2018, le protocole transactionnel du 9 décembre 2015. Par une requête n° 18NC01397, la communauté d'agglomération du Val de Fensch demande également à la cour de prononcer le sursis à exécution de ce jugement.

2. Ces trois requêtes étant dirigées contre le même jugement et présentant à juger les mêmes questions, il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt.

Sur les conclusions des requêtes n° 18NC01086 et 18NC01115 :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

3. La transaction conclue par une personne morale de droit public, est, en principe, un contrat de nature civile, sauf si elle met en oeuvre des prérogatives de puissance publique ou aboutit à la participation du cocontractant à une mission de service public. Sous cette réserve, l'homologation de la transaction et les litiges nés de son exécution relèvent de la compétence du juge judiciaire, hormis le cas où il est manifeste que les différends qui s'y trouvent compris ressortissent principalement à la compétence du juge administratif.

4. En l'espèce, le protocole transactionnel du 9 décembre 2015 a été conclu entre les parties à la convention de délégation de service public du 30 septembre 1993, qui constitue par nature, un contrat administratif et une telle transaction a pour objet de prévenir tout différend relatif à la résiliation anticipée de cette convention. Dans ces conditions, et quelles que soient les modalités selon lesquelles les parties sont convenues d'aménager les conséquences de cette résiliation, il appartient au seul juge administratif de connaître de la contestation de la validité de ce protocole, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'appartenance des biens cédés dans le cadre de cette transaction au domaine public ou au domaine privé de la collectivité délégante. Il en résulte que contrairement à ce que soutiennent la communauté d'agglomération du Val de Fensch et la SAS SFR Fibre, le tribunal administratif de Strasbourg n'a commis aucune irrégularité en écartant l'exception d'incompétence de la juridiction administrative qu'elles avaient soulevée devant lui.

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :

S'agissant du motif d'annulation retenu par le tribunal :

5. Pour déterminer si l'acte par lequel une collectivité publique cède à une personne privée un élément de son patrimoine à un prix inférieur à sa valeur est, pour ce motif, entaché d'illégalité, il incombe au juge de vérifier s'il est justifié par des motifs d'intérêt général. Si tel est le cas, il lui appartient ensuite d'identifier, au vu des éléments qui lui sont fournis, les contreparties que comporte la cession, c'est-à-dire les avantages que, eu égard à l'ensemble des intérêts publics dont la collectivité cédante a la charge, elle est susceptible de lui procurer, et de s'assurer, en tenant compte de la nature des contreparties et, le cas échéant, des obligations mises à la charge des cessionnaires, de leur effectivité. Il doit, enfin, par une appréciation souveraine, estimer si ces contreparties sont suffisantes pour justifier la différence entre le prix de vente et la valeur du bien cédé.

6. Pour annuler le protocole transactionnel du 9 décembre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a estimé que la cession à la société NC Numéricable de la partie du réseau câblé communautaire, y compris les ouvrages de génie civil associé, couvrant le territoire de la commune de Florange était, dès lors d'une part, qu'elle était convenue pour un montant de 307 482 euros qu'il a regardé comme inférieur à la valeur de ces ouvrages, et d'autre part, qu'elle n'était pas justifiée par un motif d'intérêt général, constitutive d'une libéralité qui entachait d'illégalité l'ensemble de la transaction.

7. En cas de contestation relative à la valeur d'un bien faisant l'objet d'une cession, l'appréciation de cette valeur s'opère soit au regard des transactions intervenues dans des conditions équivalentes, soit en utilisant les méthodes d'évaluation qui permettent d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné, à la date de la cession, le jeu normal de l'offre et de la demande.

