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28/12/2021 | FRANCE | N°20MA00507

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 28 décembre 2021, 20MA00507


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... F..., M. C... F..., M. A... F..., Mme D... F... et Mme E... F... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du 26 juin 2018 par laquelle le conseil municipal de Tornac a approuvé le plan local d'urbanisme.

Par un jugement n° 1802740 du 3 décembre 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 6 février 2020, les consorts F..., représentés par Me Audouin, demandent

la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 3 décembre 2019 ;

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... F..., M. C... F..., M. A... F..., Mme D... F... et Mme E... F... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du 26 juin 2018 par laquelle le conseil municipal de Tornac a approuvé le plan local d'urbanisme.

Par un jugement n° 1802740 du 3 décembre 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 6 février 2020, les consorts F..., représentés par Me Audouin, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 3 décembre 2019 ;

2°) à titre principal, d'annuler la délibération du 26 juin 2018 par laquelle le conseil municipal de Tornac a approuvé le plan local d'urbanisme ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler la délibération du 26 juin 2018 en tant qu'elle a classé les parcelles cadastrées section AN n° 410 et section AP n° 241 en zone naturelle ou agricole et en tant que la parcelle cadastrée section AN n° 56 comporte un emplacement réservé ;

4°) d'enjoindre à la commune de Tornac de convoquer le conseil municipal pour adopter un nouveau document d'urbanisme concernant ces parcelles ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Tornac la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement du tribunal administratif de Nîmes n'a pas répondu aux moyens tenant au défaut de notification du projet de plan local d'urbanisme aux personnes publiques associées et à l'absence de définition des objectifs de la révision ;

- ce jugement n'a pas répondu au moyen relatif à l'absence d'enquête publique portant sur un projet de plan local d'urbanisme conforme au schéma de cohérence territoriale du Pays des Cévennes et au schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux ;

- le tribunal administratif de Nîmes, en répondant aux moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles L. 2121-13 et L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales, a omis de se prononcer sur la présence du maire lors du vote et sur l'absence d'information des membres du conseil municipal relative à l'existence d'un risque contentieux ;

- la délibération du 26 juin 2018 est irrégulière dès lors qu'elle ne permet pas de savoir si la commune de Tornac a opté pour les nouvelles dispositions applicables à compter du 1er janvier 2016 ou si elle fait application des anciennes dispositions ;

- cette délibération est irrégulière en ce qu'elle méconnaît les dispositions de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales ;

- cette délibération est irrégulière en ce qu'elle méconnaît les dispositions de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales ;

- cette délibération est entachée d'un vice de procédure tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 123-7 du code de l'urbanisme, dès lors que la commune a omis de consulter certaines personnes publiques associées, notamment les communes de Montpellier et de Bagnols-sur-Cèze, sur le projet de plan local d'urbanisme ;

- elle est également entachée d'un vice de procédure tiré de la méconnaissance des dispositions des articles L. 123-9 et L. 300-2 du code de l'urbanisme, dès lors que la commune n'a pas précisé les objectifs poursuivis par la procédure d'adoption d'un plan local d'urbanisme ;

- elle est entachée d'un vice de procédure tenant à la méconnaissance des dispositions de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme, en l'absence de nouvelle enquête publique à la suite des changements du projet de plan local d'urbanisme survenus au cours de son élaboration ;

- le rapport de présentation est insuffisant, au regard des dispositions de l'article R. 123-2 du code de l'urbanisme ;

- la délibération méconnaît les dispositions des articles L. 101-1 et L. 101-2 du code de l'urbanisme ;

- le règlement du plan local d'urbanisme n'est pas cohérent avec le projet d'aménagement et de développement durables, ce qui méconnaît les dispositions de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme ;

- le classement en zone naturelle ou en zone agricole des parcelles cadastrées section AN n° 410 et section AP n° 241 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'emplacement réservé sur la parcelle cadastrée section AN n° 56 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la délibération est entachée de détournement de pouvoir.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 mars 2020, la commune de Tornac, représentée par Me d'Albenas, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des consorts F... G... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par les consorts F... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015 ;

- le décret n° 2015-1783 du 28 décembre 2015 ;

- le code de justice administrative.

