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04/07/2017 | FRANCE | N°17NC00850

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 04 juillet 2017, 17NC00850


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 5 septembre 2016 par lequel le préfet du Doubs a rejeté sa demande de regroupement familial en faveur de sa femme et de ses deux filles.

Par un jugement n° 1601600 du 21 mars 2017, le tribunal administratif de Besançon a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 avril 2017, M. A...E...demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administrat

if de Besançon du 21 mars 2017 ;

2°) d'annuler la décision du préfet du Doubs du 5 septembre 2016 ;

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 5 septembre 2016 par lequel le préfet du Doubs a rejeté sa demande de regroupement familial en faveur de sa femme et de ses deux filles.

Par un jugement n° 1601600 du 21 mars 2017, le tribunal administratif de Besançon a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 avril 2017, M. A...E...demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 21 mars 2017 ;

2°) d'annuler la décision du préfet du Doubs du 5 septembre 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de faire droit à sa demande de regroupement familial ;

4°) de mettre à la charge du préfet du Doubs une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté méconnaît le 3° de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que son mariage avait un caractère frauduleux.

M. E...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 mai 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Fuchs a été entendu au cours de l'audience publique.

Une note en délibéré, enregistré le 23 juin 2017, a été présentée par le préfet du Doubs.

1. Considérant que M.E..., ressortissant turc né le 5 janvier 1980, a sollicité le regroupement familial au bénéfice de sa femme et de ses deux filles par une demande en date du 27 novembre 2014 complétée le 25 août 2015 ; que par l'arrêté contesté du 5 septembre 2016, le préfet du Doubs a rejeté cette demande ; que le requérant relève appel du jugement du 21 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 411-5 du même code : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : (...) 3° Le demandeur ne se conforme pas aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, pays d'accueil " ;

3. Considérant que M. E...a épousé MmeB..., ressortissante française née le 15 septembre 1965, le 18 septembre 2004 ; qu'il est entré en France le 8 décembre 2006 sous couvert d'un visa de long séjour, puis a bénéficié de deux cartes de séjour temporaires valables du 20 décembre 2006 au 19 décembre 2007 puis du 20 décembre 2007 au 19 décembre 2008 ; qu'il a ensuite été pourvu d'une carte de résident valable du 20 décembre 2008 au 19 décembre 2018 ; qu'à la suite du divorce des époux le 23 mai 2013, M. E...a épousé le 24 octobre 2014, Mme D...C..., une ressortissante turque avec qui il a eu deux enfants nés le 14 juin 2007 et le 11 juillet 2015, au profit desquels il sollicite le regroupement familial ; que le préfet du Doubs a rejeté sa demande au motif que " le mariage de M. E...avec Mme B... se révèle être une fraude en vue d'obtenir un droit au séjour pour introduire au final sa vraie famille " ;

4. Considérant qu'il incombe au préfet de prouver l'existence d'une fraude au mariage ; qu'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que l'intéressé a mené une vie commune avec Mme B...au moins entre les mois de décembre 2006 et décembre 2010 ; que cette union a cessé à la suite d'un divorce par consentement mutuel, prononcé le 23 mai 2013, et non en raison de son annulation ; que quand bien même un acte obtenu par fraude peut être retiré à tout moment, le préfet n'a pas retiré sa carte de résident à M.E..., alors qu'il avait été informé, le 3 juillet 2009, par les services de la police nationale des doutes qui pouvaient exister sur la sincérité de son mariage avec MmeB... ; que la seule circonstance qu'un enfant a été conçu avec son épouse actuelle avant son départ de Turquie et qu'un deuxième enfant soit né de leur union en 2015 ne suffit pas à caractériser la démarche frauduleuse prêtée à M. E... depuis 2006 par le préfet du Doubs ; que, dans ces conditions, les éléments fournis par le préfet ne permettent pas d'établir, contrairement à ce qu'il soutient, que l'intéressé aurait oeuvré dès 2004 afin d'obtenir un titre de séjour pour pouvoir, en 2014, demander le regroupement familial au profit d'une compatriote ; qu'ainsi, le motif tiré de la méconnaissance du 3° de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne pouvait, à supposer même qu'un tel motif puisse légalement ressortir du champ d'application du 3° de cet article, fonder l'arrêté contesté ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, que M. E...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant que si M. E...demande qu'il soit enjoint au préfet de faire droit à sa demande de regroupement familial, il ne soutient pas qu'il remplirait les conditions énoncées en particulier au 1° et 2° de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour en bénéficier ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a seulement lieu d'enjoindre au préfet du Doubs de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que, d'une part, M.E..., pour le compte de qui les conclusions de la requête relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être réputées présentées, n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée ; que, d'autre part, l'avocat de M. E...n'a pas demandé à ce que lui soit versée par l'Etat la somme correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamé à son client si ce dernier n'avait bénéficié d'une aide juridictionnelle totale ; que, dans ces conditions, les conclusions de la requête tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1601600 du 21 mars 2017 du tribunal administratif de Besançon ainsi que l'arrêté du 5 septembre 2016 du préfet du Doubs sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Doubs de réexaminer la demande de M. E...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Les conclusions de la requête présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...E...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Doubs.

2

N° 17NC00850


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC00850
Date de la décision : 04/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Olivier FUCHS
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : HAKKAR

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-07-04;17nc00850 ?
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