8. Il résulte de l'instruction que pour convenir, à l'article 3 du protocole, d'un prix de cession de l'ensemble des câbles du réseau et de leurs accessoires équivalant à une somme de 307 482 euros, correspondant à la valeur nette comptable de ces équipements, les parties à la transaction se sont fondées sur une estimation réalisée selon une méthode comparative (dite méthode des comparables) par un cabinet d'expertise financière et technique indépendant et spécialisé dans le domaine des réseaux de communications électroniques, le cabinet CapHornier. Le tribunal administratif de Strasbourg a, par le jugement attaqué, considéré que la valeur vénale des équipements cédés ne pouvait, selon l'estimation réalisée par la direction nationale d'interventions domaniales du ministère des finances et des comptes publics (DNID) en application de la méthode dite d'actualisation des cash-flows futurs, laquelle intègre, selon de nombreux paramètres, les potentialités de reconversion ou de modernisation du réseau, être fixée à un montant inférieur à 392 887 euros, soit plus de 27% du montant convenu. Or, le dernier état de l'instruction révèle, tant au vu des analyses critiques réalisées par le cabinet Eric Cocos Conseil que de la teneur des discussions actuellement en cours entre la DNID et la société SFR Fibre, que cette estimation comportait des erreurs de calcul et qu'elle retenait certains paramètres ou reposait sur certaines hypothèses dont, pour plusieurs, la pertinence a été remise en cause, y compris par la DNID. A l'inverse et contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il n'est pas établi que les cessions de réseaux câblés réalisées dans les communes de Nice, Saint-Quentin-en-Yvelines et Chambéry ne permettaient pas, à raison des caractéristiques de ces réseaux qui étaient connues, de procéder à une estimation de la valeur du réseau de Florange par application de la méthode des comparables. Selon cette analyse, qui tenait compte de la nature urbaine ou non du réseau, de son caractère modernisé ou non, de l'inclusion ou non dans la transaction des ouvrages de génie civil, de l'importance, en nombre de prises, du périmètre concerné et de la part de marché d'ores et déjà détenue sur le réseau par l'opérateur, le prix de cession du réseau câblé non modernisé desservant la communauté d'agglomération qui, dans la commune de Florange comporte 4 202 prises et 20 kms de fourreaux et sur lequel l'opérateur ne détient qu'environ 10% de part de marché, a pu valablement être estimé à partir d'une valeur unitaire à la prise de 73 euros, la pertinence de cette méthode d'évaluation ayant, au demeurant, été corroborée depuis lors, au regard des prix de cession pratiqués dans d'autres communes et en particulier celle du Mans. A cet égard, le préfet de la Moselle ne peut utilement se prévaloir, pour leur dénier toute valeur probante, de la seule circonstance que la société SFR Numéricable, ou l'une de ses filiales, était partie à l'ensemble de ces transactions dont il n'est, en effet, pas établi qu'elles n'auraient pas été régulièrement négociées et conclues avec les différentes collectivités concernées.

9. Certes, le préfet de la Moselle maintient que la valorisation du réseau câblé de la commune de Florange selon la méthode d'actualisation des cash-flows futurs permettrait, au vu du projet de déploiement d'un réseau à très haut débit à partir du réseau existant, qui a fait d'ailleurs l'objet d'une convention de partenariat de très haut débit entre la communauté d'agglomération du Val de Fensch et la société NC Numéricable, d'établir que le prix de cession en litige était bien sous-estimé. Toutefois, s'il apparaît au vu de la restitution par les parties, des discussions en cours entre la DNID et la société SFR Fibre, que les positions de ces dernières sont susceptibles de converger s'agissant de la modification ou l'abandon de certains des paramètres à utiliser pour mettre en oeuvre cette méthode d'évaluation, s'agissant notamment de la période d'analyse, de la question des ventes de droits irrévocables d'usage, de celle de l'économie de loyer liée à l'ADSL, du taux d'actualisation ou de la valeur de revente, en revanche, eu égard à la persistance de points de désaccord concernant la prise en compte, parmi les clients potentiels, des petits établissements professionnels et le coût de modernisation du réseau, le préfet de la Moselle ne démontre pas, ainsi qu'il lui incombe, que cette méthode permettrait d'établir que la valeur des biens cédés demeurerait supérieure à celle qu'ont retenue les parties au protocole du 9 décembre 2015 par comparaison avec des transactions équivalentes.

10. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise ou de surseoir à statuer, que les appelantes sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a estimé que le prix de cession du réseau câblé de la commune de Florange avait été fixé, par le protocole transactionnel du 9 décembre 2015, à un niveau inférieur à la valeur réelle de ce réseau et en a déduit que n'étant pas justifié par un motif d'intérêt général, il révélait une libéralité constitutive d'une illégalité.

11. Il appartient toutefois à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par le préfet de la Moselle devant le tribunal administratif de Strasbourg.

S'agissant des autres moyens :

12. En premier lieu, en cas de résiliation anticipée d'une convention de délégation de service public, quel qu'en soit le motif, le délégataire est en droit de prétendre au versement d'une indemnité correspondant à la valeur non amortie des biens de retour. Contrairement à ce que soutient le préfet de la Moselle, cette règle qui vise à prévenir tout enrichissement sans cause de la personne publique délégante, est applicable y compris lorsque la résiliation anticipée intervient, comme en l'espèce, d'un commun accord entre les parties. Il en résulte que les moyens tirés de ce que la résiliation de la convention du 30 septembre 1993 n'était susceptible d'ouvrir droit à aucune indemnité dès lors que l'autorité délégante ne se prévalait d'aucune faute du délégataire ou ne pouvait établir une situation d'imprévision, doivent être écartés comme inopérants.