Par décision du 24 août 2021, la présidente de la Cour a désigné M. Portail, président assesseur, pour statuer dans les conditions prévues à l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Barthez,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me Audouin, représentant les consorts F..., et de Me d'Audigier, représentant la commune de Tornac.

Considérant ce qui suit :

1. Par délibération du 26 juin 2018, le conseil municipal de Tornac a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune qui, notamment, prévoit que les parcelles cadastrées section AN n° 410 et section AP n° 241 sont classées en zone naturelle ou en zone agricole. Les consorts F... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes, à titre principal, d'annuler cette délibération et, à titre subsidiaire, de l'annuler en tant qu'elle concerne ces deux parcelles ainsi que la parcelle cadastrée section AN n° 56 sur laquelle serait prévu un emplacement réservé. Ils relèvent appel du jugement du 3 décembre 2019 par lequel ce tribunal a rejeté leur demande.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, le tribunal administratif de Nîmes a répondu, au point 2 du jugement attaqué, au moyen selon lequel la délibération contestée serait entachée d'un vice de procédure dès lors que la commune de Tornac n'aurait pas saisi la totalité des personnes publiques associées du projet de plan local d'urbanisme. Il a également répondu, au point 5 du jugement attaqué, au moyen tiré de ce que la délibération du 16 août 2004 prescrivant la révision du plan d'occupation des sols valant élaboration du plan local d'urbanisme n'aurait pas indiqué de manière suffisamment précise les objectifs qui étaient ainsi poursuivis.

3. En deuxième lieu, le tribunal administratif de Nîmes a répondu, au point 6 du jugement attaqué, au moyen selon lequel la délibération contestée serait entachée d'un vice de procédure en l'absence de nouvelle enquête publique qui aurait été rendue nécessaire par les évolutions, notamment du cadre juridique applicable, au cours de la procédure d'élaboration du plan local d'urbanisme. En outre, il s'est référé à la branche du moyen soulevé par les consorts F... relative au schéma de cohérence territoriale du Pays des Cévennes et au schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux et il a estimé que cet argument n'était pas assorti de précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé. Ainsi, le tribunal administratif, qui n'est en tout état de cause pas tenu de répondre à tous les arguments des parties, a suffisamment motivé sa réponse au moyen tiré d'un vice de procédure tenant à l'absence de nouvelle enquête publique.

4. En troisième lieu, le tribunal administratif de Nîmes a répondu, au point 4 du jugement attaqué, au moyen relatif à la méconnaissance de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales et a bien indiqué, contrairement à ce que soutiennent les consorts F..., que le maire de Tornac avait pris part à la délibération lors de l'examen de ce point de l'ordre du jour de la séance du conseil municipal du 26 juin 2018. Il a également répondu, au point 3 du même jugement, au moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales. En outre, cette motivation indique que les requérants procèdent par de simples allégations et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que des membres du conseil municipal aurait demandé un complément d'informations qui n'aurait pas été satisfait. Elle est donc suffisante.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la légalité externe de la délibération :

5. En premier lieu, l'ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre Ier du code de l'urbanisme a procédé à une nouvelle codification à droit constant de ce livre et prévoit une entrée en vigueur de ses dispositions le 1er janvier 2016. C'est donc à bon droit que, dans la délibération du 26 juin 2018, la commune de Tornac a visé l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme, issu de cette ordonnance.

