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19/10/2017 | FRANCE | N°17NC00684

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 19 octobre 2017, 17NC00684


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 29 octobre 2012 par laquelle le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale du Territoire de Belfort a prononcé son licenciement à titre disciplinaire.

Par un jugement n° 1300069 du 6 mai 2014, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14NC01247 du 2 juillet 2015, la cour administrative d'appel de Nancy, faisant droit à l'appel de M.B..., a annulé c

e jugement et la décision litigieuse.

Par son arrêt n°393320 du 20 mars 2017, le Conse...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 29 octobre 2012 par laquelle le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale du Territoire de Belfort a prononcé son licenciement à titre disciplinaire.

Par un jugement n° 1300069 du 6 mai 2014, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14NC01247 du 2 juillet 2015, la cour administrative d'appel de Nancy, faisant droit à l'appel de M.B..., a annulé ce jugement et la décision litigieuse.

Par son arrêt n°393320 du 20 mars 2017, le Conseil d'État statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Territoire de Belfort, a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 2 juillet 2015 et a renvoyé l'affaire devant la même cour.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés respectivement le 7 juillet 2014, le 10 avril 2015 et le 31 juillet 2017, M. B..., représenté par MeC..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 6 mai 2014 ;

2°) d'annuler la décision de licenciement du 29 octobre 2012 ;

3°) de mettre à la charge du centre de gestion de la fonction publique territoriale du Territoire de Belfort le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- convoqué à un entretien par un courrier daté du 29 octobre 2012 qu'il n'a pu retirer que le jour de cet entretien prévu le 7 novembre 2012, il n'a pas bénéficié d'un délai suffisant pour préparer sa défense ;

- il n'a été informé ni de la possibilité de présenter des observations écrites et orales, ni de la sanction envisagée par l'employeur ;

- ce courrier porte la même date que celle de la décision prononçant son licenciement, laissant supposer que cette mesure a été prise avant même qu'il ne puisse se défendre ;

- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;

- il n'a divulgué aucune information à caractère professionnel sur son site internet, ni aucun élément tendant à le faire passer pour un membre de la police municipale ;

- il n'a pas manqué à son obligation de discrétion professionnelle, ni à l'obligation de moralité professionnelle retenue par les premiers juges ;

- la sanction est disproportionnée au regard des faits reprochés ;

- l'administration a porté atteinte à sa liberté d'expression, en méconnaissance de l'article 11 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen et de l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par des mémoires en défense, enregistrés respectivement le 12 septembre 2014 et le 23 mai 2017, le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Territoire de Belfort, représenté par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. B...la somme de 7 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 88- 145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lambing,

- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.

1. Considérant que M. B...a été recruté par voie de contrat à durée déterminée, le 4 juin 2010, par le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Territoire de Belfort, pour être mis à disposition de la commune de Belfort en qualité d'adjoint technique, affecté au service de la police municipale ; que son contrat a été renouvelé à plusieurs reprises et, en dernier lieu, pour une période de trois mois du 1er octobre au 31 décembre 2012 ; qu'à la suite d'un rapport établi par le maire de Belfort, une procédure qui a conduit au licenciement à titre disciplinaire a été engagée à l'encontre de M.B... ; que cette sanction datée du 29 octobre 2012 a pris effet au 19 novembre 2012 ; que par jugement du 6 mai 2014, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande de M. B...tendant à l'annulation de cette sanction ; que par un arrêt du 2 juillet 2015, la cour administrative d'appel de Nancy, faisant droit à l'appel de M. B..., a annulé ce jugement ainsi que la décision litigieuse ; que sur pourvoi du centre de gestion de la fonction publique territoriale du Territoire de Belfort, le Conseil d'État statuant au contentieux a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 2 juillet 2015 et a renvoyé l'affaire devant la cour de céans ;

Sur la légalité de la décision de licenciement à titre disciplinaire du 29 octobre 2012 :

2. Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 37 du décret n°88-145 du 15 février 1988 : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité territoriale ayant le pouvoir de procéder au recrutement. / L'agent non titulaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'autorité territoriale doit informer l'intéressé de son droit à communication du dossier " ; qu'aucune disposition législative ou règlementaire n'impose à l'autorité territoriale d'organiser un entretien préalable à l'édiction d'une sanction disciplinaire ; qu'ainsi, M.B..., qui a été informé avant la décision de le licencier, de la possibilité de consulter son dossier et de se faire assister d'un conseil, n'est pas fondé à soutenir que le centre de gestion n'aurait pas respecté un délai minimal entre la convocation et la date de l'entretien fixé au 7 novembre 2012 ;

3. Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 36-1 du décret n°88-145 du 15 février 1988 : " La décision prononçant une sanction disciplinaire doit être motivée " ; que la décision de licenciement comporte l'énoncé des circonstances de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que l'origine des informations divulguées par M.B..., justifiant la sanction, est précisée ; que les conséquences pour le service sont mentionnées ; que par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision contestée doit être écarté ;

4. Considérant en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 26 de la loi du 13 juillet 1983 portant droit et obligations des fonctionnaires, applicable aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale en vertu de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " (...) Les fonctionnaires doivent faire preuve de discrétion professionnelle pour tous les faits, informations ou documents dont ils ont connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions (...) " ; qu'aux termes de l'article 1-1 du décret n°88-145 du 15 février 1988 : " (...) II. - Sans préjudice de celles qui leur sont imposées par la loi, les agents mentionnés à l'article 1er sont soumis aux obligations suivantes : 1° Ils sont tenus au secret professionnel dans le cadre des règles instituées par le code pénal et sont liés par l'obligation de discrétion professionnelle pour tout ce qui concerne les faits et informations dont ils ont connaissance dans l'exercice de leurs fonctions. Sous réserve des dispositions réglementant la liberté d'accès aux documents administratifs, toute communication de documents de service à des tiers est interdite, sauf autorisation expresse de l'autorité dont ils dépendent " ; qu'aux termes de l'article 36-1 du même décret : " Les sanctions disciplinaires susceptibles d'être appliquées aux agents non titulaires sont les suivantes : 1° L'avertissement ; / 2° Le blâme ; / 3° L'exclusion temporaire des fonctions avec retenue de traitement pour une durée maximale de six mois pour les agents recrutés pour une durée déterminée et d'un an pour les agents sous contrat à durée indéterminée ; / 4° Le licenciement, sans préavis ni indemnité de licenciement " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport établi par la directrice de la police municipale le 9 octobre 2012, que M. B...a divulgué sur internet, au moyen d'un " blog " personnel et de comptes ouverts à son nom dans trois réseaux sociaux, accessibles par tous, des informations relatives aux domaines d'activité de la police municipale dans lesquels il intervenait ; qu'il faisait, en outre, systématiquement usage de l'écusson de la police municipale ; que M. B...y listait, de manière très précise, les lieux faisant l'objet d'une surveillance de la part de la police municipale ; que de nombreuses photographies représentant des agents de police, devant leurs postes de vidéosurveillance, ont été postées ; que sur ces photographies, les écrans des postes étaient visibles, permettant d'identifier facilement les sites où un dispositif de vidéosurveillance ou de vidéo-verbalisation avait été installé ; que ces éléments ainsi diffusés par M. B...étaient susceptibles de permettre à des tiers d'avoir accès, à des informations sensibles relatives à l'organisation du service de la police municipale ; que par ailleurs, l'utilisation de l'écusson de la police municipale comme image associée à son identité sur internet avait pour effet d'attirer davantage l'attention des tiers sur le contenu des comptes de M.B... ; que dans ces conditions, si M. B...invoque la liberté d'expression des agents, il a excédé les limites que les agents, occupant des emplois dans la sécurité civile, doivent respecter en raison de leur obligation de discrétion professionnelle, destinée à prévenir des pressions ou intimidations de tiers ; que, dès lors, ces faits présentaient un caractère fautif et étaient de nature à justifier une sanction ; que, par suite, les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur de droit doivent être écartés ;

6. Considérant qu'eu égard à la gravité des faits, au caractère sensible du domaine d'activité où M. B...exerçait ses fonctions, et à la nature des informations divulguées, dont la diffusion sur internet a permis une large mise à disposition, l'autorité disciplinaire n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, pris une sanction disproportionnée en prononçant à l'encontre de l'intéressé la sanction du licenciement, sans préavis ni indemnité de licenciement ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il résulte du point 7 ci-dessus que les conclusions de M. B...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; que, , dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du centre de gestion de la fonction publique territoriale du Territoire de Belfort présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Territoire de Belfort au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au centre de gestion de la fonction publique territoriale du Territoire de Belfort.

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N° 17NC00684


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Sanctions. Erreur manifeste d'appréciation.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Stéphanie LAMBING
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN et THIRIEZ ; SCP LYON-CAEN et THIRIEZ ; WOLDANSKI

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 19/10/2017
Date de l'import : 31/10/2017

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 17NC00684
Numéro NOR : CETATEXT000035921390 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-10-19;17nc00684 ?
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