La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/09/2022 | FRANCE | N°20MA00230

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 15 septembre 2022, 20MA00230


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme E... et N... D..., M. et Mme H... et M... L..., M. B... C..., Mme F... K..., M. et Mme A... K..., M. G... D... et M. J... I... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler le permis de construire tacite obtenu par la SACPA le 6 novembre 2017 l'autorisant à construire trois bâtiments dédiés à l'exploitation d'une activité de fourrière animale ainsi que le certificat de permis tacite délivré par le maire de Vallérargues au nom de l'Etat le 9 janvier 2018.

Par un jugement n° 1

802065 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur dema...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme E... et N... D..., M. et Mme H... et M... L..., M. B... C..., Mme F... K..., M. et Mme A... K..., M. G... D... et M. J... I... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler le permis de construire tacite obtenu par la SACPA le 6 novembre 2017 l'autorisant à construire trois bâtiments dédiés à l'exploitation d'une activité de fourrière animale ainsi que le certificat de permis tacite délivré par le maire de Vallérargues au nom de l'Etat le 9 janvier 2018.

Par un jugement n° 1802065 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 20 janvier 2020 et le 30 novembre 2020, M. et Mme D... P..., représentés par la SCP GMC avocats associés, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ce permis de construire tacite ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Vallérargues la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils tirent leur intérêt pour agir de la proximité de leurs fonds par rapport au projet et aux nuisances sonores qui en résulteraient ;

- le tribunal administratif aurait dû ordonner une mesure d'expertise pour vérifier le respect de la distance entre le projet et les habitations prévue par l'article 4 de l'arrêté du 8 décembre 2006 ;

- la demande de permis de construire ne satisfaisait ni aux prescriptions du c et du d de l'article R. 431-10 du même code, ni à celles de l'article R. 423-53 de ce code ;

- le projet ne respecte pas la distance avec les habitations prévue par l'article 4 de l'arrêté du 8 décembre 2006 ;

- il y a lieu d'ordonner une mesure d'expertise sur ce point ;

- le maire a méconnu les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- le maire a méconnu les dispositions de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, de l'article R. 1334-31 du code de la santé publique et de l'article R. 111-3 du code de l'urbanisme ;

- le maire a méconnu les dispositions de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 septembre 2020, la société par actions simplifiée SACPA, représentée par Me Seyfritz, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise solidairement à la charge de M. et Mme D... P... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance est irrecevable en ce que les requérants sont dépourvus de qualité pour agir ;

- les conclusions dirigées contre le certificat de permis tacite, qui ne constitue pas une décision faisant grief, sont irrecevables ;

- les moyens soulevés par M. et Mme D... P... ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 18 septembre 2020, la commune de Vallérargues, représentés par Me d'Albénas, a présenté des observations au terme desquelles elle conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise solidairement à la charge de M. et Mme D... P... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort,

- les observations de Me Soulier, représentant M. et Mme D... P..., Me Vicquenault substituant Me Seyfritz représentant la SACPA, et Me d'Albenas, représentant la commune de Vallérargues,

- et les conclusions de M. Roux, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Service pour l'assistance et le contrôle du peuplement animal (SACPA), qui exerce depuis 1999 à Vallérargues une activité de fourrière au sens de l'article L. 211-24 du code rural et de la pêche maritime, a, le 10 mai 2017, dans le but de moderniser ses installations, déposé une demande de permis de construire un pôle animalier composé d'un bâtiment administratif et de deux bâtiments de chenil sur une partie de la parcelle cadastrée section Y n° 34, située lieu-dit-O... ". Le 9 janvier 2018, le maire de Vallérargues lui a délivré, au nom de l'Etat, un certificat reconnaissant l'existence d'un permis de construire tacite à la date du 6 novembre 2017. M. et Mme D... et d'autres particuliers demeurant dans ce même lieu-dit relèvent appel du jugement du 19 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ce permis de construire tacite et de ce certificat.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 621-1 du code de justice administrative : " La juridiction peut, soit d'office, soit sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ordonner, avant-dire droit, qu'il soit procédé à une expertise sur les points déterminés par sa décision. ".