6. La délibération contestée a certes visé, à tort, les articles R. 123-24 et R. 123-25 du code de l'urbanisme relatifs à l'affichage du document d'urbanisme en vigueur jusqu'au 31 décembre 2015. Toutefois, cette erreur matérielle est sans incidence sur la légalité de la délibération du 26 juin 2018.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 132-7 du code de l'urbanisme : " L'Etat, les régions, les départements, les autorités organisatrices prévues à l'article L. 1231-1 du code des transports, les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de programme local de l'habitat et les organismes de gestion des parcs naturels régionaux et des parcs nationaux sont associés à l'élaboration des schémas de cohérence territoriale et des plans locaux d'urbanisme dans les conditions définies aux titres IV et V. / Il en est de même des chambres de commerce et d'industrie territoriales, des chambres de métiers, des chambres d'agriculture et, dans les communes littorales au sens de l'article L. 321-2 du code de l'environnement, des sections régionales de la conchyliculture. Ces organismes assurent les liaisons avec les organisations professionnelles intéressées ". L'article L. 132-9 du même code dispose que : " Pour l'élaboration des plans locaux d'urbanisme sont également associés, dans les mêmes conditions : 1° Les syndicats d'agglomération nouvelle ; / 2° L'établissement public chargé de l'élaboration, de la gestion et de l'approbation du schéma de cohérence territoriale lorsque le territoire objet du plan est situé dans le périmètre de ce schéma ; / 3° Les établissements publics chargés de l'élaboration, de la gestion et de l'approbation des schémas de cohérence territoriale limitrophes du territoire objet du plan lorsque ce territoire n'est pas couvert par un schéma de cohérence territoriale ".

8. A la suite des délibérations du conseil municipal du 31 août 2017 tirant le bilan de la concertation et arrêtant le projet de plan local d'urbanisme, la commune de Tornac a saisi les personnes publiques associées de ce projet, conformément aux dispositions précédemment citées du code de l'urbanisme. Il ne ressort pas de ces dispositions que d'autres collectivités territoriales, notamment les communes de Montpellier et de Bagnols-sur-Cèze, auraient dû être également saisies, nonobstant la circonstance relevée par les consorts F..., qui est sans incidence, que le rapport de présentation du plan local d'urbanisme a mentionné l'objectif de la commune d'améliorer les connexions avec les pôles urbains environnants.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ". En application de ces dispositions, le maire est tenu de communiquer aux membres du conseil municipal les documents nécessaires pour qu'ils puissent se prononcer utilement sur les affaires de la commune soumises à leur délibération. En l'espèce, il ne ressort d'aucune pièce que le dossier du plan local d'urbanisme n'aurait pas été mis à la disposition des membres du conseil municipal, ni que ceux-ci auraient été privés de la possibilité d'en prendre connaissance avant l'adoption de la délibération contestée. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que des élus auraient demandé un complément d'informations qui n'aurait pas été satisfait. En outre, il n'était pas nécessaire que le maire de la commune informe les membres du conseil municipal sur le risque d'un contentieux avec les consorts F... en raison du classement en zone naturelle ou agricole de certaines parcelles, notamment de la parcelle cadastrée section AP n° 241. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions du code général des collectivités territoriales doit donc être écarté.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales : " Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires ". Il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l'adoption d'une délibération d'un conseiller municipal intéressé à l'affaire qui fait l'objet de cette délibération, c'est-à-dire y ayant un intérêt qui ne se confond pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune, est de nature à en entraîner l'illégalité. De même, sa participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l'adoption d'une telle délibération est susceptible de vicier sa légalité, alors même que cette participation préalable ne serait pas suivie d'une participation à son vote, si le conseiller municipal intéressé a été en mesure d'exercer une influence sur la délibération.

11. S'agissant d'une délibération déterminant des prévisions et règles d'urbanisme applicables dans l'ensemble d'une commune, la circonstance qu'un conseiller municipal intéressé au classement d'une parcelle ait participé aux travaux préparatoires et aux débats précédant son adoption ou à son vote n'est de nature à entraîner son illégalité que s'il ressort des pièces du dossier que, du fait de l'influence que ce conseiller a exercée, la délibération prend en compte son intérêt personnel.