13. En outre et au surplus, il résulte de l'instruction que la résiliation anticipée de la délégation répond à un choix de la part de la communauté d'agglomération du Val de Fensch, qui s'est vue reconnaître la compétence en matière d'aménagement numérique sur son territoire, de ne pas intégrer, pour des raisons de coût, le syndicat mixte ouvert départemental pour construire et commercialiser des réseaux à très haut débit, mais de ne pas davantage intégrer dans son champ de compétence les réseaux appartenant à quatre de ses communes, déjà membres du SIVOM d'Algrange-Nilvange, afin de ne pas compromettre l'avance technologique prise par ce SIVOM en matière de numérique. Dans ces conditions et alors qu'il est établi que la société Orange n'entendait pas lui proposer d'intégrer son territoire à ses choix stratégiques de déploiement de la " fibre to the home ", l'option qu'elle a privilégiée de conclure également avec la société NC Numéricable, le 9 décembre 2015, une convention de partenariat permettant à cette dernière de déployer, sur ses fonds propres et sous sa maîtrise d'ouvrage, un réseau très haut débit par la fibre à partir d'une modernisation des réseaux câblés présents sur le territoire communautaire, suffisait à justifier la résiliation anticipée, le même jour, de la convention antérieure, sans que l'opportunité de ce choix, qui répondait à un motif d'intérêt général, puisse faire l'objet d'un contrôle du juge.

14. Il en résulte que le moyen tiré par le préfet de la Moselle de ce qu'eu égard aux conditions dans lesquelles elle est intervenue, la résiliation ne pouvait donner lieu au versement d'aucune indemnité doit être écarté. A cet égard, et contrairement à ce qu'il soutient, le recours à une transaction s'agissant tant de la détermination du montant de l'indemnité de résiliation que de l'estimation du prix de cession des réseaux était justifié par la nécessité de prévenir un conflit financier relatif à la résiliation anticipée du contrat.

15. En deuxième lieu, indépendamment des cas dans lesquels le législateur a lui-même entendu reconnaître ou, à l'inverse, exclure l'existence d'un service public, une personne privée qui assure une mission d'intérêt général sous le contrôle de l'administration et qui est dotée à cette fin de prérogatives de puissance publique est chargée de l'exécution d'un service public. Même en l'absence de telles prérogatives, une personne privée doit également être regardée, dans le silence de la loi, comme assurant une mission de service public lorsque, eu égard à l'intérêt général de son activité, aux conditions de sa création, de son organisation ou de son fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu'aux mesures prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparaît que l'administration a entendu lui confier une telle mission. Par ailleurs, il ne résulte ni des termes de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, ni des travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 dont ils sont issus, que le législateur a entendu ériger l'établissement et l'exploitation par les collectivités territoriales et leurs groupements d'un réseau de communications électroniques sur leur territoire en un service public local.

16. Eu égard aux principes qui viennent d'être cités, il ne résulte pas de l'instruction que la convention de partenariat conclue le 9 décembre 2015 entre la communauté d'agglomération du Val de Fensch et la société NC Numéricable ait eu pour objet ou pour effet de confier à nouveau à cette société une mission de service public, ce qui ferait obstacle à ce que soient, au préalable, cédés à cette société, une fois déclassés, les réseaux câblés et équipements qui étaient inclus dans le périmètre de sa précédente délégation. Par suite, le préfet de la Moselle n'est pas fondé à soutenir que la cession de ces biens, telle qu'elle a été convenue dans le protocole transactionnel du 9 décembre 2015, serait irrégulière pour ce motif.