3. Les requérants n'ont pas demandé au tribunal administratif d'ordonner une mesure d'expertise pour vérifier le respect de la distance entre le projet et les habitations prévue par l'article 4 de l'arrêté du 8 décembre 2006, applicable selon eux au litige. Cet arrêté, qui fixe les règles techniques auxquelles doivent satisfaire les installations renfermant des chiens soumis à autorisation au titre du livre V du code de l'environnement a été pris en application de la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, en particulier des articles L. 511-1 et L. 512-10 du code de l'environnement. Ainsi, la vérification du respect des prescriptions contenues dans cet arrêté ne s'impose pas à l'autorité délivrant des autorisations d'urbanisme. Par suite, une mesure d'expertise pour vérifier la distance dont s'agit aurait eu un caractère frustratoire. En s'abstenant d'ordonner une telle mesure, le tribunal administratif n'a pu rendre le jugement irrégulier.

Sur les conclusions dirigées contre le certificat de permis tacite :

4. Les requérants, qui présentent également des conclusions tendant à l'annulation du permis de construire tacite, ne sont pas recevables à demander l'annulation du certificat de permis tacite correspondant, qui ne constitue pas une décision faisant grief, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif pour un motif qu'ils ne critiquent pas.

Sur les conclusions dirigées contre le permis tacite :

5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également : (...) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. ".

6. Il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire déposée par la société SACPA comportait les documents graphique et photographiques mentionnés au c et d de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme. Ni ces documents, ni le plan de situation et le plan de masse exigés aux articles R. 431-7 et R. 431-9 du même code n'avaient à justifier du respect de la distance d'au moins 100 mètres entre les bâtiments abritant les chiens et les habitations des tiers, qui constitue l'une des prescriptions générales applicables à cette catégorie d'installations classées pour la protection de l'environnement relevant tant du régime de l'autorisation que de celui, comme en l'espèce, de la déclaration.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet aurait pour effet la création ou la modification d'un accès à une voie publique dont la gestion ne relève pas de l'autorité compétente pour délivrer le permis, celle-ci consulte l'autorité ou le service gestionnaire de cette voie, sauf lorsque le plan local d'urbanisme ou le document d'urbanisme en tenant lieu réglemente de façon particulière les conditions d'accès à ladite voie. ".

8. Le projet prévoit un accès à la route départementale n° 979. Si la société SACPA admet que le portail d'entrée aux installations qu'elle gère actuellement sera déplacé de 40 m vers cette route jusqu'à une distance de 20 m, ce déplacement, en l'absence au dossier d'autres modifications concernant l'accès, ne permet de considérer que le projet aurait pour effet la création d'un accès ou la modification de l'accès existant à la route précitée. La consultation du conseil départemental du Gard n'étant pas requise, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme doit être écarté.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".

10. Il ressort des pièces du dossier que les deux bâtiments à usage de chenil sont implantés à plus de cent mètres des habitations les plus proches au sein d'un secteur naturel dans lequel se trouvent quelques constructions isolées à une distance de 250 à 650 mètres. L'installation étant déclarée pour une capacité d'accueil de 49 chiens, ces deux bâtiments comporteront respectivement 22 et 19 boxes. 80 boxes pour chats seront aménagés dans les chatteries prévues dans le bâtiment administratif. D'une part, les requérants se prévalent du risque de divagation de ces animaux et des collisions possibles avec les véhicules circulant sur la route départementale n° 979, sans apporter d'éléments de nature à établir la réalité et l'importance de ces divagations. La divagation de chats qui seraient abandonnés par leurs propriétaires devant la fourrière ne peut être utilement invoquée pour établir que le projet de construction lui-même serait à l'origine de risques mentionnés à l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. D'autre part, dans le but de dissuader les chiens d'aboyer, les vues à partir des boxes, notamment vers la route, seront occultées au moyen de pare-vues en bois disposés devant les courettes, les cours seront séparées par des murets pleins et ces animaux seront regroupés à l'intérieur de ces bâtiments durant la nuit. Si les requérants font état de témoignages portant sur les nuisances résultant des aboiements des chiens présents dans le refuge contigu exploité par la société protectrice des animaux (SPA), dont les boxes s'ouvrent sur la route, ils ne soutiennent pas que ce refuge aurait été conçu de la même façon que le pôle animalier projeté par la société SACPA. Contrairement à ce qu'ils soutiennent, ce pôle se substituant aux installations actuelles exploitées par la société SACPA, sans augmentation de capacité, excepté le nombre de boxes pour chats porté de 70 à 80, les nuisances sonores cumulées de ces installations et de celles exploitées par la SPA ne seront pas aggravées. Dans ces conditions, compte tenu des précautions prises et en dépit de l'absence de gardiennage permanent prévu, le permis de construire attaqué n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

11. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 111-3 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est susceptible, en raison de sa localisation, d'être exposé à des nuisances graves, dues notamment au bruit. ".

12. Au soutien du moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions, M. et Mme D... P... exposent que le projet attaqué est susceptible d'exposer les tiers à de graves nuisances sonores. Ce moyen ne peut qu'être écarté dès lors que ces dispositions n'ont pas pour effet de protéger les tiers au projet autorisé par le permis de construire litigieux mais visent le cas dans lequel le projet lui-même est susceptible d'être exposé à de telles nuisances. Les requérants ne peuvent utilement invoquer les dispositions de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales et de l'article R. 1334-31 du code de la santé publique qui relèvent d'une législation distincte de celle de l'urbanisme.

13. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à son importance ou à la destination des constructions ou des aménagements envisagés, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. / Il peut également être refusé ou n'être accepté que sous réserve de prescriptions spéciales si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic. ".

14. Ainsi qu'il a été indiqué au point 8, le projet maintient en substance l'accès à la route départementale n° 979, dont il n'est pas démontré, ni même allégué qu'il serait à l'origine d'accidents. Selon les photographies jointes à la demande de permis de construire ou produites en défense, la visibilité offerte aux automobilistes s'engageant sur cette route est, en dépit de l'alignement d'arbres plantés le long de celle-ci, suffisante compte tenu de l'élargissement à ce niveau de la voie interne au projet. Il ne ressort pas des documents joints à la demande que la position du portail d'entrée, qui n'y est pas indiquée, entraînerait nécessairement l'arrêt provisoire sur la voie publique des véhicules entrants le temps de l'ouverture de ce portail, qui sera, selon le pétitionnaire posé à 20 mètres de la route. Par suite, aucune erreur manifeste d'appréciation n'entache le permis de construire tacite attaqué en ce qui concerne l'application de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme.

15. En sixième lieu, comme indiqué au point 3, l'arrêté du 8 décembre 2006 ayant été pris en application de la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, la vérification du respect des prescriptions contenues dans cet arrêté n'incombe pas à l'autorité délivrant des autorisations d'urbanisme. Par suite, les requérants ne peuvent utilement soutenir que l'installation concernée ne respecterait pas ces prescriptions générales, notamment la règle relative à la distance de 100 mètres entre les bâtiments abritant les chiens et les habitations des tiers.

16. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la société SACPA à la demande de première instance, M. et Mme D... P... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes, a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

17. Le permis de construire en litige ayant été délivré au nom de l'Etat, la commune de Vallérargues ne peut être regardée comme une partie pour l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par suite, ces dispositions impliquent que soient rejetées les conclusions dirigées contre elle sur ce fondement par M. et Mme D... P... et ses propres conclusions dirigées contre ces derniers sur ce même fondement.

18. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la société SACPA présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme D... P... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société SACPA et de la commune de Vallérargues au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... ayant été désignés comme représentants uniques en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la société par actions simplifiée SACPA, au ministre de l'intérieur et des Outre-mer, et à la commune de Vallérargues.

Copie en sera faite au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2022, où siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Quenette, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 septembre 2022.

N° 20MA00230 2

nb


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Régimes de déclaration préalable.

Victimes civiles de la guerre - Indemnisation des victimes des persécutions national-socialistes (accord franco-allemand du 15 juillet 1960).


Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Philippe D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SELARL MATHIEU SEYFRITZ AVOCAT

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Date de la décision : 15/09/2022
Date de l'import : 25/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 20MA00230
Numéro NOR : CETATEXT000046298903 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-09-15;20ma00230 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award