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31/01/2017 | FRANCE | N°15NC01419

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 31 janvier 2017, 15NC01419


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Conflans Distribution Edouard Leclerc a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 7 décembre 2012 en tant que, par cette décision, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social lui a refusé l'autorisation de licencier MmeA....

Par un jugement n° 1300420 du 12 mai 2015, le tribunal administratif de Nancy a, d'une part, annulé la décision susvisée, d'autre part, enjoint au ministre chargé du travail de procéder au r

examen de la demande d'autorisation de licenciement de Mme A...présentée par la s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Conflans Distribution Edouard Leclerc a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 7 décembre 2012 en tant que, par cette décision, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social lui a refusé l'autorisation de licencier MmeA....

Par un jugement n° 1300420 du 12 mai 2015, le tribunal administratif de Nancy a, d'une part, annulé la décision susvisée, d'autre part, enjoint au ministre chargé du travail de procéder au réexamen de la demande d'autorisation de licenciement de Mme A...présentée par la société Conflans Distribution Edouard Leclerc.

Procédure devant la cour :

Par un recours et un mémoire enregistrés le 24 juin 2015 et le 21 octobre 2016, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 12 mai 2015 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Conflans Distribution Edouard Leclerc devant le tribunal administratif de Nancy.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- la notion de groupe doit s'apprécier en retenant le critère de la permutabilité du personnel à l'intérieur de plusieurs sociétés ;

- la permutation du personnel entre les différents magasins de l'enseigne Leclerc est possible.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 29 octobre 2015 et le 14 novembre 2016, la société Conflans Distribution Edouard Leclerc, représentée par la SCP Piwnica et Molinié conclut au rejet du recours et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le ministre ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- l'arrêté du 22 août 2006 relatif à l'organisation de la direction générale du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Kohler, premier conseiller,

- les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant la société Conflans Distribution Edouard Leclerc.

1. Considérant que par une décision du 7 décembre 2012, le ministre chargé du travail a refusé d'autoriser le licenciement de MmeA..., employée par la société Conflans Distribution Edouard Leclerc au sein de laquelle elle avait été élue déléguée du personnel et membre du comité d'entreprise ; que le ministre relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nancy a, à la demande de la société Conflans Distribution Edouard Leclerc, annulé cette décision du 7 décembre 2012 ;

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

2. Considérant qu'en vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'administration de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que l'employeur a, conformément aux dispositions de l'article L. 1226-2 du code du travail, cherché à reclasser le salarié sur d'autres postes appropriés à ses capacités, le cas échéant par la mise en oeuvre, dans l'entreprise, de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; que le licenciement ne peut être autorisé que dans le cas où l'employeur n'a pu reclasser le salarié dans un emploi approprié à ses capacités au terme d'une recherche sérieuse, menée tant au sein de l'entreprise que dans les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel ;

3. Considérant que la seule circonstance que les entreprises exploitant un magasin sous l'enseigne Leclerc ne constituent pas un groupe au sens du droit commercial ne suffit pas à exclure l'existence, entre ces diverses entreprises, de liens permettant de mettre en oeuvre la permutation de leurs personnels ; qu'il ressort des pièces du dossier que ces sociétés sont adhérentes d'une association régie par la loi de 1901, intitulée " Mouvement E. Leclerc " et qu'elles ont des activités et des emplois identiques ; que le Mouvement E. Leclerc se présente, sur son site internet, comme disposant en France de 391 hypermarchés et 131 supermarchés et comme employant un total de 110 000 salariés ; qu'ainsi que le fait valoir le ministre, ce site internet regroupe l'ensemble des offres d'emploi des diverses sociétés adhérentes du Mouvement E. Leclerc ; que ces éléments établissent l'existence de relations entre les sociétés adhérentes du Mouvement E. Leclerc de nature à permettre la permutation de tout ou partie de leur personnel ; qu'il ressort d'ailleurs des pièces du dossier que des permutations de personnels peuvent avoir lieu entre ces sociétés dès lors qu'il n'est pas contesté que le dirigeant du supermarché au sein duquel était employée Mme A...avait auparavant dirigé un autre magasin Leclerc situé dans le même département ; que la société Conflans Distribution Edouard Leclerc n'apporte aucun élément de nature à démontrer que cette permutabilité ne serait pas possible ; que dans ces conditions, le ministre pouvait, sans commettre d'erreur de droit ou d'erreur d'appréciation, considérer que l'obligation de recherche de reclassement de cette société s'étendait aux autres sociétés adhérentes du Mouvement E. Leclerc ; que, dans ces conditions, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur ce motif pour annuler sa décision du 7 décembre 2012 ;

4. Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Conflans Distribution Edouard Leclerc devant le tribunal administratif de Nancy ;

Sur les autres moyens soulevés par la société Conflans Distribution Edouard Leclerc devant le tribunal administratif :

5. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que MmeD..., chef du département du soutien et de l'appui au contrôle et signataire de la décision en litige, a reçu, par décision du 11 juin 2012, délégation à l'effet de signer, dans la limite des attributions du département du soutien et de l'appui au contrôle, et au nom du ministre chargé du travail, tous actes, décisions ou conventions, à l'exclusion des décrets ; que ce département est notamment chargé de l'instruction des recours hiérarchiques et contentieux relatifs aux licenciements des salariés protégés ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige doit être écarté ;

6. Considérant que la seule circonstance que le ministre n'ait pas précisé, dans la décision en litige, les raisons l'ayant conduit à considérer que l'activité, l'organisation ou le lieu d'exploitation des entreprises de l'enseigne Leclerc permettaient la permutation de tout ou partie du personnel ce qui obligeait l'employeur a étendre ses recherches de reclassement à l'ensemble de ces entreprises, ne suffit pas à établir que cette décision, qui mentionne les éléments de fait et les motifs de droit qui en constituent le fondement, est insuffisamment motivée ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué, que le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du 7 décembre 2012 ;

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Conflans Distribution Edouard Leclerc demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1300420 du 12 mai 2015 du tribunal administratif de Nancy est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société Conflans Distribution Edouard Leclerc devant le tribunal administratif de Nancy ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, à la société Conflans Distribution Edouard Leclerc et à Mme B...A....

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N° 15NC01419


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01419
Date de la décision : 31/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-035-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Motifs autres que la faute ou la situation économique. Inaptitude ; maladie.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: Mme Julie KOHLER
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : SCP PIWNICA MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-01-31;15nc01419 ?
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