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27/02/1990 | FRANCE | N°89NC00117

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2e chambre, 27 février 1990, 89NC00117


Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 30 octobre 1987 sous le numéro 92348, et au greffe de la Cour administrative d'appel le 2 janvier 1989 sous le numéro 89NC00117, présentée pour la S.A. "Etablissements BRIATTE Frères" représentée par le président du Conseil d'administration en exercice tendant à ce que la Cour :
1) annule le jugement en date du 29 septembre 1987 par lequel le tribunal administratif d'AMIENS a rejeté sa demande en décharge des cotisations à l'impôt sur le sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des an

nées 1975 et 1976 dans les rôles de la commune de GAUCHY,
2) lui acco...

Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 30 octobre 1987 sous le numéro 92348, et au greffe de la Cour administrative d'appel le 2 janvier 1989 sous le numéro 89NC00117, présentée pour la S.A. "Etablissements BRIATTE Frères" représentée par le président du Conseil d'administration en exercice tendant à ce que la Cour :
1) annule le jugement en date du 29 septembre 1987 par lequel le tribunal administratif d'AMIENS a rejeté sa demande en décharge des cotisations à l'impôt sur le sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1975 et 1976 dans les rôles de la commune de GAUCHY,
2) lui accorde la réduction de l'imposition initiale à l'impôt sur les sociétés due au titre de l'année 1975,
3) lui accorde le remboursement des frais exposés tant première instance qu'en appel,
Vu l'ordonnance du 1er décembre 1988 par laquelle le Président de la 9ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la Cour administrative d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 13 février 1990 :
- le rapport de Monsieur BONNAUD, Conseiller,
- et les conclusions de Mme FRAYSSE, Commissaire du Gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, en premier lieu, qu'en raison des justifications produites par l'administration, la S.A. "Etablissements BRIATTE Frères" a dans son mémoire en réplique, expressement renoncé au moyen tiré de ce qu'elle n'avait pas été convoquée à l'audience, et qu'elle avait invoqué dans sa requête introductive d'instance ;
Considérant, en second lieu, que si la requête introductive d'instance présentée devant le tribunal administratif concluait à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés assignées au titre des années 1974, 1975 et 1976 et à la réduction des impositions primitives dues au titre des années 1975 et 1976, la société requérante, a, dans un mémoire en réplique faisant suite au mémoire en défense de l'administration, admis, d'une part, que les dégrèvements accordés en cours d'instance lui avaient donné entièrement satisfaction en ce qui concerne les années 1974 et 1976, et que, d'autre part, en ce qui concerne l'année 1975, le litige ne portait plus que sur la réduction, à hauteur de 72 928,80 F, des bases de l'imposition primitive ; que si, dans les visas du jugement attaqué, le tribunal administratif d'AMIENS a analysé la requête comme tendant seulement à la réduction des impositions supplémentaires réclamées au titre des années 1974, 1975 et 1976, il a, dans les motifs et dans le dispositif de ce même jugement, rejeté au fond la demande en réduction de ladite imposition primitive après avoir constaté que la requête était devenue sans objet à concurrence du dégrèvement total de 30 577 F accordé par l'administration, et correspondant aux impositions supplémentaires contestées au titre des années 1974, 1975 et 1976 ; qu'ainsi, les premiers juges ne sont pas mépris sur l'étendue du litige qui leur était soumis et ont répondu aux conclusions dont ils étaient saisis ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 1649 quinquies A, du C.G.I. alors en vigueur : "1 ...lorsque l'administration constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments suivant de base au calcul des impôts, droits, taxes ... les redressements correspondants sont effectués suivant la procédure unifiée ci-après :
2. Les notifications de redressement doivent être motivées de manière à mettre le contribuable en état de pouvoir formuler ses observations ou faire connaître son acceptation. L'administration invite en même temps l'intéressé à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de cette notification.
Si le redevable donne son accord dans le délai prescrit ou si des observations présentées dans ce délai sont reconnues fondées, l'administration procède à l'établisssement d'un rôle ou à l'émision d'un avis de mise en recouvrement sur la base acceptée par l'intéressé ....
3. Par dérogation aux dispositions de l'alinéa qui précède, lorsque le désaccord persiste, il peut être soumis, sur l'initiative de l'administration ou à la demande du redevable, à l'avis soit de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ....
L'avis de la commission est notififé au redevable par l'administration qui l'informe, en même temps, du chiffre qu'elle se propose de retenir comme base d'imposition et il est procédé à l'établisssement d'un rôle ou à l'émission d'un avis de mise en recouvrement ..." ;
Qu'il résulte de ces dispositions que l'administration peut régulièrement procéder à la mise en recouvrement des redressements acceptés par le contribuable alors même qu'elle a soumis à la commission départementale des impôts les autres redressements qu'elle envisage d'apporter de ce chef aux résultats déclarés ; qu'en tout état de cause, la requérante ne peut utilement invoquer l'absence de notification des redressements initialement contestés, dès lors que les impositions supplémentaires correspondantes ayant fait l'objet d'un dégrèvement total, le litige ne porte plus, comme il a été dit ci-dessus, que sur la réduction de l'imposition primitive établie au titre de l'année 1975 ;
Sur le bien fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 38.2 du C.G.I., applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209, le bénéfice net imposable à l'impôt sur les sociétés "est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture "de l'exercice et "l'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiées" ;