12. En l'espèce, il est constant que la maire de Tornac a participé à la délibération du conseil municipal qui a approuvé le plan local d'urbanisme. En outre, ainsi que le relèvent les consorts F..., la maire de Tornac réside dans le hameau de La Flavarderie et sa maison est située à proximité d'un secteur, classé à présent en zone naturelle, d'une superficie d'environ 1 hectare et dont fait partie la parcelle cadastrée section AP n° 241. Toutefois, les consorts F... ne font état d'aucun autre élément de nature à établir que du fait de l'influence exercée par la maire de Tornac, ce secteur a été classé en zone naturelle. En outre la commune souhaite limiter les espaces urbanisés et favoriser le développement de constructions autour de la mairie et du hameau de La Madeleine ainsi que, de manière secondaire, à proximité de hameaux anciens dont ne fait pas partie le hameau pavillonnaire de La Flavarderie. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que la délibération du 26 juin 2018, du fait de l'influence que la maire de Tornac a exercée, aurait pris en compte son intérêt personnel.

13. En cinquième lieu, le moyen tiré de l'illégalité de la délibération prescrivant l'adoption ou la révision du plan local d'urbanisme qui porte, d'une part, sur les objectifs, au moins dans leurs grandes lignes, poursuivis par la commune en projetant d'élaborer ou de réviser ce document d'urbanisme et, d'autre part, sur les modalités de la concertation avec les habitants et les associations locales ne peut, eu égard à son objet et à sa portée, être utilement invoqué contre la délibération approuvant le plan local d'urbanisme. Le moyen tiré de l'imprécision ou de l'inexactitude des objectifs mentionnés dans la délibération du 16 août 2004 ne peut donc qu'être écarté.

14. En sixième lieu, aux termes de l'article L 153-21 du code de l'urbanisme : " A l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête, est approuvé par : (...) 2° Le conseil municipal dans le cas prévu au 2° de l'article L. 153-8 ". Il résulte de ces dispositions que le projet de plan local d'urbanisme ne peut subir de modifications, entre la date de sa soumission à l'enquête publique et celle de son approbation, qu'à la double condition que ces modifications ne remettent pas en cause l'économie générale du projet et qu'elles procèdent de l'enquête. Doivent être regardées comme procédant de l'enquête les modifications destinées à tenir compte des réserves et recommandations du commissaire ou de la commission d'enquête, des observations du public et des avis émis par les autorités, collectivités et instances consultées et joints au dossier de l'enquête.

15. La mise à jour des références aux documents supra-communaux, la correction de l'emprise du plan de prévision des risques d'inondation et de la crue de l'année 2002 ainsi que de l'affichage de l'étude de la société Exzeco, la prise en compte des risques majeurs dans le règlement de la zone UE, la mention au sein de la zone N des espaces boisés classés et les modifications du règlement de cette zone rendus nécessaires par ce classement procèdent de l'enquête publique. Contrairement à ce que soutiennent les consorts F..., de telles modifications, prises dans leur ensemble, ne remettent pas en cause l'économie générale du projet. En outre, la branche de ce moyen relative à la nécessité de procéder à une nouvelle enquête publique pour tenir compte du schéma de cohérence territoriale du Pays des Cévennes et du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux n'est pas assortie des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. Les consorts F... ne sont donc pas fondés à soutenir que la procédure serait irrégulière faute d'une nouvelle enquête publique.

16. En septième lieu, l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme ainsi que l'article R. 123-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur le 31 décembre 2015 qui reste applicable au présent litige en application des dispositions du VI de l'article 12 du décret du 28 décembre 2015 précédemment visé, fixent le contenu du rapport de présentation du plan local d'urbanisme. D'une part, les consorts F... n'établissent pas la réalité de leur allégation selon laquelle le rapport de présentation, qui est le résultat du travail d'un bureau d'étude, présenterait un état de l'urbanisation de la commune de Tornac qui serait inexact. En outre, d'autre part, les consorts F..., qui critiquent de manière générale l'absence d'explication cohérente sur le choix de l'implantation des nouvelles zones d'urbanisation et le classement en zone naturelle d'espaces précédemment constructibles, ne contestent aucun élément précis du rapport de présentation. Ils tendent, ainsi, à remettre en cause le bien-fondé des choix d'urbanisme faits par la commune de Tornac et non pas la conformité du contenu du rapport de présentation aux articles L. 151-4 et R. 123-2 du code de l'urbanisme. Ils ne sont ainsi pas fondés à soutenir que le rapport de présentation méconnaîtrait ces dispositions du code de l'urbanisme.

