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05/11/2015 | FRANCE | N°15NC00240

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 05 novembre 2015, 15NC00240


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Champagney a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2012 par lequel le préfet du Jura l'a intégrée dans le périmètre de la communauté de communes Nord Ouest Jura à compter du 1er janvier 2013.

Par un jugement n° 1300030 du 4 décembre 2014, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande de la commune de Champagney.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 février 2015 et un mémoire enregistr

le 29 septembre 2015, la commune de Champagney, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Champagney a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2012 par lequel le préfet du Jura l'a intégrée dans le périmètre de la communauté de communes Nord Ouest Jura à compter du 1er janvier 2013.

Par un jugement n° 1300030 du 4 décembre 2014, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande de la commune de Champagney.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 février 2015 et un mémoire enregistré le 29 septembre 2015, la commune de Champagney, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300030 du 4 décembre 2014 du tribunal administratif de Besançon ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2012 du préfet du Jura ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Champagney soutient que :

- l'arrêté litigieux méconnaît le principe de libre administration des collectivités territoriales, le Conseil constitutionnel ayant censuré l'article L. 5210-1-2 qui organise une procédure de regroupement des communes isolées pour méconnaissance de ce même principe ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que la commune aurait dû intégrer la communauté d'agglomération du Grand Dole et que la communauté de communes Nord Ouest Jura comporte moins de 5 000 habitants et aurait dû elle-même être fusionnée avec la communauté d'agglomération du Grand Dole.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 mai 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la commune de Champagney ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., pour la commune de Champagney.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 19 décembre 2011, le préfet du Jura a approuvé le schéma départemental de coopération intercommunale du département après son adoption par la commission départementale de coopération intercommunale, à l'unanimité de ses membres, lors de sa séance en date du même jour. Dans le cadre de la mise en oeuvre de ce schéma, le préfet du Jura a pris, le 21 novembre 2012, un arrêté portant extension de périmètre de la communauté de communes Nord Ouest Jura à la commune de Champagney à compter du 1er janvier 2013. La commune de Champagney relève appel du jugement du 4 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 novembre 2012.

Sur la légalité de l'arrêté du 21 novembre 2012 :

2. Aux termes de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010 : " (...) / II.-Dès la publication du schéma départemental de coopération intercommunale prévu à l'article L. 5210-1-1 du même code ou au plus tard à compter du 1er janvier 2012, le représentant de l'Etat dans le département propose, jusqu'au 31 décembre 2012, pour la mise en oeuvre du schéma, la modification du périmètre de tout établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre. A défaut de schéma arrêté, il peut proposer, par arrêté pris avant le 31 décembre 2012 après avis de la commission départementale de la coopération intercommunale, la modification du périmètre de tout établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, sous réserve du respect des objectifs mentionnés aux I et II du même article L. 5210-1-1 et de la prise en compte des orientations définies au III dudit article. (...) / La modification de périmètre peut porter sur des communes appartenant ou non à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre. Un arrêté de projet de périmètre dresse la liste des communes intéressées. (...) / La modification de périmètre de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre est prononcée par arrêté du ou des représentants de l'Etat dans le ou les départements concernés après accord des conseils municipaux des communes incluses dans le projet de périmètre. Cet accord doit être exprimé par la moitié au moins des conseils municipaux des communes intéressées, représentant la moitié au moins de la population totale de celles-ci, y compris le conseil municipal de la commune dont la population est la plus nombreuse si cette dernière représente au moins le tiers de la population totale. / (...) Le présent II s'applique de plein droit pendant une période d'un an suivant la publication du schéma départemental de coopération intercommunale révisé conformément au dernier alinéa du IV de l'article L. 5210-1-1 du même code et pendant l'année 2018 ".

3. Aux termes de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales : " I. - Dans chaque département, il est établi, au vu d'une évaluation de la cohérence des périmètres et de l'exercice des compétences des groupements existants, un schéma départemental de coopération intercommunale prévoyant une couverture intégrale du territoire par des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et la suppression des enclaves et discontinuités territoriales (...) / III. - Le schéma prend en compte les orientations suivantes : / 1° La constitution d'établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupant au moins 5 000 habitants (...) ce seuil peut être abaissé par le représentant de l'Etat dans le département pour tenir compte des caractéristiques géographiques particulières de certains espaces; / 2° Une amélioration de la cohérence spatiale des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre au regard notamment du périmètre des unités urbaines au sens de l'Institut national de la statistique et des études économiques, des bassins de vie et des schémas de cohérence territoriale; / 3° L'accroissement de la solidarité financière; / 4° La réduction du nombre de syndicats de communes et de syndicats mixtes au regard en particulier de l'objectif de suppression des doubles emplois entre des établissements publics de coopération intercommunale ou entre ceux-ci et des syndicats mixtes; / 5° Le transfert des compétences exercées par les syndicats de communes ou les syndicats mixtes à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre; / 6° La rationalisation des structures compétentes en matière d'aménagement de l'espace, de protection de l'environnement et de respect des principes du développement durable ".