17. En troisième lieu, dans le cadre d'une délégation de service public mettant à la charge du cocontractant les investissements correspondant à la création ou à l'acquisition des biens nécessaires au fonctionnement du service public, l'ensemble de ces biens, meubles ou immeubles, appartient, dans le silence de la convention, dès leur réalisation ou leur acquisition à la personne publique. Le contrat peut attribuer au concessionnaire, pour la durée de la convention, la propriété des ouvrages qui, bien que nécessaires au fonctionnement du service public, ne sont pas établis sur la propriété d'une personne publique, ou des droits réels sur ces biens, sous réserve de comporter les garanties propres à assurer la continuité du service public, notamment la faculté pour la personne publique de s'opposer à la cession, en cours de concession, de ces ouvrages ou des droits détenus par la personne privée. A l'expiration de la convention, les biens qui sont entrés, en application de ces principes, dans la propriété de la personne publique et ont été amortis au cours de l'exécution du contrat font nécessairement retour à celle-ci gratuitement, sous réserve des clauses contractuelles permettant à la personne publique, dans les conditions qu'elles déterminent, de faire reprendre par son cocontractant les biens qui ne seraient plus nécessaires au fonctionnement du service public. Le contrat qui accorde au concessionnaire, pour la durée de la convention, la propriété des biens nécessaires au service public autres que les ouvrages établis sur la propriété d'une personne publique, ou certains droits réels sur ces biens, ne peut, sous les mêmes réserves, faire obstacle au retour gratuit de ces biens à la personne publique en fin de concession. Lorsque la convention arrive à son terme normal ou lorsque la personne publique la résilie avant ce terme, le concessionnaire est fondé à demander l'indemnisation du préjudice qu'il subit à raison du retour des biens à titre gratuit dans le patrimoine de la collectivité publique, en application des principes énoncés ci-dessus, lorsqu'ils n'ont pu être totalement amortis, soit en raison d'une durée du contrat inférieure à la durée de l'amortissement de ces biens, soit en raison d'une résiliation à une date antérieure à leur complet amortissement. Lorsque l'amortissement de ces biens a été calculé sur la base d'une durée d'utilisation inférieure à la durée du contrat, cette indemnité est égale à leur valeur nette comptable inscrite au bilan. Dans le cas où leur durée d'utilisation était supérieure à la durée du contrat, l'indemnité est égale à la valeur nette comptable qui résulterait de l'amortissement de ces biens sur la durée du contrat. Si, en présence d'une convention conclue entre une personne publique et une personne privée, il est loisible aux parties de déroger à ces principes, l'indemnité mise à la charge de la personne publique au titre de ces biens ne saurait en toute hypothèse excéder le montant calculé selon les modalités précisées ci-dessus.

18. Le protocole transactionnel du 9 décembre 2015 comporte, en annexes, les informations procédant du rapport des commissaires aux comptes de la société NC Numéricable pour l'exercice clos le 31 décembre 2014 qui repose sur une typologie technique des sept catégories de biens de retour avec la durée d'amortissement qui leur est applicable, ainsi que le tableau d'amortissement correspondant à ces différentes catégories de biens, faisant apparaître la valeur nette comptable du réseau câblé de Florange, telle qu'elle a été retenue pour déterminer le montant de l'indemnité de résiliation due à la société délégataire. En se bornant à soutenir que le calcul de cette indemnité n'aurait pas été effectué conformement aux règles d'évaluation énoncées au point 17 ci-dessus, le préfet de la Moselle n'apporte aucun élément de nature à établir que le montant de 307482 euros qui en serait résulté serait supérieur à la valeur nette comptable réelle des biens de retour ni, par suite, que le protocole transactionnel du 9 décembre 2015 par lequel les parties sont convenues de ce montant serait, pour ce motif, entaché d'illégalité.

19. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 8, 9 et 17, il ne résulte pas de l'instruction qu'en tant qu'il détermine le montant de l'indemnité de résiliation et le prix de cession du réseau câblé et des ouvrages de génie civil associé, le protocole transactionnel du 9 décembre 2015 aurait été conclu en méconnaissance des règles de la concurrence ou du paragraphe 1 de l'article 107 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne relatif aux aides d'Etat.

20. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non recevoir soulevée en première instance, que la communauté d'agglomération du Val de Fensch et la SAS SFR Fibre sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a prononcé l'annulation, à compter du 15 mai 2018, du protocole transactionnel conclu le 9 décembre 2015.

Sur les conclusions de la requête n° 18NC01397 :

21. Le présent arrêt statue sur les conclusions présentées par la communauté d'agglomération du Val de Fensch et de la SAS SFR Fibre tendant à l'annulation du jugement n° 1602374 du 7 février 2018 du tribunal administratif de Strasbourg. Par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 18NC01397 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.

Sur les frais des instances :

22. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, qui est partie perdante aux instances, le versement à la communauté d'agglomération du Val de Fensch et à la SAS SFR Fibre d'une somme de 1 500 euros chacune sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1602374 du 7 février 2018 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.

Article 2 : Le déféré du préfet de la Moselle tendant à l'annulation du protocole du 9 décembre 2015 est rejeté.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 18NC01397.

Article 4 : L'Etat versera à la communauté d'agglomération du Val de Fensch et à la SAS Fibre SFR une somme de 1 500 euros chacune sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté d'agglomération du Val de Fensch, à la SAS Fibre SFR et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise pour information au préfet de la Moselle.

2

Nos 18NC01086, 18NC01115, 18NC01397


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award