En ce qui concerne la légalité interne de la délibération :

17. En premier lieu, aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3 ". Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

18. Le projet d'aménagement et de développement durables de la commune de Tornac a pour objectifs de créer une vie de village en prenant appui sur les hameaux existants, notamment autour de la mairie et du hameau de La Madeleine, d'utiliser le patrimoine naturel et culturel comme atout de développement, de valoriser le terroir notamment en s'appuyant sur l'agriculture, et de limiter la consommation d'espace naturel, agricole et forestier. Le règlement du plan local d'urbanisme limite la superficie des zones urbaines et à urbaniser à 45 hectares, soit 2 % du territoire communal, alors que la surface des zones urbaines, NA et NB du précédent document d'urbanisme applicable s'élevait à 93 hectares. Les zones à urbaniser sont limitées à 4,33 hectares et situées à proximité de la mairie et du hameau de La Madeleine. Ainsi, alors que les parcelles cadastrées section AN n° 410 et section AP n° 241 ne sont pas situées à côté de la mairie ou de ce hameau, les consorts F... ne sont pas fondés à soutenir que le plan local d'urbanisme serait incohérent avec le projet d'aménagement et de développement durables.

19. En deuxième lieu, l'article L. 101-1 du code de l'urbanisme pose le principe que les collectivités territoriales sont les gestionnaires du territoire français dans le cadre de leurs compétences et qu'elles harmonisent leurs décisions d'utilisation de l'espace en vue de la réalisation des objectifs de l'article L. 101-2 du même code. Ces objectifs sont, notamment, les principes d'équilibre entre l'extension de l'urbanisation et la protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, le principe de diversité des fonctions urbaines et de mixité sociale et le principe de respect de l'environnement. Les dispositions de ces articles font suite aux dispositions de l'article L. 121-1 du même code pour lesquelles, par sa décision n° 2000-436 DC du 7 décembre 2000, le Conseil constitutionnel a jugé qu'elles n'étaient pas contraires aux articles 34 et 72 de la Constitution sous réserve qu'elles soient interprétées comme imposant seulement aux auteurs des documents d'urbanisme d'y faire figurer des mesures tendant à la réalisation des objectifs qu'elles énoncent et que, en conséquence, le juge administratif exerce un simple contrôle de compatibilité entre les règles fixées par ces documents et les dispositions de l'article L. 121-1 du code l'urbanisme. En conséquence, il appartient à la Cour de contrôler la comptabilité entre le plan local d'urbanisme de la commune de Tornac et les dispositions des articles L. 101-1 et L. 101-2 du code de l'urbanisme.

20. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la commune de Tornac, qui prévoit l'accueil de deux cent soixante-dix nouveaux habitants pendant la période jusqu'en 2030, a délimité des zones urbaines qui correspondent aux secteurs actuellement construits auxquels elle a parfois ajouté de petits secteurs libres cernés par des habitations, et a également créé deux zones à urbaniser d'une superficie limitée à 4,33 hectares sur lesquels elle anticipe une forte densité de constructions. Le plan local d'urbanisme augmente la superficie des espaces naturel, agricole et forestier par rapport au plan d'occupation des sols précédemment applicable. Ainsi, les consorts F... ne sont pas fondés à soutenir qu'en raison notamment d'une utilisation trop importante d'espaces naturels à des fins d'urbanisation, le plan local d'urbanisme serait incompatible avec les dispositions des articles L. 101-1 et L. 101-2 du code de l'urbanisme.

21. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme, applicable au présent litige : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. / En zone A peuvent seules être autorisées : / - les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ; / - les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs ou à des services publics, dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière dans l'unité foncière où elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages. / Les dispositions des trois alinéas précédents ne s'appliquent pas dans les secteurs délimités en application du deuxième alinéa du 14° de l'article L. 123-1-5. / En zone A est également autorisé en application du 2° de l'article R. 123-12, le changement de destination des bâtiments agricoles identifiés dans les documents graphiques du règlement ". L'article R. 123-8 du même code, applicable au présent litige, dispose que : " Peuvent être classées en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / a) Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / b) Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; / c) Soit de leur caractère d'espaces naturels ". Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils peuvent être amenés à modifier le zonage ou les activités autorisées dans une zone déterminée, pour les motifs énoncés par les dispositions citées ci-dessus. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

22. La partie sud-ouest, classée en zone agricole, de la parcelle cadastrée section AN n° 410 d'une superficie de 3 500 m² est située dans un espace non urbanisé, aucun terrain limitrophe n'étant construit, et comprenant des terrains agricoles, en particulier des vignes. Les hameaux du Trial et du Mas Neuf, dont le développement ne fait d'ailleurs pas partie des objectifs prioritaires du projet d'aménagement et de développement durables de la commune de Tornac, ne sont pas situés à proximité immédiate de cette partie de la parcelle cadastrée section AN n° 410. La circonstance qu'elle ne ferait l'objet à présent d'aucune exploitation agricole ne fait pas en elle-même obstacle à son classement en zone agricole, les consorts F... n'établissant ni même d'ailleurs ne soutenant que ces terres ne présenteraient aucun potentiel en vue d'une telle exploitation. Ainsi, pour l'application des dispositions précédemment citées de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme, la commune de Tornac a pu, sans se fonder sur des faits matériellement inexacts ni entacher son appréciation d'une erreur manifeste, classer la partie sud-ouest de cette parcelle en zone agricole.

23. La partie nord-est, classée en zone naturelle, de la parcelle cadastrée section AN n° 410 est située en continuité d'un espace non urbanisé à l'est présentant un caractère naturel. En outre, le hameau du Mas Neuf, bien que situé à proximité immédiate, ne fait pas partie des objectifs prioritaires de la commune de Tornac qui, à titre principal, veut renforcer l'urbanisation autour de la mairie et du hameau de La Madeleine.

24. La parcelle cadastrée section AP n° 241, d'une superficie de 5 615 m², également classée en zone naturelle, est située dans un espace naturel d'une superficie d'environ 1 hectare, situé en prolongement d'une zone agricole, situé à l'est de l'autre côté d'une petite voie publique. Les constructions pavillonnaires situées autour de cet espace naturel, peu denses au nord et au sud de la parcelle, font partie du hameau de La Flavarderie. Cet hameau, qui n'est pas un regroupement ancien de constructions, ne fait pas partie des hameaux que la commune de Tornac souhaite développer. Dès lors, pour l'application des dispositions précédemment citées de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme, la commune de Tornac a pu, sans se fonder sur des faits matériellement inexacts ni entacher son appréciation d'une erreur manifeste, classer la partie nord-est de la parcelle cadastrée section AN n° 410 et la parcelle cadastrée section AP n° 241 en zone naturelle.

25. En quatrième lieu, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la création d'un emplacement réservé sur la parcelle cadastrée section AN n° 56 doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 11 du jugement attaqué.

26. En dernier lieu, le moyen selon lequel la délibération du conseil municipal de Tornac serait entachée de détournement de pouvoir doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 12 du présent arrêt.

27. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande. Leurs conclusions à fin d'injonction doivent en conséquence être également rejetées.

Sur les frais liés au litige :

28. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Tornac, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser aux consorts F... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des consorts F... une somme de 2 000 euros à verser à la commune de Tornac au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête des consorts F... est rejetée.

Article 2 : Les consorts F... verseront une somme de 2 000 euros à la commune de Tornac au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administratif.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... F..., à Mme B... F..., à M. C... F..., à M. A... F..., à Mme D... F... et à la commune de Tornac.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2021, où siégeaient :

- M. Portail, président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Barthez, président assesseur,

- Mme Carassic, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 décembre 2021.

N° 20MA00507 10


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00507
Date de la décision : 28/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Plans d'aménagement et d'urbanisme - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU) - Légalité des plans - Procédure d'élaboration.

Urbanisme et aménagement du territoire - Plans d'aménagement et d'urbanisme - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU) - Légalité des plans - Légalité interne.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Alain BARTHEZ
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : AUDOUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 11/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-12-28;20ma00507 ?
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