Considérant, en premier lieu, que, d'une part, dans l'hypothèse où les bénéfices imposables d'un exercice ont été déterminés en application des dispositions précitées de l'article 38 et où leur montant a servi de base à une imposition qui est devenue définitive en raison de l'expiration du délai de répétition ouvert à l'administration par l'article 1966 du C.G.I., la valeur de l'actif net ressortant du bilan de clôture de cet exercice, telle qu'elle a été retenue pour l'assiette de l'impôt, doit elle-même être regardée comme définitive et par suite, si ce bilan comporte des erreurs qui ont entraîné une sous-estimation ou une surestimation de l'actif net de l'entreprise, ces erreurs ne peuvent plus être réparées dans ce bilan ; que, d'autre part, la valeur de l'actif net à l'ouverture d'un exercice n'est autre que la valeur de l'actif net à la clôture de l'exercice précédent, de sorte que, si l'entreprise entend établir un bilan d'ouverture qui diffère du bilan de clôture de l'exercice précédent, elle ne peut le faire que par des opérations ou écritures qui doivent être réputées faites au titre du nouvel exercice ; qu'ainsi, dans l'hypothèse susmentionnée et durant toute la période qui suit la clôture du dernier exercice prescrit, les erreurs qui entachent un bilan et qui entraînent une sous-estimation ou une surestimation de l'actif net de l'entreprise peuvent, à l'initiative du contribuable ou à celle de l'administration à la suite d'une vérification, être corrigées dans les bilans de clôture des exercices non couverts par la prescription et, par suite, dans les bilans d'ouverture de ces exercices à l'exception du premier ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 209-I du C.G.I. : "En cas de déficit subi pendant un exercice, ce déficit est considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice. Si le bénéfice n'est pas suffisant pour que la déduction puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur les exercices suivants jusqu'au cinquième exercice qui suit l'exercice" ; que cette disposition permettant à une société de retrancher des bénéfices imposables d'un exercice non couvert par la prescription les déficits d'exercices précédents même couverts par la prescription, conduit nécessairement à autoriser l'administration à vérifier l'existence et le montant de ces déficits, donc à remettre en cause les résultats prétendument déficitaires d'exercices prescrits, les rectifications apportées à ces résultats ne pouvant pas toutefois avoir d'autre effet que de réduire ou supprimer les reports déficitaires opérés sur des exercices non prescrits ;