4. En premier lieu, il résulte des dispositions du II de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010, dans sa rédaction issue de l'article 1er de la loi précitée du 29 février 2012, que le représentant de l'Etat dans le département pouvait proposer, jusqu'au 31 décembre 2012, la modification du périmètre de tout établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre afin de mettre en oeuvre le schéma départemental de coopération intercommunale établi en application de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales. Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a écarté le grief tiré de la méconnaissance du principe de libre administration des collectivités territoriales invoqué à l'encontre des dispositions de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010 par sa décision n° 2013-303 QPC du 26 avril 2013. La commune de Champagney n'est donc pas fondée à soutenir qu'en agissant sur le fondement de ces dispositions et dans le cadre qu'elles ont prévu pour élargir le périmètre de la communauté de communes Nord Ouest Jura à la commune de Champagney par l'arrêté du 21 novembre 2012, conformément au schéma départemental de coopération intercommunale du Jura approuvé le 19 décembre 2011, le préfet du Jura a méconnu le principe de libre administration des collectivités territoriales.

5. En deuxième lieu, la commune requérante ne peut utilement se prévaloir de la décision n° 2014-391 QPC par laquelle le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnel l'article L. 5210-1-2 du code général des collectivités territoriales dès lors que l'arrêté litigieux n'a pas été pris sur le fondement de ces dispositions.

6. En dernier lieu, la commune de Champagney soutient que l'arrêté litigieux a pour effet de l'inclure dans une communauté de communes fortement endettée dont la population est inférieure à 5 000 habitants, que la fusion de la communauté de communes Nord Ouest Jura et de la communauté d'agglomération du Grand Dole aurait dû être prononcée afin de se conformer aux orientations de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales et que seule une intercommunalité élargie est à même de contribuer à un exercice effectif de compétences structurantes telles que le développement économique et touristique ou l'aménagement du territoire dans le bassin dolois.

7. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que, dans le cadre de l'élaboration du schéma départemental de coopération intercommunale du Jura, le préfet du Jura a proposé, d'une part, que la situation de la commune isolée de Champagney soit traitée en lien avec celui de la communauté de communes Nord Ouest Jura qui la jouxte sur tout son périmètre jurassien et, d'autre part, que la communauté de communes Nord Ouest Jura soit fusionnée avec la communauté d'agglomération du Grand Dole. Lors de sa séance du 28 novembre 2011, la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI), si elle a examiné le projet de schéma et adopté la proposition de rattachement de la commune de Champagney à la communauté de communes Nord Ouest Jura, a expressément rejeté l'amendement consistant à fusionner la communauté de communes Nord Ouest Jura avec la communauté d'agglomération du Grand Dole en raison de l'opposition exprimée par les deux établissements publics de coopération intercommunale concernés.

8. Par ailleurs, l'arrêté litigieux permet d'intégrer la commune isolée de Champagney dans la communauté de communes Nord Ouest Jura dans laquelle elle était jusqu'alors enclavée, soit au sein d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre conformément à l'objectif énoncé au I de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales. La circonstance que la communauté de communes Nord Ouest Jura n'atteint pas le seuil de 5 000 habitants évoqué au III du même article comme orientation à prendre en compte n'est pas en soi de nature à entacher d'illégalité l'arrêté du 21 novembre 2012, l'intégration de la commune de Champagney et de sa population d'environ 500 habitants contribuant d'ailleurs à rapprocher l'établissement public de coopération intercommunale élargi d'un tel seuil. La commune requérante, en soutenant que la communauté de communes Nord Ouest Jura est fortement endettée et que sa contribution à cette structure intercommunale sera bien plus importante que celle qui aurait découlé de son intégration à la communauté d'agglomération du Grand Dole ne justifie pas non plus de ce que l'arrêté litigieux ne serait pas conforme aux orientations définies à l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales, notamment en ce qui concerne la prise en compte de la solidarité financière et l'amélioration de la cohérence spatiale.

9. Enfin, il est constant qu'aucune continuité géographique n'existe entre la commune de Champagney et la communauté d'agglomération du Grand Dole que la commune de Champagney souhaitait rejoindre et dont elle est séparée par la communauté de communes Nord Ouest Jura. La commune requérante n'invoque, inversement, aucun autre élément probant à l'appui de sa critique du choix effectué par le préfet du Jura de l'intégrer à la communauté de communes Nord Ouest Jura, dans l'attente d'une éventuelle fusion de la communauté de communes Nord Ouest Jura et de la communauté d'agglomération du Grand Dole.

10. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce qu'en décidant de l'intégrer à la communauté de communes Nord Ouest Jura, le préfet du Jura a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales ne peut qu'être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Champagney n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 novembre 2012.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Champagney demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Champagney est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Champagney et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la communauté de communes Nord Ouest Jura et au préfet du Jura.

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N° 15NC00240


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00240
Date de la décision : 05/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-05-01-05 Collectivités territoriales. Coopération. Établissements publics de coopération intercommunale - Questions générales. Communautés de communes.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : REMOND

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-11-05;15nc00240 ?
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