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28/02/2005 | FRANCE | N°03NC00233

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4eme chambre - formation a 3, 28 février 2005, 03NC00233


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 11 mars 2003, complétée par un mémoire enregistré le 8 avril 2004, présentée pour M. Patrice X élisant domicile ... ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 14 janvier 2003 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 novembre 2001 de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement ;

2° ) d'annuler ladite décision ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 765 euros en application de article L.

761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- c'est à tort que le Trib...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 11 mars 2003, complétée par un mémoire enregistré le 8 avril 2004, présentée pour M. Patrice X élisant domicile ... ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 14 janvier 2003 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 novembre 2001 de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement ;

2° ) d'annuler ladite décision ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 765 euros en application de article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- c'est à tort que le Tribunal a considéré que les droits de la défense avaient été respectés ;

- le Tribunal n'a pas analysé les faits qui lui étaient reprochés ; les témoignages produits portent en eux-mêmes trop d'incertitudes et de contradictions pour être crédibles ; au surplus les faits reprochés sont prescrits ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 16 mai 2003 et 3 août 2004, présentés pour la société Neckermann SA, représentée par son représentant légal, par Me Wittner, avocat ;

La société conclut :

- au rejet de la requête ;

- à la condamnation de M. X à lui verser la somme de 765 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- les droits de la défense ont été parfaitement respectés en conformité avec les dispositions du code du travail ;

- le comité d'entreprise a été régulièrement consulté ; l'inspecteur du travail a mené l'enquête contradictoire dans les conditions prévues par la réglementation en vigueur ;

- les faits fautifs sont avérés ;

- ils ont été portés à sa connaissance le 2 août 2001 ; la procédure de licenciement a été engagée dans les délais prescrits par l'article L. 122-44 du code du travail ;

Vu, enregistré le 28 janvier 2005, le mémoire du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2005 :

- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,

- les observations de M. X,

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des membres du comité d'entreprise, qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, doit être autorisé par l'inspecteur du travail ; qu'un tel licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont celui-ci est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 122-44 du code du travail :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 122-44 du code du travail : Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que la direction de l'entreprise a été informée des agissements de M. X au début du mois d'août 2001 ; que l'employeur a engagé à raison de ces faits des poursuites disciplinaires en convoquant l'intéressé le 18 septembre 2001 à l'entretien préalable ; qu'il n'a, par suite, pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 122-44 du code du travail ;

Sur le moyen tiré de la violation des droits de la défense :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 122-4 du code du travail : L'employeur, ou son représentant, qui envisage de licencier un salarié doit, avant toute décision, convoquer l'intéressé (...). Au cours de l'entretien, l'employeur est tenu d'indiquer le ou les motifs de la décision envisagée et de recueillir les explications du salarié. (...) ; qu'aux termes de l'article L. 436-1 du même code, alors applicable : Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un membre, titulaire ou suppléant du comité d'entreprise, (...) est obligatoirement soumis au comité d'entreprise qui donne un avis sur le projet de licenciement ; que l'article R. 436-2 du même code précise que : L'avis du comité d'entreprise est exprimé au scrutin secret après audition de l'intéressé ;

Considérant, en premier lieu, que la procédure de licenciement des salariés protégés étant organisée par les dispositions précitées, M. X, qui bénéficie de la protection visée par les dispositions précitées au titre notamment de sa qualité de membre suppléant du comité d'entreprise, ne saurait utilement, pour contester la régularité de la procédure de licenciement dont il a été l'objet, invoquer les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui ne sont applicables qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions lorsqu'elles statuent sur des droits et obligations de caractère civil ou sur des accusations en matière pénale ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en application des dispositions précitées de l'article L. 122-4 précité du code du travail, la société Neckermann a convoqué M. X à un entretien préalable à son licenciement ; que, lors de cet entretien, l'employeur a remis au salarié un document relatant les comportements et propos dénoncées par des collègues de sexe féminin et indiqué que ces faits constituaient le motif de la décision envisagée ; que l'anonymat de ce document n'est pas de nature à entacher d'irrégularité le déroulement de l'entretien qui a permis à M. X de connaître les faits qui lui étaient reprochés et de s'exprimer sur ces faits ;

Considérant, en troisième lieu, que les membres du comité d'entreprise de la société Neckermann ont été invités, par lettre du 27 septembre 2001, à délibérer sur le projet de licenciement de M. X ; que si l'ordre du jour ne comportait pas l'indication des motifs du licenciement, il est constant que les membres du comité ont obtenu la remise en séance d'une note rapportant les propos et gestes de M. X à l'égard de plusieurs salariées ; qu'ainsi, le comité a pu rendre son avis, lequel était défavorable au licenciement, en toute connaissance de cause ; que si, par ailleurs, M. X soutient qu'il n'a pas été auditionné par le comité, il n'établit pas, étant présent à la séance, qu'il aurait été privé de la possibilité de s'exprimer ;

Considérant, enfin, que la circonstance, à la supposer établie, que l'inspecteur du travail n'aurait porté à la connaissance du salarié que trois des quatre témoignages dont il aurait disposé, n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure suivie par l'autorité administrative ;

Sur le moyen tiré de l'inexactitude des faits :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que quatre salariées se sont plaintes, en des termes très précis, du comportement à leur égard de M. X qui a le statut de cadre, responsable du service plan et gestion et est, à ce titre, en contact avec la majeure partie du personnel de la société ; que ce comportement était ainsi que l'a relevé l'inspecteur du travail peu compatibles avec les fonctions d'encadrement exercées par le requérant ; que si M. X, fait valoir que le témoignage d'une des salariées comporte des contradictions et imprécisions, cette circonstance n'est pas de nature à remettre en cause la réalité des faits qui lui sont reprochés dès lors que la véracité des déclarations d'au moins deux des salariées a été confirmée par d'autres témoignages, lors de l'enquête contradictoire ; que les attestations de salariés produites à la demande de M. X n'apportent pas d'éléments susceptibles de remettre en cause la réalité des accusations portées contre lui ; qu'en estimant, dans ces conditions, que les faits reprochés étaient établis, le Tribunal n'a pas commis d'erreur ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 novembre 2001 de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Neckermann, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X à payer à la société Neckermann la somme de 765 euros qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : M. X versera à la société Neckermann la somme de 765 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Patrice X, à la société Neckermann et au ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale.

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N° 03NC00233


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 03NC00233
Date de la décision : 28/02/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: Mme Marie GUICHAOUA
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : BOURGUN DÖRR SCP

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-02-28;03nc00233 ?
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