Considérant qu'à l'occasion de la vérification de la comptabilité de la S.A. "Etablissements BRIATTE", opérée en 1978 et portant sur les exercices clos les 31 décembre 1974, 1975 et 1976, l'administration a constaté que la société avait reporté sur les résultats de l'exercice clos en 1974 le déficit déclaré au titre de 1973 ; qu'elle était en droit, comme elle l'a fait, de remettre en cause les résultats de cet exercice ; que le vérificateur a également relevé que, parmi les produits de l'exercice 1975, la société avait comptabilisé des profits sur exercices antérieurs d'un montant de 58 399,89 F correspondant au rapprochement du solde du compte "fournisseurs divers" à la clôture de l'exercice 1975 et de l'inventaire extra-comptable des dettes réelles ; que ce profit étant en partie imputable à des exercices antérieurs au cours desquels la société avait notamment inscrit par erreur au crédit du compte "fournisseurs divers" au cours de l'exercice 1973, le montant hors taxe pour un montant de 72 928,80 F de deux factures proforma correspondant à deux acomptes sur l'achat d'un hangar métallique alors que la facture définitive a été par ailleurs inscrite pour son montant de 119 458 F ; que la société en demande le rattachement de ce montant de 72 928,80 F à l'exercice 1973 et la rectification à due concurrence des résultats de l'exercice 1975, que cette demande ne peut être regardée comme un "acte comportant reconnaissance" au sens de l'article 1975 du C.G.I. de nature à interrompre la prescription ;
Considérant qu'il y a lieu, conformément aux principes rappelés ci-dessus, de rectifier les écritures de l'exercice 1973, premier exercice non prescrit, en rehaussant les résultats par la réintégration de la somme de 72 928,80 F correspondant aux deux factures comptabilisées à tort au crédit du compte "fournisseurs divers" ; qu'à l'inverse la rectification des résultats de l'exercice 1975 doit exclure des profits la même somme, que dès lors le bénéfice de la société au titre de l'exercice 1975 doit être réduit de la somme de 72 928,80 F ; que contrairement à ce qu'elle soutient, l'administration, disposait lors du dépôt de la déclaration de 1975 de l'ensemble des éléments propres à lui permettre d'établir au titre des années antérieures les impositions supplémentaires dues par la S.A.. "Etablissement BRIATTE" et notamment de la régularisation opérée sur le compte "fournisseurs divers", qu'il n'appartient pas au juge de l'impôt de se substituer à l'administration pour l'établissement des impositions ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la S.A. "Etablissements BRIATTE Frères" est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 29 septembre 1987, le tribunal administratif d'AMIENS a rejeté sa demande, et à demander en conséquence l'annulation de ce jugement et la réduction de la cotisation primitive à l'impôt sur les sociétés émise au titre de l'année 1975 ;
Sur les frais de procès non compris dans les dépens :
Considérant que la société demande sur le fondement de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel le remboursement des frais qu'elle a engagés tant en première instance qu'en appel ; que cette demande n'est assortie d'aucune justification et ne peut, dès lors, être accueillie ;
Article 1 : Le jugement du tribunal administratif d'AMIENS en date du 29 septembre 1987 est annulé.
Article 2 : La base de l'impôt sur les sociétés assignée à la S.A. "Etablissements BRIATTE" au titre de l'exercice 1975 est réduite d'une somme de 72 928,80 F.
Article 3 : La société "Etablissements BRIATTE" est déchargée des droits correspondant à la réduction de la base d'imposition décidée à l'article 2 ci-dessus.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par la S.A. "Etablissements BRIATTE" est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la S.A. "Etablissement BRIATTE" et au ministre délégué, chargé du Budget.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 89NC00117
Date de la décision : 27/02/1990
Sens de l'arrêt : Décharge
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-01-03-01,RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - EVALUATION DE L'ACTIF - THEORIE DU BILAN -Correction symétrique des bilans - Comptabilisation de reports déficitaires et de profis sur exercices antérieurs.

19-04-02-01-03-01 La vérification d'une société a porté sur les exercices clos les 31 décembre 1974, 1975 et 1976 avec un report déficitaire de l'exercice 1973 sur celui clos en 1974. La société a comptabilisé en 1975 en profits sur exercices antérieurs une somme de 58.399,89 F qui est imputable, en partie, à la comptabilisation au cours de l'exercice 1973, du montant hors taxe de 72.928,80 F de deux factures proforma correspondant à deux acomptes sur l'achat d'un hangar alors que la facture définitive de 119.458 F avait été, par ailleurs, inscrite en comptabilité. Les principes de correction symétrique des bilans s'appliquent et les résultats de la société sont rehaussés au titre de 1973 de la somme de 72.928,80 F et diminué du même montant au titre de 1975 (1).


Références :

CGI 1649 quinquies A, 38 par. 2, 209 par. I, 1966, 1975
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R222

1.

Cf. 1973-10-31, Sieur X., 88207, p. 609 et Dupont 1974, p. 20


Composition du Tribunal
Président : M. Laporte
Rapporteur ?: M. Bonaud
Rapporteur public ?: Mme Fraysse

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1990-02-27;89nc00117 ?
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