La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/02/2022 | FRANCE | N°20MA00982

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 28 février 2022, 20MA00982


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un déféré, enregistré le 9 juillet 2019, la préfète de la Corse-du-Sud a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 18 mars 2019 par lequel le maire d'Eccica-Suarella a accordé un permis de construire à M. B... A... pour la construction d'une maison individuelle sur une parcelle cadastrée section D n° 1505 au lieu-dit " Porette ".

Par un jugement n° 1900946 du 16 janvier 2020, le tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté du 18 mars 2019.

Procédur

e devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 février et 15 juin 202...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un déféré, enregistré le 9 juillet 2019, la préfète de la Corse-du-Sud a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 18 mars 2019 par lequel le maire d'Eccica-Suarella a accordé un permis de construire à M. B... A... pour la construction d'une maison individuelle sur une parcelle cadastrée section D n° 1505 au lieu-dit " Porette ".

Par un jugement n° 1900946 du 16 janvier 2020, le tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté du 18 mars 2019.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 février et 15 juin 2020, M. B... A..., représenté par Me Bronzini de Caraffa, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 16 janvier 2020 ;

2°) de rejeter le déféré de la préfète de la Corse-du-Sud ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif a commis une erreur d'appréciation de la situation du terrain d'assiette du projet au regard des dispositions de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme et du plan d'aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC) ; le terrain d'assiette du projet est situé dans une zone constructible et urbanisée, à proximité immédiate d'habitations existantes ou en cours de construction, au sein du hameau " Saint-Jean de Pisciatello " ; il a fait l'objet d'un permis d'aménager en 2011 ; les parcelles avoisinantes ont fait l'objet de permis de construire ; deux lotissements sont en cours de construction à proximité immédiate ;

- le moyen soulevé par le préfet en première instance tiré de la méconnaissance des dispositions du PADDUC relatives aux espaces stratégiques agricoles n'est pas fondé, la pente moyenne du terrain d'assiette du projet est supérieure à 20%.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mai 2020, le préfet de la Corse-du-Sud conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève ;

- le permis de construire litigieux méconnaît les dispositions des articles L. 122-5 et L. 122-10 du code de l'urbanisme ainsi que les dispositions du PADDUC relatives aux espaces stratégiques agricoles.

La requête a été communiquée à la commune d'Eccica-Suarella qui n'a pas produit d'observations.

Les parties ont été informées, par lettre du 10 novembre 2021, qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative il était envisagé d'appeler l'affaire avant la fin du premier trimestre 2022 et que l'instruction pourrait être close à partir du 15 décembre 2021 sans information préalable.

L'instruction a été close le 12 janvier 2022, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Laurent Marcovici, président assesseur de la 5ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience au cours de laquelle ont été entendus :

- le rapport de Mme Balaresque ;

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 18 mars 2019, le maire d'Eccica-Suarella a accordé à M. A... un permis de construire une maison individuelle pour une surface de plancher de 119 mètres carrés sur la parcelle cadastrée section D n° 1505 au lieu-dit " Porette ". M. A... relève appel du jugement du 16 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Bastia, sur déféré de la préfète de la Corse-du-Sud, a annulé cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme : " L'urbanisation est réalisée en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants, sous réserve de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes, ainsi que de la construction d'annexes, de taille limitée, à ces constructions, et de la réalisation d'installations ou d'équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées ".

3. Il résulte, comme l'a jugé le tribunal, des dispositions précitées que l'urbanisation en zone de montagne, sans être autorisée en zone d'urbanisation diffuse, peut être réalisée non seulement en continuité avec les bourgs, villages et hameaux existants, mais également en continuité avec les " groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants " et qu'est ainsi possible l'édification de constructions nouvelles en continuité d'un groupe de constructions traditionnelles ou d'un groupe d'habitations qui, ne s'inscrivant pas dans les traditions locales, ne pourrait être regardé comme un hameau. L'existence d'un tel groupe suppose plusieurs constructions qui, eu égard notamment à leurs caractéristiques, à leur implantation les unes par rapport aux autres et à l'existence de voies et de réseaux, peuvent être perçues comme appartenant à un même ensemble. Pour déterminer si un projet de construction réalise une urbanisation en continuité par rapport à un tel groupe, il convient de rechercher si, par les modalités de son implantation, notamment en termes de distance par rapport aux constructions existantes, ce projet sera perçu comme s'insérant dans l'ensemble existant.

4. Le plan d'aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC), qui peut préciser les modalités d'application de ces dispositions en application du I de l'article L. 4424-11 du code général des collectivités territoriales, adopté par la délibération n° 15/235 AC du 2 octobre 2015 de l'assemblée de Corse, prévoit qu'un bourg est un gros village présentant certains caractères urbains, qu'un village est plus important qu'un hameau et comprend ou a compris des équipements ou lieux collectifs administratifs, culturels ou commerciaux, et qu'un hameau est caractérisé par sa taille, le regroupement des constructions, la structuration de sa trame urbaine, la présence d'espaces publics, la destination des constructions et l'existence de voies et équipements structurants. Ces prescriptions apportent des précisions et sont compatibles avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières à la montagne. En revanche, le PADDUC se borne à rappeler les critères mentionnés ci-dessus et permettant d'identifier un groupe de constructions traditionnelles ou d'habitations existants et d'apprécier si une construction est située en continuité des bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants.

5. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet, actuellement en l'état naturel, est entouré de parcelles non bâties à la date de délivrance du permis litigieux. La construction la plus proche est une maison individuelle située à une quarantaine de mètres du projet et distante d'au moins soixante mètres de l'autre construction la plus proche, laquelle est située à plus de soixante-dix mètres du projet. Dans ces conditions, eu égard à la faible densité de l'habitat dans le secteur duquel s'implante le projet litigieux, ce dernier ne peut être regardé comme situé en continuité d'un groupe d'habitation existant au sens des dispositions précitées, quand bien même son terrain d'assiette serait desservi par la voirie et les réseaux publics autres que d'assainissement. Les circonstances que des permis de construire ont été délivrés jusqu'à une date récente pour l'édification d'habitations à proximité de ce terrain et que celui-ci, classé en zone constructible de la carte communale d'Eccica-Suarella depuis 2008, a fait l'objet en 2011 d'un certificat d'urbanisme positif sont par elles-mêmes sans incidence sur l'appréciation de la continuité de l'urbanisation. Dès lors, en délivrant le permis de construire litigieux, le maire d'Eccica-Suarella a méconnu les dispositions de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme.

6. Ainsi que l'a jugé le tribunal, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est susceptible de fonder l'annulation de la décision contestée.

7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a annulé le permis de construire litigieux. Par voie de conséquence, doivent être rejetées les conclusions de M. A... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'ayant pas la qualité de partie perdante à l'instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et à la commune d'Eccica-Suarella.

Copie en sera adressée pour information au préfet de Corse, préfet de la Corse du Sud.

Délibéré après l'audience du 7 février 2022, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Mérenne, premier conseiller,

- Mme Balaresque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 février 2022.

N°20MA00982 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00982
Date de la décision : 28/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-001-01-02-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Règles générales d'utilisation du sol. - Règles générales de l'urbanisme. - Prescriptions d'aménagement et d'urbanisme. - Régime issu de la loi du 9 janvier 1985 sur la montagne.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: Mme Claire BALARESQUE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SCP TOMASI SANTINI VACCAREZZA BRONZINI DE CARAFFA

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-02-28;20ma00982 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award